vendredi 26 décembre 2008

Anatomie de l’intellectuel engagé

J’entends un commentaire sur la vie d’Harold Pinter, décédé le 24 décembre.

Je n’ai pas d’opinion sur Pinter, que je ne connais que par le biais des adaptations qu’il a faites pour Losey. Mais le commentaire m’étonne. Pinter a dénoncé l’abomination du monde, dit, en substance, et avec contentement, l’interviewé. Comment peut-on parler d’abomination sans en être bouleversé, sans vouloir la réparer ?
J’ai du mal à concevoir un intellectuel engagé, autrement qu’écorché vif, une sorte de Molière ou de Jules Vallès, qui joue sa peau pour ses idées.

Ce qui m’ennuie dans l’intellectuel et l’artiste engagés modernes, c’est qu’ils ont le monopole de la bonne conscience. Et qu’ils ne prennent aucun risque. Et qu’ils sont extrêmement riches.
Je les soupçonne, pour une grande part d’entre eux, de défendre des idées qu’ils ne comprennent pas, simplement parce qu’il est « bien » de les défendre. Une façon d’excuser une réussite indécente ?

J’y vois surtout une des tactiques individualistes aussi vieilles que le monde : utiliser des valeurs respectées pour imposer, sans discussion, ses idées du moment. Vous devez suivre ce que je dis parce que je sais que j’ai raison. C’est comme cela qu’ont procédé l’inquisition, et tous les totalitarismes.

Compléments :
  • Sur le même sujet : Ronsard, l’hérétique.
  • J’ai jeté un coup d’œil sur la vie de Pinter dans Wikipedia anglais. Elle semble quelque peu paradoxale : lui qui a dénoncé la société anglaise était un fan de cricket, l’époux d’une comtesse de vieille noblesse, et a mené une vie familiale particulièrement heureuse et paisible.

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