jeudi 26 mars 2009

Protectionnisme

Le protectionnisme : on en cause beaucoup.

Un raisonnement élégant d’Emmanuel Todd, trouvé dans La crise, par où la sortie ?

Le libre-échange n'est pas une mauvaise chose en soi. Une partie de l'argumentation libre-échangiste est valable : réalisation d'économies d'échelle ; spécialisation des pays selon leurs compétences de production, etc. Mais l'extension démesurée du libre-échange a renvoyé le capitalisme à sa vieille tradition qui est celle d'une sorte de retard tendanciel de la demande par rapport à la croissance de la production.

Qu'est-ce qui se passe sous un régime de libre-échange ? Les entreprises, les unes après les autres, se positionnent non plus par rapport à une demande intérieure, à l'échelle nationale, mais par rapport à une demande de plus en plus perçue, dans la réalité mais aussi de manière un peu mythique, comme une demande extérieure.

Conséquence : les entreprises ne perçoivent plus les salaires distribués comme une contribution à la demande intérieure mais plutôt comme un coût qui les empêche d'être compétitives vis-à-vis de leurs concurrents mondiaux. Essayez d'imaginer ce qui se passe si toutes les entreprises, partout sur la planète, entrent dans une logique d'optimisation et de compression du coût salarial : vous arrivez à la situation actuelle ! Qui plus est, ce mécanisme est aggravé par l'arrivée de pays émergents, comme la Chine.

Cette ligne directrice permet de comprendre la crise actuelle. D'un côté, pour la majorité de la société, on assiste à un écrasement de la consommation, avec une montée des inégalités. De l'autre, un afflux d'argent au cerveau qui explique la spéculation financière. Tant que les gouvernants n'auront pas compris cela, nous ne nous en sortirons pas. C'est sympathique que le G20 se réunisse le 2 avril, à Londres, sauf qu'il va se réunir pour dire qu'il faut empêcher toute mesure protectionniste...

Je découvre par ailleurs une étude de deux économistes qui semblent convaincus que, contrairement à ce qui était affirmé jusqu’ici, il faut une très faible dévaluation d’une monnaie pour que la demande intérieure préfère sa production nationale à ce qu’elle achetait ailleurs. Bref pas besoin de mesures protectionnistes, le marché est naturellement protectionniste !

Tout ceci signifie probablement que la croyance en un marché mondial qui va spontanément faire le bonheur collectif ne plaît plus. Les nations redécouvrent leur marché intérieur et vont devoir reconstituer un tissu économique propre qui puisse un jour produire une offre originale que d’autres nations auront envie d’acheter.

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