samedi 2 mai 2009

Du citoyen

Discussion avec Marc Rousset, qui publie un nouveau livre sur l’Europe. Il oppose citoyen et droits de l’homme. Curieux.

  1. J’ai un intérêt professionnel pour Platon, Rousseau, Kant et la pensée chinoise. Mon métier consiste à faire tenir ensemble des « organisations », des entreprises. Eux ont voulu maintenir au mieux de sa forme la société qui leur semblait idéale. A une échelle plus grande, ils parlent de mon sujet. Et je reconnais mon expérience dans ce qu’ils disent. Or, ils soulèvent un paradoxe : ils ne parlent pas de droits de l’homme, mais de « devoirs », de morale. C’est probablement cela être un citoyen. Trouver ces devoirs est le but de la philosophie pour Platon, de la raison pour Rousseau et Kant. Pour ces derniers le droit de l'homme est celui de ne pas subir le diktat arbitraire d’un autre homme. C’est en faisant ce qu’il doit que ce droit ultime est respecté.
  2. Et les droits de l’homme ? Il est possible qu’ils aient été initialement les « devoirs » de la société. Peut-être, comme la pyramide de Maslow, disaient-ils à la société ce qu’elle doit apporter à l’homme ? Mais est-ce, pour autant, qu’ils pouvaient être revendiqués pas l’individu pour son compte propre ? Les droits ne seraient devenus un dû que récemment. Influence anglo-saxonne ? La vision du monde anglo-saxonne semble construite sur celle du marchand. Ce qui donne un univers d’individus isolés dont le comportement est encadré par quelques lois explicites. En dehors, tout est permis. Quant aux « droits de l’homme » ils s’expliquent probablement ainsi : la dictature du marché globalisé n’ayant pas encore fait le bonheur mondial, il faut, en attendant, protéger l’homme de la main haïssable de la société. Tout ce qui bride les désirs immédiats de l’individu est inacceptable. Exemples :

  • L’épisode du « foulard islamique » montre que la France demeure dangereuse, imprévisible, et rétrograde. L’argument de l’état laïc est incompréhensible.
  • Toutes les opinions sont bonnes à exprimer, y compris celles des révisionnistes.
  • Dans le modèle citoyen, l’immigrant est accepté parce qu’il se reconnaît dans les valeurs du pays, c’est une sorte de membre de la diaspora qui rejoindrait la terre promise. Il devient citoyen. Dans le modèle anglo-saxon, l’homme a le droit d’aller où il veut, il appartient au monde. D’ailleurs l’immigration est économiquement favorable puisqu’elle augmente la taille du marché, et, par la concurrence qu’elle introduit, elle abaisse le coût de main d’œuvre (logique du marchand).

Il n'y a certainement pas que les Ango-saxons (têtes de Turc commodes) qui soient impliqués dans l'affaire. Tous les individualismes ot dû se prêter main forte, qu'ils aient eu envie de faire du commerce ou non.

Compléments :

  • Sur la vision anglo-saxonne du monde : CROZIER, Michel, Le mal américain, Fayard, 1981 ; HAYEK (von) Friedrich A., The Road to Serfdom, University of Chicago Press, 1994.
  • MASLOW, Abraham Harold, Motivation and Personality, HarperCollins Publishers, 3ème edition,1987.
  • Sur la Chine traditionnelle et le changement : Le discours de la Tortue.

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