mardi 31 janvier 2012

Nouvelles du mois

Comme annoncé le mois dernier, ce blog est devenu celui du Cercle du changement. Quelques réflexions que ce changement a suscitées : Ligne directrice de ce blogFaire vivre un blog : question de technique. Sinon :

Google, LinkedIn, social networks et bigbrotherhood

J’ai reçu un mail de Google (« Nouvelles règles de confidentialité et conditions d'utilisation de Google ») que je n’ai pas compris. En fait, Google peut maintenant combiner les données venant des applications que vous utilisez (dont Android) pour en tirer des tas d’enseignements. Par exemple, que vous allez arriver en retard à un rendez-vous, si vous ne changez pas de route. Il va aussi fusionner vos adresses en une seule, ce qui peut faire que ceux qui se croyaient anonymes ne le seront plus. (How Google's New Privacy Policy Could Affect You: Scientific American)

Peu de temps après, m'arrive un mail me disant :
"Without attracting too much publicity, LinkedIn has updated their privacy conditions this summer. Without any action from your side, LinkedIn is now permitted to use your name and picture in any of their advertisements.
Some simple actions to be considered to stop the above by LinkedIn:
1. Place the cursor on your name at the top right corner of the screen. From the small
pull down menu that appears, select "settings"
2. Then click "Account" on the left/bottom
3. In the column next to Account, select the option "Manage Social Advertising"
4. Finally un-tick the box "LinkedIn may use my name and photo in social advertising"
5. and Save
Je commence à trouver tout ceci très compliqué. Va-t-on devoir jouer au gendarme et au voleur avec des multinationales qui ne peuvent que nous surclasser par leurs moyens ? Ne serait-il pas temps que le législateur se penche sur le sujet ? 

L’art de la relation client : Monoprix

Rentrant tard chez moi, et menacé d'une pénurie de vivres, je m’arrête au magasin Monoprix qui est à côté de ma bouche de métro. Les caisses annoncent qu’il ne fournira bientôt plus de sacs en plastic. Il va falloir que je parte au travail avec un cabas ?

J’imagine qu’il y a là-dessous une attention écologique. Mais, étrangement, je me serais attendu à ce que le magasin annonce qu’il verse le prix des sacs à une noble cause…

En tout cas, je ne suis pas sûr que ce magasin ait compris qu’il n’était pas grand-chose sans clients… 

Les évadés

Film de Jean-Paul Le Chanois, 1955.

Trois prisonniers de guerre français fuient un camp allemand.

Ce n’est pas la Grande évasion... Et c’est intéressant justement pour cela. Il n’y a pas de héros ici, mais des Français de l’époque.

Pourquoi s’évadent-ils ? Parce qu’ils ne sont pas faits pour la captivité. Ils veulent rentrer chez eux.

Au fond, cette guerre n’est pas la leur. Pourquoi le serait-elle ? On leur a donné un fusil antique, et des cartouches qui ne lui correspondaient pas. Comment auraient-ils pu se battre ?

Mais, lorsqu’ils décident de prendre leur sort en main, ils deviennent héroïques. Le système d fait des miracles. Leur force : l'art de désobéir ?

lundi 30 janvier 2012

Nicolas le téméraire ?

Il y a peut être une témérité que la vanité peut confondre avec du courage à annoncer une augmentation importante des impôts, et une attaque frontale de la classe ouvrière à la veille d’une élection présidentielle. (French Politics: The Sarkothon)
Le vice de N.Sarkozy est son impulsivité brouillonne. Plutôt que de changer, se mentirait-il à lui-même ?

Insondable Hollande

The Economist partage apparemment mon point de vue : impossible de savoir ce que fera F.Hollande s’il est élu. (Sauce Hollandaise)

L’art de la relation client : Amazon.fr

Cela fait longtemps que j’achète chez Amazon. D’ailleurs j’ai commencé avec Amazon.com.

Or, pour la première fois, le transporteur qu’il a choisi n’a pas su trouver le gardien de mon immeuble. (Car, je suis un de ces êtres exceptionnels qui travaillent aux mêmes heures que les transporteurs.) J'ai droit à l'habituel mail obligeant m'expliquant que je suis coupable. 

Pourquoi Amazon a-t-il changé de transporteur ? Certainement pas meilleure qualité. Baisse des coûts ? Mais je paie toujours au même prix ses produits (des livres)… Serais-je le dindon de la farce ?

Compléments :
  • Dernières nouvelles : j'ai eu beau lui indiquer où était mon gardien, et ses horaires, le transporteur a de nouveau échoué. Troisième tentative : mercredi prochain... Va-t-il enfin réussir ? 
  • Réponse (vendredi) : il dit qu'il l'a fait, mais mon gardien n'a rien reçu. Cette fois-ci j'ai appelé Amazon. Excellent centre d'appel. J'espère que je vais enfin avoir mon livre... En tout cas, j'ai découvert que le talon d’Achille du commerce électronique était le transporteur...

Choisir un président (4) : leadership

La théorie du leadership joue un rôle central dans la culture anglo-saxonne et dans les cours de MBA. Peut-on l’appliquer à nos élections ?

Traditionnellement, le leader est le pasteur du troupeau. Aurions-nous besoin d’un Führer ? En fait, la définition des théories du management sont plus acceptables pour notre amour-propre. Le leader, selon John Kotter (Leading change), est l’homme qui sait « conduire le changement ». Il a une vision pour l’avenir du groupe, et elle réussit.

Cette vision (parfois appelée « stretch goal ») paraît évidente à tous. Autrement dit, il y a probablement de l’intérêt général là-dedans, comme chez Kant et Rousseau. Mais cela va peut-être plus loin que chez eux : l’intérêt général pourrait avoir besoin d’une « réinvention » pour être opérationnel. C’est d’ailleurs ce que dit Chester Barnard (The Functions of the Executive), un autre théoricien des sciences du management.

Dans l’entreprise, cette réinvention se nomme nouveau « modèle économique ». Pour une nation on parlera de « projet de société ». Un tel « projet » n’est pas unique. Ce qui compte est qu'il réponde aux problèmes perçus par la nation - qui se résument probablement à l’idée que notre situation n’est pas « durable ». Et ce n’est pas « the one best way » de Taylor, un processus pour machine. C’est un problème à résoudre ensemble, le leader donnant un objectif à atteindre et une méthode de travail au groupe. 

Napoléon fournit une métaphore explicative : s’il a le génie de la stratégie, il ne peut réussir sans son armée. Paradoxalement cette stratégie semble à la dite armée la solution de la bataille, alors que c’est à elle de se sacrifier pour la gagner.

dimanche 29 janvier 2012

Résolution de la crise européenne

La crise européenne est triple : fiscale (Grèce, par exemple), de compétitivité (différentiel salaires / productivité), bancaire.

Elle vient de ce que la zone euro n'est pas finie, mais que les marchés ont anticipé ce changement. Ce faisant, ils l’ont empêché en apportant une prospérité trompeuse.

Tout l’intérêt des acteurs de la crise (BCE, Allemagne, FMI et divers pays à réformer) est d’installer des eurobligations et une protection des pays en danger. Mais ils ne peuvent le dire :
  1. pour fournir l'anxiété de survie dont a besoin la réforme ; 
  2. pour que chacun prenne sa juste part des sacrifices.
Autrement dit, le processus ne peut pas réussir, s’il ne peut échouer. Et il le fera à la dernière minute, dans le chaos.

L’art de la relation client : SFR

Ayant pensé me rapprocher d’un de mes partenaires, j’ai accepté son offre de grouper nos lignes téléphoniques. Puis, constatant que le rapprochement n’était pas pratique, je décide de récupérer ma ligne. Je remplis les documents que me donne SFR pour ce faire.

Surprise. Je reçois un SMS m’expliquant que je ne suis pas habilité à reprendre ma ligne. C’est un rien insultant. Puis une lettre me proposant de me rapprocher du titulaire de la dite ligne pour en savoir plus sur la question. Ce que je fais. Il n’a rien reçu, il ne sait rien. Il suppose que SFR doit être terrorisé par Free et prêt à tous les coups pendables pour garder ses clients.

Je trouve remarquable l’attention que SFR a pour ceux qui achètent ses produits. Cela m’a rappelé ce qu’en dit Jean-Claude Larréché : la seule relation client digne de ce nom est celle qui transforme votre client en vendeur de vos produits… (The momentum effect)

En faut-il beaucoup plus pour démontrer la situation de monopole des opérateurs mobiles, et notre essorage ? 

Décolonisation et bain de sang

Petit à petit, j’en viens à penser que la décolonisation, loin d’avoir été une glorieuse guerre de libération, a été un bain de sang totalitaire.

Son « idéal type » paraît être la révolution culturelle chinoise. À savoir le désir de transformer un pays sur le modèle occidental, mais en gardant son âme. Bref, l’adoption de l’idée de « nation », telle que définie par l’Occident.

Tout ce qui s’opposait à la réalisation de cet idéal a été massacré. C’est probablement ainsi que s’explique l’histoire des Arméniens en Turquie.

Quant aux intellectuels français, qui ont vu dans ces régimes la matérialisation de leurs idéaux, ont-ils confondu aspirations au nationalisme et aux droits de l’homme ?

samedi 28 janvier 2012

Réseaux sociaux et mode : Instagram

Facebook et Twitter sont d’un autre temps : ne demandent-ils pas d’écrire ?

Voici enfin un réseau social pour les jeunes : Instagram. Plus que des photos (ou des vidéos), mécaniquement branchées.

Le réseau social et sa succession de modes dit-il quelque-chose sur l’Amérique ?

Une société construite sur la recherche de la fortune instantanée, et sur l’exploitation des modes. La start up n’y devient jamais grown up. Elle a disparu avant. Ce n’est pas grave, ses fondateurs sont riches. 

Hollande, par KO ?

N.Sarkozy semble mal parti.

Son espoir, à mon avis, était de démontrer que M.Hollande était ce que Jean Haguet appelle un « ni ni Flamby ».

Mais M.Hollande a fait un bruit convaincant. Il a eu l’habileté de présenter un programme suffisamment évasif pour être impossible à torpiller. Et il aurait surclassé A.Juppé, le seul membre du gouvernement ayant un peu de consistance. 

Les vices de wikipedia

Je suis amené, coup sur coup, à comparer les versions françaises et anglaises de wikipedia. D’abord pour « Henriette d’Angleterre », puis pour « coût de transaction ». J'obtiens des résultats différents en ce qui concerne ce que cherchais. (Les amants possibles de la première, et le rôle de Kenneth Arrow dans l’usage du second.)

Limites de wikipedia ? Seul un expert peut parvenir à une maîtrise suffisante d’un sujet pour en faire une synthèse convaincante ? Accumuler des citations donne du « ni fait ni à faire » ?

Compléments :
  • Un reproche, cette fois-ci systématique : des références généralement inutilisables pour lancer sa propre recherche.

Vers une fédération mondiale ?

Ne sommes nous pas dans le scénario prévu par Kant ? Une fédération mondiale d’États maintenue en équilibre par l’action et la réaction de cultures différentes, qui vivent en « paix armée » les uns avec les autres.

Comme toute fédération, celle-ci semble s’entendre sur quelques principes « universels » (par la force des choses) : les hommes sont plus ou moins égaux – il est devenu difficile de les massacrer en toute bonne conscience ; la science pratique, de l’ingénieur, est utile ; un capitalisme (ou simplement le commerce ?), que chacun essaie d’accommoder à ses intérêts, conduit le monde ; pour le reste, l’homme tente de défendre ce à quoi il croit, une version diluée de sa culture d’origine, au sens où elle peine à conserver son aspiration à l’absolu.

Les empires romains, c’est fini ? Idem pour les grandes croissances glorieuses d’après guerre ? Monde un peu gris, peu innovant, où chacun est replié sur soi et joue sur les faiblesses de l’autre pour le maintenir dans la médiocrité ? La définition même du comportement français par l’Anglais ? Le monde sera-t-il français ? 

vendredi 27 janvier 2012

Faut-il supprimer les anniversaires ?

J’ai toujours regretté de ne pas avoir pu approfondir les travaux de Jean-François Marcotorchino. C’est un mathématicien qui a inventé des méthodes d’analyse de données qui ne demandent pas de les grouper (par exemple, « avez-vous dix ans ou moins, entre onze et vingt ans… »). Ce qui a d’énormes avantages, les classements introduisant des biais.

Ne faudrait-il pas faire de même avec l’âge ? Avec notre système actuel, nous nous réveillons du jour au lendemain avec l’impression d’avoir pris une décennie, ou d'être devenu un autre. Illogique ?

À la réflexion, il me semble qu’il a tout de même une vertu. Il nous force au changement. De temps à autre, nous recevons un choc brutal. Qui nous contraint à faire le deuil de ce que nous étions, et de réinventer notre approche de la vie, et nos attentes. 

Invention de la laïcité

Au point de départ, donc, « individu » n’est que le nom du cadre permettant de sauvegarder l’expérience religieuse des intrusions du pouvoir politique, il sera alors à défendre aussi bien contre l’État que contre le pouvoir ecclésiastique. Tel est le sens de la laïcité moderne. (L’Esprit des Lumières, Tzvetan Todorov.)
Le protestantisme à l’origine de la laïcité ? Comme première expression de l’individualisme ?

De l’utilité des préparations aux grandes écoles

Pourquoi avoir travaillé aussi dur en préparations (aux grandes écoles) pour travailler autant maintenant ? se demande un ami, polytechnicien et entrepreneur, confronté à l’irrationalité du sort.

Ce qui suscite chez moi deux idées :
  • Notre monde a changé. Hier, nos études nous sélectionnaient pour la vie. Elles nous plaçaient à un endroit de la société, où nous n’avions pas besoin de faire preuve de génie. Nous exécutions une sorte de volonté collective. Aujourd’hui, y compris dans l’administration, l’avenir et notre rôle sont beaucoup plus à créer que par le passé, ce qui est singulièrement hasardeux et compliqué.
  • Il y a confusion sur ce que signifie « travailler dur ». Une de mes voisines m’explique régulièrement que les SDF sont des paresseux : ne s’est-elle pas tirée d’une situation difficile par ses propres moyens ? Certes, mais elle habite un appartement qui appartient à sa famille. L’insuccès ne vient pas tant d’un manque d’effort que d’une incapacité, en dépit de ses efforts, à trouver la solution à ses problèmes. Nous ressemblons de plus en plus à des mouches tapant contre une vitre. 

jeudi 26 janvier 2012

Faut-il excommunier le changement ?

Bossuet :
Sortez du temps et du changement, aspirez à l’éternité : la vanité ne vous tiendra plus asservis. (Oraison funèbre d’Henriette d’Angleterre)
Le changement est-il le propre d’un monde obsédé par lui-même : n’étant jamais satisfait de son sort, il n’arrête pas de changer, et devient l’esclave du changement même ?

Dans l’oraison d’Henriette de France (la mère de la précédente, décédée peu de temps auparavant), Bossuet observe avec consternation les transformations récentes de l’Angleterre. Après être sortie du catholicisme, elle a liquidé son roi, mari d'Henriette d'Angleterre, et a vu une éclosion de sectes multiples. L’égoïsme mène à l’anarchie ? 

Ce qu'Internet a changé: le protocole

Avec quelques jours de retard par rapport à ce que j'avais prévu, je poursuis cette chronique sur le changement introduit par Internet. Premier paradigme: le transport d'informations sur la base d'un protocole d'échanges. C'est une première rupture.



MBA Management, Risques et Contrôle de Dauphine

Une présentation du MBA Management, Risques et Contrôle de Dauphine (je m’occupe du cours de conduite du changement).
Le MBA vise des personnes qui souhaitent :
  • Prendre du recul par rapport à leur quotidien,
  • Évoluer à l’intérieur ou à l’extérieur de leur entreprise,
  • Bénéficier d’un encadrement de qualité dans une Université réputée,
  • Bénéficier d’une connaissance de l’état de l’art en termes de management des performances, développant les leviers de contrôle des risques, les leviers d’apprentissage et la dimension éthique, en plus des approches classiques sur le sujet,
  • Se poser les bonnes questions en fonction de chaque contexte organisationnel.
La formation s’adresse à ceux qui managent et à ceux qui construisent les dispositifs permettant à ces managers d’avoir les commandes. site http://www.mba-controle.fr/.
Pourquoi suis-je intéressé par ce type de MBA ?
  • Il est suivi par des gens qui, généralement, se sont distingués dans leur carrière, et qui cherchent un diplôme complémentaire pour accompagner un nouveau grade. Or, bien souvent, ils doivent leur promotion à un « exploit ». Et cet exploit est un changement. (Mais ils ne s’en sont pas toujours rendu compte.)
  • En outre, je crois qu’on en revient ici à la mission initiale du MBA (américain) : apporter les connaissances qui manquent à une personne qui a donné des preuves de son potentiel exceptionnel de management. Le MBA moderne est devenu une copie de l’ENA : il propulse des intellectuels au sommet de l’entreprise.

Reflux de la culture occidentale ?

Le printemps arabe fut-il celui de la démocratie ?

Si l’on regarde l’histoire du Moyen-Orient sous l’angle culturel, on observe :

Une vague colonisatrice, supposée apporter les Lumières à des peuples attardés. Une contre vague, qui, au nom de ses valeurs, refuse le joug de l’Occident. Elle aboutit à l’installation de gouvernements dictatoriaux et « progressistes » (à notre sens). L’Iraq, la Syrie, et l’Égypte furent, il y a quelques décennies, des dictatures éclairées.

La nouvelle vague semble un retour aux valeurs culturelles traditionnelles. En particulier, l’Arabie Saoudite et l’Iran tiennent le haut du pavé. 

mercredi 25 janvier 2012

Mongolie, nouvel Eldorado ?

On promet le plus brillant des avenirs à la Mongolie (Mine, all mine). Elle regorge des ressources minérales dont a besoin la Chine. Sa culture nomade est en passe d’être transformée en mine à ciel ouvert par les compagnies occidentales. (Et en désastre écologique ?)

Nouvelle Arabie Saoudite ? Je n’en suis pas convaincu. L’exploitation pétrolière n’est-elle pas plus sûre que l’activité minière, surtout quand celle-ci a pour client la Chine ? L’Arabie Saoudite a su s’approprier la rente pétrolière, en sera-t-il de même de la Mongolie ? 

Et si B.Obama ne se représentait pas ?

Le couple Obama pense que l’Amérique, ses politiciens et leurs coups bas ne méritent pas un aussi noble président (Party of two). Comme les intellectuels du billet précédent ?

M.Obama a la force du juste. Par contre, il ne prend probablement pas suffisamment au sérieux les aspirations de ses concitoyens et les tactiques de ses adversaires. Ce qui expliquerait qu’il leur ait laissé l’initiative, alors qu’ils étaient à terre.

L’intellectuel français contre le peuple ?

Ma chronique cinéma m’a fait découvrir un phénomène curieux. L’intellectuel français semble haïr le peuple. C’est du moins comme cela que j’interprète Une si jolie petite plage ou OSS117 Rio ne répond plus.

D’où cela vient-il ?
  • De la nuit des temps ? On dit que le roi s’était allié au peuple pour se protéger de la noblesse, peut-être que le noble haïssait lui aussi le peuple, et que cette haine a été léguée au privilégié moderne, l’intellectuel ? Mais le noble devait mépriser, non haïr.
  • De ce que « intellectuel » = raison = « droits de l’homme » ? L’intellectuel dénonce un peuple trop préoccupé de ses propres intérêts ?
L’étonnant, pour moi, est que l’intellectuel (fatalement de gauche) est supposé être du côté du peuple. Mais, peut-être s’en est-il inventé un, digne de lui ? Les pupilles de l’Etat de la si jolie petite plage, les Roms, ou les peuples colonisés ? 

mardi 24 janvier 2012

Pourquoi Apple n’emploie-t-il pas d’Américains ?

En ces temps de chômage, l’Amérique se demande ce qui lui est arrivé. Exemple caractéristique : Apple est monstrueusement rentable, n’ayant pas réellement de concurrents. Pourquoi emploie-t-elle aussi peu d’Américains ?

Apparemment pas uniquement pour une question d’argent. Les actionnaires de la société gagneraient juste un peu moins, mais ses profits n’en seraient qu’à peine affectés.

Ce serait pour des raisons de main d’œuvre. L’Amérique manque de qualifications intermédiaires. (Apple, America and a Squeezed Middle Class - NYTimes.com)

L’offre et la demande ne s’adapteraient-elles pas mécaniquement l’une à l’autre ? Ou est-ce parce que l’Amérique ne fabrique plus chez elle que sa main d’œuvre ne peut s’adapter à ses besoins ? 

Génocide arménien et esprit des lois

Un parlement ne peut décréter qu’il y a eu génocide en Turquie sans aller contre l’esprit des Lumières, dit L’Esprit des Lumières de Tzvetan Todorov.
Les députés français n’en étaient pas à leur coup d’essai. Quelques années plus tôt, ils avaient décidé que la Turquie était bien coupable du génocide Arménien (…) La puissance publique n’a pas le droit de décider où réside la vérité, disait Condorcet.
Les Lumières distinguent en effet le bien du vrai. Le rôle du politique est de dire le premier, celui de la science le second. Aucun ne peut contraindre l’autre.

Quand le parlement décrète qu’il y a eu génocide n’agit-il pas comme l’Église condamnant Galilée ? De simples êtres humains s’arrogent le droit de définir une fois pour toute ce qui est vrai, et de mettre un terme à la marche de la science ? Le sujet est beaucoup plus grave qu’il n’y paraît. C’est la liberté de l’homme qui est en jeu. Comment justifier, en effet, qu’un homme puisse être empêché de poursuivre le vrai ?  Si l'Etat décide du vrai, et condamne les contrevenants, c'est la dictature !

Certes. Mais les Lumières, comme l’explique T.Todorov, ont aussi dénoncé le scientisme : la science comme valeur absolue. Peut-on laisser une science folle faire n’importe quoi ? D’ailleurs, les Lumières n’étaient-elles pas un moralisme ? Ce qu’elles mettent au dessus de tout, y compris probablement de la science, c’est la « volonté générale », celle du peuple.

Qu’est-ce que cela donne dans notre cas ? Que pense la volonté générale du génocide arménien ? Probablement pas grand-chose.

Et si ce que révélait ce débat était une faille de notre 5ème République ? L’exécutif peut y faire ce qu’il veut, sans consulter grand monde. Et si la première victime en était M.Sarkozy ? Et si un président impulsif avait besoin de contre-pouvoirs pour le forcer à donner le meilleur de lui-même ?

Parasitisme et principes du capitalisme

Une histoire vraie :

Pratiques d'un métier : pour savoir concevoir un produit il faut le fabriquer ; l’effort nécessité par l’acquisition du savoir-faire de conception est rémunéré par une prime sur la production du dit produit. Un donneur d’ordre a l'idée de confier la conception à des fournisseurs qui en ont le savoir-faire mais la production à des fabricants sans valeur ajoutée. Il a donc les bénéfices du savoir-faire des premiers, sans le payer. Ce qui n’est, bien sûr, pas durable.

Je me demande s’il n’y a pas ici un procédé qui est au cœur de ce que les financiers appellent « l’arbitrage » et qui est supposé conduire à un marché parfaitement efficace.

La société humaine suit des règles, qu’elle a établies au cours des ans, et qui assurent sa survie. Par exemple, un café-restaurant répartit ses coûts sur les prix qu’il pratique en fonction de ce qu’il connaît du comportement du marché (produit d’appel – le café, le menu – pas cher, suppléments – alcool – à grosse marge). Mais, en les exploitant habilement (rester des heures dans un café pour le prix d'un café), il est possible d’en tirer un bénéfice immédiat.

Pour éviter d’être victime de ce phénomène d’autodestruction, la société humaine doit donc changer ses règles en permanence. L’arbitrage ne serait donc pas un phénomène qui la rend efficace, comme l'affirment certains économistes, mais, au contraire, un jeu du gendarme et du voleur qui lui coûte cher. Les bénéfices de l’arbitrage ne seraient rien d’autre que ceux d’être asocial en société.  

Compléments :
  • Et si l'on était ici en face du problème de confiance - et de son coût - soulevé par Dominique Delmas ? Une société qui ne repose que sur la loi est une société qui perd son temps et son âme à chercher à la détourner ?
  • Depuis longtemps, je suis intrigué par la capacité qu'ont les Anglo-saxons, qu'il s'agisse de rugby ou de guerre de cent ans, pour trahir l'esprit des jeux auxquelles ils jouent. Je me demande si ce n'est pas un des principes du (ou de leur) capitalisme : Perfide Albion
  • Des économistes extrêmement prestigieux semblent penser que le LBO « redistribue » la valeur, plutôt qu’il ne l’a crée. Curieusement, ils reprennent exactement l’argument de ce billet (que j'avais écrit bien avant de découvrir ces idées...). Pour eux le fonds de LBO s'enrichit en dissolvant l'organisation sociale qu'est l'entreprise. Il y parvient en
    Rompant un contrat implicite entre employés, fournisseurs et autres parties prenantes de l’entreprise. (Breach of Trust - NYTimes.com)

lundi 23 janvier 2012

François Hollande parle

Le dernier discours de M.Hollande va-t-il dissiper le mystère de sa personnalité ?

Surprise. Les extraits qu’en donne la radio ce matin font entendre un ténor des temps héroïques de l’internationale socialiste. Il part en croisade contre la finance mondiale, et va défendre la veuve et l’orphelin. Inattendu, à un moment où on ne parle que d’économie(s), et encore à mots feutrés de peur de réveiller le marché.

Mais ce qu’en disent le Monde et la Tribune est tout différent. En dehors de quelques messages à son électorat, forts mais sans grande conséquence, on y trouve une certaine retenue dans la dépense et quelques idées qui ne surprendraient pas les économistes libéraux, comme la séparation des activités des banques (une réforme anglaise), ou l’élimination des niches fiscales (ce que The Economist encourage M.Obama à faire).
En outre, l’idée de contenir les effectifs de la fonction publique, sans suivre une « règle aveugle », ressortit aux bonnes pratiques de la conduite du changement. Dans ce domaine, M.Sarkozy a de grosses faiblesses, qui ne demandent qu’à être exploitées.

Conclusion ? M.Hollande semble exceptionnellement habile à concilier l’apparemment inconciliable.

Avenue Q

Hier, j’entendais présenter une comédie musicale par France Musique, Avenue Q. Politiquement incorrecte !

On y chante que nos petits défauts ne sont pas des vices. Nous n’irons pas en enfer pour être un peu racistes,  par exemple. Acceptons la nature humaine et laissons l’hypocrisie au vestiaire ?

Lenny serait-il ressuscité ? Ou vivrions-nous la mort des grandes idéologies moralisatrices et de leurs principes universels ?

La confiance catalyseur du développement durable ?

Un article de la TRIBUNE que m’adresse Christophe, nous dit qu’un chercheur économiste américain, John W. Henke, évalue le coût des conflits inter entreprises en France, à 50 milliards d’euros, soit 2% du PIB.

Il s’est basé sur une enquête annuelle présentée lors du quatrième comité de pilotage de la charte de la médiation inter-entreprises et de la Compagnie des dirigeants et acheteurs de France (CDAF), et qui établit que
14 % du chiffre d'affaires et 33 % des profits des constructeurs automobiles étaient liés à des relations de confiance avec leurs fournisseurs.
Par ailleurs Jean Claude VOLOT, le médiateur des relations inter-entreprises, je découvre son existence, considère que "La mise en œuvre d'écosystèmes, collaboratifs et de bonnes pratiques, est économiquement rentable et représente aussi un avantage concurrentiel indéniable". Il ajoute :
Il est grand temps que les donneurs d'ordres français comprennent qu'il est dans leur intérêt d'instaurer des relations collaboratives avec leurs fournisseurs, à tous les niveaux, afin que chacun gagne davantage en productivité, rentabilité, compétitivité et innovation
Cet article vient conforter nos travaux sur la RSE, Responsabilité Sociétale des Entreprises, menés avec Christophe depuis plus d’un an pour le compte de la FSE (Fédération des sociétés d’Expertise) et qui vont faire l’objet d’un séminaire le 26 janvier prochain. Que disent ces travaux ? des choses simples et de bon sens !
  • Il est important de savoir qui nous sommes, quel est notre rôle sociétal et comment le jouer avec nos parties prenantes.
  • Ils montrent que c’est une relation tendue vers un objectif commun, et donc de confiance, qui est soutenable et durable. Mon expérience personnelle, avec deux assureurs qui s’opposent dans les méthodes, me confirme chaque jour l’efficacité des relations scellées par la confiance.
Finalement, je m’interroge sur l’omniprésence du droit, qui serait un bon marqueur de la perte de confiance.
  • Plus j’encadre par le droit, plus je marque ma méfiance vis-à-vis de mon partenaire et le risque que je perçois.
  • Plus je me méfie et moins je construis.
  • Moins je prends de risque et plus je prends de risque ?

Le capitalisme d’État règne sur le monde !

The Economist s’inquiète de l’avènement de monstrueuses entreprises étatiques dans les pays émergents. (The rise of state capitalism)

Cela ne peut pas être efficace selon lui, seule l’initiative individuelle peut faire le bonheur collectif.

Curieusement, The Economist ne semble pas remarquer que le monde a appliqué ses conseils pendant plusieurs décennies, sans beaucoup de succès. Pas plus qu’il n’évoque l’après guerre, qui fut un grand nomment technocratique, à l’est comme à l’ouest. Et qui a donné, chez nous, les « trente glorieuses ».

En tout cas, contrairement à ce que nous avons connu, le développement émergent semble bricolé et fragile. D’autant qu’il n’est pas sûr que, s’il ne peut en tirer profit, l’Occident ne lui mette quelque bâton dans les roues. 

Équilibre des marchés

Les cours d’économie disent que le marché conduit naturellement à un équilibre entre offre et demande qui se situe à l’intersection de deux belles droites. La chose ne semble pas si simple.

D’après une modélisation apparemment plus réaliste, tout dépend de la vitesse de réaction des offreurs et des demandeurs. Si les seconds sont les plus rapides, les prix s’effondrent. Si c’est l’inverse, il y a formation spontanée d’une sorte d’oligopole de gougnafiers. (Cartels Are an Emergent Phenomenon, Say Complexity Theorists - Technology Review) La sélection naturelle défavoriserait-elle le meilleur rapport qualité / prix ?

D’après l’article, cela correspondrait effectivement à des comportements réels. Mais, s’il est clair que tous les secteurs économiques sont dominés par des oligopoles, est-il vrai pour autant que leur production soit de basse qualité ? Peut-être la susdite modélisation est-elle un peu simpliste ?

Compléments :

Choisir un président (3)

Que donnerait l’impératif catégorique de Kant appliqué au choix du président ? : Kant, impératif

Une de ses versions dit qu’il faut décider comme on aimerait que tout le monde décide. « Agis seulement d'après la maxime grâce à laquelle tu peux vouloir en même temps qu'elle devienne une loi universelle. »

Certes, mais quid du tsunami de 2006 ? Un élan de générosité international a produit des masses d’argent inutiles. Ne faut-il pas tenir compte du comportement du reste de la population dans notre choix, sachant qu'elle ne suit pas Kant ? C’est d’ailleurs probablement ainsi que nous votons.

D’ailleurs Kant, lui-même, est pragmatique : le monde ne se fera pas en un jour, le tout est d’aller dans la bonne direction.

Aboutirait-on à une sorte d’impératif « relativement » catégorique : chercher la direction dans laquelle doit aller le pays ; évaluer le comportement prévisible de ses concitoyens ; et agir en fonction ?

Compléments :

dimanche 22 janvier 2012

François Hollande ou l’esquive ?

J’ai voulu faire une psychanalyse existentielle de François Hollande, i.e. déduire la logique qui le guide de son histoire. Mais aucune de ses biographies ne paraît satisfaisante. Une recherche sur Internet n’a pas été plus heureuse. Je n’ai trouvé qu’un article intéressant (en fait la critique d’un livre qui ne me semblait pas passionnant…).

J’en tire ? rien. À part quelques qualificatifs inquiétants :
"Monsieur Petites blagues" (Fabius), "Flanby" (Montebourg), "Couilles molles"(Aubry) mais aussi, contradictoire, "le Chinois" (pour ses manières silencieuses de tuer le gêneur avec le sourire), ou "L’Entourloupeur"...
Le pire :
le propre fils de (François Hollande :) : on se demande toujours par quelle porte va fuir François Hollande.
Et si la caractéristique de François Hollande était l’impossibilité de le décrire ? Sa vertu, sa logique première, est d’être insaisissable ? Et cela remonte aux origines, peut-être. N’a-t-il pas vécu apparemment en bonne intelligence avec un père d’extrême droite et une mère mitterrandiste ?

Un homme de courants (au sens aqueux du terme), qui ne s’attache à rien ? Il sait vivre en environnement hostile, non le changer ?

Mais alors, quel changement parle-t-il? Il ne faudra plus compter sur notre président pour changer ? 

Le Français est bien élevé

Pourquoi les enfants français se comportent-ils aussi bien ? se demande un écrivain américain.

Apparemment parce qu’aux USA l’enfant a la première place dans la famille, alors qu’en France, il compte moins que ses parents. (Non, non and non)

Sarkozy et Schröder

Il semblerait, comme je le soupçonnais, que la TVA sociale soit une tentative de rendre la compétitivité à la France, à la manière Schröder. (Down a notch)

Depuis 2000, les salaires français ont crû d’environ 40% contre 10% seulement pour la productivité. Les chiffres allemands, eux, sont longtemps restés proches. (How to restore competitiveness in the EU | vox).

Intentions similaires, mises en œuvre du changement différentes. Il y avait une forme de consensus lorsque M.Schröder a décidé de ses réformes. Quant à M.Sarkozy, il agit dans la précipitation et il faut se casser la tête pour deviner ses intentions.

Décidément, il commet toujours les mêmes erreurs (cf. Les réformes ratées du président Sarkozy) ?

Qui sont les riches (américains) ?

Les riches sont au centre du débat électoral américain. Toute la croissance de ces dernières années semble être allée chez eux (le 0,1% le plus riche recevait 12,7% des revenus nationaux en 2007). Ne serait-il pas logique de leur faire rendre gorge ?

Mais qui sont-ils ? (Who exactly are the 1%?) Ou, du moins, qui sont les nouveaux riches ?

Il semblerait que ce soit surtout les financiers. (« En 2009, les investisseurs des 25 plus riches hedge funds ont gagné 25md$, approximativement 6 fois autant que l’ensemble des PDG du S&P 500, ensemble. »)

Curieusement, Mitt Romney est l’un d’entre-eux. N’y a-t-il pas meilleur qu’un de ses représentants pour réformer la finance ? Mitt Romney, Vidocq américain ?

Psychanalyse existentielle

Je dis souvent que j’écris ce blog pour savoir pourquoi je l’écris.

Je viens de découvrir que je pratiquais la « psychanalyse existentielle ».

Les existentialistes pensaient qu’en retraçant le cours de la vie d’une personne on peut y découvrir les choix fondamentaux qui l’expliquent. (FLYNN, Thomas R., Existentialism, a very short introduction, Oxford University Press, 2006).

samedi 21 janvier 2012

Qu’attendent les peuples en crise ?

« En Italie, il y avait une demande cachée pour un gouvernement ennuyeux qui essaie de dire la vérité sans jargon politique » dit Mario Monti. (Italy’s prime minister: A good professor in Rome | The Economist)

Cette attente n’est-elle pas commune à beaucoup de pays ? Avons-nous encore les moyens de nous payer ambitions personnelles et idéologies ?

Obama réorganise son armée

« Faire des trous dans la coque pour alléger le bateau », voici comment j’explique généralement la façon usuelle de mener le changement. Ce serait peut-être celle qu’utilise Obama pour réduire les coûts de son armée.

Il élimine les troupes stationnées en Europe, alors qu’elles ont un rôle décisif de coordination des armées amies – elles-mêmes critiques dans la réduction des coûts militaires américains. (The downgrading of Europe)

Ligne directrice de ce blog

Ce blog a-t-il une ligne directrice ?

On y trouve des gens qui parlent de ce qu’ils ne connaissent pas.

La crise est, à l’échelle de la planète, ce qu’est la dépression pour l’homme : la preuve que ce à quoi elle croyait dur comme fer ne fonctionne pas. Pour l’en sortir, il faut plonger dans le moteur, dans l’inconscient collectif, pour y trouver l’hypothèse implicite qui fait disjoncter l’équipe.

C’est ce que fait ce blog. Il essaie de tirer la ficelle de ses croyances et de leur appliquer sa raison d’autodidacte. Avec tout ce que cela signifie d’efforts patauds.

Compléments :
  • Un de mes patrons disait : « je ne le sais pas, je vais l’enseigner ». Au fond ça pourrait être la devise de ce blog. 

vendredi 20 janvier 2012

Kodak fait faillite

Grand classique de la littérature du management : un monstre américain est incapable de s’adapter au changement. Kodak est en faillite, à 133 ans. Une victime de plus de la téléphonie mobile et du numérique.

Il avait, pourtant, vu arriver le danger. Et même étonnamment tôt.

En tout cas, FujiFilm, lui, s’est sauvé. Curieusement, son comportement a été beaucoup plus américain que celui d’un Kodak paralysé : licenciements massifs et colossaux investissements de diversification. (Technological change: The last Kodak moment? | The Economist)

N’y aurait-il tout de même pas un rien de culpabilité culturelle ?  Face à un PDG japonais qui applique ses idées depuis 2000, sans être dérangé, Kodak a changé à répétition de dirigeant, chacun essayant une nouvelle recette… 

Concordia-Germania ?

En déglinguant le couple Merkozy, Standards and Poor's aurait-il, involontairement, encouragé l’Allemagne, seul maître de l’Europe après Dieu, dans son entêtement à s'approcher des récifs ? (Charlemagne: And then there was one | The Economist)

La ville abandonnée

Sympathique western oublié de William Wellman, 1948.

Un gang de voleurs patibulaires s’abat sur un grand père et sa petite fille, chercheurs d’or.

D’autres auraient eu peur. Pas eux. La belle, d’ailleurs, ne résiste pas au fumet de SDF d’un des malfrats. Et l’amour provoque la rédemption de ceux qui survivront au règlement de compte final. Les valeurs de l’Amérique éternelle leur reviennent en mémoire. D’ailleurs, ils ont des circonstances atténuantes : la guerre (de sécession) a tourné la tête à bien des jeunes.

Le cas du méchant est peut-être le plus instructif. Son mal, c’est la « fièvre de l’or ». Vouloir s’enrichir par le vol n’est pas un pêché capital, ce qui l’est c’est de ne voir plus de la vie que la soif du lucre ? Une leçon pour les banquiers modernes ?

jeudi 19 janvier 2012

Le Danemark dans l’euro ?

Le Danemark est présenté par To opt in or not to opt in à la fois comme un appendice de l’économie allemande et comme le meilleur ami du libéralisme économique anglais. Jusqu’ici il est prudemment resté en marge de la zone euro.

Pourtant, contrairement à l’Angleterre, et peut-être à cause d’elle, il pense que cette zone est trop importante pour ses intérêts pour qu’il ne puisse pas l’influencer. Le Danemark pourrait même rejoindre l’euro, s’il survit à la crise actuelle.

Malheurs de Carrefour (suite)

Carrefour est pris entre le Charybde d’investisseurs activistes qui veulent retrouver rapidement leur mise, et le Scylla d’un modèle économique qui n’a pas suivi l’évolution de la société et de la technologie. (Bread, cheese, new boss?)

Compléments :

L’homme est-il responsable de son sort ?

Une forme de libéralisme estime que le riche est responsable de son succès et le pauvre de son malheur. Bref, tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes. Le libéralisme est un conservatisme.

Pour ma part, je pense que le succès est le fait de la société. Mais que l’homme est responsable de ses échecs. C’est-à-dire de ne pas avoir su bien utiliser les ressources sociales.

Cela n’entraîne pas une condamnation de celui qui a failli (sinon par lui-même). En effet, l’environnement dans lequel on se trouve conditionne massivement le type de succès auquel on peut prétendre ; dans certaines situations, les chances de faire mieux que SDF sont quasi nulles ; d’ailleurs qui peut prétendre, a priori, qu’il aurait réussi dans ces circonstances et jeter une première pierre ?

Par conséquent la société doit chercher à égaliser ces conditions de départ, ou, au moins, à s’assurer que sortir, simplement, la tête de l’eau ne demande pas d’être un héros.

Qu’est-ce qui sous-tend cette opinion ? Il est possible que je fasse l’hypothèse fondamentale que notre sort est déterminé, mais qu’il n’est pas efficace de le croire. (Voir Kant, et la science moderne, sur le sujet.)

mercredi 18 janvier 2012

Pénurie de main d'oeuvre... en France ! (si, si)

Par ces temps de crise, il existe au moins un secteur qui ne cesse de progresser, y compris en France : le monde numérique. A tel point qu'une pénurie de main d'oeuvre se fait jour.

Selon Arnaud Cantet de Lincoln & Associés, "la pénurie actuelle pouvait pourtant s’anticiper à la lecture des démarches qu’ont eues l’immense majorité des entreprises :
  • Tous les acteurs recherchent des compétences dans le digital, avec des parcours proches ou similaires.
  • Les systèmes managériaux traditionnels et les organisations ne se sont pas adaptés au monde digital.
  • La demande est croissante auprès de profils qui justifient souvent de peu de réalisations concrètes."
On ne forme pas assez de spécialistes du marketing en ligne, de développeurs, etc. Trois entrepreneurs célèbres ont même créé leur propre école, l'EEMI (voir ci-dessous).

Compléments :

Mitt Romney, technocratie et crise

Qui est Mitt Romney, plus probable prochain président des USA ? Wikipedia lui consacre un très long article.
  • M. Romney vient du conseil en stratégie prestigieux (Bain). Il s’est enrichi en appliquant ses talents à un fonds d’investissement (Bain Capital).
  • Sa spécialité est la transformation du modèle économique d’une entreprise. C’est essentiellement un travail en chambre, avec une forte préoccupation de court terme. On lui reproche ainsi d’avoir revendu avec un gros bénéfice des participations qui ont subséquemment fait faillite. Il en est désolé. Mais peu de gens auraient agi différemment à sa place.
  • Il a appliqué ces talents partout où il est passé. Jeux Olympiques de Salt Lake City, État du Massachusetts…  il a redressé les comptes et remis l’affaire sur les rails, à la satisfaction générale. Il est aussi fort pragmatique : le pionnier des réformes de santé de M.Obama, dont le Tea Party aimerait faire un autodafé, c’est lui.
  • C’est un sympathique mormon : il a remarquablement bien concilié les valeurs de sa foi et sa vie, sans tomber dans le fondamentalisme ou l’hypocrisie. C'est aussi un sympathique fils de famille, qui a vraisemblablement considéré le fortune des siens comme une récompense qui se mérite par une vie consacrée à un travail acharné et au service de la communauté. Un George Bush Jr qui aurait bien tourné ?
Mitt Romney ou l’idéal américain ?

Au fond, c’est un technocrate. Mais les périodes de crise sont favorables aux gens de son espèce. Car ils ont deux qualités : ils savent parer efficacement au plus pressé et leur manque d’idéologie ne peut susciter d’affrontement suicidaire. Ce sont des gens à qui l’on peut faire confiance. Par contraste, M.Obama est trop marqué idéologiquement, ce qui est, actuellement, un handicap difficile à supporter par sa nation. 

Il reste à voir si Mitt Romney saura résister à la machine de guerre politique Barack Obama, qui, au fond, est un tueur.

Justification des gros salaires

Les gros salaires anglais sont attaqués de tous côtés. The Economist a trouvé un argument imparable pour les défendre. La globalisation. Il y a alignement des responsabilités et des rémunérations des patrons mondiaux.

En 12 ans, le salaire des patrons a triplé, mais est resté stable pour le reste de la population. (Bosses under fire) Pour elle, la croissance, c’est fini. Autre conséquence de la globalisation ?

Avec des défenseurs comme The Economist, le capitalisme n’a plus besoin d’ennemis. 

Nouvelles des banques européennes

Une étape critique de la remise à flots de l’économie européenne passe par la reconstitution des réserves des banques, sans pour autant assécher l’économie. Réussissent-elles ?

Peut-être. Grâce à l’innovation comptable… (By hook or by crook)

mardi 17 janvier 2012

Conditions de réussite des changements gouvernementaux

Pour être honnête, tous les changements de nos gouvernements n’échouent pas. (Suite du billet précédent.)
  • Abolition de la peine de mort, établissement de l’euro (même si nous devons nous débattre avec ses conséquences), concurrence dans la téléphonie mobile = succès. 
  • Les changements d’après-guerre ont transformé radicalement le pays. Cependant, comme le disent Hayek (The road to serfdom) ou Galbraith (L'ère de la planification), ils ne furent pas la particularité de la France. Ils sont le résultat d’un mouvement technocratique mondial.
Enseignements ? Les gouvernements ont des zones de pouvoir et de légitimité, dont ils savent jouer. Mais surtout, le changement ne rencontre pas de résistance s’il répond à une aspiration du peuple… L'exécutif est là pour exécuter la volonté générale, disaient les Lumières...

Le changement comme discours politique

J’entendais la radio dire ce matin que parler de changement en politique était une banalité. (M.Hollande serait-il banal ?) La mode aurait été lancée par M.Giscard d’Estaing, en 1974.

Faut-il s’en réjouir ?
  • Édouard Balladur. Il veut créer une économie sur le modèle allemand. C'est-à-dire avec des interrelations capitalistiques entre entreprises, qui empêchent toute prise de participation inamicale (étrangère). Malheureusement l’entreprise française manque de fonds, et ce système de « noyaux durs » l’assèche un peu plus. Elle saisira la première occasion pour se libérer de ses liens et s’ouvrir en grand aux capitaux étrangers, sur le modèle américain. (Transformation de l'entreprise française)
  • Martine Aubry. Pour éliminer le chômage, elle veut faire travailler le Français 35h, 10% de moins qu’auparavant. Pour la mise au point du dispositif, elle compte sur une négociation entre acteurs locaux. Malheureusement, ils n’y sont pas préparés. Les acteurs les plus puissants impriment leur marque à la mise en œuvre de la loi. (Le changement de l'économie française)
  • Nicolas Sarkozy. 18 premiers mois de réformes. Nicolas Sarkozy attaque des « intérêts spéciaux » (grandes surfaces, taxis, syndicats, universités…). Tactique : les prendre de vitesse, et lâcher, en dernière minute, une concession qui leur permette de sauver la face. Résultat ? Ils résistent. Les délais donnés par notre président deviennent un piège. Les services de l’État, pour les tenir, cèdent aux exigences de ceux qu’ils devaient réformer. Mais ils leur demandent une concession, afin de sauver la face. (Les réformes ratées du président Sarkozy)

Nouvelles de Grèce

Le Grec supporterait ses malheurs avec stoïcisme. Mais de prochaines élections menacent cet équilibre précaire. (The Mediterranean blues)

Une si jolie petite plage

Film d’Yves Allégret, 1949.

La pluie est le héros du film. Anti brochure touristique pour plages du nord.
Il pleut, donc, à sauts, sur des misérables, dignes de Victor Hugo, et quasiment nus. La France d’après guerre devait être une grande machine d’exploitation de l’homme par l’homme.

Mais il y a un rayon de soleil dans ce liquide et cette gadoue, un enseignement édifiant : il vaut mieux encore l’esclavage que le vice. Non pour des raisons morales, mais parce que le second finit par être plus insupportable que la première.

Compléments :
  • Comme chez Clint Eastwood, il y a rédemption par la mort, et sauvetage d’une âme, au passage.
  • Parabole ? La France occupée vue par l’intellectuel ? Des innocents, victimes d’un peuple rural, calculateur, médiocre et laid ?

lundi 16 janvier 2012

De plus en plus de catastrophes naturelles ?

Une pierre dans le jardin de Dominique Delmas. Dominique est un expert des « Catnat » (« catastrophes naturelles », pour les initiés), et ce billet parle de leur coût.

Celui-ci augmente, non parce que la nature s’affole, mais en conséquence de l’évolution de la société : la logique de l’économie nous amène là où frappent les catnat, mais sans nous donner les moyens de nous défendre.

Recommandations aux gouvernements : prévoir des moyens de prévenir les conséquences des désastres ; ne pas laisser construire n’importe où ; ne pas subventionner les primes d’assurance, qui doivent refléter le coût réel du risque. L’entreprise (et l’individu ?) doit aussi faire entrer la Catnat dans son vocabulaire, et dans ses plans.

Compléments :

La science économique sauvée par le blog ?

Réunion annuelle de l’American Economic Association. On semble y découvrir que les recommandations de l’économiste ne se préoccupent pas de la faisabilité des changements qu’elles sous-entendent (pour parler comme ce blog). La vie n’est pas une équation. De surcroît, « l’économie a internalisé les opinions de ses riches bienfaiteurs ».

Possible rédemption ? « La technologie, au moins, aide la profession à être plus honnête ». Le blog permet à des opinions discordantes de se faire entendre. (The Beltway constraint)

Choisir un président (2) : Kant et la République

Maintenant, au tour de Kant et de la République. Pour Kant, le régime politique idéal est celui de la République. C'est-à-dire un exécutif qui met en œuvre la volonté générale, représentée par le législatif. Les deux doivent évidemment être séparés. Ça commence mal pour la France.

On peut en déduire quelques critères de sélection curieux :
  • Un exécutif qui exécute sa propre volonté est une dictature. Par conséquent le candidat qui est porté par une idéologie et qui a la capacité de la mettre en oeuvre doit être écarté.
  • L’intérêt général sous-entend la recherche de ce qui unit la nation. Un candidat qui « divise pour régner », ou qui utilise la démagogie (voir ce qu’en pense Aristote) pour disloquer les principes fondateurs du pays, devrait donc être hors jeu.
  • Mais l’exécutif doit aussi avoir la capacité à exécuter. Un exécutif qui ne sait pas se décider est aussi un mauvais choix (on retrouve les idées du billet précédent). 

dimanche 15 janvier 2012

Génération BSP et RSE

Par Dominique Delmas.

Vendredi, dans le cadre de mes expertises, je suis allé consulter le dossier public «environnement» d’un industriel important. La DRIEE avait mis à ma disposition une dizaine de documents, récents, de 50 à 400 pages chacun, qui matérialisent le suivi du respect des obligations dudit industriel en matière d’environnement… En 1990 lorsque je rédigeais ces mêmes documents, ils ne comportaient qu’un seul volume de 30 à 40 pages! Et lorsque je frappais à la porte des dirigeants d’entreprise pour vendre ces études d’impact avec des contrôles de pollution, le contact était condescendant, ironique, amusé, agacé, rarement curieux et jamais aucun volontarisme ou motivation n’alimentait l’échange.

C’est donc sans doute la foi inébranlable et la fougue de la jeunesse qui me poussaient. L’écologie, l’environnement étaient alors encore, l’apanage des doux rêveurs idéalistes. 20 ans plus tard, lorsque je regarde la génération des dirigeants en place, je m’amuse de voir leur intérêt appuyé et leur connaissance sérieuse lorsque l’on parle « d’environnement ».

Ce long cheminement a été bien sûr porté par l’émergence du code de l’environnement et la pression de son volet pénal (aujourd’hui plus épais que le code civil), et par l’évolution de la société civile.Quelle entreprise n’a pas son  « responsable environnement » ? La génération actuelle, qui pétille d’initiatives, est née avec les concepts du développement durable dans les cartables et les cartoons.

Elle sera probablement le maillon entre son arrivée à maturité et le développement en marche de son prolongement : la RSE/RSO – Responsabilité Sociétale des Entreprises ou Organisations. Les réalités douloureuses comme la raréfaction de certaines ressources, la pression de la démographie, la mondialisation, la faiblesse des Etats, les technologies de l’information, l’évolution de la société civile en tant de crise seront probablement ses moteurs.

Mais si la prise en compte de « l’environnement » dans l’entreprise a été poussée par la réglementation, la RSE semble poussée par le BSP (le bon sens paysan). ISO 26000, basé sur le volontariat et conçu par plusieurs centaines d’experts du monde entier, en est l’illustration parfaite. Sans doute la RSE arrivera-t-elle à faire ce que le développement durable à loupé, convaincre les actionnaires et investisseurs.

Un article de la newsletter de Mc Kinsey Quarterly (merci Christophe) pose la question : comment avec la RSE créer de la valeur pour l’entreprise et pour la société ? L'étude montre que les managers restent frileux à l’idée de transmettre des projets étiquetés RSE qui seraient vus comme en décalage avec le cœur de métier par les parties prenantes au business. Ses trois auteurs proposent que l’entreprise s’appuie sur quatre principes simples pour mettre en cohérence pur business et RSE :
  1. garder comme objectif la satisfaction des besoins des parties prenantes et de leur marché,
  2. communiquer sur des actions solides et des objectifs de l’entreprise qui sont dans l’intérêt des parties prenantes,
  3. travailler sur le volet RSE avec des parties prenantes déjà partenaires
  4. évaluer et contrôler régulièrement que les objectifs et initiatives de l’entreprise sont en cohérence avec ceux des parties prenantes
Cette démarche correspond à un calibrage permanent de l’étude de marché de l’entreprise. Ce processus donne la capacité d’anticiper le marché, d’innover de créer de la valeur chère aux actionnaires, ce qui rassure les parties prenantes et augmente leur écoute !

Ne serait ce pas là un cercle vertueux ?

La campagne de Hollande

Ai-je compris ce que disait M.Hollande tout à l’heure ? M.Sarkozy vous a beaucoup promis, ça n’a pas marché, moi je ne vous promets rien ?
  • Si oui, le changement de M.Hollande est un retour aux origines. Nous demande-t-il un acte de foi ?
  • Mais je me suis probablement trompé. Ramener M.Sarkozy à ses promesses est un sophisme peu compatible avec la rigueur morale intransigeante de M.Hollande. Car, qu’il le dise ou non, M.Sarkozy a une conviction (favoriser l’entreprise pour tirer l’économie). Pat ailleurs, s’il a une langue fourchue, il a un comportement, qui, sur le long terme, est prévisible. C’est un pragmatique qui croit au rapport de forces. Tous les candidats jusqu’ici ont été comme lui - et dans tous les pays. Ils ont beaucoup promis et peu tenu, mais, leur parti avait une ligne. Nous savions à quoi nous attendre en les élisant.
Qu’en est-il de M.Hollande ? A-t-il seulement un programme ? Une fois au pouvoir, va-t-il faire une grande improvisation ? Ou nous cache-t-il des choses qui pourraient nous froisser ? 

Panne d’Honda ?

Honda se serait-elle laissé aller ? Sa force aurait été ses moteurs, or ils sont dépassés, sa ligne haut de gamme, autre force n’est plus dans le coup, et la Honda Civic est un échec cuisant. (Honda's troubles: Running out of time | The Economist)

Cas isolé, ou le Japon perdrait-il le contact avec le reste du monde, et du marché ?

Compléments :
  • Le cas de Toyota.

La face cachée du miracle indien

Où sera l’Inde en 2025 ? (What will India look like in 2025? | vox) Nulle part, peut-être.

Elle a connu une croissance astronomique, certes. Certains sont devenus fabuleusement riches, mais, pour le reste, c’est le tiers monde, ou pire. Elle manque cruellement d’entrepreneurs, 90% des emplois sont dans le secteur informel, la pauvreté se maintient à un niveau exceptionnel (en Asie du sud, « la mortalité infantile et les niveaux de malnutrition sont parmi les plus élevés au monde »), et le conflit social y est endémique.

On ne peut pas compter sur le marché seul pour tirer un peuple de la famine ?

Perte du AAA : il va falloir sortir les tripes !

D'accord, on peut désavouer les méthodes, voire nier la légitimité des agences de notation. Elles ne sont pas neutres, ni par leur nationalité, ni par leurs propres intérêts. Cela dit, ne parlons pas du juge mais plutôt de ceux qui sont au banc des accusés, avec la France au premier rang.

Depuis combien d'années sait-on que la France est trop endettée ? que les déficits s'empilent dans toutes les strates de la comptabilité nationale ? que ses administrations dépensent trop et trop mal ? que ses systèmes sociaux sont trop généreux ou mal gérées (ou les deux) ? que son déficit commercial est malsain ? que le coût du travail est trop élevé ? que l'on gaspille du précieux capital dans les dépenses courantes ? que les écarts de compétitivité avec l'Allemagne et d'autres perdurent ? Depuis combien de temps se voile-t-on la face ?

Et depuis combien de temps nos hommes politiques insistent sur la paille dans l'oeil bruxellois en oubliant les poutres qu'ils trimballent dans les deux yeux ? A combien de réformes de fond a-t-on renoncé au lieu de corriger nos déséquilibres ? Combien de démissions, de renoncements au fil des années devant l'inévitable train de la catastrophe que l'on voyait poindre à l'horizon et qui nous roule dessus aujourd'hui ? Combien de fois la grève et l'occupation de la rue par les intérêts particuliers ont supplanté le suffrage universel ? Combien de fois le courage de dire la vérité et d'affronter la réalité nous a manqué ? Combien de fois a-t-on parlé aux Français comme s'ils étaient des enfants gâtés impossibles à éduquer ? Combien de fois, de tous bords, a-t-on préféré l'affrontement à la négociation collective ? la passion à la raison ? l'idéologie au pragmatisme ?

Maintenant on s'agite, on crie au scandale, on décide de réformes des traités européens en quelques jours ou mois, là où on mettait auparavant des années. Tout à coup, nous devenons farouchement européens ! Et les promesses de vertus budgétaires sont trompettées de toutes parts ! On racle les fond de tiroirs, on s'agenouille devant les BRIC et les fonds souverains sans même en boire la honte. C'est tout juste si on ne cherche pas des boucs émissaires - espérons ne pas en arriver là, cela rappellerait de trop mauvais souvenirs.

Nous sommes aux abois parce que pendant des décennies nous n'avons pas fait notre travail, ni de politicien, ni de responsable économique ou social, ni de citoyen.

Est-ce politiquement incorrect de dire que cette dégradation, nous la méritons ? Est-ce impensable de croire que les Français, chacun dans leur responsabilité, vont enfin se sortir les tripes pour changer et s'adapter au nouveau monde qui se dessine déjà ? Quand allons-nous accepter d'affronter notre destin la tête droite et les yeux ouverts ? et oser tous les courages ?

samedi 14 janvier 2012

France, triple A et agences de notation

Une des grandes lois du changement, est que la crise est bonne pour lui. La perte du triple A français, surtout si elle a des conséquences dramatiques pour l’Europe et le monde, peut être un bien. Elle peut forcer les gouvernants et les peuples à regarder en face leurs problèmes. Ce qui ne tue pas renforce, disait Nietzsche. (Cela peut aussi tuer, bien sûr.)

Par contre, le plus surprenant est qu’aucune réflexion n’ait été lancée sur un système de contrôle de l’économie par agences de notation vénales :
  • L’impact de leur notation n’est pas linéaire, mais crée des ruptures brutales et destructrices.
  • On a quelques raisons de penser qu’elles ont plusieurs poids et plusieurs mesures. L’Europe, en particulier, est actuellement considérée comme la lie de l’humanité.  À juste titre ? (Voir le début de Charlemagne: How much closer a union? | The Economist) Ou est-elle victime de son incapacité à manipuler les médias ? Et quid du rôle des agences dans la bulle des subprimes ?
  • Surtout, elles semblent en permanence inventer de nouvelles règles de jugement. D’ailleurs quels jugements reflètent-elles ? Ceux d’une science quelconque ou les a priori de la culture qui leur fournit leurs employés ?
Compléments :

Hongrie et Europe disloquée

Ce qui arrive à l’Europe ressemble étrangement à ce que disent mes cours sur ce qui est fatal au changement.

La zone euro est attaquée de toutes parts ; les Anglo-saxons la regardent avec une inquiétude navrée pour sa stupidité, comme s’ils n’étaient pas un tout petit peu pour quelque chose dans ses malheurs ; la situation étant favorable à l’Allemagne (ECB policy: Not favouritism, just error | The Economist), elle n’est pas prêteuse ; en France, il en faudrait bien peu pour que l’opposition, suivant l’exemple grec, ne jette à la face du monde l’incompétence du gouvernement, et que celui-ci ne cède à quelque tentation du coup médiatique suicidaire. Et voilà que l’on découvre (Somewhere In Europe - NYTimes.com) que la Hongrie veut en revenir au régime qui a fait son succès de 1920 à 1944 (Miklós Horthy - Wikipédia)… Il est vrai que sa situation ne doit être guère enviable.

Le mal du changement, c’est qu’il déclenche le chacun pour soi. Or, l’homme n’est rien sans la société. Notre sort individuel dépend massivement de notre volonté de rendre des sortes de petits services collectifs, désintéressés. Sans cette volonté l’édifice social s’effondre.

Antipoison ? L’entraide. Il faut reconstruire le « lien social ». Cela se fait en deux temps, et cela nous concerne tous :
  • Il faut repérer ceux qui coulent et leur donner un coup de pouce pour réussir. C’est un travail compliqué et ingrat, irrationnel, où la crise succède à la crise.
  • Une fois que l’on a obtenu quelques succès, un phénomène mystérieux se produit, une dynamique collective s’enclenche qui fait que le groupe se réorganise et prend son sort en main. Peut-être a-t-il su tirer un enseignement de la résolution des problèmes des naufragés précédents ?  
Compléments :

    Show me the money

    On parle beaucoup de l'ascension d'Android en termes de parts de marché des smartphones (plus de la moitié des ventes de smartphones aux Etats-Unis fin 2011, soit deux fois plus que l'iOS d'Apple). Mais il semble -pour le moment- que Google en tire peu de profit.

    Au sens propre : en termes de chiffre d'affaires issu des ventes d'applications, l'App Store d'Apple récupère de 85 à 90% de l'argent dépensé par les utilisateurs sur les plateformes mobiles.

    Alors que 13,5% des applications pour iPhone sont payantes, seulement 1,3% des applications Android le sont. Et les utilisateurs d'iPhone sont moins nombreux mais dépensent beaucoup plus. Les développeurs ont donc plus intérêt à produire des applications pour iPhone et iPad.

    Par un phénomène de myopie, pourrait croire que Google est parti pour devenir le Microsoft du mobile. Mais il devra encore livrer la bataille pour les utilisateurs à forte valeur ajoutée ! Et les développeurs. Pas simple d'enrayer un écosystème, visiblement vertueux, mis en place par l'innovateur (Apple en l'occurrence).

    Refonder notre société sur la pensée des Lumières ?

    Notre société redécouvrirait-elle la pensée des Lumières ? Le philosophe Dany-Robert Dufour, par exemple, pense que nous devons repartir de ses idéaux, dévoyés par la suite. Curieusement, ce blog, lui aussi, explore cette période de notre histoire.

    Au fond, rien que de très normal. Toute crise démontre l’inefficacité des dogmes dominants. En les mettant en cause on revient naturellement à leurs fondations. Or, pour la partie laïque de notre société, ces fondations sont les Lumières, l’affirmation que l’homme ne doit remettre son sort qu’à la seule raison.

    La question qui se pose, d’ailleurs, n’est peut-être pas tant : avons-nous correctement exploité ce principe ?, que, qu’entend-on par raison ?

    Une tentative de réponse minimale :
    • Ce que désiraient les Lumières est que l’humanité cesse de s’entr’égorger et adopte le principe « universel » selon lequel l’homme n’est pas un loup pour l’homme. Or, ce qui a justifié, et justifie encore, tous les drames humains, c’est l’idéologie, un principe transcendant auquel l’individu s’abandonne aveuglément. Et cette idéologie peut aussi bien être une religion figée dans ses certitudes que des dogmes tels que le marxisme, la main invisible du marché ou le Consensus de Washington.
    • Quant à la raison, elle me semble avoir une définition modeste. Une définition qui était peut être celle des Grecs. À savoir que lorsqu’un groupe de personnes est en conflit, en discutant avec les uns et les autres, il est possible de trouver une solution qui les satisfait tous. Une solution « raisonnable ». La seule condition nécessaire et suffisante étant qu’ils soient d’accord pour chercher cette solution.
    Compléments :
    • De la pensée grecque et de son application, le droit romain : un billet.
    • Une clé de lecture des travaux d’Elminor Ostrom ? 

    vendredi 13 janvier 2012

    BBVA : Outlook au clou, vive Gmail !

    La banque espagnole BBVA a annoncé qu'elle déploierait (uniquement en interne) les applications Google (http://www.bbc.co.uk/news/business-16486796). Le coût n'est visiblement pas la motivation. BBVA espère accroître la productivité mais surtout accomplir une "mutation culturelle", notamment mieux faire collaborer les employés (élaboration de documents, vidéo conférences, etc.).

    BBVA a opté pour une approche en "big bang" : les employés auront accès à leurs courriels Outlook s'ils l'estiment nécessaire mais ils passeront du jour au lendemain aux nouveaux outils. Commentaire de la directrice de l'Innovation de BBVA : "Nous ne voulons pas maintenir les anciens comportements.  Pour aller vers l'avenir, il faut mettre le passé de côté." Et pan ! (ou bang ?) ;-)

    Cette adoption emblématique est la conséquence de deux tendances :
    1. Les employés, ne seraient-ce qu'à titre individuel, travaillent de plus en plus à partir de leurs smartphones, voire de tablettes. Comment collaborer si les applications ne permettent pas de travailler à partir des terminaux mobiles ?
    2. Les Microsoft et autres essaient bien de se mettre au Cloud. Mais les clients penchent d'abord pour ceux -dont Google- qui ont le nuage "dans le sang".
    Ma réflexion :
    • Les smartphones jouent le rôle de cheval de Troie d'une nouvelle informatique fondée sur le nuage.
    • Les PC apparaissent comme des dinosaures, mais aussi tout leur écosystème avec. Muter ne semble pas suffisant. La menace est celle d'une extinction pure et simple.
    • Il est très difficile d'être le leader dans une ère et de le rester dans la nouvelle.

    Free et l'art de la stratégie

    Free pourrait illustrer quelques théories de l’art du management et de la stratégie, à commencer par l’attaque d’un concurrent installé.
    • Reengineering : la société est construite avec une offre bon marché en tête. Par conséquent, les structures de coût de ses concurrents, résultat des méandres de l’histoire et d’un bien confortable monopole, sont certainement beaucoup plus lourdes que les siennes.
    • Modèle économique : Free ne propose pas de terminal, alors que c’est le principe de l’offre concurrente. Faire d’une force de son ennemi une faiblesse est le sommet de l’art chinois de la guerre.
    • Analyse de la valeur : l’offre de Free est bâtie sur ce qui compte le plus pour les segments de marché visés.
    • Par ailleurs, comme le note Hervé Kabla, Free réussit un coup de pub habile, qui profitera certainement à toute sa gamme. (FreeMobile, la révolution du 10 janvier 2012)
    Quant à ses concurrents, leurs lourdes organisations leur permettront-elles de réagir et de ne pas se faire dépecer ? En fait, il est possible que le mal que va leur faire Free n'est pas tant sa concurrence directe que le changement qu'il a opéré dans la perception de leurs prix et de leurs services par le marché (« Non, vous n’êtes pas des pigeons », la réponse de Bouygues à Free).

    Finalement, si la téléphonie mobile pouvait devenir moins coûteuse, cela ferait du bien à beaucoup de familles modestes, et peut-être aussi au reste de l’économie. Des mérites du libéralisme ?