jeudi 29 août 2013

Un anthropologue et le changement de la France

Depuis quelques semaines, je consacre des billets à l’anthropologue Eric Minnaert. Je vais, en deux billets, essayer d’en tirer des conclusions. Tout d’abord, dans celui-ci : la France et son changement.
  • Les billets sur l’entreprise. Il y a un parallélisme frappant entre ce que dit Eric Minnaert et l’analyse du progrès par Jean-Baptiste Fressoz. Dans les deux cas on voit une sorte de lutte des classes. Un affrontement entre ceux qui « pensent » et ceux qui « sentent ». Les premiers semblent enfermer les seconds dans un cercle vicieux. Ils leur imposent une forme de modélisation théorique du monde (les « normes »). Elle est dysfonctionnelle. Elle a pour conséquence d'entraver l’efficacité de l’entreprise. Mais aussi ce qui fait le sens de la vie des seconds. D’où dépression. Elle renforce les premiers dans leur sentiment de supériorité. (Cercle vicieux, qui se termine par la destruction de l’entreprise.)
  • La transformation du secteur public. Il y a ici aussi affrontement entre intellectuel et manuel. Mais, la situation y est peut-être plus inhumaine. En effet, le fonctionnaire semble s’être persuadé de sa totale inutilité. Et, contrairement à l’employé du privé qui peut échapper à l’étau en s’évadant, il est piégé. Il est convaincu que l’enfer commence où finit le secteur public.
  • L’exemple de l’EHPAD est effrayant. On applique au vieillard dépendant une logique de chaîne de fabrication. Il y a totale élimination de ce qui rend l’homme humain, c'est-à-dire les rites, la vie en société. Il devient une chose. Ne sommes-nous pas, ici, devant le mythe d’une société construite sur le principe du marché ? Une autre façon de concevoir une société de classes ? D’un côté, il y a les « marchands », de l’autre il y a les « choses » qu’échangent les marchands. Ce sont les perdants / détruits. Dans cette catégorie, il y a les pauvres soumis au « marché du travail », mais aussi les malades, qui obéissent à la logique du déchet.
Il est tentant de mettre tout ceci au compte du « libéralisme » (au sens premier du terme) post 68. L’homme a été encouragé à s’épanouir. Cela a conduit à une lutte de tous contre tous. Par ailleurs, l’analyse d’Eric Minnaert semble dire que, dans notre société, « ceux qui pensent » ont un avantage sur « ceux qui sentent ». La situation était particulièrement favorable pour les milieux d’affaires anglo-saxons. Ils avaient des théories toutes prêtes, qui réapparaissent régulièrement. Et une logique de lobby, qui leur est naturelle. Ils ont donc imposé leur modèle, le marché.

Fin d’un épisode de l’histoire ? Le prochain est à écrire ? 

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