jeudi 14 novembre 2013

Le mal du siècle a son livre ? Humble Inquiry

Et si tous nos malheurs, personnels et collectifs, venaient de questions mal posées ? C’est ce que dit Edgar Schein dans son dernier livre.

La complexité du monde le rend imprévisible et dangereux. Or à la fois le fonctionnement de notre cerveau et notre culture biaisent nos perceptions tout en nous faisant croire que nous détenons la vérité et que nous devons affirmer, sous peine de perdre la face. Résultat ? Nous apportons de bonnes réponses à la mauvaise question. D’où cercles vicieux dramatiques.

Pourtant il en faut peu pour nous sauver. Humble Inquiry, l’humble enquête. Avant d’agir, cherchons à comprendre le problème qui se pose à nous. Et, pour cela, apprenons à poser des questions, avec humilité.
L’humble enquête est l’art de faire émerger la personnalité de quelqu’un, de poser des questions auxquelles vous n’avez pas toujours la réponse, de construire une relation basée sur la curiosité et l’intérêt pour l’autre.
Au fond, ce n’est pas une question de techniques. Mais d’attitude. Si vous êtes convaincu de votre interdépendance aux autres, du mystère qu’ils représentent, y compris d’ailleurs pour eux-mêmes, de la faiblesse de vos sens et de vos capacités, alors, probablement, vous saurez poser les questions qui sauvent. Et vous construirez des relations de confiance.

Techniques pour esprits éclairés
Mais, comme souvent, les techniques ont une utilité. Elles sourient à l’esprit éclairé. En voici quelques-unes :
  • Après chaque rencontre, se demander ce qui a bien ou moins bien marché. Si l’on peut en tirer des enseignements sur la façon de demander humblement des renseignements. 
  • La demande n’est, en fait, pas toujours humble. Elle peut avoir une forme d’agressivité. Etre une sorte d’affirmation. Ce qui la rend humble est son intention. 
  • Tout ce qui nous montre nos limites est utile. Car il « fait grandir notre ego ». A commencer par l’art, et la fréquentation d’autres cultures. Prenons, aussi, conscience de notre dépendance aux autres. Et de la nécessité de bâtir avec eux des liens qui ne claqueront pas au premier revers. 
  • Nous sommes le premier destinataire de nos humbles demandes. Car c’est de nous que nous sommes le plus dépendants. Et la plupart de nos réactions nous sont imprévisibles. Nous sommes inconnus à nous-mêmes. 
  • Une technique utile consiste à examiner les processus plutôt que leur fonctionnement. Notre façon de dialoguer plutôt que la conversation en cours. Un exemple. L’île culturelle. Vous êtes membre d’un groupe multiculturel. Pourquoi ne pas faire l’exercice suivant ? Quelles sont, dans chaque culture, les règles liées à l’autorité et à l’établissement de relations de confiance ? Quelles conséquences peuvent-elles avoir par rapport aux événements que nous risquons de rencontrer ? Comment bien y répondre, tout en respectant nos cultures ? 
  • C’est le leader, en premier, qui doit apprendre l’humble questionnement. Car c’est lui qui est le plus dépendant des autres. Et c’est lui qui est supposé savoir. Il doit apprendre à se montrer « vulnérable ». (Il me semble utile, ici, d’apporter une précision. Les meilleurs dirigeants que j’ai rencontrés étaient des inquiets. Mais cette inquiétude n’en faisait pas des faibles. Mais des gens déterminés. Rien ne pouvait les détourner de la recherche d’une solution à leurs inquiétudes. Il ne faut pas se méprendre sur ce que signifie « vulnérabilité ». Ce peut-être la manifestation d’une force indestructible.)
SCHEIN, Edgar H., Humble Inquiry, Berrett-Koeler Publishers, 2013. 

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