samedi 31 octobre 2015

Atavisme

Il y a quelques temps, Hervé Kabla a tweeté qu'il était surpris par l'éclectisme de mes lectures. Cet éclectisme s'explique par une enquête. Je vais d'un sujet à l'autre au gré de mes interrogations. Curieusement, j'ai découvert que mon père faisait comme moi. Mais il ne le disait pas. Et je ne l'ai compris que bien après sa mort. Lui aussi se prenait d'intérêt pour des sujets, et épluchait ce qu'il pouvait trouver sur eux. Il n'est pas impossible que l'on ait eu le même type de combat. 

J'ai toujours été surpris par la proximité qu'il pouvait y avoir entre parents et enfants, même lorsque, comme c'est le cas de mon père, les premiers vivent loin des seconds. Sans s'en rendre compte, on crée les conditions qui font que nos idées survivront ? 

(Paradoxalement, il semble que c'est lorsque l'on veut imposer ses idées en force, que l'on connaisse quasi certainement l'échec...)

Mannequins et statistiques

Les mannequins ne représenteraient pas la diversité de la société, disait une étude. Ils seraient blancs en grande majorité. Racisme

Certes. Mais les mannequins (femmes) mesurent 1m80. Ce qui signifie qu'elles sont probablement d'Europe du nord. Racisme du nord ? Et si les mannequins étaient à l'image qu'a d'elle-même l'acheteuse de haute couture ? Peut-être aussi, si l'on allait plus loin dans l'analyse des origines sociales des mannequins découvrirait-on qu'occidentales, africaines ou asiatiques, elles viennent désormais d'une même classe de la société : celle qui, en Occident, en Asie ou en Afrique, a profité de la globalisation et s'est enrichie ? Hold up des riches sur les richesses ?... Un autre angle d'analyse serait celui de la pratique. Si le mannequin est est grand et maigre cela peut s'expliquer, qui sait ?, parce qu'ainsi les habits ont le meilleur effet sur lui...

Et si notre interprétation des statistiques ne reflétait que nos préjugés ? 

vendredi 30 octobre 2015

Politique du logement et élections

M.Hollande annonce qu'il va faciliter l'accès à la propriété grâce à l'extension du prêt à taux 0. Il présente cela comme une "réforme". Or, cette politique, poursuivie depuis des décennies est à l'origine d'une bulle spéculative. Comme le CIR (billet précédent), elle a eu l'effet inverse de celui qui est désiré. Et son impact est énorme sur les finances publiques, puisque sans elle le pays respecterait probablement les critères de déficit européens. 

Explication probable ? M.Hollande veut se faire réélire, et, pour cela, il prend une mesure démagogique. C'est de bonne guerre ? Il va falloir payer pour ces dépenses. Pour beaucoup de gens cela signifie dégradation de leur vie. 

Le bug actuel de notre système politique ne serait-il pas l'élection de gens qui ne représentent pas la collectivité, mais leurs intérêts propres ? Est-il a l'image de notre société, égoïste ? Ou pourrait-on mieux faire ? 

CIR : comment rater un changement, pour les nuls ?

(Le Crédit d'Impôt Rénovation a) coûté (...) 15,6 milliards d'euros (depuis 2005). (Ses 3 vices : 1) la moitié des ménages découvre seulement après le début de ses travaux l'existence du crédit d'impôt, dont les règles ont d'ailleurs été changées sept fois en dix ans (2) seul 1% des biens en location (...) un logement sur deux et (...) les plus énergivores, en ont profité. Ni le propriétaire, qui ne paye pas la facture de l'électricité, ni le locataire, qui n'est pas assuré de passer suffisamment longtemps dans le logement, ne considèrent en effet des travaux de rénovation comme avantageux (3) le crédit d'impôt (est) axé sur l'équipement, et non pas sur la performance atteinte. Il ne parvient ainsi pas à orienter vers les investissements les plus pertinents: (...) 41% des dépenses de rénovation des ménages sont dirigées vers l'installation de nouvelles fenêtres, alors qu'elles sont responsables de 10 à 15% des pertes thermiques d'un logement. (...) l'isolation, à l'origine de quasiment deux tiers des pertes thermiques, capte "seulement" 34% des dépenses. (La Tribune)
Ce crédit aurait surtout enrichi "les professionnels", qui en auraient profité pour augmenter sérieusement leurs tarifs. Nouvel exemple d'énantiodromie ?  Les bons sentiments donnent le contraire de ce que l'on attendait ? Pauvre France ?

Mais, pour la même somme, l'Allemagne équipe 13 fois plus de logements... Et si, tout simplement, c'était une question de conduite du changement ? En France, décider c'est agir, en Allemagne, le succès est dans l'exécution ? 

jeudi 29 octobre 2015

Que cherche Google ?

Je cherche le mot CAPTURS sur Google. C'est le nom d'une marque (http://www.capturs.com/). Que me répond Google ? Une page de Renault Captur. Il faut que je tape "capturs", entre guillemets, pour obtenir ce que je cherche. 

Les recherches de Google seraient-elles biaisées par ce qu'elles lui rapportent ? 

Malthus avait-il raison ?

Malthus avait-il raison ? Y a-t-il une limite au nombre d'hommes sur terre ? Un article lu il y a longtemps disait que ceux qui l'ont prétendu se sont trompés. Curieusement, il ne citait pas "les limites à la croissance". Or, sa thèse n'est pas qu'il y a une limite au nombre d'hommes, mais à notre mode de développement.

Je me demande si ce n'est pas la clé de la question. Quand on regarde l'histoire, il semble que l'espèce humaine croisse en oscillant. A des phases de développement fortes succèdent des guerres, épidémies ou autres catastrophes. Et si ces crises étaient des crises d'adaptation ? Et si ce qui compte n'était pas tant le nombre d'hommes que leur comportement ? 

mercredi 28 octobre 2015

La pensée est-elle de droite ?

MM. Onfray et Finkielkraut sont les seuls penseurs en activité, et ils sont de droite, disait Marcel Gauchet. Puis j'entends parler de plus en plus de penseurs de droite. Serait-on automatiquement qualifié "de droite" quand l'on essaie de penser ? Alors, dans ces conditions, qu'est-ce qu'être de gauche ? Avoir la foi ? 

Millenium

France Culture lisait Millenium un, il y a peu. Deux choses m'ont frappées :

Les méchants sont vraiment très méchants. Si Hannah Arendt a raison, en disant que le mal est banal, ce type de livre nous prépare-t-il à affronter cette banalité, ou, au contraire, nous installe-t-il dans une calme satisfaction de nous-mêmes ? Et s'il nous endurcissait dans nos lâchetés quotidiennes ?...

Comment faut-il interpréter le fait que, comme tant d'autres, il nous rend voyeurs complaisants d'atrocités ? Et que le héros masculin, auquel nous sommes supposés nous identifier, se fait tabasser et quasiment violer ?

mardi 27 octobre 2015

Airbnb et les lois du marché

Airbnb est attaqué par certains résidents de San Francisco. La raison en est qu'un afflux de touristes produit une inflation galopante des prix des locations. Ici comme ailleurs, San Francisco paie les pots cassés du numérique. 

Le numérique, du moins tel qu'il est utilisé aujourd'hui, joue essentiellement sur les mécanismes de marché, et les dérègle ?

Qu'est-ce qu'un bon coach ?

Mon dernier livre est le résultat d'un tissu de surprises. En particulier, je me suis rendu compte que ce qui intéressait mes clients n'était pas tant les problèmes de leur entreprise que leur vie personnelle. Ils m'ont fait découvrir que les techniques que j'emploie pour l'entreprise marchent aussi pour l'individu. Et, pourtant, cela semble de la mécanique pour ingénieur. 

Voilà le moyen de définir un coaching efficace ?

Ces dernières années, j'ai rencontré deux types de coachs. Une minorité de psychologues. Une majorité, s'étendant rapidement, de cadres qui croient qu'un nouveau diplôme leur donnera un emploi. 

Pour reprendre la classification de Max Weber, les seconds sont dans la rationalité, les premiers dans le rite. Les seconds savent l'objectif vers lequel doit tendre le coaché. Les seconds l'aident à travailler son comportement. Les seconds tombent facilement dans le totalitarisme : ils imposent leur point de vue. Les premiers sont généralement moins nocifs que ces derniers, mais une poignée, et pas des moindres, tend à faire des ses ouailles les membres de leur secte. 

Mon approche indique peut-être une troisième voie. Celle de la "méthodo qui débloque". Je déballe mes petites techniques et leurs petites histoires, et je demande à celui avec qui je discute : n'y a-t-il pas là-dedans quelque-chose d'utile ? Qui vous parle ?... 

L'un n'est pas dans un fauteuil et l'autre sur le canapé. Tous les deux nous sommes sur le tapis, et nous jouons au Lego. 

lundi 26 octobre 2015

Le paradoxe polonais

Les Polonais reçoivent de grandes quantités d'argent européen, et pourtant ils en veulent à l'Europe. Comment expliquer ce paradoxe ?

Le petit peuple de paysans, commerçants... semble souffrir. Et lorsqu'il cherche un coupable, il voit, partout, la main de la bureaucratie européenne. Et il est appuyé par une Eglise ultra réactionnaire.

A qui profite l'argent de l'Europe ? Est-ce l'Europe qui est coupable du malheur paysan, ou plutôt les dirigeants locaux qui n'ont pas su faire bon usage ? Ils se servent de l'UE comme bouc émissaire ? Qu'est-ce qui serait arrivé, et arriverait, au petit paysan polonais, sans Europe ?...

La France est le casse-tête du changement

Le terme "changement" me pose un problème. En France, il provoque l'irrationalité. Mes premiers livres sont basés sur ce qui s'enseigne en MBA. J'ai découvert que ces cours n'ont aucune autorité en France. Alors, j'ai essayé de m'adapter, mais je ne parviens pas à trouver le bon angle d'attaque.

Et s'il n'existait pas ? 

Je fais une présentation sur le changement. Et j'ai l’impression d’être passé à côté de l’intérêt de la salle. Et ce en dépit de 3 séances de préparation avec le management de l'entreprise. (Pour une heure de présentation dont 35 minutes d'exposé !) Jusqu’à ce que j’attende, en ligne, au vestiaire. Alors des participants m'interpellent, gentiment. Et j’ai découvert qu’ils avaient une grosse culture du management : ils s’intéressaient à l’entreprise libérée, se posaient des questions très pertinentes sur VW… Il y avait de quoi avoir une discussion passionnante.

La France serait-elle double ? D'un côté, elle est libre, ouverte au monde, curieuse, sympathique, travailleuse ; de l'autre, elle joue à son jeu éternel de la lutte des classes, de l'exception culturelle, du clientélisme, de l'arrogance, elle donne en spectacle ses conflits sociaux... ?

dimanche 25 octobre 2015

Comment fabriquer un conflit : l'Angola

La guerre civile qu'a connue l'Angola aurait été fabriquée. D'ordinaire une communauté s'oppose à une autre. Pas ici. Après le départ des Portugais, les deux factions qui les ont combattus s'affrontent. Et, elles vont créer, par la terreur, les conditions qui vont faire que le peuple, jusque-là indifférent, va s'entre-déchirer. 
For most, therefore, the war began not for a cause, but as a reality that was imposed upon people. Many of Pearce’s interviewees described their lives under UNITA and the MPLA as if they had been “owned” by the warring factions. “People lost the notion of being independent,” one interviewee told him. “People became possessions.” (L'article.)
Cela fera des centaines de milliers de morts. Dans l'indifférence générale. Une des factions a gagné. Mais la nature de son emprise sur la société n'a pas changé. 

La décolonisation a été un des changements les plus ratés qui soient. Peut-être serait-il temps de se demander pourquoi ? 

Angleterre grand profiteur de l'Europe ?

Thanks partly to British political clout, the EU now has less wasteful agricultural and fisheries policies, a budget to which Britain is a middling net contributor, a liberal single market, a commitment to freer trade and 28 members.
On apprend aussi que "La Grande Bretagne est le pays le moins réglementé en Europe. En fait, elle l'est même moins que des pays extra européens tels que les USA, l'Australie et le Canada".

Autrement dit, pourquoi l'Angleterre veut-elle quitter l'Europe, puisqu'elle en fait ce qu'elle veut ? 

(Je suggère que c'est justement ce que l'Anglais reproche à l'Europe...)

(PS. Autre article de The Economist : tout ce que reproche l'Angleterre à l'Europe est infondé. Sa population souffre d'une information dramatiquement fausse.)

samedi 24 octobre 2015

Pourquoi réformer le droit social ?

Discussion avec une directrice des ressources humaines. Quel est le principal intérêt de réformer notre droit social ? Revenir sur les "avantages acquis". C'est le mal de la France. 

Mais qui a donné ces avantages ? Le patronat. (Car chaque entreprise a ses avantages spécifiques.) 

Alors, est-ce un problème de droit ou de management ? De management, me dit-elle, avec un soupir las. (Et quelques exemples de lâcheté managériale ordinaire.)

L'Angleterre se vend à la Chine ?

Les Anglais s'accoquinent avec la Chine, au détriment de leurs alliés traditionnels...
The British gamble is that an open-door policy – when the US and the EU reflexively treat Chinese state investors as a threat – will lead to a reciprocal welcome for British firms in China.
C'est un pari risqué : la Chine décélère.

La perfide Albion semble toujours prête à vendre son âme pour un peu d'argent... 

vendredi 23 octobre 2015

Qu'est-ce que la confiance ?

La direction de VW était-elle au courant... ? m'interroge un ingénieur. 
Je lui demande : dans votre entreprise, parle-t-on de ses problèmes ? 
Nous gérons des centrales nucléaires, imaginez ce que cela donnerait si on les cachait !, me répond-il. 

Et si c'était cela qui permettait de savoir si la confiance règne dans l'entreprise ? 

Mais il y a encore mieux, peut-être. Non seulement on ne masque pas ses problèmes mais dès que l'on a un problème on appelle à l'aide, et ce de manière agressive. C'est une technique que j'ai rencontrée dans une (grande) entreprise. Dès que quelqu'un rencontrait une difficulté, il en faisait la préoccupation du groupe. C'est à cela que l'entreprise devait son étonnant succès, pensait son PDG (tout de même un peu las de ne jamais être sûr d'avoir le dernier mot). 

En résumé, il semblerait qu'il y ait une échelle de la confiance à trois valeurs :
  1. Je cache mes problèmes. 
  2. Je ne cache pas mes problèmes. 
  3. Quand j'ai un problème, j'utilise l'organisation pour le résoudre. Mon problème n'est pas le mien, mais celui de l'organisation. 

L'effet Cendrillon

Nicolas Sarkozy disait "travailler plus pour gagner plus". Bill Gates me vaut un million de fois. A-t-il travaillé un million de fois plus que moi ? C'est l'effet Cendrillon. 

Considérons les gens qui ont réussi. Qu'ils soient ultra riches, présidents de tel ou tel pays, oligarques, ou autre. Oublions qu'ils ont réussi, et regardons leurs caractéristiques personnelles... Nous n'aimerions pas que nos enfants leur ressemblent. 

Or, leur succès vient de leur différence. Et peut-être même de leurs défauts. Ils ont trouvé quelque-chose que nous ne voyions pas. Les leviers du système monde. Et la fée société a fait d'eux des maîtres de l'univers. 

jeudi 22 octobre 2015

De quel type d'innovation Uber est-il le nom ?

Procès en cours. Si les chauffeurs d'Uber sont requalifiés en salariés, la société ne vaut plus rien. Tout son modèle économique tient au fait d'avoir court circuité le droit du travail... (L'article.)

En fait, dit Philippe Tibi, la "transformation numérique" n'affecte pas significativement le salariat. L'innovation ne joue qu'à la marge. Ce qui m'amène à la question : c'est à la marge que se déterminent les salaires, disent les économistes. Et si toutes les innovations du moment ne servaient qu'à contenir, voire réduire, la masse salariale, en faveur des possesseurs de capital ? (Comme, hier, les délocalisations ?)

Changement : une question de définition ?

Augmenter les impôts en France, faire payer des impôts aux Grecs, parle-t-on du même type de changement ? Non. Paul Watzlawick dit que le premier est "d'ordre 1", et le second "d'ordre 2". 

Cela a une importance. Car nous ne voyons pas cette distinction. Quand nous pensons changement, nous pensons changement d'ordre 1. C'est travailler plus pour gagner plus. C'est appuyer sur le champignon pour aller de plus en plus vite. Donc, quand ça coince, on pense être en échec. Il faut nous changer. D'où peur. Or, pas du tout. Quand ça coince, c'est qu'il faut changer de vitesse. Il faut procéder différemment de ce que l'on faisait jusque-là. Pour le reste, on a ce qu'il faut pour réussir. 

Exemple type : l'embouteillage. Le problème ne vient pas des conducteurs, mais de la signalisation. 

mercredi 21 octobre 2015

Justin Trudeau : enfin le changement ?

Encore un qui parle de changement ! me suis-je dit en entendant annoncer l'élection de Justin Trudeau. 

Mais si, cette fois, c'était un vrai changement ? Alors que tout le monde parle de rigueur, et économise, lui annonce relance maîtrisée et la construction d'infrastructures ; alors que partout le politique est haï, et les urnes boycottées, lui suscite l'espoir et une augmentation du nombre de votants... (Et alors que nos politiques sont vieux, lui est tout neuf.)

Un phénomène identique pourrait-il arriver en Europe ? me suis-je demandé. Difficilement. D'abord, Justin Trudeau appartient à une sorte de parti d'extra terrestres : les Libéraux. Le Canada semble avoir des partis de gauche, socio-démocrates, et de droite, conservateurs, aussi coincés que les nôtres. Mais, il existe aussi un troisième parti que nous n'avons pas. Ensuite, l'Europe est solidaire par nature avec l'Allemagne. Tant que l'Allemagne ne change pas ou qu'une masse agissante de nations ne la contraint pas à changer, probablement, rien ne se passera. 

Suis-je antilibéral ?

Un lecteur me déclare que je suis antilibéral. Cela ressort clairement de mon quatrième livre. Ce à quoi je réponds :
Libéral a beaucoup de sens. Pour moi, il nous ramène aux Lumières, c'est la question de la liberté de l'homme. Et cette liberté est celle de l'esprit. C'est mon combat. 
Ce qui me va moins, c'est la façon dont on entend ce mot aujourd'hui. Les philosophes des Lumières cherchaient un moyen de faire que l'homme n'ait pas à obéir à l'homme. Ils cherchaient des "lois naturelles". Certains trouvèrent "le marché". Cette idée est revenue aujourd'hui. Or, confier notre liberté à quelque chose qui n'est pas nous, cela s'appelle "aliénation". C'est le contraire de la liberté.
Manifestation de notre "moment thucydidien".

mardi 20 octobre 2015

Danger : expert

highly regarded experts are routinely shown to be no better than novices at making judgements. (Lettre d'information de l'Université de Cambridge.)
Ne croyez pas les experts. Ils sont victimes de biais cognitifs. Il faut leur faire subir ce que l'on fait subir à toute autre source de données. C'est ce que dit une étude. 

(Pour ma part, il me semble que l'on ne croit pas l'expert pour la justesse de sa parole, mais parce que cela arrange la société que nous le croyions. Il appartient à un rite social. Le fait que l'on n'ait plus foi en la "parole d'expert" résulterait-il d'une transformation sociétale ? Refus de l'autorité ?) 

Lire ou écrire, exutoire pour stress

Actuellement, je ne parviens pas à lire, et j'ai l'impression de perdre mon temps : je n'apprends rien. Vraiment ? En écrivant, pour préparer des interventions, j'ai l'impression que je résous plein de problèmes, qui me bloquaient. Il en est de même lorsque je parle de moi. Ce qui n'est pas très facile, puisque, pour arriver à débrouiller mes idées, il faut que je les exprime en désordre. Ce qui donne une piètre image de la clarté de mon esprit. 

Et s'il fallait écrire / parler plus qu'on ne le fait ? 

(Est-ce pour cela que les psychologues disent que c'est le meilleur, seul ?, moyen d'évacuer le stress?)

lundi 19 octobre 2015

Serrons la main du président ?

Un représentant CGT ne serre pas la main du président. Ce n'est pas bien. Voilà ce que disait un auditeur de France Inter, ce matin, au secrétaire général de ce syndicat. 

Faut, il serrer mécaniquement la main d'un président, eu égard à sa fonction ? me suis-je demandé. Fallait-il mécaniquement serrer la main du chancelier Hitler, par exemple ? La gauche des années 60, aurait-elle mécaniquement serré la main de De Gaulle ? Si l'on fait l'hypothèse que l'homme a un "libre arbitre", aucun acte ne peut être mécanique. 

Le coach, le donneur d'aide et le paradoxe

Une rencontre avec un ami, coach, m'a fait trouver une illustration pour deux concepts qui sont fondamentaux dans mon travail. 
  1. Le paradoxe, le principe de ce blog, 
  2. Le « donneur d’aide », l’homme clé du changement. 
Exemple de paradoxe. Mon ami me fait remarquer que j'ai un tic de langage. J'emploie beaucoup « si tu veux ». Et, lorsqu'il me demande si je veux du café, je lui demande s'il en prend. Il interprète cela comme un manque d’assurance. Curieusement, en me faisant remarquer mes tics, il me fait, effectivement, me sentir en situation d'infériorité. 
Mais il y a une autre façon de voir les choses. J'ai peut-être l'attitude de l’anthropologue qui doit s’inscrire dans les règles de la société qu’il étudie, et donc les découvrir au préalable. Cela colle d'ailleurs à l'orientation de mes travaux. 
Il y a sûrement d’autres interprétations possibles. 
La technique du paradoxe a pour objet d’attirer notre attention sur le fait que nous pouvons nous tromper. Notre jugement est avant tout un préjugé, disent les psychologues. (D’aucuns affirment que c’est par le doute que l’homme a commencé à penser.)

Le donneur d’aide, maintenant. Comment reconnaître un donneur d’aide ? se demande Edgar Schein. C’est quelqu’un qui vous est utile à résoudre des problèmes qui vous sont propres, par vous mêmes. 
Le médecin, l'expert, sont utiles. Mais ils n'ont pas besoin de votre libre arbitre pour agir. Sous cet angle, ce ne sont pas des donneurs d'aide. 
Je demande donc de l'aide à mon ami : je lui raconte mes frustrations actuelles. Il me répond que je me complais dans l’état de victime. Il me le démontre à l'aide de savants diagrammes… M’a-t-il été utile ? Il m'a enfoncé la tête sous l’eau. D'ailleurs, je ne lui demandais rien. J'avais simplement besoin de penser tout haut. 
Mais, cela fait parfois du bien de boire la tasse, me direz-vous. Ce qui ne tue pas renforce. Et cela m'a fourni un billet pour ce blog. Cependant il ne faut pas abuser de ce procédé. Surtout si l'on veut faire carrière dans la conduite du changement. 

dimanche 18 octobre 2015

Papa et maman sont universels

Pourquoi tous les bébés du monde appellent-ils leurs parents papa et maman, ou quelque son approchant ? 

Apparemment parce que le premier bruit qu’émet l'enfant est aaaaa, et lorsqu'il parvient à fermer le bec, cela devient maaamaaa. Du coup l'être humain qui se trouve à proximité estime qu'on l'a désigné par ce terme. Puis le son se complexifie et devient paaapaaa. Le deuxième être de proximité s'attribue ce nom. Mais les choses se corsent, ensuite. Du fait d'associations d'idées différentes liées à des circonstances différentes, les langues s'éloignent les unes autres. 

L'article dans lequel j'ai trouvé cette théorie.

Gauche autoritaire

Le principe de ce blog est le paradoxe, en voici un : pourquoi la gauche qui, en 68, dénonçait l'autorité, est, aujourd'hui qu'elle est au pouvoir, un utilisateur sans complexe de principes d'autorité ? (D'ailleurs, le fait qu'elle exerce "le pouvoir" ne contredit-il pas toutes ses thèses ?)

Et si c'était inhérent au pouvoir ? Hannah Arendt disait que le sénateur romain représentait l'autorité parce qu'il matérialisait les principes qui étaient à l'origine du succès de Rome. Elle pensait qu'il n'y avait rien de tel aujourd'hui. Je crois qu'elle s'est trompée. Après guerre, par exemple, il y'a eu l'autorité du technocrate, du scientifique, en bref de l'homme de raison. Parce que la raison était le fondement de notre société, et qu'elle était la cause de son succès.  

Autour des années 60, il est possible qu'un autre modèle ait émergé. Il est lié à la massification de l'éducation supérieure. Avec elle triomphe une société d'intellectuels dont le métier est de brasser des idées. Le mot d'ordre : la culture. Ce que 68 a appelé "gauchistes" a été l'agent du changement. Il s'est opposé à une autorité, et non pas à L'autorité, au nom d'une autre autorité. 

Aujourd'hui, le modèle 68 d'une société d'intellectuels est en faillite. Car elle n'a pas de pouvoir sur les événements. Or, le succès est la condition nécessaire de l'autorité... Il est probable que de nouvelles formes "d'autorité" doivent être en cours de formation. 

samedi 17 octobre 2015

Le paradoxe de la productivité informatique

Plus on dépense en technologies de l'information, plus la productivité mondiale baisse. C'est le paradoxe de Solow, et il s'affirme. Explication ? Le Financial Times pense que ce qui pêche est l'investissement en formation. Autrement dit, c'est une question de conduite du changement. Effectivement, c'est ce que je soupçonne depuis longtemps. Au moins depuis que j'ai enquêté sur l'utilisation des ERP. (Etude chez Slideshare.) C'est d'ailleurs pour cela que j'ai eu le temps de changer d'avis. 

Et si l'informatique avait été utilisée pour sortir la "valeur" de l'entreprise, i.e. abaisser la masse salariale représentée par ses personnels, au profit de quelques gagnants des dernières évolutions de la société ? Ces gagnants sont, pour simplifier, les titulaires de MBA les plus prestigieux. A savoir, les dirigeants de multinationales, les dirigeants de fonds et autres financiers, et les dirigeants de cabinets de conseil. 

Par ailleurs, les quatre autres théories en course sont, d'après le FT :
Economists, who have been struggling with this conundrum since Robert Solow first wrote about it in 1987, have four theories for what causes it: there are productivity gains, but we just do not measure them correctly; some individuals and companies make productivity gains, but these come at the expense of others — so there is no net gain; there is a time lag before productivity gains show up; there are no productivity gains because IT is so hard to manage.

Interviewé par la RTBF


Hier matin, j'ai passé trente minutes dans une émission de la radio belge, RTBF. Il était question de mon dernier livre. J'étais dans mes petits souliers : je n'ai jamais rencontré de journaliste qu'en face à face ou par téléphone, pour un article... alors participer à une demi-heure d'une émission de grande écoute... Et à distance. 

Illustration de "J'ai pensé à tout..." : méfiez-vous de vos préjugés. J'avais l'habitude du journaliste qui vous fait parler d'un livre qu'il n'a pas lu. Là, j'ai eu l'impression que l'animatrice connaissait mieux mon travail que moi ! (Méfiez-vous des Belges ?) En tout cas, quelle pro : la dynamique de l'émission était remarquablement agréable, y compris pour moi qui en était la victime. Il suffisait de se laisser porter. Malheureusement, ne voulant pas ennuyer l'auditeur, je pense que j'ai été un peu trop court dans mes réponses.

En tout cas, j'ai constaté deux choses. Il y a beaucoup de pub utilisant de l'anglais dit en anglais correct ou par des Anglo-saxons (de type : "êtes vous I have a dream ou Yes we can ?"), et la problématique du changement semble raisonner bien mieux en Belgique qu'en France. Voilà, encore une fois, qui m'a pris par surprise. Le temps de réaliser mon erreur, l'émission était passée.  Mais c'est plus facile de rejouer le match que d'y participer. 

Le podcast est ici : http://t.co/AID6a03FXz. Je n'ose pas l'écouter...

(PS. Je l'ai écouté, pour raison familiale, et je me suis trouvé compréhensible.)

vendredi 16 octobre 2015

L'Amérique des aventuriers ?

50% des fonds pour candidat aux présidentielles américaines proviennent de 158 familles. Et ces familles veulent l'envers de ce que désire la majorité de la population (pour le bien de celle-ci, d'ailleurs). Qui sont ces familles ? Des nouveaux riches. leur fortune vient de fonds d'investissement et du gaz de schiste. 

Volonté de puissance ? Gens sans foi ni loi qui ont su exploiter des occasions sans lendemain et qui pensent que tout s'achète ?... (Et éternelle Amérique ?)

Qu'est-ce que le progrès ?

Apparemment, Kant et les philosophes des Lumières pensaient que le progrès c'était la raison s'éveillant et prenant les commandes du monde. En devenant de plus en plus intelligents, nous serions de plus en plus sages et heureux. Le progrès n'était donc pas une question de fusées, de machines à laver ou de numérique, mais d'esprit. 

En m'interrogeant sur les causes des changements que nous subissons, j'en suis arrivé à une hypothèse proche de celle des Lumières. Avec une différence : pour elles progrès = bien, pour moi progrès = cours des choses. En effet, il me semble que l'histoire de l'homme depuis quelques milliers d'années s'explique par une innovation : la raison. La raison correspond à une partie du cerveau qui nous est propre, et dont l'intérêt premier est social. Elle nous permet de communiquer entre nous, et de construire des sociétés. (Par opposition au groupe primitif.) La raison serait donc liée à l'émergence de la société. Ce serait la raison qui aurait permis l'agriculture, et pas le contraire. 

Mais, comme souvent dans ce blog, surgit le paradoxe : alors qu'elle est un organe social, elle nous a convaincus que nous étions des individus ! 

Si bien que, comme le pensaient les Lumières, le combat de l'humanité est celui de la maîtrise de la raison. Car il faut s'assurer que quelques-uns ne se l'approprient pas, et surtout qu'ils ne jouent pas aux apprentis sorciers. D'où l'importance de l'école, formation, pour tous, de la raison. La raison, c'est le pouvoir, c'est même peut-être bien l'ultime "bien commun" (res publica) de l'humanité. "Bien commun" dans un sens, au fond, très négatif : c'est une bombe qui ne demande qu'à nous rayer des vivants. Je ne suis pas un homme de Lumières. 

jeudi 15 octobre 2015

Les best sellers du blog du changement

Que lit-on dans ce blog ? Question posée par un ami. Je suis allé le demander à Google Analytics. Je me suis contenté des 3 dernières années (sur 8). Et j'ai éliminé les "pages" pour ne laisser que les "billets".
Voici ce que cela donne, pour les billets les plus lus.

Petit traité de manipulation : l’injonction paradoxale
Psychologie vulgarisée
Définition de changement
Fondamentaux de conduite du changement
Qu’est-ce que la résistance au changement ?
Fondamentaux de conduite du changement
Serge Delwasse et résistance au changement
Témoignages
La systémique pour les nuls
Fondamentaux de conduite du changement
Le changement, ça s'apprend
Annonce d’un livre
Trois techniques de conduite du changement
Fondamentaux de conduite du changement
Michel Rességuier et le redressement d’entreprise
Témoignages
Eric Harlé
Souvenirs
Travail du dimanche : et si la France se souvenait qu'elle est laïque ?
Opinion invitée
Quel rôle pour les ressources humaines dans le changement ?
Le changement en action
Hegel pour les nuls
Philosophie vulgarisée
Origines des techniques de conduite du changement
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Qu'est-ce qui me frappe ?
  1. Ces billets sont beaucoup plus lus que ce que je pensais. En gros tous sont entre 500 et 5000 vues, sur 3 ans. D'ailleurs, le nombre de vues des billets qui viennent ensuite dans le classement ne diminue que très lentement. 
  2. Vulgarisation : changement, mais peut-être plus encore psychologie et philosophie. Ce qui est surprenant, puisque ces deux derniers sujets sont secondaires pour ce blog. 
  3. Pratique du changement : témoignages, qui servent de CV à mes interviewés ?, et exemples.

Qu'est-ce que la gauche de progrès ?

"Gauche de progrès." Le terme est probablement ancien, mais je ne l'ai remarqué que récemment. Décidément le discours politique me passe au dessus de la tête.  Je me suis demandé : y aurait-il une gauche de la stagnation ? A moins que le progrès ne soit exclusivement de gauche ?

J'ai cherché une définition de "gauche de progrès" sur Internet. Je n'ai rien trouvé. J'ai cru comprendre que c'était la gauche non socialiste. Ce qui n'est pas une conjecture totalement idiote : le socialisme moderne est "postmoderniste", donc anti-Lumières, donc anti-progrès.

Mais alors, pourquoi ne pas avoir fait un programme de ce mot ? N'y aurait-il pas ici un argument marketing redoutable : si nous sommes dans la panade, c'est du fait de vos croyances, vous partis de gouvernement ?... A moins que les politiques, de progrès ou non, n'aient aucune conviction ? Ils se paient de mots qui sonnent bien ? Comme Eichmann

mercredi 14 octobre 2015

Crise européenne : des joueurs mais pas d'équipe ?

Un universitaire disait récemment que l'Allemagne était le mauvais génie de l'Europe. C'est aussi ce que pensent depuis longtemps les économistes étrangers. Mais, je ne suis pas sûr qu'il n'y ait pas une cause plus profonde aux difficultés de l'Europe. 

Ce qui caractérise l'Allemagne, c'est qu'elle n'en fait qu'à sa tête. Puis qu'elle nous impose ses décisions. Cela a commencé par sa réunification, faite dans des conditions irréalistes. Puis il y a eu les réformes Schröder, qui avantagent brutalement son industrie. Puis Mme Merkel décide de supprimer ses centrales nucléaire, alors que nos réseaux électriques sont dépendants les uns des autres. Puis elle se met à accueillir les réfugiés syriens à bras ouverts, avant de revenir sur son offre... C'est d'ailleurs curieux. On dit qu'elle est hyper prudente, qu'elle a adopté l'attitude du conducteur dans le brouillard alors que, au contraire, elle prend des décisions totalement irréfléchies. 

L'Allemagne n'a rien d'un joueur d'équipe. Mais, pourquoi ne le lui dit-on pas ? Je me demande si ce n'est pas la faute de la France. Mme Merkel veut que nous fassions bloc avec elle. Et elle tient M.Hollande par ses déficits, qu'elle lui permet de ne pas rembourser. (La réélection de M.Hollande tient à sa capacité à dépenser. Système clientéliste oblige.) Dans ces conditions, qui peut la critiquer, alors que les deux principales puissances du continent font bloc ? 

C'est parce que la zone euro n'est pas une équipe qu'elle est en crise ? 

Changement chez France Musique

Le changement vu de loin. Nouvel épisode de l'analyse des changements chez France Musique.

A un moment, je pensais que France Musique était devenue la radio des musiciens. Comme il y a depuis quelques temps le "musicien metteur en ondes", il y avait le "musicien animateur". Puis il y a eu un retournement de tendance : ligne Radio Classique. De la musique, des émissions longues, peu de paroles. Cela semble se confirmer et s'amplifier. 

Serait-ce le marché qui l'a emporté sur l'élite de la culture ? Réduction de coûts, par élimination de présentateurs ? Présentateur = catégorie de personnel qui peut le moins facilement se défendre ?...

(Mauvais esprit ?)

mardi 13 octobre 2015

L'entreprise libérée : dangereuse utopie ?

Vincent Berthelot pense que "l'entreprise libérée" a été récupérée. Elle n'est pas conçue comme une mesure d'épanouissement mais d'économie. Car elle permet d'éliminer le management intermédiaire. Et surtout elle permet de le faire sans résistance au changement. 

Une fois de plus ce qui compte n'est pas l'idée, mais qui l'utilise. Nos dirigeants sont des gestionnaires, pas des créateurs (ou "entrepreneurs"). Ils réduisent des coûts pour augmenter des profits. Ayant un marteau, ils voient des clous partout. Que ce soit libération, lean, numérisation ou autre. 

(Exemple de "phénomène de l'agence".)

Non à la gentrification !

La France va s'opposer à la gentrification de ses villes, au mélange riche, pauvre, disait l'animateur de la matinale de France Culture, lundi matin. La France n'aime pas le mélange concluait-il. On préfère que les pauvres restent ensemble. Pauvre France. Curieusement, il n'y a pas de manifestations sur le sujet en France. La chronique partait de l'exemple anglais. Or, au lieu de conclure que l'Anglais refuse le changement, notre homme disait : cela va bientôt être le cas de la France. Et de faire un procès d'intention au pays. 

Quelques-temps avant, Hubert Védrine, toujours chez France Culture, regrettait que la France aime de moins en moins l'Allemagne. Plutôt que d'avoir le courage de suivre l'exemple de M.Schröder, elle préfère se mettre la tête dans le sable. 

Et s'il y avait d'autres explications à la "résistance au changement" française ? Et si elle trouvait qu'il n'est pas normal que les pauvres se soient appauvris, qu'ils soient éjectés de leur habitat ? Que la fortune des riches est mal acquise, leur comportement impérialiste ? Et si la "résistance au changement" était un mouvement démocratique, en absence de parti politique pour le représenter ? 

(Un ami me disait que la rue Saint Denis à Paris, se gentrifiait effectivement à grande vitesse.)

lundi 12 octobre 2015

e réputation : est-ce bien sérieux ?

Scandale de VW : impact sur son e réputation ? Terrible. Tapez VW et Google vous répond "scandale". Voilà un malheur dont VW aura du mal à se relever dit un article

Je suis dubitatif. Si ce que Google dit change si vite dans un sens, cela peut changer dans l'autre ! Car ce que reflète Google ne correspond qu'à ce qui intéresse les gens à un moment donné. Dès que VW sera associé à une autre nouvelle, elle effacera la précédente. Ce qui compte est ce que l'acheteur de voiture a dans la tête. Je ne suis pas certain qu'il se la remplisse en faisant des requêtes sur Google. D'ailleurs, il n'y trouve que ce qu'il y cherche. 

Je me demande si cette histoire d'e réputation est bien sérieuse. En fait, elle marche pour les peu connus. (Par exemple, mon blog semble être une source de renseignements sur Serge Delwasse, un spécialiste du redressement d'entreprise.) Pour le reste, Internet n'est probablement qu'une des multiples caisses de résonance qu'utilise la société. 

Qu'est-ce qu'une entreprise libérée ?

On parle beaucoup de "l'entreprise libérée", en se demandant comment la réaliser. On cherche une méthode. Je pense que l'on se trompe. 

Jean-Farnçois Zobrist, dont on cite généralement les exploits, dit que son entreprise est bâtie sur la confiance, et que l'art du management est de concevoir les conditions pour que les choses se fassent toutes seules. Il me semble que c'est ce qui compte. 

J'ai rencontré, et je rencontre, des entreprises comme cela. Extérieurement, elles n'ont rien d'original. Mais leurs employés viennent travailler avec plaisir. Et ils font preuve d'initiative. Ils donnent, en quelque sorte, sans compter. Et surtout sans se demander si c'est ce qu'on leur demande.

Et il y a peut être mieux. Un dirigeant me disait que, avant que sa société ne soit achetée par une multinationale, ses employés faisaient un drame personnel du moindre problème de l'entreprise et harcelaient leurs collègues jusqu'à ce qu'ils l'aient résolu. Elle faisait des exploits. Maintenant elle a de l'argent, des robots et des ingénieurs, mais on ne pense plus qu'à sa carrière. Et elle n'est plus rentable. 

dimanche 11 octobre 2015

Chronique polytechnicienne

Serge Delwasse tient une chronique polytechnicienne sur le blog d'Hervé Kabla. Il choisit des événements apparemment secondaires de l'histoire de Polytechnique pour les disséquer avec un sens du détail fascinant. Dernièrement, il s'est attaqué à l'affaire Dreyfus. Auparavant il y a eu Borotra et l'attitude de l'élite pendant la dernière guerre. A l'occasion d'un billet sur Yves du Manoir, on découvrait qu'un de ses ancêtres n'a pas engagé les navires qu'il commandait lors de la bataille de Trafalgar : y aurait-il eu résistance passive au sein des troupes révolutionnaires ? On a aussi parlé de grève à Polytechnique et de bien d'autres sujets anecdotiques et pourtant curieusement révélateurs de leur époque et de notre société. 

Cela ressemble aux nécrologies de The Economist. The Economist profite de la disparition d'un illustre inconnu pour explorer l'évolution de l'humanité. C'est probablement ce que fait Serge Delwasse. 

Que cache la réforme du droit du travail ?

Comparaison de deux entreprises du même secteur. L'une grosse, l'autre petite. Si la petite entre chez la grosse, mécaniquement, les salaires de ses personnels augmentent de l'ordre de 15% du fait de conditions de travail et de rémunération très favorables. 

Le droit social n'est donc pas en cause : les deux sont françaises. Ce qui l'est c'est la façon dont la grosse a été gérée. Et, ce, d'ailleurs, sans qu'il soit question de syndicats. 

La réforme du droit du travail n'est donc peut-être pas ce qu'elle semble. Ce qui est en cause n'est pas le droit social français mais la façon dont il est utilisé par le dirigeant. Celui-ci a maintenant besoin d'une façon élégante de revenir sur les concessions qu'il a faites un peu légèrement. 

Mais, il n'y a pas que cela ! En effet, la principale différence entre les deux entreprises n'est pas le salaire, mais la motivation. Les employés de la petite société, son heureux et combatifs. Ceux de la grande, politiques. Il va falloir que le patron français comprenne qu'il ne pourra être éternellement sauvé par le gouvernement. Il va devoir faire son métier de patron ?

samedi 10 octobre 2015

Air France ou l'irrationalité humaine

En ce qui concerne Air France, il y a une certitude : il sera éternellement dans la panade. Et cela coûtera éternellement cher au contribuable. Voilà ce que disait un interviewé de France Culture. 

L'explication est simple. C'est le prestige. Le transport aérien est une question de statut pour une nation. Et il est prestigieux de travailler dans l'aviation. Si bien que la logique économique n'entre pas en jeu et que l'offre est systématiquement supérieure à la demande. Dans le foot et la presse, l'oligarque prend la place de l'Etat. Le résultat est le même.  

(Cela explique peut être aussi pourquoi le polytechnicien a été longtemps mal payé ?)

Quelles sont les limites de l'homme ?

Où est-ce que votre corps s'arrête, où commence-t-il ? L'homme est environné d'un nuage de microbes, qui lui est propre, et qui, d'ailleurs, peut trahir sa présence après qu'il ait quitté un lieu. Si cette empreinte n'est pas encore utilisable par la police, car trop vite brouillée, elle en dit long sur les limites de la science, et de notre pensée. 

En effet, la science a besoin de limites. La mécanique classique, par exemple, travaille sur des "corps". Or, ils n'existent pas. On ne sait pas définir exactement un homme, un pays, la mer ou un électron. La science ne peut donc manipuler que des approximations. En conséquence de quoi, ses applications sont réduites. Un modèle déduit de la science ne peut pas prétendre nous imposer notre comportement. Ce ne peut qu'être une inspiration à l'action. 

vendredi 9 octobre 2015

Dissociation d'idées

Rémy de Gourmont avait pour spécialité la "dissociation d'idées". Il avait noté que notre esprit associait mécaniquement des idées entre elles, et que cela pouvait avoir des effets regrettables. Par exemple, de son temps, "guerre"  était associée implicitement à "revanche". D'où l'utilité 

C'est un des grands thèmes de mon dernier livre. Une association d'idées malheureuse peut expliquer que "ça ne marche pas". Seulement l'affaire n'est pas aussi simple que cela. Nous faisons beaucoup de choses sans nous rendre compte qu'elles résultent d'idées plus ou moins bien associées. Tout cela est inconscient. 

La vie en société permet de faire émerger ce qui ne va pas. Soit par le mécanisme du paradoxe : on découvre que la réalité ne semble pas se comporter logiquement ; soit parce que quelqu'un nous dit que notre vision du monde est biaisée. 

(J'ai découvert Rémy de Gourmont, apparemment un grand écrivain, grâce à France Culture.)


Numérique : le retour d'Orwell ?

Discussion avec Hervé Kabla. Tous les deux nous avons choisi de publier numériquement pour un petit groupe de lecteurs. Faire plus grand nous amènerait, avouons-le, à perdre la liberté de notre propos. 

Paradoxal ? Internet et le "numérique", on nous disait que c'était la liberté. Et c'est devenu l'Omerta. On ne peut plus faire la fête aujourd'hui comme du temps de sa jeunesse, me disait un expert en SI. Car, le dérèglement est pris en photo, se retrouve sur la place publique, et vous nuit toute votre vie. 

J'entends maintenant que l'on regrette la télévision de De Gaulle : elle permettait l'impertinence, et la contradiction, et "la culture" la plus exigeante était accessible à tous... Je me souviens de ma déception lors de l'arrivée des "Radios libres". Je m'attendais à l'inconnu. Or, c'était de la musique commerciale habituelle, en boucle. Avec de la publicité. "Libre" ? Marketing !

Curieux. Tout comme chez Orwell. 1984. Les mots ont le sens inverse de ce qu'ils veulent dire. Autre forme de totalitarisme ? 

Et si c'était une bonne nouvelle ? Si nous ne sommes pas libres, nous pouvons le devenir ! Et quel plus beau projet peut-on avoir dans une vie ? 

jeudi 8 octobre 2015

Microsoft : le retour ?

Nouveaux produits de Microsoft : revues excellentes. (Exemple.) Tout ce qui ne marchait pas semble maintenant aller : système d'exploitation, mobile, PC. Faudrait-il à nouveau se méfier de Microsoft ? 

Si c'est le cas, cela pourrait venir d'une qualité que l'on prête peu à Bill Gates : l'humilité. 

Scandale VW : histoire d'un changement raté ?

Curieuse histoire VW, si je comprends bien ce que dit le Financial Times. Cela démarre avec un premier scandale, cette fois de corruption (bravo l'Allemagne ?), que l'équipe de management de l'époque tente d'utiliser pour "changer la culture" de l'entreprise, mais se fait prendre en contre, et sortir. Une nouvelle équipe est installée. Dorénavant, les mauvaises nouvelles ne passent pas. 

En même temps se pose la question du Diesel, trop polluant pour les normes américaine. La première équipe de management estime que la technologie maison n'est pas la bonne, qu'il faut emprunter celle de Mercedes. Une insulte. La seconde équipe de management redonne le développement du moteur aux spécialistes internes, qui vont devoir tricher pour arriver à leurs fins. 

Où l'on voit qu'une culture ne se change pas par la force ? Mais qu'il y a un sérieux besoin de changement, la culture de VW étant devenu un handicap ? 

mercredi 7 octobre 2015

Phénomène Onfray

France Culture s'interroge sur le "phénomène Onfray". Du mystère de la popularité. Il y a quelques années je l'entendais disserter des Grecs. J'en ai retenu qu'à côté de la pensée officielle, puritaine et sinistre, qui fait de l'être humain un coupable de naissance, il y avait une pensée du bonheur et de l'épanouissement de l'homme. Puis il a progressé dans son travail d'analyse, jusqu'à notre temps. Ce qu'il y avait de curieux, c'est qu'il parlait moins de la philosophie que de la vie de ses personnages. Vie "pleine de trous", comme on dit dans ma famille. D'où un sentiment très agréable. Non seulement il ne semble pas extrêmement bien maîtriser son sujet, mais il tourne en ridicule les plus grands penseurs de notre temps. Du coup, je me sens extrêmement intelligent. 

Marcel Gauchet disait qu'il s'agissait d'une résurgence de la philosophie de droite, tuée par la collaboration. J'ai entendu aussi un journaliste de "l'Obs" se demander si être "contre", c'est une pensée. 

Je me demande si, avec toutes ses maladresses, Michel Onfray ne fait pas quelque chose de bien plus radical. Il montre que la pensée dominante, celle de Platon, Kant, Hegel, Marx, Sartre et les autres, est une pensée totalitaire de l'absolu qui a pour seul objet d'être un opium du peuple. Etre contre peut alors être un programme. C'est celui d'un autre mouvement de pensée, des Socrate, Bergson, Camus, Arendt et autres. Ils ne nous disent pas ce que nous devons faire. Mais qu'il n'y a pas d'idée absolue, à laquelle l'homme doit être asservi. C'est une pensée de liberté. Liberté, qui est penser par soi-même. C'est aussi le programme des Lumières, et de la 3ème République. 

Michel Onfray fait tomber de son piédestal l'intellectuel. L'intellectuel est nu, dit-il. Il lui retire son droit de penser à notre place. Et il montre, par l'exemple, que penser n'a rien de compliqué. Nous pouvons tous être des philosophes. Mais Michel Onfray n'est que l'hirondelle du printemps. Il n'est pas la cause d'un mouvement. Il n'est que la résultante de la faillite de la pensée dominante. 

Uber, mouche du coche ?

Uber attaque le partage de voiture. Il rencontre un problème algorithmique qui m'aurait plu dans ma jeunesse : optimiser le parcours de la voiture pour maximiser son remplissage. Ce qui est difficile, j'imagine : non seulement il faut tenir compte des distances, mais aussi du trafic, qui change sans cesse. Mais, cela ne va-t-il pas décourager le candidat au partage, contraint au détour ? Pourquoi être aussi compliqué ?, me suis-je demandé. Simplement pour payer les services d'Uber ! (Article du FT.) 

Curieuse histoire. Uber semble avoir autant de stratégie qu'une mouche contre une vitre. Il attaque tous azimuts. Et surtout, il n'a pas l'initiative. C'est d'ailleurs ce qui caractérise tous les spécialistes du numérique. Ils sont plus méchants que subtiles. Seconde question : que va devenir le marché de la voiture ? L'article cite un esprit supérieur du MIT. Il explique que les voitures ne sont utilisées qu'à 5%. Donc on peut en réduire le nombre par 20... Quelqu'un de moins intelligent aurait peut-être dit que la voiture a d'autres usages que ceux envisagés par le MIT : la disponibilité a un prix, de même que le prestige de la possession. Sinon pourquoi acheter des BMW ? En outre, il se peut que ce soit ceux qui ne peuvent pas se payer de voiture qui partagent. Et si c'était la pauvreté qui faisait la fortune d'Uber ? En tout cas, cela semble signaler qu'il y a des bouleversements à attendre dans le domaine des transports. Et qu'ils sont, qui sait ?, plus le fait de mouvements sociaux que technologiques. 

mardi 6 octobre 2015

Bushismes

Bushisme. Je découvre. Certainement avec retard. George Bush semble avoir une exceptionnelle mauvais maîtrise de la langue. Il est non seulement victime de lapsus, mais il emploie un mot pour un autre. 

Pour n'importe qui d'autre, un tel défaut aurait été un handicap fort. Pourquoi cela n'a-t-il pas été le cas pour lui ? Lui qui était le "commander in chief" de la plus puissante armée mondiale, et qui s'en ventait, et qui a utilisé ses pouvoirs sans complexes ? Et s'il avait réussi justement du fait de ses défauts ?

(Mon favori : "nucular power pants", les pantalons à énergie nuculaire. Ils mériteraient d'être inventés.)

L'histoire est-elle cyclique ?

Le titre de mon dernier livre est arrivé par hasard. C'est une autre façon de parler de changement. Mais, elle semble bien meilleure que la première. Je découvre, cela me surprend, un sentiment général que "ça ne marche pas". 

En fait, ça n'a pas toujours été le cas. Mes parents semblaient penser que tout "marchait". Pas tant leur vie, d'ailleurs, que la société, voire le monde. En fait, eux aussi avaient connu une période où "ça ne marchait pas". L'avant guerre et la guerre. Même avant la guerre, les temps étaient beaucoup plus durs qu'aujourd'hui, surtout lorsque l'on appartenait à une famille nombreuse et modeste. On mourrait d'ailleurs encore souvent en bas âge. Et puis l'après guerre est arrivée. Non seulement la médecine a fait des progrès colossaux, non seulement il y a eu un déluge d'innovations sans précédent, mais on semblait savoir ce qu'était le bien, comment orienter la marche du monde. La vie avait un sens.

L'histoire humaine serait-elle faite de cycles ? Les Chinois semblent avoir eu cette intuition. Leur histoire présente des cycles de plusieurs siècles. Les anciens Égyptiens auraient connu un phénomène similaire, mais avec des phases de calme plat très longues. Quant aux peuplades "primitives", elles paraissent avoir établi un équilibre quasi stable avec leur environnement. Pas très scientifique tout cela, mais, si c'est juste, cela signifierait que le cycle est peut être lié à la civilisation. Et que l'Occident aurait la particularité d'avoir des cycles courts, de quelques décennies. L'origine du cycle pourrait être l'éloignement de l'homme avec son environnement. L'homme passe par des phases "d’exubérance". Il croit que tout est permis. Tout semble lui réussir. Mais il est rattrapé par la "réalité", et tout s'effondre. Denis Meadows a trouvé une formule pour décrire cela : l'Occident est soumis à la "bulle spéculative". 

(Il pense que l’éclatement de celle que nous vivons, elle a pris une dimension planétaire, devrait nous être fatal. Par ailleurs, il existe une théorie économique qui parle de cycles.)

lundi 5 octobre 2015

Escroquerie : test de dépistage

Après un billet sur la confiance, un autre sur la tromperie, son envers. Et si nous étions des escrocs ? Si nous le sommes, nous ne le savons pas. Robert Trivers dit que le bon menteur est convaincu de ce qu'il affirme. C'est ce qui le rend persuasif. 

En fait, pour savoir si on l'est, il faut utiliser la méthode Bergson : comparer vos paroles et vos actes. Comme dans l'histoire du scorpion qui tue la grenouille, vos actes trahissent votre véritable nature. 

Mais pourquoi devrais-je faire un test de dépistage ?, me direz-vous. Parce que l'escroc étant partiellement inconscient, ses facultés sont diminuées. Il est donc facilement manipulable. 

Je me demande même si ce n'est pas l'arme qu'a utilisée la perfide Albion pour conquérir le monde, et disloquer l'Europe. Elle a peut-être bien su jouer sur les intérêts des hypocrites qui nous gouvernent pour leur faire essorer, à son profit, les populations qu'ils administrent. (Exemples : Europe et Waziristan.)

Le crime contre l'humanité est-il dans les gènes de l'Occident ?

Il y a quelque-chose d'étrange dans la pensée de Kant. D'un côté, il dit qu'il n'y a rien de pire que de considérer l'homme comme une chose (un moyen), de l'autre il bâtit sa philosophie sur le modèle de la mécanique classique, ce qui revient à considérer l'homme comme une mécanique, une chose. 

Et si c'était ses contradictions qui faisaient le véritable intérêt d'un philosophe ? C'est ce que pensaient les anciens Grecs : de la contradiction ("l'absurde") naît une nouvelle vérité. 

En tout cas, l'on a peut-être ici un vice de l'Occident. Comme le dit ce blog, son originalité est de croire à l'existence d'Idées, de vérités absolues. Et cela amène naturellement à considérer la nature, l'homme en particulier, comme une chose. Et une chose, ça se détruit à volonté. L'homme pour commencer : c'est le crime contre l'Humanité. La nature, ensuite. L'Idée c'est le suicide ? 

(Camus, avec quelques autres, parle de "nihilisme".)

dimanche 4 octobre 2015

Le paradoxe VW

Le scandale qui secoue actuellement VW me rappelle des souvenirs personnels. Curieux que je n'y ai pas pensé plus tôt. J'ai travaillé à plusieurs reprises avec des ingénieurs allemands. A chaque fois, ils me disaient quelque-chose comme : les constructeurs français sont des gougnafiers. S'il y a un retard, en France, dans la conception d'une voiture, du fait d'une question technique, on triche ; en Allemagne tant que le problème n'est pas résolu, on n'avance pas. J'avoue avoir été si convaincu, que j'ai décidé d'acheter une voiture allemande. (Avant de comprendre qu'il ne servait à rien d'avoir une voiture, puisque je ne l'utilise pas...)

A ce sujet, les constructeurs français ont-ils triché ? Si c'est le cas, ça ne semble pas être sur la même échelle qu'en Allemagne. Dans ce pays, quand on fait quelque-chose, on le fait industriellement...

Comment expliquer ce curieux paradoxe ? Toute la communication allemande est une communication technique, démontrant quasi mathématiquement l'excellence du produit. Cette communication ne signifie probablement rien d'autre que : nous, Allemands, nous sommes des êtres supérieurs. Et cela déclenche naturellement un phénomène qu'a décrit Robert Merton : "l'innovation". Autrement dit, quant les objectifs que l'on se donne sont trop difficiles à atteindre, on tend à tricher avec les moyens que la société juge légaux d'employer. 

Drahi ou la roche tarpéienne ?

Trente milliards de dettes. C'est ce qu'avait, il y a quelques temps, M.Drahi. (On en serait maintenant à 42 milliards.) On approche le niveau qui fait s'inquiéter l'investisseur, me suis-je dit. Et, effectivement, peu de temps après je lisais que cela semblait le cas

Alors, M.Drahi, la roche tarpéienne est proche du Capitole ? Morale simpliste. Le plus intéressant dans cette histoire est ce que cela révèle de la nature humaine. Le bon investisseur sent quand il ne faut pas aller trop loin, me disait un trader. Quand la bulle spéculative est sur le point d'éclater, c'est là que le métier devient excitant !

Pourquoi les bulles éclatent-elles ? Un phénomène mystérieux, irrationnel, "la représentation collective", fait que, brutalement, l'investisseur prend peur. Le bon trader est un fin psychologue. 

(Quant à M.Drahi, les gens qui lui ressemblent pensent la plupart du temps pouvoir marcher sur l'eau. Ils croient à ce qu'ils disent. C'est ce qui les rend convaincants. Au moins pour le menu fretin de la spéculation. Sont-ils les idiots utiles des grands requins ?)

samedi 3 octobre 2015

Allemagne : mauvais génie de l'Europe ?

Aujourd'hui, beaucoup d'économies européennes souffrent des mêmes maux que ceux de l'Allemagne de l'Est après l'introduction du mark de l'ouest : chute du PIB, désindustrialisation, taux de chômage élevé, déficit de la balance commerciale, émigration. Ce n'est pas un hasard.
Et si l'Allemagne était le mauvais génie de l'Europe ?, dit un universitaire italien. La raison en serait un mécanisme simple. Il viderait la substance de tout ce qu'il touche, pour en faire profiter une partie de l'Allemagne. Systémique pour débutant.

Cela commence avec l'Allemagne de l'Est. Principe diabolique : un mark de l'Ouest = un mark de l'Est (jusque là le rapport était de 4,44). L'industrie de l'Est n'est plus compétitive. Liquidée. Du coup, il faut faire vivre sa population des subsides publiques. Gagnant ? L'industrie de l'Allemagne de l'Ouest. 

Apparemment, nous serions tous des Allemands de l'Est. Le taux de change de nos monnaies serait devenu relativement trop élevé par rapport à celui de l'Allemagne. Du coup, perte de compétitivité de notre industrie, qui sombre, au profit de l'allemande.

(Remarque. Ce que l'article ne dit pas, c'est que l'Allemand de l'Ouest ordinaire a été perdant : ses impôts ont dû maintenir à flots des Ossies au chômage. Ce qui peut expliquer les réformes de M.Schröder. Mais aussi le fait qu'elle ne veuille pas nous subventionner : elle a sacrifié sa propre population.)

Argenteuil

Un samedi, un hasard de la SNCF m'a fait explorer en bus les environs d'Argenteuil. Cela faisait presque 40 ans que je n'étais pas passé dans la ville de mon enfance. Et ce que j'ai vu m'a glacé. J'ai eu l'impression de passer dans Detroit. Ce qui, de mon temps, était des rues commerçantes, grouillantes de vie, n'était maintenant plus que vitrines condamnées. Plus loin, à la place du stade que je connaissais, des équipements sportifs laids et coûteux, puis des HLM tristes mais qui avaient fait l'objet, visiblement, d'investissements récents, finalement des zones pavillonnaires un peu misérables, des constructions anciennes plus ou moins bien entretenues, avec de temps à autres des empilages de pièces mécaniques. 

J'ai eu le sentiment que la vie s'était enfuie. 

vendredi 2 octobre 2015

Liège, la modeste

Je rends visite à Liège, à l'occasion d'une formation. Elle est organisée par la CCI. Très dynamique, très innovante, et très petite CCI, qui n'a rien à voir avec les nôtres. Ce n'est pas une émanation de l'Etat, mais une entreprise privée ! 

Liège m'a surpris. 200.000 habitants seulement, mais une gare de TGV qui fait pâlir toutes les nôtres, un aéroport, où l'on déjeune très bien, et une équipe de foot, le Standard de Liège, parmi les meilleures de Belgique ! Impensable chez nous. Peut-être cela est-il un souvenir des heures de gloire de Liège ? Car elle fabriquait l'acier et l'armement. 

Dans un exercice, j'ai demandé aux dirigeants participants de définir les caractéristiques de la Wallonie. La principale, à l'unanimité : "modestie". Et, effectivement, j'ai eu la surprise de voir des managers de transition expérimentés me demander conseil. Décidément, impensable chez nous. Et si la Wallonie était un peu trop modeste ?, me suis-je dit.

Le marché moteur à inégalités

En MBA, au début des années 90, on enseignait que l'entreprise était le mal, et le "marché" le bien. Il fallait sortir l'argent des entreprises pour le donner au marché, qui en ferait une allocation optimale. On disait aussi que le marché créait l'innovation. 

Ce qui est étonnant est que les gens qui disaient cela étaient des scientifiques, alors que ce qui était présenté comme une évidence ne repose sur rien. Jusqu'à preuve du contraire, le "marché" n'est rien d'autre que ce que dit son nom : une place d'échange. Et la source de la création humaine, qui maintenant a quelques millénaires, n'a rien à voir avec le marché. Tristement, la guerre, notamment la dernière, semble être bien plus efficace que lui pour provoquer la créativité humaine.

Résultat : consciemment ou non, tous ceux qui ont les leviers du monde ont appliqué cette théorie.

Comme le dit Bergson, la raison de cette théorie n'est pas à chercher dans ses paroles, mais dans ses conséquences ? La théorie du marché consiste à sortir le maximum de cash de l'entreprise, surtout en réduisant ses effectifs et les salaires de ses employés, pour le donner aux actionnaires. Car les actionnaires c'est le marché (financier). 

Il n'y a pas besoin d'avoir un prix Nobel pour constater qu'une société ne peut pas vivre éternellement sur ce principe. 

jeudi 1 octobre 2015

Le marché, c'est la guerre ?

Mon précédent billet parlait de l'euro. Beaucoup de gens disent que nous serions mieux sans. Ce qu'il y a de curieux, c'est que nous semblons incapables de raisonner à long terme. Nous sommes enfermés dans l'anxiété du 0,5 % de croissance. Nous avons été kidnappés par la vision myope des économistes. Et si cet aveuglement nous amenait au chaos ? 

Après guerre, on pensait loin. Et, à tort ou à raison, beaucoup croyaient que la finance folle avait créé les conditions de la barbarie. C'est la thèse de Karl Polanyi. Elle semble avoir été partagée par les gouvernements de l'époque, qui ont tenté de contrôler la finance pour qu'elle n'entre plus en conflit avec la société. Leur système n'a pas fonctionné. Mais il serait tout de même bien que l'on se remette à envisager le long terme, et à se demander quelles peuvent être les conséquences de nos désirs. 

Quant à l'euro, je pense de plus en plus que c'est une bonne chose. Voilà pourquoi. Selon moi, la cause de la crise est l'Allemagne. En se comportant de manière irresponsable (absorption maladroite de l'Est par l'Ouest, puis dévaluation compétitive), elle a mis le reste de l'Europe en difficulté. Enseignement : les ajustements sont douloureux, en conséquence, il faut les anticiper, les préparer et les accompagner. Si nous comprenons ceci, il est possible que les crises soient beaucoup moins violentes que dans un marché financier laissé à lui-même. 

Faut-il sortir de l'euro ?

Sortir de l'euro serait-il une bonne idée ? Une synthèse de quelques idées. 
  1. Depuis l'origine les économistes pensent cette monnaie unique stupide. On en voit aujourd'hui les conséquences. L'Allemagne procède à une "dévaluation compétitive", avec Schröder. Elle prend l'avantage sur le reste de l'Europe et la force à faire de même, c'est à dire à réduire ses salaires. Ce qui paraît injuste. Car toutes les statistiques montrent que le revenu du gros du peuple fait du surplace depuis des décennies. Pourquoi le peuple paierait-il pour les erreurs des autres ? Et, en plus, ceux qui se sont enrichis profiteraient de son sacrifice ? (Puisque qu'ils possèdent le capital, et récoltent les bénéfices liés à la réduction des coûts de l'entreprise.) Il semble évident que si, mais c'est un si compliqué, la zone euro parvenait à sortir de l'euro, ses pays, en dévaluant, retrouveraient leur compétitivité. Cela ferait immédiatement un bien fou à beaucoup de gens. 
  2. Mais à long terme ? Lorsque des pays font un très gros volume de commerce ensemble, une monnaie unique devient nécessaire. Car il est quasi insupportable de devoir subir des dévaluations à répétitions de ses partenaires. Il semble que cette raison soit importante en ce qui concerne l'euro. 
  3. Mais l'euro n'est pas un projet économique ! Paul Krugman n'a rien compris. Nouvel exemple du lavage de cerveau ambiant, qui vise à nous faire croire que tout est économique. L'idée de l'euro était, très certainement, de placer les Européens devant le fait accompli, qui les force à la solidarité. Car l'origine du projet européen, c'est la guerre. Mais, comme dans tout changement, ce n'est pas celui qui a l'idée qui le met en oeuvre. Celui qui le met en oeuvre a d'autres intérêts que son inventeur. La zone euro a probablement grossi beaucoup trop vite, pour qu'elle puisse s'adapter harmonieusement et sans crise. Notamment grâce aux manœuvres de la perfide Albion, qui, depuis près d'un millénaire, ne craint rien autant qu'une forteresse Europe. Ce à quoi s'ajoute les forces du marché. Il sait, pour l'entreprise comme pour les nations, qu'il y a énormément d'argent à gagner en démantelant les structures sociales. Ce qui amène à se demander si ces forces destructrices ne sont pas aussi celles qui provoquent les guerres... D'ailleurs, les concepteurs de Bretton Woods ne pensaient-ils pas que la guerre était due, justement, à ces taux de change flottants ? 
  4. Un débat sur l'euro est bienvenu. Car la politique européenne n'est plus que petits arrangements entre amis, imposés, par la manipulation plutôt que la force, au peuple. Il n'y a plus de démocratie. D'ailleurs, c'est un cercle vicieux. Plus nos amis prennent des décisions malheureuses plus ils craignent qu'elles se sachent. Aujourd'hui, ils sont peut-être dans une impasse dont ils n'arrivent pas à se tirer. Mais ce processus démocratique n'est-il pas dangereux ? Ne peut-il pas être kidnappé par un populisme quelconque ? Oui, le risque est grand. Car, nos élites ont voulu que nous ne pensions pas. Que nous absorbions leurs idées, sans discuter. Aujourd'hui, elles se trouvent fort dépourvues. Car ces idées ne marchent pas. Le peuple n'est pas content. Et il n'a pas été formé pour faire ce qu'il pourrait avoir envie de faire.