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vendredi 5 septembre 2008

Comment implanter une nouvelle technologie

Le blog de Bertrand Duperrin dit beaucoup de choses importantes concernant la mise en œuvre d’une application Web 2.0. Des choses que l’on a longtemps ignorées. Surtout : c’est l’homme qui est premier, pas la technique. C’est le cas pour toutes les applications de la technologie. Jusqu’à aujourd’hui, à l’image de Frederick Taylor, nous avons cru que la technique devait guider l’homme. Taylor avait conçu des procédures optimales. Les ERP les ont automatisées. Mais ça ne marche pas. Un cabinet de conseil observait, dans une analyse du désastre qu’a été la mode du CRM, que l’erreur des acquéreurs était de croire que le logiciel « allait diriger l’entreprise à leur place ». La technologie a de grands mérites. Mais ils ne sont pas où on le croit :
  • Tout d’abord c’est une idée nouvelle. Une lumière dans l’obscurité. Le CRM, par exemple, permet d’ouvrir de nouveaux modes de relation au marché, et d’éliminer des tâches coûteuses et sans intérêt.
  • Une fois que l’idée d’une transformation a pénétré le crane de l’entreprise. Elle doit chercher comment remodeler son organisation, avec ses forces et ses faiblesses, pour tirer partie de l’idée. Règle : utiliser la technologie en appui de l’homme ; de façon à mettre en valeur ses atouts.
Deux exemples :
  • Un ami dirigeant. Il y a peu, il gérait une entreprise de BTP. Multiples chantiers. Son anxiété : leurs retards. Il installe un système d’information, demande aux chefs de chantier d’y enregistrer leur avancement. Rien ne se passe. Il demande aux chefs de chantier d’appeler en fin de soirée le répondeur de son assistante, elle saisira l’avancement. Succès. Tout le monde est enchanté.
  • Fin des années 80. Je rédige la stratégie robotique de Dassault Systèmes. À l’époque on disait que les Japonais allaient tuer l’industrie occidentale, grâce à leur robotisation à outrance. Nous devions prendre les devants. Ce que j'ai trouvé : si les robots étaient un flop monumental en Occident, c’est parce qu’ils devaient remplacer l’homme ; s’ils étaient un succès au Japon, c’est parce qu’ils y aidaient l’homme. Explication. Un robot qui veut remplacer un homme doit être très compliqué (6 articulations), donc très fragile. Lorsqu’il tombe en panne, ce qui est fréquent, personne ne sait le réparer, surtout pas l’ouvrier qu’il est supposé remplacer. Un robot qui aide l’homme est simple (3 articulations). S’il tombe en panne, l’homme (que l’on ne veut pas éliminer, et qui est donc bien formé), va à son secours. Quand le robot a été mis au point, on en généralise l’usage, et on le complexifie.

Conclusion :

  • La technologie nous donne l’idée du changement.
  • Mais elle doit s’adapter à la nature (apparemment irrationnelle) de l’homme, et du groupe humain.

Références :

  • Sur Taylor : KANIGEL, Robert, The One Best Way: Frederick Winslow Taylor and the Enigma of Efficiency, Penguin Books, 1999.
  • Sur les ERP, comme « processware » (mise en œuvre des processus tayloriens) : DAVENPORT, Thomas, Mission Critical: Realizing the Promise of Enterprise Systems, Harvard Business School Press, 2000.
  • Le CRM : RIGBY, Darrell K., REICHHELD, Frederick F., SCHEFTER, Phil., Avoid the Four Perils of CRM, Harvard Business Review, février 2002.
  • On retrouve dans l’exemple des robots un trait culturel : l’entreprise française veut éliminer l’homme, il est au centre de l’entreprise japonaise. Le changement peut tuer.

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