Les classes moyennes sous pression, étude du CREDOC : les conditions de vie des classes moyennes se sont-elles détériorées ?
Lecture rapide, donc incorrecte. Ce que j’en ai retenu, toutefois.
- Les classes moyennes sont définies comme tout ce qui gagne entre 75 et 150% du niveau de vie médian. Pourquoi-pas. Avec cette définition, on constate qu'elles croissent, contrairement à ce qui se passe ailleurs. Mais, depuis les années 90, le niveau de vie des classes moyennes évolue moins vite que celui de la population dans son ensemble.
- Plus intéressant, et plus mystérieux, l’étude définit plusieurs niveaux de dépenses : les dépenses contraintes (logement, eau, gaz…), les dépenses incontournables (alimentation, santé…), ce qui reste (loisirs, épargne…). Les dépenses contraintes (on ne dit rien sur les autres), ont augmenté terriblement pour les plus démunis : elles sont passées de 24% à 48% pour la couche la plus défavorisées, contre de 20 à 27% pour la couche la plus favorisée (en 25 ans).
- On observe aussi que, sur le long terme, l’inflation est légèrement plus défavorable aux moins favorisés touchant un peu plus sérieusement ce qu’ils consomment.
L’étude semble conclure qu’il n’y a pas eu d’appauvrissement des classes moyennes, comme on le dit parfois. Cette impression pourrait venir de ce que la fin de la croissance des 30 glorieuses a rompu avec l’enrichissement rapide d’alors : dorénavant les écarts entre classes de revenus ne semblent plus pouvoir se combler.
Sous-jacente est la question de l’inégalité. Un indicateur : le pourcentage de la richesse nationale détenue par le % le plus riche. Aux USA et en Angleterre, il est passé de 8 à 17% et de 7 à 13%, respectivement, en une trentaine d’années, en France il a décollé plus récemment, passant de 7 à 8,5% en 20 ans. Si l’on introduit la notion de contrainte dans les dépenses, il y aurait eu augmentation des inégalités ces dernières années (au moins de 96 à 2003).
Mais le plus surprenant ne semble pas avoir attiré l’attention des rédacteurs de l’étude :
- Alors qu’il était en croissance auparavant, le taux d’accession à la propriété a notablement chuté, depuis 1990 pour approximativement 80% de la population (catégorie la plus pauvre : de 54 à 34%, moyenne supérieure de 56 à 51%). Ce qui explique notamment le différentiel d’inflation et de dépense contrainte : le coût du logement ayant crû (bulle immobilière), les non propriétaires ont été sérieusement touchés.
- La population est étonnamment atteinte par le chômage : un quart de la tranche la plus riche et ¾ de la tranche la plus pauvre l’ont connu. Et cela pour une population qui compte un tiers de fonctionnaires ! À cela s’ajoute une croissance continue du temps partiel (39% pour la catégorie la plus pauvre).
Conclusion ? L’étude fait une erreur idéologique. L’enrichissement (l’accumulation de biens matériels) n’est que secondaire dans la vie humaine, le PIB n’est pas une mesure de bonheur. Ce qui compte pour le Français est ailleurs : c’est probablement plus la possibilité de pouvoir posséder quelque chose à soi, et surtout de ne pas être soumis à l’aléa de l’emploi. Et, pour ces critères, notre sort s’est collectivement, massivement ?, dégradé (à l’exception peut-être des classes supérieures de fonctionnaires).
Compléments :
- C’est pour cela que le modèle libéral ne nous convient pas : il nous demande de sacrifier la stabilité de notre vie à la performance économique, en échange d’un enrichissement collectif qui profitera de manière disproportionnée à une minuscule élite, et qui, de toute manière, n’est qu’un souci annexe. Une illustration de l’injonction que fait l’économie à l’homme : Baiser de Judas ?
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