Conversation récente. Beaucoup de gens donnent des conseils, ou des services, que l’on n’est pas prêt à payer. Explication ? Quelques théories :
- Selon Kenneth Arrow ce qui est important est gratuit, à commencer par les soins médicaux vitaux. Nous n’avons pas confiance en celui qui est poussé par l’intérêt. (Les conseilleurs ne doivent pas être payés.)
- Pour Robert Cialdini, une des lois humaines est de rendre ce que l’on a reçu. Le fait de ne pas respecter cette loi peut sous-entendre que la société se délite, victime d’un individualisme qui ne sait plus que prendre, d’une société de « droits de l’hommes » qui n’a plus de devoirs.
- Selon le même plus quelque chose est cher, plus il a de la valeur. Notamment du fait du principe de cohérence : nous apprécions d’autant plus notre achat qu’il a été un difficile investissement. La contradiction entre points 2 et 3, et point 1, s’explique peut-être parce des circonstances différentes. Dans le premier cas, on serait dans la logique de la famille ou de la société comme groupe, dans les deux autres, dans la logique du marché, de l’échange de peu d’importance.
- La culture française est une culture d’assistanat : nous n’avons pas l’habitude de payer, tout est gratuit, tout nous est donné par l’état, ou par notre entreprise. Peut-être aussi, il y a l’horreur du secteur marchand : celui qui lui appartient ne peut-être qu’un escroc, il n’a pas besoin qu’on le paie pour s’enrichir.
- La culture française est aussi une culture de l’intérêt personnel : le conseilleur tend peut-être à faire ce qu’il croit bon, à répondre au besoin réel plutôt qu’au besoin perçu. Il donne un conseil dont le conseillé ne voit pas la valeur. Par contraste l’Américain cherche à maximiser ses revenus, il se demande donc quelle ficelle tirer pour que son client lui remette ses économies (d’où l’énorme intérêt de l’université américaine pour la manipulation – cf. les travaux de R.Cialdini cité ci-dessus).
Que faire ? 2 solutions observées :
- Ne donner qu’à ceux qui peuvent donner. Pour ne pas perdre son temps, il faut vite mettre l’autre en situation de donner quelque chose, même sans valeur. S’il ne fait pas cet effort, l’abandonner immédiatement.
- Ce qui est donné, doit avoir une contrepartie, dont le prix rentabilise le don. Dans beaucoup de professions, la vente de produits est précédée par un travail d’expertise gratuit. C’est l’expert qui fait l’intérêt unique que porte le client au fournisseur, mais c’est le produit qui rémunère le service.
"Les conseilleurs ne sont pas les payeurs" est un adage courant.
RépondreSupprimerIl faut introduire, je pense, une nuance entre les différentes formes d'assistance intellectuelle: conseiller bien sûr, mais aussi renseigner, orienter, éduquer, entraîner, cadrer, encadrer, recadrer, coacher, etc. Sans oublier abuser ou désabuser, qui relèvent également de ce type de prestation.
Au final, le français est une langue assez riche pour exprimer tout un tas de prestations de "conseil". A chacun de trouver le terme qui convient le mieux - et la prestation, gratuite ou non, qui peut s'y associer.
Effectivement, ça apporte une autre façon de voir la question...
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