Elle est fort à la mode et McKinsey est son prophète. Conseils de Dani Rodrik pour bien la mener :
Premièrement, une politique industrielle est davantage un état d’esprit qu’une liste de politiques spécifiques. Ceux qui la mettent en œuvre avec succès savent qu’il est plus important de créer un climat de confiance entre le gouvernement et le secteur privé que de fournir des incitations financières. Par le biais de comités de réflexion, de forums de développement fournisseurs, de comités consultatifs sur les investissements, de tables rondes sectorielles et de fonds d’investissements mixtes privé-public, la collaboration a pour objectif de compiler les informations sur les possibilités d’investissement et les goulots d’étranglement. Il faut pour cela un gouvernement qui ait un pied dans le secteur privé, sans pour autant être à sa solde.
Deuxièmement, une politique industrielle doit user à la fois de la carotte et du bâton. Compte tenu des risques et du décalage entre les avantages sociaux et privés, l’innovation doit s’accompagner d’une rentabilité – de retours sur investissements supérieurs à ceux que produisent les marchés. C’est pour cette raison que tous les pays ont un système de brevets. Mais des incitations sans restrictions ont aussi leurs coûts : elles peuvent provoquer une hausse des prix pour les consommateurs et bloquer des ressources dans des activités improductives. C’est pour cette raison que les brevets ont une durée limitée. Le même principe doit s’appliquer à toutes les mesures prises par un gouvernement pour donner naissance à de nouvelles industries. Les incitations doivent être temporaires et conditionnées aux résultats.
Troisièmement, les acteurs d’une politique industrielle doivent se souvenir qu’elle a pour but de servir la société dans son ensemble, et pas seulement les bureaucrates qui la gèrent ou les entreprises qui en sont bénéficiaires. Pour éviter les abus et l’appropriation, une politique industrielle doit être mise en ouvre de manière transparente et responsable, et être accessible autant à de nouveaux candidats qu’aux bénéficiaires en cours.
L’argument habituel contre l’adoption d’une politique industrielle est que les gouvernements ne sont pas en mesure de choisir les gagnants. Ils n’en sont évidemment pas capables, mais là n’est pas la question. Ce qui détermine le succès d’une politique industrielle n’est pas la capacité de distinguer les gagnants, mais la capacité de pouvoir se séparer des perdants – une exigence moins insurmontable. Le principe d’incertitude veut que même les politiques les plus optimales produisent des erreurs. L’idée est que les gouvernements reconnaissent ces erreurs et retirent leur soutien avant qu’elles ne deviennent trop coûteuses.
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