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mardi 17 août 2010

Globalizing Capital, Histoire du système monétaire international

Eichengreen, Barry, Globalizing Capital, Princeton University Press, 2008.

Le système monétaire international passe par plusieurs étapes :
  • Newton fait une erreur dans ses calculs de prix relatifs des métaux, qui va amener l’Angleterre à avoir pour seule monnaie l’or. Révolution industrielle, l'Angleterre est la super puissance économique mondiale et le monde adopte l’étalon or.
  • Il fonctionne jusque en 1914, en quelque sorte par un heureux hasard. L’Angleterre est à la fois le pays qui fournit son équipement (machines, bateaux...) au monde et qui lui prête, d’où équilibre de son taux de change. En outre celui-ci est la seule préoccupation de la banque centrale anglaise.
  • Ce n’est plus le cas après guerre. L’arrivée de la démocratie et des syndicats fait que de nouvelles préoccupations entrent en jeux (emploi, salaires) qui bloquent les ajustements de taux. De même la banque centrale doit jouer les prêteurs de dernier ressort et sauver le système bancaire quand il menace d’être en faillite. Les marchés financiers ne trouvent plus le système crédible. L’entre deux guerres sera une période d’instabilité et de crise.
  • Bretton Woods tire les conséquences de cette période agitée. Il prévoit un système d’ajustement des taux de change, le FMI qui supervise les politiques économiques nationales et fournit des financements, et un mécanisme de contrôle des flux financiers qui permette de tenir compte des intérêts humains. Contrairement à ce que l’on croit aujourd’hui, le système est mal conçu et tient par miracle. Seul le système de contrôles est relativement efficace. Mais il s’écroule sous la montée des flux de capitaux internationaux. Il semblerait que l'ensemble ait tenu tant que l’Europe et le Japon, en développement, ont accepté de payer l’effort militaire américain. Il a sombré quand ils ont jugé qu’ils avaient d’autres intérêts.
  • Et ce qui a suivi ressemble beaucoup à un nouveau Bretton Woods. Cette fois-ci, les pays émergents remplacent Europe et Japon pour financer le déficit et la consommation américains. Les nations ont adopté plusieurs types de gestion de leurs taux de change : ceux pour qui l’exportation jouait un rôle relativement faible ont des taux flottants ; l’Europe qui échange beaucoup entre soi a adopté une monnaie unique (l’équivalent de l’étalon or) ; ce qui reste a cherché à ancrer sa monnaie à celle d’un partenaire économique majeur.
Ce que montre surtout cette étude est que ce système est en changement permanent et que les nations s’y adaptent par essai et erreur. Une fois qu’une technique semble fonctionner elle est adoptée par tous. Par ailleurs, les pays ressemblent à des dominos : impossible de poursuivre seul une stratégie, fatalement on doit se plier au modèle qui s’est imposé chez les autres. Enfin, il existe une dimension majeure d’expérience : les institutions des pays s’adaptent progressivement aux exigences de la globalisation. Il y a apprentissage.

Commentaires :
  • Un livre qui n’a pas grand-chose à voir avec ceux d’économie. Ici pas d’équilibres automatiques et miraculeux, mais des changements permanents où l’on voit le rôle déterminant des variables humaines, non économiques, négligées par les économistes.
  • J’en garde l’image d’un système économique qui passe de déséquilibre en déséquilibre, et qui s’ajuste par crise. Nous sommes tous dépendants les uns des autres, les choix d’un pays pouvant devenir les nôtres, demain, par contagion (cf. le cas des réformes allemandes). Dans ces conditions l’autisme français, notre fermeture sur nous même, notre insensibilité aux autres, notre croyance en notre pouvoir, est suicidaire. Cela nous condamne à subir les bouleversements du monde. Il faut regarder ce qui se passe ailleurs, ce qui doit nous permettre d’intervenir pour éviter qu’un changement étranger ne nous soit défavorable. (Par exemple, il aurait peut-être été intelligent de donner un coup de main à l’Allemagne lors de sa réunification, ça nous aurait évité aujourd’hui de devoir subir sa politique de rigueur.) Et même lorsque nous ne pouvons pas influer sur le cours des événements, au moins en les voyant arriver nous pouvons nous y préparer.
  • Plus généralement, le monde n’a pas besoin de quelque dispositif miracle, mais d’un système d’ajustement dynamique qui cherche à trouver des solutions ad hoc aux problèmes que posent les transformations, imprévisibles, du monde.
Compléments :
  • Par ailleurs, ce texte montre que l’analyse de Galbraith sur la période de Bretton Woods était à la fois juste et fausse. Oui, l’économie américaine était tirée par ses dépenses militaires, mais, non, le système n’était pas stable, on n’avait pas trouvé la recette de la « société d’opulence ». 
  • Quant à la zone euro, elle semble avoir une vraie logique et être bâtie sur du solide, ayant été construite à une période particulièrement peu favorable. Ses obligations jouiraient d'un effet d'échelle (d'où peut être la spéculation qui a plombé les « PIGS »), ce qui en ferait une alternative forte à la dette américaine. Mais est-ce une bénédiction ?

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