L’injonction paradoxale, qui s’appelle double bind depuis
qu’elle a été étudiée par Gregory Bateson, consiste à placer une personne entre
deux obligations contradictoires, une consciente, l’autre non. Par exemple, un
avocat m’a parlé d’un manager à qui l’on a demandé d’augmenter la rentabilité
de son unité par réduction de ses coûts, ce qui était impossible. Mais impossible
de refuser, sous peine (implicite) de perdre son emploi ou d’être mal noté. Épuisement
à la tâche, et suicide.
La subtilité de l’art de l’injonction paradoxale est de la
construire sur ce à quoi la personne tient le plus, par exemple son sens de
l’honneur, l’amour qu’elle éprouve pour vous, le respect qu’elle doit à ses
parents, sa peur de la mort…
Mais, l’injonction paradoxale peut aussi être involontaire,
et c’est pourquoi elle est aussi dangereuse. Dans l’exemple précédent celui qui
a donné l’ordre était peut-être ouvert à d’autres solutions qu’une réduction de
coûts…
L’injonction paradoxale est d’autant plus effrayante que,
comme l’Escherichia coli, elle est présente à l’état latent dans notre
société. En effet, c’est une généralisation, par exemple, de la méthode qui consiste à
obtenir ce que les parents désirent de leurs enfants « si tu ne fais pas,
tu n’auras pas ».
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