Siegmund Warburg est un mythe en Angleterre. Ses idées ont
fait de la City la première place financière au monde, au moment où elle
sombrait dans la médiocrité.
Au siècle dernier il existait une forme de banque familiale,
juive ou protestante. Les membres de la famille la gèrent ensemble et utilisent
pour leurs affaires internationales des parents installés à l’étranger. Les
Warburg de Hamburg sont une sorte de dynastie financière, des vassaux des Rothschild.
Siegmund Warburg est un parent pauvre. L’entreprise
familiale lui fournit un emploi. Mais la montée du nazisme va changer sa
destinée. Après avoir pensé qu’Hitler apporterait un peu de dynamisme et de
jeunesse à une Allemagne ankylosée, il doit partir. Il choisit l’Angleterre par
défaut. Il y fonde une banque et s’associe avec d’autres Juifs qui ont connu
son sort. Les débuts sont difficiles. Le terrain étant fort occupé.
Il semble avoir pensé qu’un Juif devait le meilleur
de lui-même à la nation qui l’accueillait. Ainsi, il a voulu changer l’Angleterre. (La trouvait-il paresseuse et décadente ?) Selon lui, son avenir était européen. Il aurait aimé, au moins, régénérer ses entreprises en les fusionnant avec des multinationales allemandes. A défaut, il a été à l’origine d’une finance
européenne : les Eurobonds, obligations en devises étrangères.
Ce sont elles, qui, en peu d’années, vont faire de la City la première place
financière mondiale. Il déclenche aussi un vague de fusions acquisitions. Elle
concentre l’industrie anglaise, et la met en partie sous la coupe de l’étranger.
Il désirait lui donner du sang neuf. Ce sera un échec. Il faudra attendre Mme
Thatcher pour sortir le pays de sa torpeur.
Tous ces exploits lui ont peu rapporté. Il n’était d’ailleurs
pas intéressé par l’argent. Il voyait la finance comme un art. Il aurait aimé
créer une petite banque d’un très haut savoir-faire, et d’une grande éthique,
qui durerait. Mais elle ne lui a pas survécu. Elle a
été victime de la transformation de la finance mondiale. Finance globalisée
dont il a été le pionnier, et dans laquelle son héritage et ses valeurs ont
sombré.
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