Tout ce monde a raison. Si le changement doit être compris
pour réussir, il y a risque d’échec. Et c’est pour cela qu’une communication qui
se veut pédagogique est un signe certain du fiasco.
La communication doit être un ordre dénué d’ambigüité. Pour
qu’elle soit cela, celui qui mène le changement doit comprendre ceux qui vont le
mettre en œuvre. Alors, il formulera son message d’une façon qui ne leur
demande pas de le comprendre !
Règle : c’est à celui qui mène le changement de « comprendre »,
pas à ceux qui doivent le mettre en œuvre.
Bonjour, je ne suis pas sûr de "comprendre" ce billet. Que celui qui donne l'ordre essaye de le faire en fonction du point de vue des personnes cible, cela est nécessaire mais il faut bien que cet "ordre" soit compris par ceux à qui il s'adresse sinon ils ne pourront pas l'executer, ou ils ne voudront pas s'il n'y a pas un minimum d'adhésion. Pourriez vous clarifier car cela me parait un point clé de l'accompagnement du changement. Merci.
RépondreSupprimerVotre commentaire est une remarquable illustration de mon billet : il montre que « comprendre » a plusieurs sens. Et qu’il peut conduire à des ambigüités.
RépondreSupprimerLe plus simple est peut être que je m’explique par un exemple, qui est assez significatif de ce que je rencontre régulièrement.
Un dirigeant arrive à la tête d’une société de service. Très vite, il veut la « changer ». En effet, elle ne répond pas correctement aux besoins de son marché. Il juge sa culture désuète. Beaucoup d’exemples de comportements ridicules appuient son diagnostic. Mais le changement ne s’annonce pas facile : avoir tenté de faire bouger la société a coûté leur poste à ses deux prédécesseurs.
Cependant, en observant l’entreprise, je constate, au contraire, qu’elle n’est pas poussiéreuse et endormie mais redoutablement performante. Ses équipes sont très autonomes et très compétentes. Plus curieux, il semble qu’il y ait une sorte de pression sociale interne qui intègre les nouveaux embauchés à coût extraordinairement faible, et surtout exerce une forme de contrôle qualité remarquablement sophistiqué (le métier est terriblement complexe et fait de cas particuliers), et pousse à une forme d’optimisation du chiffre d’affaires individuel. D’ailleurs, le système de rémunération va dans le même sens.
En fait, ce mode de contrôle social informel était adapté à l’ancien marché de la société. Or, il a changé. Le besoin d'un segment de marché majeur n’est plus la qualité de la prestation (individuelle) mais coûts et délais. Les clients de ce segment ne font plus appel à l’entreprise au cas par cas. Mais dans le cadre d’appels d’offres énormes dirigés par des acheteurs professionnels. Ils l’ont intégrée dans un processus taylorien, un peu comme s’il était un sous-traitant automobile. Le non respect des normes « bureaucratiques » de ces processus, jusque-là sans importance car sans rapport avec la qualité réelle du produit, conduit à des pénalités énormes, ou à la perte pure et simple d’un grand compte.
L’entreprise était tellement occupée à produire qu’elle ne pouvait pas percevoir cette évolution.
Le dirigeant a expliqué à son entreprise l’évolution de son marché. Il lui a présenté la logique de la transformation qu’elle devait suivre pour s’y adapter (elle était évidente une fois que l’on avait compris la nature du problème). Il a demandé à ses dirigeants opérationnels un plan de mise en œuvre. Ces plans ont été fusionnés en un plan global, et appliqués. En deux mois le changement de tous les dangers était réussi. Sans drame et quasiment sans accompagnement. Et surtout sans moyens ! (J’ai découvert que l’entreprise a une capacité d’initiative hors du commun. Elle vient, paradoxalement, de la très grande autonomie de ses personnels - jusque là présentée comme un frein au changement.)
De manière intéressante, l’entreprise s’est transformée avant même que son système de rémunération ne soit modifié. Ce qui montre que le fait qu’il s’oppose au changement n’était pas un frein majeur.
Qu’est-ce que cela signifie ? Face à un changement, l’entreprise ne doit pas avoir à faire un effort intellectuel pour le « comprendre ». Elle ne doit pas être comme l’élève qui doit apprendre les mathématiques. Au contraire, il faut trouver une formulation du problème qui lui paraît évidente, qui la conduise à l’action. Plus facile à dire qu’à faire !