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jeudi 1 août 2013

Un anthropologue et des ouvrières

Une autre mission d'Eric Minnaert chez les biscuitiers... Dans cet épisode le dirigeant d’une usine soupçonne que des manœuvres syndicales expliquent une faible productivité.

Ce qui frappait dans l’usine, c’était la différence entre les mondes des hommes et des femmes. Le monde de la fabrication, celui des hommes, « les pâteux », était viril, « des mecs moustachus », qui se donnaient des surnoms de surhomme. Pourtant, par certains côtés, c’était un monde féminin. « Vocabulaire lié à la maternité, au ventre, température de 36°… » « Alors que les hommes étaient dans la procréation, les femmes socialisaient le biscuit ». Les femmes travaillaient à la production. Bienvenus chez les misérables : « femmes surendettées, seules avec des enfants », « femmes battues », « burn out », « les tensions entre elles étaient visibles », « peu de gens voulaient faire leur travail », d’ailleurs, « les hommes obtenaient vite des promotions à la fabrication ».

Un jour il remplace une ouvrière. Il se brûle en tirant de la chaîne un biscuit mal cuit. Lorsqu’elle revient, il lui parle de son accident. Elle se brûle aussi. Mais cela lui donne l’impression de faire un travail utile. Et si cela expliquait pourquoi il y avait eu 3 accidents similaires, sur trois machines différentes, dans un univers où il n’y a pas d’accidents ? Et cette mort d’un ouvrier ayant voulu nettoyer des lames encrassées sans arrêter la chaîne de fabrication, parce qu’il n’aurait pu le faire sans s’attirer l’hostilité de ses collègues ? « C’était une façon de se recréer une identité » là où le travail n’avait plus aucun sens (« il avait fallu dix minutes pour me former »).

Il fallait « recréer une notion d’identité technique interne ». « Un partenariat avec la CGT a débouché sur un métier pour ces femmes ». Elles devenaient responsables conjointement de la machine. Elles s’occupaient aussi de sa maintenance « de niveau 1 et 2 ». Jusque-là ces tâches étaient assurées par le personnel de maintenance, des hommes. Pour éviter un conflit, « on leur a confié la maintenance des travaux neufs, le pilotage de nouveaux projets, les normes incendies… » On enrichissait ainsi leur métier.

Mais ces usines ont fermé. La déshumanisation du travail a conduit à une forme de dépression du personnel, dont la productivité a chuté. Une bonne raison de délocalisation. 

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