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samedi 4 janvier 2014

Historiettes

Livre de Tallemant des Réaux (Folio).

Nos livres d’histoire ont effacé l’humanité de ceux qui l’ont faite. Ici, Henri IV est une sorte de Bill Clinton. Peu impressionnant ou glorieux, mais attachant par ses faiblesses mêmes. Richelieu n’est pas Barack Obama. C’est un inquiet qui conserve son pouvoir grâce à la chance et à la manipulation des favoris royaux. Il a une forme de génie, mais plus d’intuition que de calcul. Comme Henri IV, ses défauts le rendent sympathique. Ce qui n’est pas le cas de Louis XIII. Il ne gouverne pas, il vit pour son plaisir, en multipliant les favoris. Un éternel méchant enfant.

Mais ce ne sont pas ces grands personnages qui intéressent l’auteur. Son sujet n’est pas les rois ou leurs proches, les grands seigneurs, sinon de loin. Mais la classe qui vient juste au dessous. C’est un curieux petit monde qui aime à se décrire. Et qui devient familier à force d’en lire les mémoires. C’est celui dont parlent Mme de Sévigné, le cardinal de Retz ou le duc de Saint Simon (ces deux derniers, cependant, traitent des grands). Ou, plus exactement, il s’agit de sa jeunesse.

Curieusement on y parle de Molière, de Pascal ou de Corneille comme on le ferait aujourd’hui. C'est-à-dire, en quelque-sorte, comme de phénomènes. Mais, de l’extérieur. Ils sont en dehors de la société de l’auteur. Elle ne cultive que le bel esprit. Pas le génie. Cette société est d’ailleurs extraordinairement libre et remarquablement mobile. Il en faut peu pour faire fortune, être anobli, et parvenir au fait de la puissance. Elle a peu de tabous. Les prêtres sont paillards, l’homosexualité est commune, et les femmes accumulent les amants. Je suis d’ailleurs surpris que l’on ait canonisé Simone de Beauvoir plutôt que Ninon de L’Enclos. Car cette Ninon est un personnage étonnant. Elle n’était pas jolie. Mais son esprit séduisait. Elle a vécu à sa guise, en allant d’amant en amant. Sans même être intéressée par l’argent. Le hasard voulant que ceux qu’elle aimait puissent satisfaire à ses besoins matériels… Beaucoup de ces grands personnages passeraient aujourd’hui pour des fous. Car, alors, l’originalité était une vertu ultime. Fut-ce un des grands moments de liberté de l’histoire de France, que la fin du règne de Louis XIV a fait basculer dans les ténèbres de l’hypocrisie ? 

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