- Elle viendrait de l’économiste John Williamson. Il a résumé ainsi ce que pensaient alors les cercles dirigeants de la finance américaine (donc mondiale) : on savait désormais comment rendre une économie prospère. Le consensus était une liste de 10 recommandations sensées faire l’unanimité chez les experts. Dans les faits des divergences sérieuses demeuraient. Le seul consensus était probablement que l’économie de marché avait définitivement triomphé et qu’on avait là le moyen de sauver les pays pauvres. Ensuite tout ne serait qu’une question d’ajustements mineurs.
- Mise en œuvre enthousiaste. Et série de crises majeures : Turquie, Venezuela, Argentine, Mexique, Corée du sud, Malaisie, Philippines, Thaïlande, Russie et Brésil. À chaque crise, on découvre une faille, a posteriori ridicule, dans le modèle. Et il évolue et se complexifie. À chaque fois on croit possèder la martingale gagnante. Nouveau drame humain.
Réflexions personnelles... Ce que prêchait le Consensus de Washington ressemble étrangement aux idées qui couraient au temps de la Nouvelle économie : on disait, aux USA, que le capitalisme ayant gagné le monde, il n’y aurait plus de crises. Qu’il fallait installer partout la « destruction créatrice » du marché, détruire les grandes entreprises, ou, du moins, remplacer leur fonctionnement interne par un marché. Enron, et les start up Internet donnaient raison à ce modèle. Quand il s’est effondré, le gouvernement américain a réduit les taux d’intérêts pour prévenir une crise. D’où nouvelle bulle spéculative, « les subprimes ». D’où nouvelle réduction de taux. Et le gouvernement va au secours des institutions financières ébranlées par les conséquences de leurs malversations. Il envisage même de les nationaliser (ce qu'a fait l'Angleterre avec la banque Northern Rock)… Je tire de cette observation deux idées :
- L’Américain est pragmatique. La fin justifie les moyens est probablement son idéologie fondamentale. S’il doit en venir à la nationalisation et au socialisme pour réussir, il le fera. De même il serait faux de parler d’une théorie économique. Rien n’y est figé.
- Le Français, par contre, a besoin de certitudes : toute son éducation lui dit qu'il existe une « seule bonne solution ». Le succès apparent des Américains lui fait croire qu'ils l'ont trouvée. (Il est d’autant plus abusé que les bulles spéculatives peuvent durer plus d’une décennie.) Il adopte quelques idées qui semblent y courir. Mais parce qu’il n’est ni habitué à douter de ce en quoi il croit, ni très soucieux de ce qui se passe à l’extérieur, il ne les voit pas évoluer. Comment arriver à faire que la lenteur française ne soit pas victime de « l’innovation américaine » ? Je suggère un Institut Pasteur du risque financier. Il analyserait en permanence les nouvelles idées américaines et les évaluerait. Son travail serait simplifié par le fait que l’Américain a relativement peu de mémoire : certaines idées font des retours réguliers. Cet Institut pourrait ensuite alimenter en quasi certitudes le reste de la nation.
- L'origine principale de mes informations sur le Consensus de Washington : Moises NAIM, Fads and fashion in economic reforms: Washington Consensus or Washington Confusion?, Third World Quaterly, Vol 21, N°3, 2000.
- Kevin J. STIROH, Is There a New Economy?, Challenge, Vol. 42, No.4, Juillet - Août 1999.
- Stephen B. SHEPARD, The New Economy : What It Really Means, Business Week, 17 Novembre 1997.
- Gary HAMEL, Reinvent your company, Fortune, 12 Juin 2000.
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