Pages

vendredi 28 février 2014

Entreprises : trouvez votre raison d’être par l’exemple

Second billet consacré à Michel Rességuier. Où l’on acquiert l’intuition de comment il faut aborder la question du redressement d’une entreprise. Michel Rességuier donne 4 exemples :

Un fabricant de matériel de laboratoire. 70 ans d’existence. 60 ans de prospérité. 10 ans de pertes. Il entretenait une grosse équipe d’ingénieurs de haut niveau pour conseiller le client, alors que cela ne lui servait plus à rien. Son attente était le sourcing et la logistique, qui, eux, laissaient à désirer. Il fallait les professionnaliser.

Un transporteur routier. Impossible de comprendre ce qui ne va pas. Quelle que soit la façon dont on segmente son activité, il n’y a pas de différence de rentabilité entre segments. Un conducteur suggère de faire un découpage par conducteur. Résultat : deux catégories de conducteurs plombent les comptes. Les très mauvais, et les très bons. Pourquoi ces derniers ? Parce qu’on leur demande de rattraper tout ce qui ne va pas. Mais on ne refacture pas le travail correspondant.

Un fabricant de meubles. Ancien leader de son domaine, il se retrouve en situation difficile. « Livrer à l’heure n’était pas un sujet ». Les grandes surfaces du meuble, ses clients traditionnels, étaient en difficulté, mais il avait décidé de ne pas travailler avec Ikea !

Un groupe de librairies. Chaque librairie est une entreprise à part. Sa raison d’être dépend de critères tels que superficie, histoire (par exemple, librairie de l’école de médecine), marché local (ville universitaire ?), légitimité (est-elle choisie par la clientèle universitaire ?). Et le blocage ? Ses personnels se voient comme des missionnaires de la culture, pas comme des vendeurs. Or, une enquête mystère montre qu’ils ne parlent pas au client ! Toute leur activité est logistique. Solution ? Ne pas exiger d’eux d’être des vendeurs, certes. Mais leur demander d’échanger quelques phrases sur un sujet culturel, et les former à parler de livres.

A la découverte de la France

Depuis 5 ans, j’appartiens à un groupe d’entrepreneurs. Il m’est venu l’idée de les interroger sur leur métier. Curieux résultat. Mon enquête révèle que nous pensons le plus grand mal les uns des autres. Raison ?

Nous avons tous poursuivi dans notre domaine une sorte de perfection. Cette quête a la forme d’une évidence pour nous. Si bien qu’il ne nous viendrait pas à l’esprit de chercher à expliquer ce que nous faisons. De ce fait, ce dont nous sommes capables est quasiment incompréhensible pour les autres. Ils nous jugent donc sur quelques détails secondaires. C’est un peu comme si nous trouvions Einstein ridicule, parce qu’il a un comportement bizarre.

Je me demande s’il n’y a pas ici quelque-chose de profondément français. Contrairement à ce que l’on nous dit, le Français est perfectionniste. Il est à la recherche d’une sorte d’idéal. Il est poussé par le sens de quelque-chose qui ressemble à une vocation. De ce fait, il ne peut pas comprendre que l’on ne voit pas l’intérêt de son œuvre. C’est pourquoi il défend aussi mal ses intérêts. (A creuser.)

jeudi 27 février 2014

Sommes-nous manipulés par l'Europe ?

Un interlocuteur me dit que nous, nos gouvernants et nos entreprises sommes des victimes impuissantes de l'UE. Ce avec quoi je ne suis pas d'accord :

Ce blog raconte une anecdote édifiante. Martine Aubry, avec un talent confondant et une facilité étonnante, a fait passer à l'Europe une loi sur les discriminations. Elle a voulu ensuite l'imposer à la France. L'INSEE s'est opposée à sa mise en application. Elle est contraire aux principes fondateurs de la République.

Qu'est-ce que cela signifie ? L’Europe n’est qu’une excuse ? Nos gouvernants s’appuient sur elle pour faire adopter des mesures idéologiques qu’ils n’ont pas le courage de nous imposer ?

En tout cas, l’Allemagne, contrairement à nous, tend à ne pas se laisser faire. Elle défend sa constitution.

mercredi 26 février 2014

Les grandes écoles : maillon faible de la France ?

Les grandes écoles fusionnent. Elles doivent devenir des universités qui entreront en concurrence frontale avec le MIT pour recruter les "meilleurs". Meilleurs chercheurs, meilleurs élèves, meilleures entreprises partenaires... Rappelons les critères de sélection américains : une licence au MIT = 200.000$. (Bac + 5, ajoutez 100.000$.)

Pensez-vous qu'il y aura beaucoup de Français parmi ces meilleurs ?

Ce qu'il y a de fascinant dans ce dispositif, c'est ce qu'il révèle sur notre pays :
  • Les grandes écoles étaient le point faible de notre dispositif. Si on les abat, toute la société est transformée. Nous devenons une société de classes. Les possédants se reproduisent. 
  • Nous sommes atteints de haine auto-destructrice. En effet, personne d'autre que nous n'applique le modèle que décrit par Pierre Veltz. Les Chinois ne veulent pas d'universités ouvertes, ils veulent absorber le savoir-faire occidental. Le reste de l'Europe fait évoluer prudamment son modèle existant, sans réformes brutales. Même en pays Anglo-saxons, les nombreuses universités, et leurs Etats, n'ont aucun complexe d'infériorité vis à vis de MIT. Elles ne croient pas qu'une grande course en avant est lancée. 
  • Je me demande d'ailleurs si ce qui motive nos réformes n'est pas la vengeance personnelle. On disait que Richard Decoin, le réformateur de Science Po, avait mal vécu sa scolarité. Je me demande s'il n'y a pas quelque-chose d'identique ici. En effet, le plus étrange dans l'argumentation de M.Veltz n'est pas qu'elle est un tissu de sophismes, mais qu'il n'aboutit pas totalement au modèle américain. L'étudiant idéal n'est pas hyperspécialisé comme l'américain. Il sait tout. Comme M.Veltz. 

Les causes culturelles de l'échec du changement ?

Petit à petit j'ai été amené à étudier les réformes de nos gouvernements successifs. Pourquoi ? Parce que j'avais besoin de renouveler les exemples de mes cours. Le Français n'aime pas qu'on lui parle d'entreprises. 

Comment procédé-je ? Je pars d’études (par exemple Science Po / Harvard). Je compare l’objectif et le résultat. Et je constate l’échec. Pas plus compliqué que pour une entreprise. J’investis tant, ai-je un retour sur investissement ? Exemple type : 35h. Passer de 39 à 35 = 10%, il y a 10% de chômeurs, je vais les ramener à 0. Ou presque, si je tiens compte de pertes en ligne. Or, résultat = 10% ! Rien ne s’est fait. Quasiment tout a été récupéré en gains de productivité par la grande entreprise. (Nous avons fait aussi bien que Schröder disent certaines études.) Mes livres reprennent toutes les grandes réformes, des noyaux durs au pacte de compétitivité. Même résultat.

Sommes-nous dirigés par des incompétents ? Une autre hypothèse. On pense de plus en plus que, si autant de changements ratent dans l’entreprise (cf. les statistiques sur les fusions / acquisitions ou les grands projets informatiques), c’est parce que leur but ultime n’était pas l’intérêt de l’entreprise, mais celui de leur promoteur. Pourquoi n'en serait-il pas de même pour notre gouvernement ? Il fait une réforme pour nous donner le change ? Mais, après moi le déluge, il ne se préoccupe pas de la mise en oeuvre de la dite réforme et de ses conséquences ?

Bref, le jour où la mode ne sera plus à l'égoïsme mais à la solidarité, les changements réussiront ?

mardi 25 février 2014

Faut-il sauver les grandes écoles ?

Livre écrit par Pierre Veltz (Science Po, Les presses, 2007), X-Ponts, sociologue, économiste, président de l’Etablissement Public de Paris-Saclay. Il semble avoir inspiré le projet de Silicon Valley du plateau de Saclay.

Le livre s’intéresse aux 7 plus prestigieuses écoles d’ingénieurs parisiennes : Polytechnique, Les Mines, Les Ponts, Les Télécoms, Centrale, Supélec et Agro (dont il n’est jamais question).

Il y a deux siècles, elles furent innovantes. On ne pensait pas alors, ailleurs qu'en France, qu’il y ait un lien entre la science et la technique. Elles conservent des atouts. Le type de formation qu’elles dispensent semble mieux adapté au contexte moderne que la spécialisation anglo-saxonne.

S’éloignant du programme qu’avait Monge pour Polytechnique, puis qu’a repris Centrale, un enseignement pratique, elles ont toutes dérivé vers les mathématiques. Aujourd’hui, elles sont toutes généralistes. Etablissements minuscules qui font la même chose. Les réunir permettrait des synergies. D’autant qu’elles sont dépassées et provinciales. Qui dans le monde connaît leurs diplômes ? Surtout, elles détournent de la science et de la recherche les meilleurs scientifiques de leur génération.

Comment l’auteur voit-il l’avenir ? Émergence d’une « économie de la connaissance », qui éliminera les barrières entre disciplines. Des mathématiques à la sociologie, il faudra tout connaître. La recherche fondamentale et l’innovation, la création d’entreprises et d’emplois, se feront dans une poignée de « hubs » mondiaux, interconnectés, centrés sur un campus, collaborant intimement avec l’entreprise. S’y regrouperont une élite, internationale et apatride, faite des meilleurs étudiants et de stars scientifiques. Ces établissements seront payants, l'éducation n'est-elle pas un investissement ?, mais ouverts à la diversité sociale (internationale), source de créativité. La course à l’innovation s’est engagée. Copions l’Amérique et la Chine.

« Le système des écoles appelle aujourd’hui des réformes profondes. » Et voilà comment on en est arrivé à Saclay ?

Entreprises : miracles d'une transformation systémique ?

Depuis ses origines, ce blog s'interroge sur ce qui pourrait sortir de la crise. Plus ça va, plus la modélisation se simplifie. 

Résultat clé. L’entreprise passe de l’abondance à la pénurie : augmentation des salaires émergents et hausse des coûts de main d’œuvre, réduction de l’endettement qui tirait la demande occidentale, etc.

Conséquence inattendue. Paradoxalement, cette pénurie peut avoir un effet extraordinairement bénéfique pour l'entreprise. Un effet systémique : en en faisant moins on peut obtenir infiniment plus... En effet, en forçant l’entreprise à l'économie la pénurie a deux conséquences :
  • Elle va développer son chiffre d'affaires par codéveloppement. Autrement dit elle rassemble un écosystème autour de ses compétences clés, ce qui lui permet d'entrer sur de nouveaux marchés et de les développer en mode start up. Cela  lui donne une croissance par « rupture », et non plus par rendements décroissants, comme aujourd'hui. 
  • L'entreprise est devenue une structure de contrôle. C'est une bureaucratie. En responsabilisant ses ressources humaines, elle liquide ses coûts non productifs et retrouve son poids de forme et son agressivité. 
Autrement dit, la pénurie révèle le véritable potentiel de l'entreprise et l'amène à en tirer le meilleur parti. L'espoir est permis.

lundi 24 février 2014

Politique industrielle chinoise

C’est curieux, mais personne n’en parle. Qu’ont fait les Chinois ? Ils ont copié Amazon, Goople et les autres, et ils leur ont fermé leurs portes. Du coup, ils se sont construit des champions locaux pour pas cher. (Ce qui, au passage, semble montrer que les originaux n’avaient pas un gros avantage concurrentiel.)

Pourquoi personne n’a-t-il rien dit ? Peut-être que les USA ont pensé que le marché chinois valait un sacrifice. Quant à l’Europe, elle est en morceaux et semble juste bonne à se faire tondre. 

Irlande = un taux d’imposition ?

L’Irlande n’avait pas d'entreprises, alors elle a attiré celles du reste du monde grâce à une imposition réduite au minimum ? Du coup, ça lui rapporte des emplois et un revenu d’imposition sur l’entreprise à la hauteur de ceux des pays développés. (Article de The Economist.)

Rendements décroissants de l’innovation mondiale ? Faute de grandes découvertes, électricité, moteur…, on en vient à se piquer nos entreprises les uns aux autres ? 

dimanche 23 février 2014

Entreprises et Etats : la paix des braves ?

Entreprises et Etats doivent s’entendre. Ils sont complémentaires, pas ennemis. En prétendant à l’autorégulation, le monde des affaires a entraîné une surréaction de l’Etat. L’un et l’autre sont engagés dans un cercle vicieux du gendarme et du voleur. Le rôle de l’Etat, c’est la formation, les infrastructures, la recherche et l’aide au lancement de l’entreprise. Le rôle de l’entreprise, c’est l’industrialisation et le marketing de l’innovation. Pour cela elle a besoin avant tout de règles du jeu claires et stables.
En attendant les multinationales jouent sur les règles locales pour partager leurs implantations. La Hollande permet d’arranger les statuts de l’entreprise à son gré. Pas mieux que l’Angleterre en matière d’accommodements financiers. La Suisse serait out.

Thaïlande. La bataille entre le peuple et les privilégiés pourrait tourner au profit des premiers. Le futur roi leur serait favorable. Ukraine. Le pays est pris entre des forces centripètes. Un Ouest polonais avant l’annexion soviétique, un Est proche de la Russie, la Crimée, base russe, communauté russe. Avec Kiev comme trait d’union. France. On parle de « théorie du genre ». La différence homme / femme serait une invention sociale. Cela a révélé qu’il existait un courant pro famille fort. Mais aussi que « une nouvelle génération de députés socialistes a été amenée à la politique non par le mouvement ouvrier ou par la politique locale mais par le mouvement associatif, où ils ont combattu pour les droits de la femme et contre la discrimination. Dans une société post industrielle où les travailleurs ont abandonné la gauche pour le Front National, les députés voient ces sujets comme un terrain de batail clé. » M.Sarkozy penserait à revenir au pouvoir. Malheureusement les Français l’aiment quand il se tait. Espagne. Elle redonne droit de cité aux descendants des Juifs expulsés en 1492. Toute la communauté juive serait concernée (au moins). Initiative business. Italie. M. Renzi a renversé le gouvernement. Apparemment, il n’a d’autre programme que de prendre tout le monde de vitesse. Ecosse. Va-t-elle faire sécession ? Ce serait une question de gros sous. Comment récupérer les bénéfices de la liberté sans assumer les charges de l’Etat anglais ? Et revenir dans l’UE prendrait du temps. En tout cas son succès pourrait encourager d’autres régions à prendre leur envol. Ces projets d’autonomie, d’ailleurs, n’auraient pas été possibles sans la protection européenne. Elle fait perdre son intérêt à celle des Etats. Iran. Suite de la tentative de se rabibocher avec l’Ouest en échange de revenus pétroliers. Un succès de M.Rohani pourrait nuire à M.Khamenei. Syrie. L’échec des négociations de Genève pourrait montrer à M.Obama qu’il a eu tort de laisser croire à M.Assad qu’il avait le haut du pavé. Lybie. C’est le chaos. Bientôt, un coup à l’égyptienne ? USA. Le congrès devrait couler les négociations de libre échange. Les précédents (NAFTA) seraient vues comme n’ayant pas tourné à l’avantage du pays. Réchauffement climatique. Croyants et non croyants pourraient trouver un terrain d’entente, à condition que les seconds ne s’en prennent pas aux valeurs des premiers.

Facebook achète WhatsApp. 19md$ pour 32 ingénieurs. Facebook veut injecter du sang neuf dans sa fortune déclinante. Tout étant informatique, la piraterie devient une grosse affaire. Elle coûterait plus de 100md$ par ans. Certains pirates passent au contreterrorisme. Les syndicats américains changent de marché. Le travailleur qualifié de l’usine automatisée n’en veut plus. Le syndicat doit se tourner vers les « exclus », personnels de service, universitaires sans poste fixe et autres intouchables. Révolution à San Francisco ? Mouvement de rejet de l’hypocrisie atroce des « barons du high tech », et d'un monde fondé sur la discrimination ? Les gestionnaires de fonds s’enrichissent au détriment de leurs investisseurs. Leur talent, s'il existe, ne compense pas leur coût. L’OPEP en difficulté. Le pétrole afflue de partout (USA, Iran, Iraq…). L’OPEP ne pourra pas maintenir ses prix. Pourquoi ne pas les baisser brutalement ? Cela tuerait ses concurrents. Le Bitcoin est victime d’une faille informatique. Sa valeur a été divisée par deux. Les économistes cherchent à mettre une valeur sur ce à quoi le marché n’en donne pas, parce que ça pourrait en avoir une un jour.

Le développement intellectuel de l’enfant est fonction du nombre de mots qui lui sont adressés, et de la complexité du dialogue que l’on entretient avec lui. Le réchauffement accéléré de l’Arctique ferait baisser le différentiel de température qui crée le jet stream. Du coup, il pourrait se mettre à zigzaguer paresseusement, et aléatoirement. D’où un climat incertain et stagnant. Un nouveau type de panneaux solaires pourrait produire de l'énergie à un prix concurrentiel avec le charbon. Les hyènes communiquent par leur odeur. Elles sous-traitent cette communication à des bactéries. En éclairant les tableaux pixel par pixel, on leur redonne leurs teintes d’origine. 

samedi 22 février 2014

La solution à la crise ?

Le paradoxe de Solow s'étonne que l'informatique n'apporte rien à la croissance. Il me semble que ce n'est pas une fatalité. Voici 2 idées simples qui souriront peut-être à l’esprit éclairé :
  • Relisons les livres de management. Des ERP aux réseaux sociaux, chaque nouvelle innovation informatique est accompagnée d'un argumentaire de vente convaincant. Malheureusement, il ne se réalise pas. Eh bien, j’ai constaté qu'il était juste, mais qu'obtenir les bénéfices promis demandait beaucoup d’efforts. Mais rien de surhumain. Surtout eu égard aux capacités intellectuelles de nos dirigeants. N'ont-ils pas été sélectionnés, justement, pour leurs talents de résolution de problèmes ? Où est le bug, alors ? Les dits dirigeants s’arrêtent à la décision d’achat. Ils ne s’intéressent pas à ce qui arrive ensuite. 
  • Faites appeler le contrôle de gestion. Tout investissement doit avoir un retour sur investissement. Le rôle du contrôle de gestion est de s’en assurer. Par conséquent, il doit vous aider à trouver, dans les ouvrages précédents, assez de gains de productivité pour justifier votre acquisition. Puis il doit s’assurer que vous les obtenez. C’est son métier. 
Ce qui me frappe dans cette question n'est pas le problème du SI. Je me demande si elle ne révèle pas une vérité générale. Qu'il s'agisse de ses SI, de la faculté de résolution de problème de ses dirigeants, de la capacité de son contrôle de gestion à contraindre l'entreprise à investir rentablement... notre entreprise est pleine de capacités inexploitées. Et il y a plus étrange. Au fond, il est simple de les réaliser. Il suffit que gens et choses fassent ce pour quoi ils sont bons ou ont été conçus (pour les derniers) !

Ce n'est pas la première fois que je fais cette constatation. Les rattrapages d'un changement mal parti donnent toujours ce résultat : les bons ingrédients étaient présents, mais ils n'avaient pas été bien employés. Un espoir pour notre pays en crise ?

vendredi 21 février 2014

Michel Rességuier et le redressement d’entreprise

Jean-Pierre Schmitt m’a fait rencontrer Michel Rességuier. J’ai été enthousiasmé par son expérience. Voici le premier de deux billets qui lui sont consacrés.

Prospheres est un spécialiste du redressement d’entreprises. La société emploie 17 salariés et a mené plus de 100 redressements en 14 ans. Elle intervient principalement pour des entreprises en situation difficile (ayant une fois sur deux des problèmes de refinancement). Leur chiffre d’affaires varie entre 10m et 1md€.

Ce que dit l’expérience de Prospheres, c’est que même dans les pires circonstances, le renouveau est à portée de main. Cela ne demande qu’un seul changement : prendre la compétence de son entreprise au sérieux :
  • Sa méthode de travail repose sur une constatation. Si une société est en difficulté, c’est qu’elle n’a pas compris sa « raison d’être ». Elle s’acharne sur ce qui jadis a eu de l’importance, mais qui n’a plus de valeur aujourd’hui pour le marché. Et elle laisse ses forces en jachère, faute de leur apporter le processus de gestion rigoureux qui les transformerait en avantage concurrentiel décisif. 
  • Prospheres prend un mandat social en vue du redressement sans connaître l’entreprise et sa situation. Dans ces conditions, rien ne peut se faire sans la participation de ses équipes. Prospheres apporte le savoir-faire nécessaire à la définition d’un plan de redressement, et ce sont elles qui le conçoivent et l’appliquent. De ce fait, il n’y a pas de résistance au changement, et le plan est immédiatement appliqué. En moyenne, il faut un an pour redresser la société et mettre en place une nouvelle équipe dirigeante.
Et les conflits sociaux ? a demandé Jean-Pierre Schmitt. Parfois, les syndicats cherchent à empêcher les salariés de collaborer avec Prospheres. Michel Rességuier leur répond qu’il est dans l’intérêt de ces derniers de participer à la mission. Y compris, lorsque cela est nécessaire, à la conception d’un plan de licenciement. En outre, l’expérience montre qu’une « cellule d’outplacement bien pilotée » est efficace. Les seules personnes qui ne retrouvent pas un emploi sont celles qui ne désirent pas continuer de travailler (généralement, parce qu’elles sont proches de l’âge de la retraite). « S’ils ont envie de travailler, on les reclasse tous. »

Le prochain billet, dans une semaine même heure, illustre la démarche par l’exemple…

Egalité des sexes et direction d'entreprise

Il y a deux ans, j'ai publié un article dans lequel je constatais que les caractéristiques que l'on attribue à la femme correspondaient exactement à celles de "l'animateur du changement". Ce résultat me semblait ne pouvoir subir aucune contestation, car il repose sur des résultats bien établis. Mais il m'a valu de initiés inattendues. Notamment chez quelques journalistes de gauche, et que je n'attendais donc pas sur ce terrain.

La femme devrait-elle éliminer l'homme de l'entreprise ? Les études sur l'efficacité des groupes ne sont pas loin de le conclure, me disait-on il y a une semaine... En y réfléchissant, je pense que les qualités de la femme sont aussi leurs défauts. Et ces défauts peuvent poser de gros problèmes à l'entreprise, parce que, jusqu'ici personne ne les avait. Et que je ne suis pas sûr qu'ils ne soient pas incompatibles avec certains traits que l'entreprise tient, peut-être, de siècles de domination masculine. Voici deux observations, qui n'ont rien de scientifique.
  • Premier trait qui a fini par me marquer : la femme vous oublie vite, ne répond pas à vos mails... Est-elle plus poussée par son intérêt à court terme que l'homme ? Ou, au contraire, est-elle moins de le court terme, dans la relation immédiate ?...
  • Un second trait semble coller avec le fait que la femme tend à adopter des stratégies sociales, alors que l'homme est dans la confrontation. La femme dirigeante me semble tendre à éviter les problèmes. Lorsque quelque-chose ne lui va pas, elle s'esquive. Elle n'argumente pas de manière rationnelle. Elle cherche à atteindre ses objectifs, pas toujours conscients, par une sorte de "soft power". (On retrouve son attitude à la conduite du changement.)
Tout ceci, si c'est juste, est probablement plus acquis qu'inné. Il pose surtout une question. Quand on parle d'égalité des sexes a-t-on véritablement pris la mesure de ce que cela impliquait ? Veut-on vraiment que hommes et femmes aient exactement les mêmes caractéristiques ? Pourquoi ne pas jouer sur les forces des uns et des autres pour les amener à une forme d'égalité dans la différence ?

jeudi 20 février 2014

L'entreprise française vue de Californie

Jérôme Lecat, un entrepreneur installé en Californie, voit ainsi le sort de l'entreprise française de high tech :
  • Un coût de main d'oeuvre moitié moindre qu'aux USA, or "dans bien des domaines, les ingénieurs français sont les meilleurs".
  • Une relative facilité à trouver un financement de démarrage, avec l'effet pervers que certains entrepreneurs se transforment en chasseurs de primes. 
  • Pour un développement ambitieux, il faut aller aux USA, il y a le financement et l'écosystème nécessaires. 
  • Le problème majeur : la réputation effroyable du pays. 
C'est toujours agréable d'entendre quelqu'un de compétent partager son point de vue...

Goldman Sachs, fusions et acquisitions

Une étude de Goldman Sachs encourage les fusions acquisitions. 

Acquérir une entreprise est généralement une très mauvaise idée. Mais, pas toujours. Comme le dit, en substance, Goldman Sachs, la fusion qui crée un oligopole prend son marché en otage et en retire une rente.

Vous avez besoin d'un coup de main pour acquérir une société ? Goldman Sachs peut vous aider. C'est le leader mondial du secteur.

mercredi 19 février 2014

Le business n'aime pas la France

M.Hollande veut séduire les grandes entreprises étrangères. J'entendais la radio dire, lundi matin, que ce qui ne leur plaisait pas chez nous, c'était la complexité administrative et le coût du travail. Curieux. Car il n'y a rien de neuf ici.

Et si la véritable raison de leur malaise à notre endroit était, tout simplement, la rhétorique socialiste ? La peur du rouge ? Les rodomontades de M.Montebourg, en particulier ? Les étrangers que je rencontre n'ont que son nom à la bouche. Ce qui est d'ailleurs curieux, car y a-t-il  meilleur ami de l'entrerpreneur que M.Montebourg et le pouvoir socialiste ? N'est-il pas certain que si vous leur promettez des emplois, ils vous donneront l'argent du contribuable ? Malheureusement pour eux, ils pensent qu'ils se doivent de gesticuler pour faire de gauche, donc peuple, et cela se voit de l'extérieur ?

(Et si les fausses raisons étaient un vrai moyen de faire accepter à la France de renoncer à quelques-un de ses acquis sociaux ?)

Cambridge en guerre


 Jours heureux pendant la guerre de 40. Force de caractère britannique qui se rit des événements ? En tout cas, une façon originale de découvrir Cambridge.

mardi 18 février 2014

M.Hollande en Amérique

Vidéo de la visite de M.Hollande aux USA. Une fois de plus, je suis frappé à quel point M.Hollande a quelque chose de bizarre. Non seulement il n'a pas le comportement que l'on attendrait d'un président, mais il paraît même curieusement "non humain". Cela ressemble au sentiment qu'inspirent certains robots. Quand l'imitation de l'homme est quasi parfaite, mais pas tout à fait, la vue du robot rend l'homme mal à l'aise. M.Hollande jouerait-il un personnage, plutôt qu'il ne l'est ?...

François Mitterrand, le guerrier

Je découvre, dans un texte de Louis Gautier, que François Mitterrand fut un guerrier. Des présidents de la 5ème République, "il est celui qui a le plus livré bataille". Il semble surtout avoir été l'auteur d'un changement majeur. Il a transformé l'identité et la mission de notre armée.

Les guerres mitterrandiennes ont été de deux types, opposés. L'un consistait, en quelque sorte, à défendre la grandeur de la France, en Afrique, "continuité et conservatisme". "La France ne serait plus tout à fait elle-même aux yeux du monde si elle refusait d'être présente en Afrique", dit Mitterrand. L'autre commence avec la Guerre du Golfe. Le pays va s'engager désormais dans le règlement des crises internationales. Le rôle et la mission de l'armée changent. On parle maintenant de "projection". Il faut changer les principes constitutifs de l'armée française. La France n'intervient plus seule. La conscription n'est plus de saison.

Mais il y a un fil commun entre les deux : la grandeur de la France (et sa place de président dans l'Histoire ?). François Mitterrand a pensé que la guerre et les forces armées étaient un facteur déterminant "pour la stature internationale de notre pays". Mais que leur mission était amenée à évoluer.

A cette vision peut-être discutable, François Mitterrand semble avoir apporté le talent d'un stratège avisé.
Mitterrand est tellement préoccupé par la dimension historique de ses actes, surtout quand il s’agit de l’usage de la force, qu’il se laisse parfois exagérément influencer par des impressions du passé ou l’écho futur espéré de ses décisions. Cela a parfois nuit à la lisibilité voire à l’efficacité immédiate de son action militaire. Mais cela a évité aussi de plus grands maux. Comme chef des armées, Mitterrand est tout sauf timoré mais il est le contraire d’un impulsif.

lundi 17 février 2014

Vieux Suisse

Samedi dernier Christine Okrent parlait du vote suisse. Les Suisses veulent limiter l'immigration. Tendance nationaliste comme en Norvège et en Autriche. Or, ces pays sont riches et n'ont pas de chômage (3% en Suisse), et, d'ordinaire le nationalisme est associé à la pauvreté...

Il semblerait que, dans ce cas, ce soit une conséquence du vieillissement. Étrangement, la Suisse va devoir faire de plus en plus appel à l'immigration. Et c'est pour cela qu'elle n'en veut pas...

Les clusters du grand Paris

Je viens de comprendre pourquoi Dauphine s'est déplacée à la Défense, et pourquoi les grandes écoles s'empilent à Saclay. Un article explique que Christian Blanc a lu un livre de Michael Porter parlant de Clusters d'entreprises. Et il a décidé qu'il allait créer des clusters par sa seule volonté. Grâce à lui nous n'avons pas une mais 6 silicon Valleys !
Source : ACADIE/Abderrahim Nouaiti
Dauphine est dans le pole Finance, et les grandes écoles dans le Pôle innovation ! Tout cela aurait été encouragé par des intérêts locaux.

Illustration étonnante des travaux sur l'Etat en France de Pierre Rosanvallon : nous appartenons à un pays dirigé par des théoriciens coupés des réalités, et d'une étonnante indigence intellectuelle. Et qui nous prennent pour des marionnettes ? Mais des marionnettes qui se mettent à innover par la seule volonté du génie de leurs gouvernants ?

dimanche 16 février 2014

Argentine dysfonctionnelle et Europe nationaliste

Pourquoi l’Argentine, pays riche du début du siècle dernier, n’a-t-elle pas réalisé ses promesses ? Apparemment parce que son économie est tirée, périodiquement, par des exportations de matières premières. Et qu’elle n’est pas capable d’en profiter pour construire des institutions rationnelles. Peut-être parce que son peuple est un mélange détonnant de riches fermiers et de pauvres travailleurs, et que dans ces conditions il est plus facile de jouer de la subvention que de mener des réformes de fond. Aujourd’hui, elle est en crise. Mais patience, le gaz de schiste est au coin du bois.
Les Hollandais ont fait une étude qui leur montre qu’ils seraient plus riches en dehors de l’UE qu’à l’intérieur. (Mais, ils semblent estimer qu'ils perdraient les inconvénients mais par les avantages de l'UE.) Les Suisses se sont révoltés contre l’immigration européenne des « riches voisins qui font s’envoler le prix de l’immobilier et qui provoquent des embouteillages sur les autoroutes ». L’Angleterre est inondée, mais l’Anglais n’a pas perdu son flegme. Le gaz de schiste pourrait faire, à nouveau, des USA le plus gros producteur de pétrole mondial, et le régulateur des prix de l’énergie. Encore faudrait-il que l’interdiction d’exportation de pétrole, qui remonte aux années 70, soit levée. Les Républicains continuent leur mue. Ils ne sont plus systématiquement le parti du non. Mais ils demeurent toujours aussi perfides. Leurs affiches de campagne associent un numéro qui permet de leur faire une donation, avec la photo de leurs opposants… Inde. Depuis que M.Modi semble devoir gagner les élections, les puissances occidentales révisent leur opinion. Elles oublient qu'il leur a fait peur.

Le tourisme médical n’a finalement pas vu le jour. Au mieux il se fait au sein d’un même pays. L’Indonésie fabrique des morceaux d’Airbus. Mais elle n’aurait pas renoncé à son démon de construire une industrie aéronautique locale. Le constructeur automobile australien est au bord du trépas. Petit marché, coûts extraordinairement élevés et devise surévaluée… Le mouvement libertaire Internet, avec ses bitcoins et ses logiciels qui rendent indétectables les ordinateurs, a trouvé une première application : le trafic de drogue. Pour le moment, la maladresse de ses opérateurs leur est fatale. Les « activistes » montent à l’assaut des entreprises. C’est bon pour elles, ça les force à réfléchir. Comme en 2000, les biotechnologies font une bulle. (En 2000, elles attiraient les bénéfices tirés de la bulle Internet.) Les fondations semblent plus solides que la dernière fois. Mais quid du marché ? « Il n’est pas certain que les assurances et les gouvernements continuent de payer les prix élevés demandés par les entreprises de biotech. » Quant aux résultats de la recherche : « la RetD demeure une question de chance ». Le commerce électronique en Chine est comme ailleurs. Il est une question de taille et d’investissements massifs dans des actifs traditionnels, et d’années de pertes à la recherche du monopole. (En outre, en se protégeant de la concurrence de l’extérieur, mais pas de ses capitaux.) L’Anglais se répand dans les entreprises. Ce serait si bien que tout le monde parle la même langue ! (Mais ce type de changement peut-il se faire par décret ?)

La Cour constitutionnelle allemande a envoyé un coup de semonce à la politique monétaire européenne. Ailleurs, il serait bien qu’il y ait une coordination internationale de façon à protéger les nations des conséquences (dévastatrices) des politiques monétaires des grands pays. Sans espoir. Les banques d’investissement européennes sont plombées par la législation. Elles doivent faire des économies radicales. Seule leur politique salariale est à la hausse. Les cartes de crédit américaines devraient passer au système de puce que l’on trouve ailleurs. Le montant des fraudes est devenu trop élevé (5md$). En Amérique, les chômeurs de longue durée cessent de chercher un emploi. Ils sont devenus inemployables.

Le préservatif fait l’objet d’un gros effort de recherche et développement. Il demeure un article pour pays riches. On espère construire des immeubles grâce aux propriétés d’émergence des systèmes complexes. 

Peut-on apprendre la conduite du changement dans les livres ?

Peut on vraiment apprendre à changer autrement qu’en ayant traversé des changements plus ou moins pénibles, autrement dit par l’expérience ? et pas par un cours ? Me demande-t-on, sachant que j'écris des livres et que je donne des cours...

Ma réponse est que le changement est comme toutes les autres activités humaines. Les cours et les livres ont leur utilité...
  • L’homme n’apprend que par la pratique. Nous sommes d'accord. D’ailleurs la conduite du changement est une nécessité de la vie. Nous savons tous, plus ou moins bien, conduire le changement. C'est-à-dire modifier les organisations humaines. 
  • Mon but est de transformer les gens doués, d’amateurs en professionnels. Explication. 
    • Comme je l'ai dit, nous savons tous, plus ou moins, mener le changement. Mais nous le faisons intuitivement. 
    • L’intuition n’est pas adaptée à la complexité de l’organisation moderne. L’entreprise moderne est comme une F1. Il ne suffit pas d’avoir le permis de conduire pour la piloter. 
  • Mon livre est un livre d’exercices et de conseil. Il ne doit pas être lu comme un livre de recettes.

samedi 15 février 2014

France kafkaïenne ?

Témoignage d'un ami :
une discussion hier soir avec des amis artisans menuisiers et designers d'intérieur. A les entendre, une petite boîte a quasiment besoin d'un temps plein pour gérer tous les litiges. Eux ont eu des problèmes
  • en particulier avec EDF (qui leur a imposé un changement de contrat qui leur est défavorable),
  • une assurance (qui les a trop prélevés pendant plusieurs mois à tort),
  • Bouygues Télécom (qui les a laissé 2 mois 1/2 sans internet alors qu'ils communiquent principalement par mail avec leurs clients et qui a fait appel à Numéricable comme sous-traitant pour faire les réparations. Numéricable semblait vouloir dézinguer la crédibilité de Bouygues)
  • des clients bien sûr qui trouvent mille raisons de ne pas payer
  • et AXA (qui leur a placé une mutuelle au dessus des prix du marché en leur faisant croire qu'ils avaient droit à un tarif de faveur).
  • Plus le service des impôts (qui a augmenté la taxe liée à leur local commercial de 300 à 750 €). Mais là, ce n'est pas un litige, il faut juste subir...
Les petites structures, même plutôt disposées à travailler en confiance, se sentent entourées de requins. Et ça serait particulièrement le cas en France. Mes amis ont travaillé au Canada où, de leur point de vue, les boîtes sont beaucoup plus prêtes à faire des procès quand ça ne va pas : de ce fait, le quotidien des affaires est plus réglo. Autre remarque intéressante de ces artisans qui ne sont pas français (iranien et canadien) : pour eux, l'administration en France est exigeante (il faut avoir un dossier complet pour faire une demande) mais efficace et prête à aider. Ca serait un gros point positif par rapport à ce qu'ils ont ont connu au Canada.
Voilà qui donne le spectacle d'une société où l'homme est un loup pour l'homme. Et le client, le dindon de la farce. N'est-il pas, par définition, en situation de faiblesse. Curieusement, il reste l'administration...

vendredi 14 février 2014

Serge Dassault

Hier, j'entendais la radio parler de Serge Dassault. La justice le poursuit apparemment avec acharnement. La gauche, une partie d'entre-elle au moins, aussi. Elle voulait faire voter à main levée les sénateurs, de façon à pouvoir punir les traîtres.

M.Dassault a demandé la levée de son immunité parlementaire. C'est probablement intelligent. Un vieillard qui fait front à une meute, c'est extraordinairement sympathique.

Dépression séculaire et limites à la croissance

On parle de "dépression séculaire" aux USA. Les meilleurs économistes seraient inquiets.

Il semble (ça paraît une évidence) que depuis les années 80, la croissance se soit faite à coup de bulles spéculatives. L'économie serait incapable de croître. Peut-être, faute de croissance démographique.

Dans ces conditions que faut-il faire ? Apparemment, le contraire de ce que l'on fait. Autrement dit, être imprudent, vivre comme s'il ne devait pas y avoir de crise, et dépenser à tort et à travers. "La vertu privée est le vice public" dit Paul Krugman.

Cela semble quelque peu malsain. Sommes-nous obligés de nous plier aux lois de ce système ? Ne pourrions-nous pas le changer ?

jeudi 13 février 2014

L'argent vote à droite

Les riches votent à droite. Est-ce leurs idées qui ont fait leur fortune ? Un économiste a fait une curieuse expérience. Il a suivi l'évolution du vote de gagnants de la loterie. Il a découvert que gagner, même peu, tend assez nettement à nous envoyer à droite. Et nous fait croire que la société est juste et le talent récompensé !

Profonde découverte. Elle pourrait pousser les partis politiques à la schizophrénie. La droite est élue pour taper sur les pauvres, mais elle a intérêt à les faire sortir de la misère. Et inversement pour la gauche.

Le dirigeant, handicap de l'entreprise ?

Et si l’obstacle au changement c’est le PDG lui même, que faut il faire ? Lorsque je parle de changement, voici une question qui revient souvent.

Je tends à répondre : Quand on n’a pas ce que l’on aime, on aime ce que l’on a. Devise du changement. Mais, à la réflexion, je pense que j'ai tort. En effet, j'ai fini par me demander si le changement ne pouvait pas être, en quelque sorte, une menace physique pour le dirigeant.

Voilà ce que j'ai observé, dans des changements que j'ai menés, et ce que j'ai entendu dans certains témoignages :

Un premier changement réussit. L'entreprise veut aller beaucoup plus loin. Le dirigeant bloque. Pourquoi ? Une hypothèse. Le dirigeant a fait l'entreprise à son image. Il ne se reconnaît plus dans une entreprise, certes performante, mais totalement transformée. Et peut-être même devenue dangereuse par son efficacité même. Cela me rappelle l'histoire que m'a racontée un mécanicien. Son patron avait vendu une Porsche à une personne un peu âgée, qui voulait impressionner une très jeune conquête. L'homme revient au garage en disant que la voiture n'avance pas. Concessionnaire et client vont l'essayer. Lorsque l'acheteur a senti la poussée que l'on pouvait tirer du moteur quand on savait conduire correctement le véhicule, il l'a immédiatement rendu.

Au fait, pourquoi le phénomène n'est-il pas identique pour l'employé ? Peut-être parce qu'aujourd'hui, il doit se remettre beaucoup plus souvent en cause que le dirigeant. Il est devenu adaptable. Peut-être aussi que la santé de l'entreprise compte plus pour lui et son emploi que la façon dont elle fonctionne. (Pour être honnête, ce type de blocage est beaucoup plus gênant chez le dirigeant que chez l'employé, c'est aussi probablement pour cela que l'on tend à lui accorder de l'importance.)

Invention du changement

Un doute m'a pris. Depuis plus de dix ans, mes livres parlent de changement. J'essaie de définir les lois du changement social. Plus exactement, les moyens de faire se transformer une société. J'ai l'impression de ne rien dire de très nouveau. Et si je me trompais ?

En creusant le sujet, voici ce que je constate :
  • Je suis surpris du peu de définitions que l'on donne de changement. C'est un peu comme si le mot n'avait pas besoin d'être expliqué, qu'il allait de soi.
  • On présente comme "le" changement, des changements spécifiques, qui sont adaptés à un type particulier de contexte, de structure sociale (par exemple, une équipe, une bureaucratie....).
  • Très souvent, aussi, le changement n'est pas neutre. On sous entend que le changement, c'est faire "le bien". Et qu'il n'y a qu'une façon de procéder. Cela semble le cas de Kurt Lewin, qui veut édifier une société démocratique.
  • Paul Watzlawick parle de changement un peu comme moi. Mais il s'intéresse à de petits systèmes. Ce qui semble un cas particulier. Encore une fois.
  • En termes de démarche, celui dont je semble le plus proche est John Kotter. Sa démarche est pragmatique. Il observe les gens qui font bouger les entreprises (ce d'où je viens), et il essaie de comprendre comment ils procèdent. Cependant, je pense qu'il a raté la dimension systémique du changement. Et je ne suis pas certain que le changement demande fatalement un leader. En outre, il parle de changements particuliers. 

mercredi 12 février 2014

Hollande copie Mitterrand?

M.Hollande fait un pèlerinage à la Silicon Valley comme M.Mitterrand. Dans les deux cas, après un coming out libéral. Je me suis rappelé avoir lu que M.Hollande se référait souvent à M.Mitterrand pour justifier ses propres attitudes. Serait-il guidé, inconsciemment, par son modèle ? Du coup, je me suis rappelé que M.Mitterrand, lui aussi, avait fait des guerres en Afrique. Un nouvel exemple de copie ? Et quid de la famille secrète de M.Mitterrand. M.Hollande n'a-t-il pas, lui aussi à nouveau, tenté d'avoir une double vie ?...

Étrange. M.Hollande aurait-il été, en quelque sorte, subjugué par M.Mitterrand ? Aurait-il vécu dans son ombre, plein d'admiration et d'envie, à tel point que le comportement de son maître se serait imprimé dans son inconscient ? Un telle prise de possession d'un vivant par un mort est-elle possible ? Il faudrait demander à un psychologue.

Sans aller aussi loin que ce billet, une recherche sur Internet montre que l'idée revient régulièrement. Sa conséquence naturelle serait que M.Hollande dissolve l'assemblée. De ce fait, il serait contraint à la cohabitation. C'est le meilleur moyen d'être réélu, comme l'a montré M.Mitterrand. (Mais la manœuvre est de M.Chirac.) Pour ma part, je ne vois pas comment M.Hollande pourrait justifier une telle dissolution.

La France est-elle une démocratie ?

Dans  une conférence, une participante chinoise m’interroge sur le bizarre comportement des Français : pourquoi autant de manifestations ? Parce que la France ressemble de plus en plus à une dictature.

Un principe qui devrait être le sien est l’équilibre entre l’exécutif, le législatif et la justice. Depuis de Gaulle, le législatif est à la botte de l’exécutif. Certes. Mais je viens de découvrir que la justice était en passe de le devenir aussi. Pourquoi ? Les deux plus hautes instances de la justice sont le conseil d’Etat et le conseil constitutionnel. Le premier est fait de hauts fonctionnaires, nommés, le second d’hommes politiques (!) et de hauts fonctionnaires (plus trois présidents). En quoi sont-elles indépendantes ? Ou représentatives des valeurs fondamentales pour la nation ? Or, elles peuvent casser des lois ou des jugements, ou, au contraire, en laisser passer qu’elles devraient casser, parce qu'ils peuvent rendre notre société bancale (par exemple en contaminant la constitution par des pratiques qui s'opposent à ses principes fondateurs).

Quel est le danger de ce dispositif ? Des mouvements de contestation violents. Et ils ne pourront qu’être organisés par des forces possédant des réseaux puissants,  ou jouant sur quelques-unes de nos aspirations les plus basses

mardi 11 février 2014

Le changement nous est-il imposé ?

Le changement dans la plupart des cas nous est imposé par des forces externes sur lesquelles nous n’avons pas beaucoup de poids. Comment distinguer entre ce que nous pouvons changer et ce qu’il faut accepter? Suite du billet précédent, et autre question intéressante :

Je pense que deux attitudes au changement ont marqué notre histoire :
  • Récemment, en particulier après guerre, nous avons cru que la nature était de la pâte à modeler. Tout était possible.
  • Jadis l'Eglise catholique nous disait que la nature nous imposait sa loi. Il fallait s'y soumettre.
Je pense, pour ma part, avec les Chinois, qu'il s’agit de profiter des vents favorables pour amener sa barque à bon port. Nous pouvons utiliser ce que nous ne pouvons pas modifier. (D'ailleurs, je ne suis pas certain qu'il faille modifier grand chose.)

Le changement est-il le même partout ?

Pensez vous que les conclusions auxquelles vous arrivez peuvent s’appliquer dans les grandes entreprises publiques, voire les administrations, voire le mille feuille administratif français ? me demande-t-on.

Pour répondre à cette question, il faut comprendre que réaliser un changement demande de résoudre deux problèmes de natures différentes :
  • un problème "technique" (par exemple, fusion d'entreprises) ;
  • un problème "humain", c'est la conduite du changement à proprement parler, c'est à dire faire évoluer un groupe d'hommes.
Le second problème ressortit à l'anthropologie. On retrouve de mêmes techniques que l'on s'intéresse aux évolution d'une cité grecque, d'une tribu, d'une nation, d'une entreprise ou d'une administration. Toutes sont des groupes d'hommes dont la vie est organisée par une culture commune. D'ailleurs, la première de ces techniques est l'écoute. Chaque communauté a ses lois, le changement doit les emprunter.

lundi 10 février 2014

MOOCs et importance du lien social dans l'enseignement

Un économiste s’intéresse aux conséquences des MOOCs :
  • Caractéristiques : lourd investissement de réalisation, des coûts quasi nuls d’utilisation. C’est un modèle presque inverse de l’Université, qui est soumise à des contraintes physiques et dont le « coût marginal » est très élevé.
  • La bataille devrait se faire sur la qualité. Comme pour les livres (les éditeurs devraient-ils se lancer dans les MOOCs ?), quelques cours devraient s’accaparer tout le marché. Faisant ainsi des stars d’une poignée de professeurs.
  • Les universités américaines se divisent en deux. Le bas de gamme qui devrait plus ou moins servir de support aux MOOCs ou périr. Le haut de gamme qui, lui, devrait impérativement ne pas collaborer avec les MOOCs. En effet son modèle est, en quelque-sorte, la « fidélisation » d’une élite étudiante qui, une fois fortune faite, en reverse une partie à son établissement d’origine. Pour cela il faut des liens humains exclusifs et forts.
Mes remarques :
  • Comme pour toute innovation, ses conséquences sont difficiles à évaluer, et laissées de côté. Quid des enseignants actuels, qui pourraient se trouver au chômage ? Et du modèle à adopter pour former les prochaines générations de professeurs, sachant que seulement quelques stars doivent survivre ? Quel rôle joue le lien social dans ce que l'on apprend à l'université, dans la capacité de l'élève à absorber efficacement beaucoup de connaissances... ? La force de Cambridge, par exemple, c’est que chaque élève est suivi par un superviseur, qui travaille avec lui en face à face. En outre, la vie sociale de l'étudiant et sa capacité à s'y faire remarquer, et à y jouer un rôle de leader (équipes sportives, clubs politiques, journaux universitaires, compagnies théâtrales...) sont vus comme des tests de ses qualités et sont décisifs pour sa future carrière. 
  • Internet a un effet très particulier. Son marché est souvent marginal (cf. les ventes de livres en ligne). Mais il conduit à un effondrement de ce qu'il attaque, qui était optimisé pour servir au meilleur prix son marché existant. Du coup, l'effet d'Internet peut être la disparition de services importants pour une grande partie de la population. Les MOOCs pourraient-ils avoir cet effet dévastateur ? D’un côté des formations extrêmement chères, du type de celle de Cambridge, désormais réservées à une élite de possédants ? De l’autre des cours d’accès facile et peu coûteux dont ne pourraient se tirer que quelques autistes ayant des talents et une volonté exceptionnels ? Ce qui ne leur ouvrirait, pour autant, pas de carrières magnifiques, celles-ci étant réservées à ceux qui ont des liens avec le meilleur monde, et qui savent s’y bien comporter ?
Peut-être serait-il bien de faire un minimum d’expérimentation avant de les laisser dans la nature ? En fait, ce qui ne va pas dans cette affaire, c'est le modèle du marché. Tout se passe comme si nous assistions impuissants à un combat que nous ne pouvons pas influencer, mais qui va déterminer notre sort. Or, si les MOOCs ont des vertus, elles ne peuvent pas remplacer celles de l'enseignement traditionnel. La question qui se pose est donc : comment maîtriser le "marché", afin d'avoir le meilleur de l'innovation et de la tradition, sans que l'un ne tue l'autre ?

dimanche 9 février 2014

Dynamisme africain

Dynamique Afrique. C’est nouveau, elle développe une industrie pour ses propres besoins. Tout lui est favorable : éducation, gouvernements et infrastructures qui s’améliorent ; main d’œuvre qualifiée chinoise qui reste sur place ; « migration des emplois de fabrication asiatiques ». Israël va-t-elle connaître le sort de l’Afrique du sud pré Apartheid ? Il devient mal vu d’y investir. La Pologne ne sait pas quelle politique énergétique adopter. Gaz de schiste ou nucléaire ? Gros investissements. En attendant 80% de son énergie vient du charbon. M.Hollande va en Amérique. Il veut afficher son nouvel amour du marché. Mais peut-on le croire ? L’Allemagne va-t-elle sortir de sa politique de non intervention militaire ? Elle l’envisage sérieusement. Aujourd'hui ses intérêts la poussent à appuyer la Chine et la Russie… En Ukraine, l’Europe revient dans le débat. Elle pourrait chercher à ramener le pays vers l’Ouest, grâce à des mesures économiques, à une promesse d’adhésion à l’UE, et en menaçant les intérêts financiers des meneurs de l’autre camp.

Aux USA, B.Obama a déporté deux millions d’immigrés plus ou moins illégaux. Pour cela une impressionnante logistique a été mise en place, faisant mentir ceux qui accusent d’incompétence le service public. Le pays est aussi un champion toutes catégories de la politique agricole. Il subventionne massivement ses (riches) producteurs. Il les assure même contre ce qui peut faire baisser les prix. (Ce qui est aussi bon pour les assureurs, payés par le contribuable.) Et il offre un très généreux programme d’alimentation gratuite au nécessiteux. Quant aux négociations de libre échange, M.Obama les présente comme devant « protéger nos travailleurs, protéger notre environnement et ouvrir de nouveaux marchés aux produits américains », mais les Républicains ne sont pas convaincus. Par ailleurs, les riches se marient entre eux. Ce qui amplifie les inégalités. Et l’Américain semble penser que les Républicains roulent pour le « riche au cœur froid », alors que les Démocrates ne voient que par le « pauvre indigne ». Un pipeline doit apporter le gaz de schiste canadien aux USA. Les Américains semblent ne pas en vouloir. Au motif qu’ils ont suffisamment de leur propre production. Donc que le gaz de schiste canadien est polluant. Aung San Suu Kyi présidente ? On ne semble pas pressé de faire l’évolution constitutionnelle nécessaire. Champ de mines en Thaïlande. La dernière élection n’a rien changé. Un Raminagrobis local pourrait-il mettre d’accord les plaideurs ? Le Japon part de plus en plus à droite, et encadre la liberté de parole de sa presse. En Chine, l’élu apprend à parler à la démocratie, et le gouvernement veut forcer les entreprises à mettre en œuvre sa politique environnementale par la pression populaire.

La mode est maintenant à l’échange de services publics d’une nation à une autre.

BP s’est rétréci et s’est affaibli. Il est très dépendant de la Russie. Risque-t-il une OPA ? Raison ? Deepwater Horizon. Mais surtout un management qui n’a pas été « excellent »… Google a un différend avec l’UE. Sa plate-forme de recherche favorise un peu trop ses intérêts. Apparemment, l’UE et Google sont las de l’affaire. Et veulent y mettre un terme, même si la solution trouvée n’est pas dans l’intérêt collectif. Microsoft, toujours gros, mais qui n'arrive pas à être mobile, aurait choisi le bon PDG. Le canal du panama est en cours d’élargissement. Ceux qui participent aux travaux se disputent. L'économie mondiale découvre d’autres routes.

Fin de la bulle des business schools.  C'est « une des rares professions où ne pas obéir à ses propres règles est quasiment une condition de recrutement ». Capturées par un corps enseignant indéboulonnable, plombées par des coups salariaux colossaux, leur « esprit moutonnier » leur garantit l’abattoir.

Finance mondiale. Pas de crise en vue. La politique monétaire européenne et japonaise prend le relais de l’américaine, ce qui garantit que les capitaux continuent à aller vers les émergents. La baisse des cours des actions correspond à une prise de bénéfice. Une étude montre que la motivation par bonus tend à pousser le dirigeant à sous-investir. Contrairement à ce que l’on pensait, les bidonvilles (« un tiers de la population des pays en développement ») ne serait pas un meilleur ascenseur social que la campagne. Causes ? Prix de l’immobilier et épidémies, en particulier.

Allons-nous tous être des OGM ? En tout cas, les biotechnologies commenceraient à fonctionner. De nombreuses manipulations génétiques sont tentées. Utiliser des virus (dont le HIV) pour modifier un gène, recoder le système immunitaire pour qu’il détruise les mauvaises cellules ou les gènes qui les produisent. Respirer du xénon améliorerait les performances sportives russes. 

La nouvelle économie avait-elle raison ?

La paradoxe des limites à la croissance me fait penser, qu’une fois de plus, j’ai eu tort. Dans les années 90 a existé quelque-chose que l’on a appelé « la nouvelle économie ». Cela allait de pair avec la bulle Internet. Des gens très sérieux disaient que les Soviétiques ayant bu un bouillon, et Internet ayant liquidé les « coûts de transaction », le marché allait dominer le monde, il n’y aurait plus de crises, et nous croîtrions de 4% par an. (Une référence.)

J’avoue avoir cru que nous étions en face d’un avatar du millénarisme. Probablement, beaucoup de gens me donneraient raison aujourd’hui. Sauf moi.

En effet, je soupçonne qu’il y a un fond de raisonnement juste derrière la nouvelle économie. Imaginons que, du jour au lendemain, apparaisse un nouveau pays. Il aime ce que nous produisons, et inversement. Nous nous mettons à échanger. Nous avons un nouveau client, il a un nouveau client. Il nous paie avec l’argent que nous lui donnons. Des deux côtés l’activité augmente. Ce qui s’est passé avec la chute des Soviétiques ressemblait à cela. Du jour au lendemain la taille du marché était décuplée. Pourquoi cela n’a-t-il pas fonctionné ? Je soupçonne que c’est parce que les nouveaux pays n’avaient rien à nous proposer. Et qu’ils n’ont pas su mettre en valeur ce qu’ils avaient. En dehors de leurs matières premières, qui avaient un prix de marché. Du coup, nous avons dû déshabiller Paul pour habiller Jacques. 

samedi 8 février 2014

Aux armes, citoyens !

Il y a quelques temps, j'ai fait relire un article que je destine au JDN. Commentaire : c’est un article « citoyen ». J’ai aimé cette expression.

Il est difficile lorsque l’on a une activité commerciale d’émettre une opinion qui n’est pas biaisée par ses intérêts. Et je suis un consultant. Eh bien, il me semble qu’il faut avoir le courage de dire ce que l’on pense. Nous appartenons à une démocratie, et son principe même est l’échange d’idées et le débat. D’ailleurs, la liberté a-t-elle un prix ?

Il me semble surtout que la liberté de parole n’a jamais été aussi menacée, justement par la censure de l’intérêt. Il suffit de considérer l'extraordinaire appauvrissement de l'expression médiatique entre la période gaulliste, prétendument totalitaire, et le règne actuel du marché. (Quand je pense que l'on parlait de "radios libres" dans ma jeunesse ! Mais, en quoi l'étaient-elles ?) Or, manifestement, la pensée unique est incapable de nous sortir de la crise. Il faut chercher ailleurs. Et on n'y arrivera pas si l'on ne se dégage pas de la censure. 

vendredi 7 février 2014

Changement en Suède

Comment se passe le changement en Suède, est-il plus facile qu’en France ? Voici la question que j’ai posée à Thomas Krän, spécialiste du management interculturel et Suédo-Américain, marié à une Française…

Ce qui domine la Suède c’est la nécessité du consensus. Les idées viennent de partout, beaucoup d’en bas, et sont appliquées par tous impeccablement du fait de ce consensus. Nos grèves, nos manifestations de rue, nos insultes, le comportement de notre ministre du redressement productif… laissent le Suédois perplexe.
Comme en Allemagne, les syndicats ont une influence importante dans l’entreprise. Ce qui a l’avantage, sur le modèle français, de produire une culture de responsabilité, et un large partage des réalités de l’entreprise et de son environnement concurrentiel.
Ce modèle, cependant, n’est pas d’origine. Il a été adopté dans les années trente, pour mettre un terme à une lutte des classes violente. Après guerre la Suède s’est refondée sur le principe que l’homme est bon, et que l'on peut lui faire confiance. Dans les années 90, elle a constaté que cette hypothèse était erronée, et qu’elle l’avait conduite "droit au mur". Elle a donc dû en changer. La Suède est mieux gérée et moins généreuse pour sa population qu’elle ne l’a été.

Alors, le changement se fait-il sans heurts en Suède ? Il tend, surtout, à ne pas se faire. Lorsqu’il s’agit de se réinventer, les entreprises suédoises ont beaucoup de mal à se transformer. Et c’est souvent le marché et sa destruction créatrice qui est l’agent du changement. Faute de pouvoir évoluer, l’entreprise suédoise disparaît. Et elle est plus souvent la cible d’une acquisition qu’elle n’acquiert.

Quelles sont les entreprises qui créent des emplois ?

Message de la Harvard Business Review, qui me laisse rêveur :
Les entreprises qui prennent la part du lion de la création d'emplois - et qui ont le plus gros impact sur l'économie - existent depuis environ 25 ans, et appartiennent à des secteurs traditionnels tels de l'alimentaire, l'immobilier, la construction, le commerce, la logistique et l'industrie.
Nos politiques et nos entrepreneurs qui sont aveuglés par Internet, Big data et les start up, ne font-ils pas fausse route ?

(L'article auquel est lié le dit message est ici.)

La France et le changement

Je demande à mes élèves ce qu’ils aimeraient voir changer à l’université. Riche débat. Beaucoup d’idées. Je leur propose de les mettre en œuvre. Je ne leur ai pas dit que je distingue des choses simples à faire. Et que je perçois des frustrations identiques aux leurs au sein du corps enseignant et de l’administration (pour ma part, je ne me plains de rien) : je soupçonne donc qu’il n’y aurait pas de résistance au changement. Et je suis prêt à donner une note exceptionnelle aux volontaires. Mais, il n'y en a pas.

Il y a probablement là quelque-chose de culturel. Nous, Français, nous protestons beaucoup, mais nous ne faisons rien. Chez nous la protestation vaut action ? Ou croyons-nous que pour agir il faut du pouvoir, or, nous n’en avons pas ? Et, quand nous en avons, comme notre président, nous réalisons que nous ne pouvons rien faire ? Parce que le vrai pouvoir est chez ceux qui ne croient pas en avoir ?

jeudi 6 février 2014

Réjouissons-nous, nous allons de l'abondance à la pénurie ?

Et si notre avenir devenait visible ? Depuis ses débuts, ce blog affirme que nous vivons un changement, mais qu'il ne sait pas où il va nous mener. Et si l'on commençait à y voir clair ?
  • Depuis mon enfance, j'ai l'impression de traverser une crise interminable. Or, je viens de comprendre que les entreprises, du moins les très grandes, ont très bien vécu ces dernières années. Pour elles, la crise, c'est maintenant ! Pourquoi ? Parce qu'elles ont écrasé leurs coûts grâce à la main d'oeuvre gratuite de l'Est, et surtout, à la pression qu'exerçait sa menace sur les salaires et les sous-traitants de l'Ouest ; mais pas leurs revenus : les salariés et les sous-traitants de l'Ouest ont été maintenus à flots par la dette et les subsides de l'Etat. 
  • Conséquence : des entreprises organisées pour l'exploitation de l'homme, de la société et de la nature, pas pour la création, l'innovation. Plus exactement : bureaucratie hyper informatisée pilotée par le haut, qui collecte le salaire de l'exploitation (appelé "création de valeur").
  • Aujourd'hui. C'est fini, c'est la pénurie. Déflation, dettes, crise, chômage, pollution, épuisement des ressources naturelles, renaissance des nationalismes, concurrence en hausse, et multinationales qui ne savent plus à quel saint se vouer.
  • Doivent-elles aborder un nouveau modèle ? Il me semble qu'il commence à émerger. C'est quelque-chose qui ressemble au modèle japonais dont on parlait tant dans les années 80. Écosystème, spécialisation, chasse au gaspillage, confiance, création, innovation...
Et si, paradoxalement, nous pouvions renouer avec la croissance ? 

Poutine, de Gaulle russe ?

The Economist répète que ce que désire M.Poutine, c’est le respect. Il aimerait que son pays retrouve l’image qu’il a eue à l’époque de l’Union soviétique. Il ne serait pas très difficile de lui faire plaisir, donc d’éviter qu’il se rende nuisible pour se faire remarquer. Mais la Russie est tellement insignifiante que M.Obama ne parvient même pas à faire semblant.

M.Poutine aurait-il le complexe de Gaulle ? Un complexe au dessus des moyens de la Russie (et de la France) ?

mercredi 5 février 2014

Politique de la famille

Hier, j'entends dire que le gouvernement retire une loi sur la famille. De quoi s'agit-il ? Voici ce que j'ai retenu des informations de France Culture ou Musique (mon seul lien avec le monde) :
  • Premier temps
    • J'entends parler de manifestations. Deux caractéristiques : beaucoup moins de participants que ce que disent les organisateurs ; ils protestent contre des mesures (PMA, GPA ?) qui ne sont pas dans le texte. 
    • On évoque une "théorie du genre" (qu'est-ce que c'est ?), pour nier qu'elle soit au programme.
  • Brutalement. Le texte est retiré. Des députés socialistes (France Culture / Musique n'interviewe qu'eux) le regrettent. Ils auraient aimé, si je comprends bien, discuter PMA, GPA. Ce qui semble vouloir dire que, si ce n'était pas dans le texte, il y avait un moyen de l'y mettre (amendement). 
Voici la fâcheuse impression qui ressort de tout ceci :
  • France Musique / Culture ment. Les manifestants, que j'étais prêt à prendre pour l'incarnation du mal, avaient-ils raison ? 
  • Le gouvernement essayait-il, effectivement, de faire passer, en sous-marin, un texte concernant la famille ?  S'en prend-il à des valeurs culturelles fortes pour au moins une partie de la population ? Et ce, sans débat démocratique, puisque la 5ème République est explicitement construite pour qu'il n'y en ait pas. 
Petit à petit, j'en suis arrivé à me demander si le combat de la gauche, d'une partie avancée de celle-ci ?, n'est pas de faire triompher quelque chose qui vient peut être de 68. Quelque-chose qui tiendrait de "il est interdit d'interdire", et, curieusement, d'un anti "travail, famille, patrie" de Pétain. Autrement dit, c'est le droit de l'individu de profiter de la vie sans contrainte aucune. (N'est-ce pas, au fond, ce que révèle la vie privée de notre président, ce que l'on n'attendait pas de lui, et qui choque parce que cela le fait passer pour un Tartuffe ?)

Mais profiter de la vie, signifie la lutte de tous contre tous. C'est le triomphe du plus fort. Nécessairement de l'oligarque, de celui que la société a placé en situation de l'exploiter. Étrangement, c'est une vision libérale du monde. Il y a longtemps, j'ai entendu La suite dans les idées parler de Michel Foucault. A la fin de sa vie, il s'était mis à lire les textes de Hayek et des libéraux (ceux que l'on appelle les néoconservateurs), et il avait été follement séduit. Il y avait trouvé sa quête de la liberté. Le refus de la société. Mais cette vision de la liberté n'est pas celle des Lumières, de Rousseau ou de Montesquieu. Pour eux, la liberté ne peut se réaliser que si l'homme est protégé de ce qui peut l'écraser. S'il doit lutter, il doit le faire à armes égales. Ces idées ne demeurent-elles pas, globalement, les nôtres ?
(Ce billet illustre probablement ce que disait une journaliste au sujet du président : "ceux qui ne savent pas parlent, ceux qui savent se taisent". Pour ma part, je crois que la démocratie, c'est parler, c'est le logos des Grecs, quitte à dire des bêtises.)

Nous sommes des croyants

C'est étonnant à quel point ce que nous croyons éternel est récent.
C'est étrange comme les modes changent, et comme des gens bien intentionnés défendent des idées récentes, que leur tendance a combattu. Au fond nous sommes des croyants. Et notre religion, avec ses mythes et ses saints, n'arrête pas de se renouveler.

mardi 4 février 2014

De l’offshoring au nextshoring

L’offshoring, c’est fini. Pendant un temps, l’Ouest a donné son savoir-faire à l’Est, en échange d’une main d’œuvre gratuite, ou presque. Aujourd’hui, les salaires émergents ont augmenté, ce qui a créé de nouveaux consommateurs. Parallèlement, les marchés se sont fragmentés, chacun développant ses goûts. La nouvelle règle du jeu est le « nextshoring » : produire à proximité du marché local, en construisant et faisant évoluer un « écosystème » de sous-traitants innovants et de centres de formation. Ce qui demandera un nouveau type de management, décentralisé et habile. Les coûts salariaux ne sont plus une variable déterminante. Voilà, ce que j’ai compris de ce que dit McKinsey.  

Payer cher ses employés est bon pour l'entreprise

Inattendu. Un article explique que l'augmentation du salaire minimum est bonne pour les affaires de l'entreprise. Raison : plus une ressource est chère, plus on cherche à bien l'utiliser ! L'augmentation des salaires rend l'entreprise intelligente.

(C'est un argument que l'on retrouve en ce qui concerne l'immigration. Une main d'oeuvre mal payée encourage l'entreprise à ne pas chercher à s'améliorer. C'est mauvais pour l'innovation et la productivité.)

lundi 3 février 2014

Target costing : le retour

Ce blog dit que nous revenons à une période de pénurie (un exemple). Les entreprises font face à un marché en crise. Il va de plus en plus leur imposer des prix qui sont au dessous de leurs coûts.

Il y a une technique pour ce type de situation : le target costing. Elle est relativement simple à comprendre, quoi que difficile à mettre en œuvre. Il s’agit de se donner un objectif de rentabilité et de s’assurer en permanence, de la conception à la vente du produit, qu'elle est au niveau voulu. On met en place une sorte de système (au sens systémique) qui, continûment, mesure l’écart entre prix et coûts et peut être amené à réinventer l’organisation de production de façon à atteindre l’objectif (difficulté).

Le target costing serait apparu chez Toyota en 59. Il a ensuite été adopté par l’ensemble de l’industrie automobile. Mais sous une forme tronquée. Alors qu’au Japon, le principe de la démarche était une mobilisation du génie collectif (notamment celui des sous-traitants), en Occident, on a préféré le rapport de force. Ce qui n’est pas durable : ça compromet la survie des sous-traitants, en particulier, et ça ne stimule pas la créativité du groupe. Or, c’est le principe même du target costing, qui est une sorte de changement permanent.

Le target costing bien compris ne conduit donc pas au licenciement, mais à l’innovation. Et il est anti déflationniste puisqu’il permet de s’assurer que l’on ne vend jamais un bien au dessous de sa valeur. Si votre client veut « moins cher », il aura « autre chose ».

Tout ceci demande un management (notamment de terrain) compétent et résolu et une culture du contrôle de gestion développée. Ce que peu d’entreprises françaises ont. En revanche, elles possèdent peut-être l’essentiel : la culture de l’exploit.

(Quelques références :
  • Target Costing and Kaizen Costing in Japanese Automobile Companies, Monden and Hamada, Journal of Management Accounting Research, automne 1991. 
  • Toyota Motor Corporation : Target Costing System, Robin Cooper et Takao Tanaka, Harvard Business School, 1997. 
  • Restoring the relevance of Management Accounting, Tochori Hiromoto, Journal of Management Accounting Research, Automne 1991. 
  • Japanese Cost Management Practice, Robin Cooper, CMA Magazine, Octobre 1994.)

Les limites de la démocratie

Nous avons repris une idée grecque, les Américains, en premier : du débat démocratique sort la vérité. Est-ce juste ? De temps à autres, j'envoie une question que je me pose à un groupe linkedin, en espérant y trouver quelque réponse utile. Je suis généralement déçu.
  • La plupart des participants apporte une opinion de peu d'intérêt, parce qu'elle ne reflète qu'une expérience limitée, ou qu'elle est une rationalisation de telle ou telle idée reçue.
  • Les contributions utiles sont soit des témoignages d'expériences personnelles (opinion subjective, mais sans généralisation abusive) soit indirectes : elles signalent des travaux d'experts ou des expériences peu connues. 
En bref, pour qu'une contribution soit utile, il me semble qu'elle doit résulter d'une expérience ou d'un travail d'enquête et de synthèse (du type de celui que font les chercheurs). Conséquences (à creuser) :
  • Si la démocratie construit ses décisions sur la confrontation de ces expériences clés elle sera efficace. (C'est peut-être ce que l'on entend par "démocratie représentative".) 
  • Le "bon sens populaire" (notre instinct) doit trouver convaincant ce qui sort d'une telle confrontation. Mais il peut probablement aussi être manipulé, si l'on étouffe les "expériences clés", et qu'on lui lance des idées qui exploitent le peu de profondeur de sa réflexion, ou vont dans le sens de ses intérêts à court terme. 

dimanche 2 février 2014

Méfiance et écosystèmes

Les tendances du moment. Ce qui caractérise les marques, c’est la méfiance qu’elles inspirent au marché. Les entreprises se demandent comment le manipuler pour qu’il les aiment de nouveau. Il faut prendre le peuple par les émotions. En effet, la société américaine est lasse des donneurs de leçon et de leurs grands principes (les droits de tels ou tels…). L’argent étranger fuit les pays émergents. Il revient aux USA, depuis qu’ils ralentissent leur politique d’innovation monétaire. Hier, on les appelait les BRICS, aujourd’hui, ils sont « fragiles ». Mode des écosystèmes. Le paresseux à trois doigts est un champion de l’économie d’énergie. Sa recette ? Il entretient sur son pelage une algue, des champignons et une mite. Tout cela fournit une partie de sa diète. L’ordinateur va-t-il remplacer l’enseignant ? Il pourrait aider à corriger les faiblesses de l’enseignement traditionnel (qui est chiant, tue toute créativité et dégoûte de ce qu’il enseigne), sans renoncer à ses vertus, dont les bénéfices sont indirects, et qui sont fondamentales pour construire l’esprit humain.

Les bêtes noires de The Economist. Russie. M.Poutine a utilisé l’argent du pétrole pour maintenir la Russie d’hier. Mais cela ne marche plus. Les élites russes pourraient le lâcher. Vers une dislocation du pays ? Idem pour le Vénézuela et l’Argentine (soja plutôt que pétrole, pour cette dernière). Ces pays sont en proie à l’inflation et ne peuvent plus payer leurs importations. Angleterre. L’Ecosse va-t-elle faire sécession ? Probablement non, mais The Economist craint une perfidie de dernière minute des indépendantistes. M.Miliband, finalement. Son discours vise « les 40% de l’électorat qui partagent l’expérience d’un salaire faible et de prix en hausse. » (Quant à la France, n'inspire-t-elle plus que de la pitié ?)

Business as usual. USA. Discours sur l’Etat de l’Union. M.Obama, président impuissant, n’a rien à dire. En Ukraine et en Thaïlande, les guerres civiles locales ont connu une accalmie. En Turquie, le pouvoir de M.Erdogan semble s’éroder. Mairie de Paris. Match Hidalgo / NKM. Problème d’image : ombre de M.Delanoë contre morgue aristocratique. L’une veut diluer la composition sociologique de la population en subventionnant le logement social, l’autre joue la classe moyenne, de plus en plus écrasée entre « le riche et le pauvre subventionné ». Toutes deux veulent sortir Paris de sa léthargie. M.Karzai veut régler ses comptes avec les USA, ce qui pourrait laisser l’Afghanistan aux mains des Talibans. Attendons son départ. Développement durable. La qualité de l’eau et de l’air se dégrade, mais la Chine a fait des pas de géant en termes de réduction d’émission de CO2.
Pourquoi l’Angleterre embauche mais ne croît pas ? Pourquoi est-ce l’inverse aux USA ? Parce qu’en Angleterre, l’inflation attaque les salaires et rend la machine plus chère que l’homme. C’est l’inverse aux USA. On ne sait toujours pas quoi penser du Bitcoin. Outil de blanchiment pour truand ou innovation financière ? La tentative de réforme du système bancaire européen pourrait forcer la BNP et d’autres à des restructurations douloureuses. Walmart cherche à se réinventer. « Ecosystème » (c’est à la mode) de magasins de proximité et de vente en ligne. Les conglomérats familiaux turcs ont pris le meilleur de tous les mondes : paternalisme rassurant ; diversification internationale, qui les protège de leur crise locale ; refus d’engagement politique, qui leur évite les mauvais coups. La Chimie européenne (même allemande) va mal. Concurrence des Chinois « appuyés par l’Etat », et des Américains, portés par le gaz de schiste. Espoir ? Que le marché européen de l’automobile relève la tête. La nouvelle mode Internet : la santé en ligne. Suivi automatisé, permanent, de notre santé. C’est supposé faire faire des économies à la sécurité sociale, bien que rien n’ait pu être démontré. Pas grave. Il y a les hypocondriaques. « (Les entreprises du secteur) peuvent compter sur l’armée des technophiles qui poussent leurs médecins à incorporer les nouveautés dans leur traitement. » (Vraie cible des fonds d’investissement : remboursement par la sécurité sociale ?) Par ailleurs, pour améliorer les soins, on multiplie les indicateurs. Rien ne disparaît, tout se transforme ? On reconstitue l’ADN de l’homme de Neandertal à partir de ce que ses croisements avec notre espèce nous ont laissé. 

Régime sans gluten

On me parle de régime sans gluten. Certaines personnes ne le supportent pas du tout. D'autres, difficilement. On me dit aussi que des raisons économiques (faciliter sa récolte ?) auraient conduit à développer des variétés de blé que nous tolérerions mal.

Je ne sais pas ce qu'il en est de ce dernier point. Cependant il pourrait illustrer un des vices de l'économie de marché. Le fait que l'on prenne des décisions qui concernent notre vie, sans nous consulter. Certains Anglo-saxons ont voulu démontrer l'équation démocratie = marché. Mais elle ne convainc que le vrai croyant. Pour ma part, il me semble que c'est à la démocratie de définir ce qu'elle veut, et ensuite aux entreprises de le lui fournir. Tout le monde y trouve son compte. L'entreprise n'a pas à créer notre besoin ; elle possède un objectif clair et rassurant. Quant à nous nous y gagnons la maîtrise de notre sort. Ce serait une réinvention de la planification. Mais démocratique, et non plus technocratique.

samedi 1 février 2014

Qu'est que la croissance ?

Les limites à la croissance disent que la croissance est le mal de l'humanité. Mais ils n'expliquent pas ce que c'est que la croissance. Sinon que ce serait une sorte de tendance à la spéculation. C'est à dire à la négation des limites physiques de la nature. Ce n'est pas très satisfaisant. Une idée de modélisation m'est venue :
  • Chaque année nous produisons des produits consommables + une capacité à produire (des machines, mais aussi des connaissances nouvelles). J'appelle dans la suite les uns P, l'autre C.
  • Cette capacité à produire, l'année suivante va, de nouveau produire des produits et de la capacité à produire. 
  • Cependant une grosse partie de la capacité à produire se maintient d'une année sur l'autre (machines). Il est donc logique de penser qu'elle croit. On passe de C à C + dC, d > 0. Et la production passe de P à P + dP. Si d tend à avoir une valeur constante. On a une croissance exponentielle. 
Ceci ne résout rien, mais pose de curieuses questions :
  • La croissance pourrait avoir quelque-chose de naturel et de sain. C'est la croissance de nos connaissances. C'est le fait que nous en laissons plus à nos enfants que ce que nous avons trouvé. Ce peut-être aussi la croissance de la "résilience" de l'espèce : nous accumulons une sorte d'expérience qui nous permet de résister de mieux en mieux aux chocs, d'être de plus en plus durables. 
  • La croissance que craint Les limites à la croissance serait une croissance malsaine, peut-être parce que sa production P n'est, paradoxalement, pas consommable. Elle donne quelque-chose que la nature ne parvient pas à retraiter (thèse du berceau au berceau). 
  • Y a-t-il eu toujours croissance ou n'a-t-elle démarré que récemment ? Il n'est pas impossible que nous ayons trouvé de nouveaux moyens de stocker notre savoir (notamment les machines), qui font qu'il se perd moins que par le passé.
Ce qui m'amène à une idée encore plus étrange. Et si notre croissance actuelle était liée au matérialisme ? Il aurait fait notre fortune en nous permettant de rendre durables nos acquis. Mais il menacerait maintenant notre survie, en produisant du déchet non réutilisable. Cela signifierait alors que, si l'on veut un développement un peu plus durable, il faut réserver le non dégradable à la production de connaissances, et en faire un usage parcimonieux, et, pour le reste, s'assurer qu'il va se dissoudre dans la nature, qu'il est, effectivement, consommé. Pour une vraie société de consommation ?

Idiot ? 

Et si Thucydide avait raison ?

Quand j'ai une minute, je lis La guerre du Péloponnèse de Thucydide. Fort bon livre fort bien écrit. Régulièrement, nos ancêtres se sont étonnés de sa modernité. Je ne ferai pas exception à la règle. 

Que dit Thucydide ? Les Grecs défont les Mèdes. Exploit extraordinaire pour un peuple de va-nu-pieds face à une superpuissance riche et centralisée. La victoire acquise, les cités grecques, Athènes en particulier, appliquent leur esprit d'entreprise au développement de leurs affaires. Rapidement, c'est la guerre du Péloponnèse. Athènes et ses alliés (en fait des cités asservies) contre le reste de la Grèce. Mais surtout, revirements d'alliance incessants, dans chaque cité les oligarques contre le peuple, et, finalement, tout le monde contre tout le monde, et chacun pour son intérêt. La médiocrité liquidant la valeur, Athènes, qui avait tout pour gagner, est défaite par sa propre incompétence. Mais il n'y a pas de vainqueur. Car toute la Grèce est exsangue. Alexandre n'en fera qu'une bouchée. Puis viendront les Romains.

Et le parallèle ? C'est la fin de l'empire soviétique. Depuis 25 ans, l'individualisme occidental s'est répandu sur le monde comme la vérole sur le bas clergé.

(L'Anabase de Xenophon semble n'être rien d'autre qu'une variante de la même leçon. United we stand, divided we fall.)