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vendredi 31 mai 2013

Isaac Asimov peut-il sauver l’espèce humaine ?

Dans Fondation, Isaac Asimov imagine qu’un savant est capable de prédire les moments où l’espèce humaine va être sur le point de disparaître. Tout dépendra alors d’une décision. Cela ressemble à un enseignement de systémique. Notre « éco-système » permet la vie humaine. Mais les systèmes changent à « effet de levier »… (Tout le débat sur l’effet de serre se retrouve ici : il est possible que nos émissions de carbone fassent basculer le système terrestre, et que la vie humaine ne soit plus possible après le basculement.)

Et si l’on parvenait à prévoir ces changements, pour éviter qu’ils ne tournent mal pour nous ? Rassemblant mes deux idées du moment, l’une sur la relance de l’économie par la recherche et l’Etat, l’autre sur la banalité du mal, je me demande s’il n’y a pas ici une solution commune. Et si la recherche mondiale combinait ses efforts pour suivre les conseils d’Isaac Asimov ? Si nous arrivions à mieux comprendre les mouvements de la nature, à nous y insérer comme jadis les chasseurs cueilleurs, peut-être que nos changements sociétaux deviendraient beaucoup moins douloureux pour l’individu ? 

jeudi 30 mai 2013

Crise et culpabilité de l’Etat

Suite de la série la culpabilité de l’Etat. Pendant des années l’Etat a subventionné l’automobile en multipliant jupettes et baladurettes. Cette croissance artificielle a probablement encouragé les constructeurs français à ne pas changer. Pire, peut-être, à désinvestir. (J’ai entendu dire par l’auteur d’un rapport sur la santé de PSA, que la famille Peugeot avait prélevé 6md€ sur la société.) D’où un effet pro-cyclique : le parc étant neuf, le marché n’a pas de raisons d’acheter, et les constructeurs n’ayant pas été soumis à la concurrence n’ont pas eu de raison de maintenir à niveau leur outil de production et leur gamme.

Je me demande aussi, si avoir déréglementé les télécoms en pleine crise n’était pas une erreur. Logiquement cela devrait conduire à des plans de licenciement chez les concurrents de Free. A moins que les économies faites par les consommateurs ne créent de l’emploi ailleurs. Encore faut-il que cet argent ne soit pas économisé, et que cet « ailleurs » soit en France.

Tout le drame de la rigueur est peut-être dans ces exemples. Elle veut nous punir des erreurs que nous avons faites. Or, ces erreurs, aujourd'hui, seraient probablement les solutions à nos problèmes… Ne serait-il pas bon que nos gouvernants sortent d’un mode de prise de décision réflexe, essentiellement inspirée par des modes, et envisagent les conséquences à long terme de leur action, en particulier en prenant en compte leurs conséquences sur l’emploi ? Ne faudrait-il pas aussi qu’ils s’assurent que leurs décisions donnent ce qui était prévu ?

mercredi 29 mai 2013

Changement, enfants, crise et systémique

Je lis un livre sur la société grecque au temps de Périclès. A cette époque, l’amour est entre hommes. Parler d’amour entre un homme et une femme est suspect. A Athènes, la fillette vit cloîtrée dans la maison de ses parents, jusqu’à sa puberté, elle est alors mariée, et vivra cloîtrée chez son mari. Il y a d’ailleurs une sorte de division des tâches entre femmes. L’épouse pour tenir la maison et produire des enfants - l’homme la voit d’autant moins qu’il est préférable d’avoir peu d’héritiers ; les concubines pour les soins ; les prostituées pour le plaisir. Quant aux enfants, ils n’ont aucun droits, ils peuvent être déposés sur les ordures à leur naissance (ils meurent ou sont récupérés pour devenir esclaves), ou vendus comme esclaves. (Les esclaves sont assimilés à des biens mobiliers.)

Cela peut paraître bizarre. Mais c’est une illustration de ce que le système fait l’individu. Nous sommes conditionnés par notre environnement. Il en est de même aujourd’hui pour la génération Y. Elle appartient à un système qui n’est pas celui de ses parents. C’est parce qu’ils lui appliquent les règles qui avaient cours de leur temps que ceux-ci n’arrivent pas à la comprendre. Parents et enfants sont des étrangers ? (L’affection étant hors système, heureusement ?)

Quand il y a changement de système, il y a rupture de continuité entre règles de vie. Pour vivre et agir dans le nouveau système, il faut adopter les méthodes de l’ethnologue. Il faut observer les natifs du système, et déduire de leur comportement leurs règles de vie, puis s'y conformer. Voilà peut-être les raisons de notre crise et sa solution. Notre système-monde a changé. Nous devons apprendre ses nouvelles règles. Mais nous nous acharnons à appliquer les anciennes. 

Michel Serres contre Hannah Arendt

Michel Serres m’avait réconcilié avec le monde, mais Hannah Arendt a ramené mes idées noires. Ma lecture des ouvrages traitant de l’évolution de la société me fait croire, en effet, à une tentation d’oppression de l’homme par la société. Ce qui est aussi son idée.

Plusieurs hypothèses me sont venues en tête pour expliquer ce phénomène. La première est que cette oppression est une loi de la nature. Le rôle du constituant n’est-il pas d’être asservi au tout ? Ne faisons-nous pas souffrir nos cellules ? Mais il est aussi possible que la société humaine obéisse à un principe dangereux. La « banalité du mal » d’Hannah Arendt ? Mon exploration de la sociologie des organisations m’a fait aller de surprise en surprise. D’abord, j’ai découvert que je parlais comme la pensée chinoise. Puis j’ai compris que je rejoignais aussi la pensée allemande d’avant guerre. Son originalité était en effet d’avoir exploré la dimension sociale de la vie. Maintenant, je comprends, à ma grande surprise, que les plus avancés dans les sciences de la société sont les Anglo-saxons. Non seulement, les sciences de la manipulation sont étudiées dans les universités, mais The Economist est un champion de la technique du paradoxe, fondamentale dans l’art du changement. Ce qui est, en soi, un paradoxe : les Anglo-saxons ne sont-ils pas des individualistes forcenés ? Certes. Mais la contradiction n’est qu’apparente. Et s’ils avaient poussé si loin la science de la société pour mieux la manipuler ?

J’en arrive à une idée inattendue. Hannah Arendt oppose communauté et société. Et si la communauté était l’héritière de celle des chasseurs / cueilleurs ? Ils étaient à la fois égaux et solidaires, et se voyaient comme une partie de la nature. Et si la société était héritière de l’invention de l’agriculture ? Celle-ci a permis à des groupes humains relativement disparates de vivre en grande partie isolés de la nature. Ils réagissaient aux crises naturelles, d’autant plus violentes que cet isolement avait caché leur approche, de manière défensive. Or, le moyen le plus simple pour répondre à une crise n’est pas de chercher ce qui l’a causée pour pouvoir en tirer parti, mais de demander à la communauté humaine de l’absorber. Autrement dit, de demander à l’homme de changer, et non à la société. Et si l’invention de la société par les agriculteurs avait aussi été celle de l’exploitation de l’homme par l’homme ? (à suivre)

(Mes idées sur les chasseurs cueilleurs et la société viennent d’ici, et d’ici, où l’on voit aussi que le mal est un principe d’organisation sociale pour les Anglo-saxons ; les sciences de la manipulation sont étudiées, notamment, par le professeur Cialdini, un des favoris de ce blog.)

mardi 28 mai 2013

FEMEN en Tunisie

Ce matin j’entendais une chroniqueuse de France Culture parler de la Tunisie et de sa FEMEN. Elle opposait les bons « démocrates » et les mauvais fondamentalistes. Est-ce une bonne idée de voir la vie comme une lutte du bien et du mal ?, me suis-je demandé. Ne risque-t-on pas d’envenimer le conflit ? Et ainsi de faire le « mal » ?

Le père de ladite FEMEN a adopté une autre position. Il a publié une lettre, si j’ai bien compris, attribuant l’attitude de sa fille au malaise de la jeunesse tunisienne, en général. Et si fondamentalisme et FEMEN avaient une même cause ? Et s'ils révélaient une faille de la société tunisienne ? 

L’Egypte et les scribes des contours

Exposition du Louvre sur les « scribes des contours ». Qui étaient ces scribes ? Des spécialistes du dessin sur pierre. (Un aperçu venu du Louvre, et un autre, du Monde.)

Cette exposition m’a fait découvrir l’usage qu’ils faisaient de « l’ostracon ». Jusque là je ne connaissais que l’ostracon grec, un tesson qui servait aux votes, et qui conduisait parfois à « ostraciser » une personne, à l’exclure de la cité. En Egypte, l’ostracon était un cahier de croquis. Il permettait de préparer le détail d’une fresque, ou la réalisation d’une statue, de s’exercer, pour les apprentis, ou de se délasser, par une sorte de caricature ou de détournement des rites ou des règles de représentation de l’individu.

Je découvre peu à peu que l’Egypte a été une sorte d’antithèse du changement. Sa civilisation était avant tout caractérisée par un ordre social exceptionnellement stable. Son art, d’ailleurs, a remarquablement peu évolué au cours des temps. Les ostraca semblent montrer qu’il y a quelque chose en l’homme qui s’accommode mal de la répétition mécanique, taylorienne, des rites. L’homme n’est pas une machine. Le propre de l’homme est la fantaisie, l’innovation ?

lundi 27 mai 2013

Cannes et la liberté d’aimer

France Culture disait ce matin que « la liberté d’aimer » avait triomphé à Cannes. Cette liberté semble avoir quelque-chose de monomaniaque, le seul autre film dont j’avais entendu parler avec enthousiasme traitait d’une plage pour homosexuels.

La liberté d’aimer est-elle vraiment le problème du pays ? Pour ma part, j’avais l’impression que nous traversions une crise majeure. Rien ne va plus. L’Europe donne un spectacle lamentable, la société se disloque accumulant les déclassés, des hommes qui n’en sont plus, la seule certitude que l’on ait est qu’il ne faut faire confiance à personne, que l’intérêt égoïste est partout...

Notre élite serait-elle extraordinairement isolée du reste du pays ? Extraordinairement privilégiée ?

Suède en flammes

Les Suédois ont quelque chose d’extrêmement désagréable. C’est le mépris qu’ils affichent vis-à-vis de nous. Pour eux, nous sommes des malpropres. La Suède est un modèle. D’ailleurs, la confiance est une attitude qui est naturelle à ses habitants, me disent les Suédois que je connais.

Aujourd’hui, la Suède est en flammes. On découvre qu’elle parque ses immigrés dans des ghettos. Des ghettos très propres, c’est vrai. Mais il n’y a pas que la propreté qui compte, il y a aussi le respect. Le modèle français a beaucoup de défauts, mais, au moins il n’a pas pour ambition de faire de ses immigrés des citoyens de second ordre. Peut-être pourrions-nous apprendre les uns des autres ?

La Birmanie s'ouvre au monde, et l'Europe est toujours aussi désespérante

The Economist encourage M.Obama à réformer ses régimes sociaux. Il propose des mesures qui dépassent mon entendement limité. Mais il me semble qu’il sera difficile de réformer à un moment où les finances des USA semblent s’améliorer miraculeusement.

En Europe, comme d’habitude, tout va mal. L’Espagne est dans une mauvaise passe. Elle a pourtant réformé ferme et l’électorat se laisse faire. Elle commence même à attirer les entreprises d’autres nations de l’UE. Mais elle dépend de ses exportations dont deux tiers vont vers une euro-zone en pleine dépression. The Economist voudrait plus de réformes. Mais cela va être difficile à avaler. The Economist a enfin compris la ligne directrice de M.Hollande : l’ambiguïté. (Il ne lui reste plus qu’à lire Hannah Arendt.) En tout cas, le journal est inquiet pour la France qui « pourrait couler l’Europe ». L’Europe, aurait, comme l'Espagne, besoin de réformes, mais « les gouvernements ont dépensé tellement de capital politique à promouvoir l’austérité, qu’ils pourraient être trop affaiblis pour libéraliser leurs économies ». « L’infortuné » M.Hollande a peut être raison : « il serait erroné de penser que l’euro peut survivre sans un plus important partage de risques ». Mais l’opinion de la France ne pèse pas lourd, ces temps-ci.

L’économie anglaise irait apparemment un petit peu mieux. Ce qui permettrait de réutiliser la planche à billets sans effet adverse.

La Birmanie s’ouvre brutalement au monde, après un demi-siècle d’isolement. C’est un (des rares) succès pour la politique asiatique de M.Obama. Le pays pourrait profiter d’une situation géostratégique exceptionnelle (entre l’Inde et la Chine, notamment). Mais il est constitué d’une multitude d’ethnies. Ce qui le rend extrêmement fragile. Cela explique peut-être l’importance que l’armée a joué dans son gouvernement. Elle était nécessaire pour le conserver en une seule pièce. On se prépare à négocier avec M.Assad. Car on a peur que les islamistes profitent de sa chute. Mais l’armée de M.Assad ayant l’avantage, il n’a pas grand intérêt à lâcher quoi que ce soit. Ce qui inciterait l’Angleterre et la France à donner des armes à ses opposants. L’Amérique chercherait, elle, à gagner du temps. « Mais pour quoi ? »

Les grandes entreprises vont-elles payer plus d’impôts ? On en parle beaucoup, les « entreprises américaines ont amassé de l’ordre de 1900 md$ à l’étranger, protégés du percepteur américain »,  mais il y a peu de chances que cela se fasse. Les intérêts de pays comme la Grande Bretagne, l’Irlande ou le Luxembourg s’y opposent. Yahoo achète 1,1md$ Tumblr, qui gagne 13m$. Ce type d’acquisitions devrait se multiplier : « les géants du Web nagent dans l’argent ». C’est aussi le cas dans d’autres secteurs. Et c’est pour cela que les fonds d’investissement « activistes », se préparent à lancer l’assaut.

Il n’y a pas que les Chinois qui utilisent Internet pour l’espionnage industriel. L’Inde, et bien d’autres, s’y mettent. Pour vendre des armes, il faut proposer à l’acheteur des projets qui aident son économie. Curieusement, ce serait une forme de subvention déguisée à certains secteurs du pays acheteur que le dit pays paierait au prix fort. La pratique aurait son origine aux USA. « Ils avaient forcé l'Allemagne à acheter des armes américaines pour compenser le coût du stationnement de troupes en Europe ». Elle aurait de beaux jours devant elles. En effet, les industries de l’armement de l’UE et des USA ont besoin de nouveaux marchés.

Il semble que l’on puisse corréler les mots que nous employons avec les caractéristiques de notre comportement. Une bonne nouvelle pour le marketing. Ces temps-ci la recherche découvre que l’être est un écosystème. Dans cet épisode on apprend que certains virus peuvent constituer une sorte de système immunitaire. 

dimanche 26 mai 2013

Michel Crozier

Michel Crozier est mort. Je dois à un « déjeuner » dont il était l’invité, en 93, une citation de Napoléon : « à l’amour comme à la guerre, le succès est dans l’exécution ». Le mal de la France est l’exécution. La France n’a aucun sens pratique. Je suis d’accord avec lui.

J’ai lu plusieurs de ses livres. Ils me rappellent beaucoup ma propre expérience. Nous partagions probablement une même idéologie. Celle selon laquelle l’optimum économique est un optimum humain, comme disaient mes anciens associés. Peut-être aussi une révolte contre les dysfonctionnements de la France.

Étrangement, bien avant que je le rencontre, que je sache même qui il était, on m’avait dit que mes idées ressemblaient terriblement aux siennes. Pourtant, à l’époque, je me voyais comme un ingénieur ordinaire. J’aurais été incapable d’imaginer que je consacrerais ma vie au changement. 

Divorce entre université et entreprise

La suite dans les idées de France culture interviewait hier des universitaires qui ont étudié le « benchmarking » dans l’administration. C’était dramatique.

Ces braves gens n’avaient pas compris que tout le monde parle de benchmarking dans l’entreprise, depuis toujours. Car c’est l'idée fondatrice des théories tayloriennes. (Eux s'étaient arrêtés à un employé de Xerox, qu’ils étaient fiers d’avoir interviewé.)

S’ils lisaient The Economist, ils sauraient aussi que cela ne fonctionne pas. Que le reengineering des années 90 a été un bain de sang. Et que, d’ailleurs, toutes ces choses en ing marchent tellement peu que l’on appelle cela des « modes de management ». Ils auraient donc pu en déduire, rapidement, qu’adapter ce qui rate pour l’entreprise à l’administration a peu de chances d’être un succès.

Mais le plus dramatiques n’est pas là. Je comprends que l’entreprise donne à nos universitaires des crises d’épilepsie. Mais pourquoi, alors, ne contactent-ils pas leurs collègues spécialisés dans les sciences de l’organisation ? Pourquoi ne viennent-ils pas à Dauphine, par exemple ? 

Hannah Arendt

Je me suis interrogé sur Hannah Arendt : haïssait-elle le monde ? Je ne pouvais pas plus me tromper. Sa devise était « amour du monde » ! Hannah Arendt m’a certainement donné une grande leçon. Une leçon qui est peut-être au centre de sa pensée. Mon erreur n’était pas dans l’interprétation de son livre, mais dans celle de ses intentions. Voilà ce qui arrive lorsque l’on est intellectuellement paresseux. La paresse intellectuelle est le mal banal qui nous entraîne sur la pente douce du mal absolu.
Le plus étrange est qu’à mesure que je lisais la vie d’Hannah Arendt, je découvrais qu’elle a écrit ce blog. Apparemment, à probablement pas grand-chose près, nous avons les mêmes obsessions. Toujours est-il que la pensée d’Hannah Arendt est étonnamment explosive. Elle contredit tout le prêt à penser moderne. Elle a révélé à la société de son temps ses petits arrangements coupables. Comme moi, celle-ci a réagi brutalement.

Eichmann et la banalité du mal
Il n’est pas étonnant que les déclarations d’Hannah Arendt sur Eichmann aient été mal reçues ! Ce n’est pas ce qu’elle écrit d’Eichmann qui compte. (Eichmann est un pauvre type qui n’avait pas les capacités de comprendre ce qu’il faisait.) Mais c’est son opinion sur l’attitude de la communauté juive. Hannah Arendt dit d’elle ce que l’on dit de la France : son élite dirigeante a facilité le travail des nazis. Et cela en pensant faire le bien, ou un « moindre mal ». Or cette élite dirige Israël ! Et le procès Eichmann est une manœuvre politique de Ben Gourion, qui par ailleurs a des accords avec l’Allemagne (qui lui livre des armes).
On entre de plein pied dans la théorie d’Hannah Arendt. L’homme est conditionné par sa communauté. Les nazis ont réalisé le mal absolu en détruisant les conditions qui font de l’homme un homme digne de ce nom. C’est pour cela que tous les peuples ont réagi de la même façon à leur influence. Le seul antidote au mal est la pensée et le jugement. C’est à la fois le doute quotidien, le refus du prêt à penser et des bons sentiments. Mais aussi chercher, contrairement à ce qu’a fait le monde d’après guerre, à comprendre pourquoi nous avons basculé dans le mal absolu. Tant que nous ne connaîtrons pas les causes du totalitarisme, il nous menacera.

La société contre le politique
J’avais correctement compris que la grande affaire d’Hannah Arendt est la lutte entre la société et le politique. Le politique doit s’entendre au sens grec du terme. C’est le débat dont émergent les directions que doit suivre la cité. C’est ce débat permanent entre égaux qui fait l’homme. L’homme a donc besoin d’une « pluralité » d’hommes pour se constituer. Il ne peut devenir lui-même que par « l’action » au sein d’une collectivité. Le droit de l’homme premier est donc d'être membre d'une communauté.
L’évolution historique de la société la montre occupée à détruire le politique, afin de faire de l’homme une chose gouvernée par ses besoins physiologiques. Exemples ? La glorification du travail par Marx, travail qui jusque-là était l’apanage des animaux ; l’égalité des femmes, qui si elle ne s’inscrit pas dans un combat politique servira une forme d’asservissement. (Autre exemple : l’attaque récente contre l’Etat et les politiques, au nom du marché ?)

Science du politique
Hannah Arendt voulait établir une science du politique. Je ne sais pas si elle a réussi. En tout cas, voici quelques idées que j’ai retenues.
Comme Kant, et contrairement à Hegel, elle pense qu’il n’y a ni fatalisme, ni détermination. L’histoire n’est pas écrite, c’est l’action quotidienne qui la fait. Comme Kant, elle est contre la raison pure, et pour la raison pratique. Elle oppose la « vérité des faits », à la raison. La raison nous enthousiasme pour des idées abstraites, coupées du sens commun qui se construit par la discussion. C’est au nom de ces idéologies que l’homme détruit l’homme. En revanche, les hommes ou les sociétés possèdent au fond d’eux une richesse qui leur est particulière (par exemple l’idée du politique chez les Grecs ?). C’est elle qu’il faut préserver. C’est l’interaction de ces « richesses » humaines qui permet la créativité du débat politique.
Le totalitarisme commence par une combinaison élite / masse. L’élite pense de manière mécanique. Elle suit une idéologie. La masse, si je comprends bien, diffère du peuple en ce qu’elle est faite d’individus indistincts, il n’y a plus de communautés. Elite et masse ont en commun, donc, de ne pas penser, de ne pas être capables de juger. Juger ne demande ni un haut intellect, ni une connaissance des sciences de la morale. Mais un questionnement systématique, une conversation permanente avec soi-même, et la volonté de prendre des décisions avec lesquelles ont pourra vivre. De manière plus technique, Hannah Arendt pense que juger, c’est se vider (de ses préjugés). On voit alors le bien et le mal, comme on voit le beau et le laid en art. (D’où référence aux travaux de Kant sur l’esthétique.)
L’éducation est un sujet important. De même que chaque action est une renaissance et une réinvention de la société, l’enfant est la source ultime d’innovation. Il ne doit donc pas être endoctriné. Ses différences, sa connaissance de la culture à laquelle il appartient et sa capacité à raisonner doivent être développées (idées de Herder).
La reconnaissance de l’importance du groupe comme condition nécessaire de l’être humain pose un problème curieux. Elle contredit la prééminence des droits de l’homme, puisque ceux-ci sous-entendent que l’individu est une sorte d’électron libre. En outre, pas de droits de l’homme (ou de la femme !) sans communauté pour les faire appliquer. Elle semble dire qu’une société est un assemblage de communautés. Les communautés sont des êtres moraux qui ont leurs droits. Aucune ne doit dominer les autres (comme l’UE, au fond). L’assimilation par une communauté supérieure de communautés subalternes (les Juifs en Allemagne d’avant guerre, les noirs aux USA) doit être combattue.
Autres idées curieuses. L’ambiguïté. Lorsqu’aucune solution proposée n’est satisfaisante (assimilation ou sionisme dans le cas d’Hannah Arendt), il faut naviguer entre les deux. Pensée systémique ? La non-violence, aussi. Hannah Arendt pensait que la violence était une manifestation d'impuissance. Qu'en cas de difficultés, il fallait sonder les ressources de la non-violence en premier.

Hannah Arendt le néoconservatisme et la pensée française
On finit dans l’anecdote. Contrairement à ce que je pensais, Hannah Arendt était anti-neocon. Mouvement dont elle a rencontré les fondateurs en Allemagne (Leo Strauss). Pour elle, les néoconservateurs combattaient le totalitarisme par le totalitarisme. Plus exactement, ils faisaient de la démocratie un concept totalitaire.
Hannah Arendt connaissait très bien la France, pour y avoir vécu. Elle a soutenu Daniel Cohn-Bendit, dont les parents avaient été ses amis. Elle pensait qu’en voulant secouer la rigidité des règles administratives de son université, il avait failli faire tomber un Etat étrangement fragile. Pour elle, le plus grand penseur français était Camus. Quant à Sartre c’était une sorte de néant. Une pensée pseudo hégélienne incohérente, qui s’était raccrochée au Marxisme, avec lequel elle n’avait rien à voir, pour pouvoir dire quelque chose.

samedi 25 mai 2013

Rôle de l’Etat : la recherche ?

Un précédent billet m’amène à une idée que je n'attendais pas. Et si le rôle du marché était « l’exploitation » ? C'est-à-dire la transformation de ressources, naturelles ou non. Mais pas l’innovation, leur création. Et si, ayant épuisé les dites ressources, faute d’approvisionnement, il s’en était pris aux moyens mêmes de les produire : l’homme ?

J’en viens à me demander si le « marché », quel que soit ce que l’on entend par là, n’a pas vécu sur les découvertes scientifiques militaires, qu’il transforme en biens de consommation depuis 70 ans. Internet en est un exemple. Il doit ses origines, dans les armées soixante, à une armée américaine qui voulait que ses réseaux de communication puissent survivre à des contretemps. Et l’ordinateur vient de la seconde guerre mondiale.

Et si relancer l’économie signifiait relancer la recherche fondamentale, une recherche sans but lucratif immédiat, que seule la collectivité peut mener ? Cela pourrait redonner à l’Etat une légitimité et, à nous, l’envie de payer des impôts. Mais, pour que la recherche soit efficace, il faut qu’elle mobilise les talents (perdus aujourd’hui dans le néant bancaire), et qu’ils aient une grande anxiété de survie, comme durant les guerres. Où trouver cette motivation ?

(Au fond, je redécouvre les idées de Galbraith.)

vendredi 24 mai 2013

La métamorphose du dirigeant

Fait-il bon d’être dirigeant ? Il y a peu, je parlais d’un risque de printemps arabe. Mêmes causes mêmes conséquences. L’entreprise ne crée plus. Le dirigeant devient le bouc émissaire de toutes les anxiétés. Rançon du bonus ? De s’être présenté comme le créateur de valeur de l’entreprise ? En tout cas, il me semble stressé.

On lui demandait hier encore d’être un gestionnaire, on exige maintenant qu’il soit un entrepreneur. Peut-il se métamorphoser ? Je crois que oui. Il me semble qu’au fond de lui, il sait ce que devrait faire son entreprise. Mais il est bloqué, probablement pour deux raisons. Elles ont chacune leur solution :
  • Il pense qu’il doit donner un cap, alors que le monde est totalement incertain. Idée trompeuse. Il existe une façon de diriger une entreprise en environnement incertain, sans cap précis, qui est tout à fait acceptable par l’ensemble des « parties prenantes » de l’entreprise. Il faut accepter la réalité telle qu'elle est, incertaine, et faire comme les entrepreneurs et les planeurs, ou les oiseaux : chercher le courant porteur. (En fait, il y a mieux : voir ici.)
  • Il ne voit pas comment mettre en œuvre ses idées. N’est-il pas entouré de gens qui sont mal disposés à l’endroit du changement ? Il se trompe. Son rôle n’est pas de dire comment, mais de dire pourquoi il faut changer (dans ce cas, se mettre en position de saisir les courants favorables), et de donner les moyens qui permettent à ceux qui ont le pouvoir de mise en œuvre de lui dire comment y arriver. Cela fait dix ans que j’explique comment faire

Le marché et la France

C’est fou comme il est difficile de faire des affaires en France ! J’anime un petit groupe d’entrepreneurs. Il se heurte à des quantités d’obstacles. Tout d’abord, chacun est très compétent dans son domaine, mais n’est absolument pas un vendeur. D’ailleurs, le vendeur efficace est une denrée inconnue en France. Ce qui, au fond, n’est pas grave : les entreprises n’achètent pas aux gens qu’elles ne connaissent pas. Quant à utiliser les médias, comme dans les livres de marketing, pour se faire connaître, c'est impossible : la presse hait ceux qui ont quelque-chose à vendre. Eh puis. Il y a des jours fériés, des vacances interminables, qui semblent s’échelonner toute l’année…

Cela nous pousserait à vouloir tout démolir. Ce qui serait dommage, car, au fond, nous y tenons. Mes amis entrepreneurs ne sont-ils pas les premiers à prendre d’interminables vacances ?, par exemple.

Je me demande s’il ne faut voir ici un coup de génie des Anglo-Saxons. Ils nous ont convaincus que le monde était un marché, et que nous devions être des commerçants. N’y parvenant pas, nous nous sommes mis à détruire notre pays et sa culture, pour qu’elle devienne le no man’s land que doit être une place de marché ?

Devons-nous en revenir aux penseurs de l’économie sociale ? Ils désiraient que l’homme profite des bénéfices de l’économie, sans s’avilir.

jeudi 23 mai 2013

Menace sur l'entreprise?

Apple envisage de donner cent milliards de dollars à ses actionnaires. Curieusement, on a peu parlé de cette nouvelle déjà ancienne. Pourtant, elle signifie à la fois qu'Apple est incapable de faire du neuf, et, surtout, un extraordinaire transfert d’argent, du consommateur à l’actionnaire. (Cela n'aurait-il pas fait beaucoup de bien à la France, si sa part des dividendes avait été injectée dans son économie ?)

Et si le marché était en fait une essoreuse du consommateur ? Et si son moteur était l’entreprise ? L’entreprise est incapable de créer. Elle n’est plus qu’un mécanisme de subvention du riche (ou actionnaire) par le pauvre (aussi appelé consommateur). Autre manifestation de ce phénomène : la croissance passée a été spéculative, elle n’existait pas.

De ce fait la grande entreprise court deux risques.
  1. Ne sachant utiliser l’argent qu’elle n’arrête pas d’accumuler, elle ne peut qu’être la cible des fonds d’investissement, qui menacent de la disloquer (Sony), ou font pression sur sa gestion (ils sont à l’origine de la décision d’Apple). 
  2. Bloquant la croissance mondiale, et n’assurant pas sa fonction de distribution de moyens de subsistance par le biais de l’emploi, elle pourrait être réformée par les Etats. 
Ce qui la protège peut-être d’une nationalisation est que, contrairement à ce qui s’est passé après la seconde guerre mondiale, il n’y a pas de reconstruction à mener, ni de boom scientifique à exploiter. L’Etat, qui ne sait qu’utiliser la planification, n’a pas de plan évident à mettre en œuvre. 

Changement à l’américaine

Une phrase du film La conquête de l’Ouest m’a frappé. Un constructeur de chemin de fer dit, en substance, des Indiens : ils ont perdu, ils devront s’adapter. Cela me semble une attitude très anglo-saxonne. C’est aussi celle qui prévaut en Europe. Les peuples ont cru à une croissance. Ce n’était qu’une bulle spéculative. Maintenant, vous avez perdu, vous devez subir la rigueur, la loi du marché, entendent-ils.

Le Français est comme l’Indien. Il s’accroche au passé. Du coup, il s’enfonce. Ne serait-il pas mieux qu’il reconnaisse sa défaite, et que, contrairement aux Indiens, il se mette en marche pour gagner la prochaine manche ? Façon 89 ?

mercredi 22 mai 2013

Comment sortir du chaos syrien ?

Un ami libanais commente mon dernier billet sur la Syrie :
Quant à la Syrie, n’oublie pas que la Syrie est le théâtre des conflits des autres – je pense aux conflits suivants : conflit Russie-USA, conflit Sunnite – Chiite, conflit régional entre Iran, Egypte-Arabie-saoudite & Turquie pour le contrôle de cette région, conflit économique dans cette région avec une nouvelle apparition de champs de gaz dans le large du Liban, conflit avec Israël, etc.
Un article ajoute à cela qu’il faut aussi envisager les conséquences du conflit. La minorité sunnite irakienne a été gagnée par la fièvre syrienne : l’Irak est aussi menacé de chaos.

Comment éviter que le Moyen-Orient ne devienne un champ de bataille ? Le même article semble penser que son problème vient de la solution qu’il a adoptée : le conflit. Et si, au lieu de jouer à dent pour dent, on essayait de discuter ? Peut-être que cela sortirait l’Iran, par exemple, d’une spirale de radicalisation ? 

Génération Why et génération How

Ce qui me surprend, chaque année un peu plus, chez mes étudiants est qu’ils ne semblent pas lire les énoncés des sujets que je leur donne. Ils ne vont jamais où je veux les mener. Mais ce qu’ils disent n’est pas idiot. Ils traitent des questions que je ne leur pose pas, mais qui sont du domaine de mon cours. (Ce qui, finalement, me va très bien : cela me fait découvrir ce que je n’aurais pas vu sans eux !) En fait, pour que le cours fonctionne, j’ai l’impression qu’il faut capturer leur imagination.

Une autre de leurs caractéristiques paraît être qu’ils ne savent pas très bien tirer les conséquences de leurs traits de génie. Est-ce la marque de la génération Y ? Une génération qui refuse les barrières ? Elle est armée pour poser des problèmes ?
Et la mienne pour les résoudre ? How serait-il le nom de ma génération ? Dois-je encourager mes élèves à s’interroger, et les aider à apprendre à raisonner ? (Par ailleurs, ils me semblent bien se débrouiller dans leur travail, en faisant preuve d'une autonomie et d'un sens des responsabilités remarquables.)

mardi 21 mai 2013

Le changement de l’entreprise française : devenir elle-même

Comment expliquer, le plus simplement possible, le changement que doit subir l’entreprise moderne ? Une conférence de Jeanne Bordeau, jeudi dernier, me ramène à cette question. Voici où j’en suis :
  • L’entreprise doit « devenir soi ». Voilà le nom du changement. L’entreprise doit découvrir ce qu’elle a d’unique. C’est la loi du marché.
  • C’est une bonne nouvelle ! Ce changement ne demande aucune invention, aucun coup de génie. Il est à portée de main !
  • Mais, il y a un blocage. L’entreprise pense qu’elle est moche. Un secret bien gardé, que j’appelle son « déchet toxique ». C’est pour cela qu’elle ne veut absolument pas devenir elle-même ! C’est aussi pour cela qu’elle est dans une aussi mauvaise passe. Parce qu’elle ne connaît pas ses forces, elle a copié ce qui se faisait ailleurs. Du coup, elle a abattu ses défenses, et elle est entrée dans un cercle vicieux d’avilissement de ses compétences.
  • D’où ce qui caractérise la phase décisive de mon travail, depuis toujours : montrer à l’entreprise que ses défauts apparents sont en réalité des qualités. Ensuite, la mise en œuvre du changement que cela signifie (i.e. tirer le maximum de son environnement) n’est plus qu’une question de techniques. 

lundi 20 mai 2013

Renaissance de l’impérialisme japonais ? Europe, au bord de la dislocation ?

Le Japon, paralysé et malade, devient brutalement le meilleur élève du libéralisme. Et ses réformes à la cosaque semblent réussir. Que lui est-il arrivé ? Qu’est-il arrivé à son premier ministre ? Son précédent mandat n’avait-il pas été pitoyable ? Sursaut d’orgueil. La Chine menace le Japon de disparition. Alors, le Japon veut en revenir à ce qui a fait sa gloire. Ce qui signifie tenter le tout pour le tout, pour se tirer de son marasme économique. Et éliminer de sa constitution l’influence occidentale. Inquiétant ?

Quant à l’Europe, elle passe un mauvais quart d’heure. L’Angleterre est sur la pente glissante de la sortie. David Cameron est de plus en plus fermement contraint par le jeu politique à tenir ses promesses de référendum. D’ailleurs, les liens commerciaux du pays avec l’Europe s’affaiblissent (mais représentent encore 50% de ses exportations). En Allemagne, la coalition qui pourrait sortir des élections est incertaine. Un nouveau parti vient d’émerger, à droite de Mme Merkel. Il demande la fin de l’euro (mais pas de l’UE). L’idée pourrait marquer l’opinion, et le dit parti empêcher les alliés naturels de Mme Merkel d’obtenir les minima pour être représentés. Et les pays européens vont-ils longtemps tolérer leur perte de souveraineté ? Ici, la BCE propose son « aide en échange d’une approbation de l’austérité et de réformes structurelles. » « Cela semble du chantage à certains électeurs de nations débitrices. » Là, le gouvernement d’Andalousie découvre qu’il ne peut pas aider des sans-logis, du fait de l’accord de renflouement des banques espagnoles. L’Europe est partout en récession. Elle est à l’image de son marché de l’immobilier : « les performances contrastées du marché de l’immobilier reflètent et renforcent la tendance générale vers une économie mondiale à trois vitesses. Les marchés sont généralement forts dans les économies émergentes, en rapide développement. Le redressement du marché immobilier américain va contribuer à soutenir la reprise engagée par ailleurs. Le mal affectant de nombreux marchés immobiliers européens est une raison supplémentaire pour laquelle l’Europe est à la traîne. » Aurait-elle été plombée par la BCE de M.Trichet ? Une comparaison avec Fed et Banque d'Angleterre, montre que la BCE a curieusement voulu combattre une inflation inexistante, par des taux élevés. Et a insisté pour « demander que les gouvernements réduisent leurs déficits en échange de son assistance ».

Rien ne va plus en Iran. Lors des prochaines élections, le clan du président va devoir faire face à deux gêneurs. M. Rafsanjani et un poulain de M.Amadinejad. L’Amérique latine se divise entre les bons, l’Union du Pacifique, libres-échangistes, et les mauvais, membres du Mercosur, socialistes. La piraterie se déplacerait, de la Somalie, tenue en respect par l’armada de l’économie mondiale, au delta du Niger. Aux USA, les Républicains cherchent de mauvaises querelles à M.Obama. Histoire, à nouveau, de le paralyser. L’international n’est pas porteur. L'interventionnisme de l'Etat, si.

Il y a tout de même de bonnes nouvelles. Les élections pakistanaises semblent éloigner le risque de chaos (en particulier terroriste). Le parti de la famille Bhutto serait en perdition.

Poussées par les politiques monétaristes des banques centrales, les actions s’envolent. L'entreprise Sony perd beaucoup d’argent. Elle est attaquée par un activiste américain. Il veut lui faire vendre ses studios. Mais ses difficultés viennent de la perte de sa créativité. Drame japonais. La commission européenne part en guerre contre les panneaux solaires et les équipementiers télécom chinois. (Je m'interroge: manœuvre de l’Allemagne et de la France ?) Une étonnante histoire de changement. Le conteneur aurait été une révolution ! Il aurait transformé l’économie mondiale, en facilitant le transport des biens : « plus gros bateaux (…) réduction massive du temps passé dans les ports (…) réduction par deux du voyage porte à porte (…) réduction du pouvoir de négociation des dockers, et du nombre de grèves (et) des pertes pour vol (…) De plus grands ports, moins nombreux (…) il a été possible d’échanger économiquement un plus grand nombre de biens (…) les chaînes d’approvisionnement ont pu devenir plus complexes et plus généralistes. » Et cela aurait permis le miracle des pays émergents : ils n’auraient eu qu’à utiliser ces nouvelles routes, pas à en construire de nouvelles.  

Revue de livres. L’humour juif serait récent, associé à la culture Yiddish, et politesse du désespoir. Ce n’est pas les tensions internationales qui disloqueront la Corée du nord, mais la différence de niveau de vie avec le sud. Alors, attention au chaos (au moins régional) qui va s’ensuivre. Peut-être faudrait-il hâter la dislocation, par la technique utilisée contre l’URSS ? Personne n'est intéressé. L’Egypte ancienne, société stable et hiérarchisée, n’avait pas besoin de monnaie. « La monnaie a été l’instrument qui a permis aux sociétés postérieures de se libérer de l’ordre social et de devenir individualistes. Avec l’argent est arrivée la spéculation et ses crises financières endémiques. » Solution ? Les Etats ne devraient plus assurer les flux financiers. Payer pour ses erreurs éliminerait spéculation et crise. 

Le jeu trouble de la BCE ?

Discussion entre économistes sur un réseau social de l’Insead :
La BCE semble vouloir affaiblir certaines économies afin qu’elles soient forcées à des réformes de structure. La BCE pourrait faire tellement plus pour elles (alors qu’elle prétend qu’elle ne peut rien).
Au même moment, le déficit des USA, qui ont évité la rigueur, se réduit, comme par miracle.

Cela me fait me poser plusieurs questions. La BCE, non démocratiquement élue, imposerait-elle des mesures idéologiques et inefficaces à l’Europe ? Mais aussi, pourquoi a-t-on accordé deux ans de plus à la France pour réduire ses déficits ? Notre gouvernement serait-il agissant, en dépit de ce que nous pensons de lui ? Si c’est le cas, a-t-il raison de faire passer notre intérêt avant celui de la collectivité européenne ? 

Comment maîtriser le marché ?

Il y a longtemps, une phrase de Fernand Braudel m’a surpris. Il disait que le marché avait été une heureuse invention. Mais pas l'économie de marché.

Un livre que cite ce blog semble expliquer pourquoi. La place de marché a été une innovation qui a permis de nourrir le peuple du Moyen-âge, bien et à bas coût, en réunissant au même endroit consommateurs et producteurs, en évitant les intermédiaires. Mais le Moyen-âge contrôlait le marché de façon à ce qu’il assume la fonction qu’on lui avait donné : nourrir le peuple (pour qu’il puisse produire ?). Pour cela, la loi de l’offre et de la demande devait être bloquée, et la spéculation combattue.

Les mécanismes de régulation mériteraient d’être examinés. Il semblerait qu’ils aient été surtout indirects. La morale y jouait probablement un rôle important. Pour elle c’était Dieu (la nature) qui créait ce que l’on appelle aujourd’hui la « valeur », bien plus que l’homme. Ce qui n’est que bon sens ! Dans ces conditions, pourquoi ce dernier aurait-il le droit de s’approprier une part disproportionnée de la production collective ? Ensuite, il y avait des mécanismes systémiques comme la dîme. Plutôt qu’un prélèvement inique, elle semble avoir permis d’éviter les effets pervers du marché. C’était un système de redistribution. Elle contrebalançait en partie les fluctuations du marché, et, les prélèvements étant stockés, elle permettait de nourrir les victimes d’une mauvaise récolte et les pauvres. Peut-être aussi, l’efficacité du marché faisait que l’on ne cherchait pas à s’enrichir plus qu’il ne le permettait. C’est ainsi que les nobles auraient utilisé les marchés, plutôt que le pillage.

Une idée à creuser ? Et si nous définissions ce que doit être la fonction du marché pour l’humanité ? Et si nous mettions en place les mécanismes de contrôle adéquats ? Ou, peut-être, se mettraient-ils en place d'eux-mêmes ?

dimanche 19 mai 2013

L’Université doit-elle parler anglais ?

J’entends dire que le gouvernement veut que l’université donne des cours en anglais. Cela me semblait déjà le cas, et une mauvaise idée. Je pense que le gouvernement a confondu comment et pourquoi.

La France, cinquième destination des jeunes qui étudient à l'étranger, est attractive dans sa sphère traditionnelle d'influence (Maghreb et Afrique), mais elle est en perte de vitesse. Le gouvernement, aiguillonné par les écoles et les universités, veut attirer les étudiants des puissances montantes : Brésil, Chine, Inde, Indonésie...
Mais ce qui fait rayonner l’université, ce sont ses idées. L’anglais devenant un critère de sélection des enseignants, corrélativement la compétence technique en sera victime. Nous recruterons de mauvais enseignants étrangers, et nous mettrons au chômage de bons enseignants français (pour faire simple). Or, la France a de moins en moins d'idées.

Et si le gouvernement attaquait le cœur du problème ? Et s’il se demandait comment favoriser une éducation qui nous apprenne à penser ? En particulier à ne pas confondre le pourquoi et le comment ? (Au passage, il pourrait aussi s’interroger sur l’inefficacité de l’enseignement des langues en France.)

De la nécessité de big data

On dit beaucoup de choses de Big data. Je ne crois pas que ce soit juste.
  • Tout d’abord, Big data serait la formule magique que l’on attend depuis la bulle Internet. Miraculeusement, il donnerait le moyen de nous faire acheter ce que produit l’entreprise. Ce qui nous fait craindre une manipulation. Je ne crois pas qu’il existe des algorithmes capables de ces prouesses. Et s’ils existaient, ils seraient bien plus dangereux pour le puissant, qui a beaucoup à cacher, que pour le petit. Dommage. Ne serait-il pas amusant de découvrir ce que tel ou tel journal ou tel ou tel dirigeant a derrière la tête ? Curieusement, j’ai étudié les applications de Big data il y a une quinzaine d’années, au hasard d’une mission, et à une époque où aucun visionnaire ne s’intéressait au sujet. J’ai découvert qu’il existe effectivement des applications extrêmement rentables. Mais qu’elles ne sont pas là où on les cherche aujourd’hui. On trouve ainsi un peu partout des problèmes complexes, qui génèrent beaucoup de données, que des entreprises riches ne savant pas exploiter. (Une exception grand public toutefois : il y a un gros marché pour des logiciels capables d’évaluer la solvabilité d’une personne.)
  • Il me semble surtout que l’on n’a pas vu que Big data est essentiel. En effet, avec la disparition du papier nous n’avons plus de traces de nos échanges. Au mieux nous restera-t-il quelques documents officiels. Mais rien de ce qui permet, par exemple, d’explorer la pensée d’un écrivain, d’un philosophe ou d’un scientifique. Nouvel outil d'archéologie, Big data peut permettre de retrouver, dans le chaos d’Internet, un peu de ce que nous avons été. (Mais cela sera bien moins durable que les pyramides !)

samedi 18 mai 2013

L'entreprise doit se métamorphoser

L’Insead semble s’être lancé dans une réflexion sur la durabilité de l’entreprise. Je ne suis pas sûr que le problème soit pris par le bon bout. Selon moi, c’est l’entreprise, en elle-même, qui n’est pas durable. Une fois qu’elle le sera, elle respectera la nature et l’éthique, sans efforts.

Ces dernières décennies, les entreprises sont devenues bureaucratiques. Le critère de sélection des managers est politique. Le tueur gagne, et rend la vie impossible aux personnes compétentes. Et on a appliqué la philosophie taylorienne à l’organisation : l’homme est devenu un exécutant, quand il n’a pas été remplacé par une machine. Résultat ? Une entreprise qui est ouverte à tous les vents de la concurrence, et qui est incapable de changer en profondeur, tout en changeant sans arrêt ! Comme le note The Economist, les investisseurs s’impatientent. Les entreprises empilent les bénéfices, mais rien de nouveau n’en sort.
Ratio profit des entreprises / PIB, aux USA (venu de A.Fatas de l'Insead)

Ce mouvement a été accompagné d’un grand lavage de cerveau. On nous a dit que ce massacre serait créatif. La grande entreprise ne crée pas d’emplois, contrairement aux PME. Tout est donc le mieux dans le meilleur des mondes : les chômeurs vont créer des emplois ! Mais on ne s’improvise pas entrepreneur ! Et un homme de talent peut avoir un bien plus grand impact sur le monde dans une grande entreprise, que dans une poubelle !

Qu’est-ce qu’une entreprise durable ? C’est une entreprise qui a une assurance sur la vie. Autrement dit un « métier », un avantage concurrentiel fort, qui la distingue. Et cet avantage n’est pas donné par la machine, que tout le monde peut acheter, mais par l’homme, et le capital social qu’accumule un groupe d’hommes travaillant ensemble. Si l’entreprise veut redevenir durable, elle doit se donner un dirigeant qui est un « leader » (au sens des sciences du changement), et apprendre à recruter et à cultiver les talents sur d’autres critères que leur capacité à trucider leurs collègues, ou à être des bêtes de somme. 

Le dysfonctionnement bureaucratique français

Michel Crozier montre que la France est un système bureaucratique dysfonctionnel (Le phénomène bureaucratique). Il semble aussi croire que tout système bureaucratique est dysfonctionnel par nature.

Jean-Pierre Schmitt, dont je parle dans un précédent billet, a peut-être identifié une erreur dans ce raisonnement. Le système bureaucratique français est dysfonctionnel parce qu’il est construit par des théoriciens, qui n’ont aucune connaissance des réalités de la vie. Notre pays continue à obéir à la logique de la monarchie. D’autres modèles bureaucratiques, fondés sur la réalité concrète, peuvent être efficaces. Jean-Pierre Schmitt pense que c’est le cas du modèle allemand, en particulier.

Question importante en ces temps difficiles... 

vendredi 17 mai 2013

Les mystères de Google Alertes

Hervé Kabla m’a suggéré d’utiliser Google Alertes pour suivre ce qui se disait sur moi. Curieusement, « Christophe Faurie » a connu une lente décroissance. Puis plus rien. Pourtant, je découvre de temps à autres que je suis cité. Pourquoi Google ne s’en rend-il pas compte ?

Par curiosité, je me suis mis à suivre « Faurie ». Surprise. Les Faurie auxquels s’intéresse Google Alertes sont tous américains !

La France n’existerait-elle pas pour Google ? Ou Google a-t-il décidé de liquider progressivement la fonction Alertes, l’Amérique étant la dernière à sombrer ?  

Le marché n’est pas la solution, mais le problème : vive le politique ?

Ce blog a fini par comprendre ce qui était écrit dans les journaux anglo-saxons ! (Et ce qui m’avait été seriné en MBA.) On a voulu réinventer la société sur le modèle du marché. Donc faire de l’homme une chose. La crise résulte de cette utopie. Nous courrons maintenant le danger que la contre-utopie du dirigisme bureaucratique remplace le chaos du marché.

Y a-t-il une solution intermédiaire ? Une universitaire amie, que ses recherches amènent dans ma direction, me dit qu’il faut réinstaurer le politique. Elle retrouve la conclusion de Pierre Manent dans son Cours familier de philosophie politique (Gallimard, 2004). Mais comment y parvenir ? Lui dis-je. La démocratie, ça ne s’impose pas ! Peut-être y a-t-il des conditions qui lui sont favorables ?

Je n’ai pas d’idée très claire à proposer. Juste des pistes. Notre société possède quelque-chose de fantastique. C’est l’énorme quantité de gens éduqués, armés pour penser. La France a réussi un de ses grands changements ! En outre ces gens sont farcis de bons sentiments. Certes, ils en font généralement un mauvais usage : nous sommes massivement hypocrites. Mais c’est par manque de sens pratique que nous pavons l’enfer de bonnes intentions. Tocqueville l’a bien dit. Donc, il n’en faudrait pas beaucoup pour transformer le monde en mieux. Juste quelques techniques. Mon expérience me le répète.

Alors comportons nous comme si nous étions dans une démocratie, débattons du sort de la nation, et recherchons les méthodes pratiques de mise en œuvre de nos idées ? 

jeudi 16 mai 2013

Impasse en Syrie ?

Le régime Assad a joué à diviser pour régner, et à terroriser. Mais, cette fois-ci « la population sunnite (a) simplement arrêté d’avoir peur ». Et le conflit est devenu confessionnel. Et les thèses sunnites rejoignant celles d’Al Qaïda. Nouvel épisode de l’affrontement entre les empires ottoman (turc) et safavide (iranien), mais aussi de la guerre froide, avec Américains et alliés d’un côté et Russes et alliés, de l’autre. « Bientôt (le conflit) sera allé bien trop loin pour que l’un ou l’autre camp puisse revendiquer la victoire. » Si je comprends bien.

Mais serait-ce bon pour la Syrie qu’il y ait un vainqueur ? L’Europe ne devrait-elle pas se préoccuper d’un chaos à ses portes ? Mais, après les désastres irakiens, afghans et libyens, quelle solution adopter ? A moins que la crise mondiale ne soit un des catalyseurs de l’affrontement ? Si elle se résolvait, les forces belligérantes seraient-elles affaiblies ? 

Eco-chonnerie ?

En me promenant, j’aperçois un immeuble en construction. Je suis surpris par la minceur des structures. D’ailleurs, certaines avancées sont étayées par de fines tiges d’acier. Forme d’optimisation : c’est le bâtiment fini qui est solide, pas ses états intermédiaires ? Après tout, il me semble qu’il en était de même des cathédrales. Mais qu’arrivera-t-il à ce bâtiment, en cas d’avarie ? Ce qui me frappe le plus est que tout ceci est très moche. Toute l’esthétique du bâtiment est apportée par des couches superficielles collées sur l’ossature de béton. Et ça s’appelle un « éco quartier » ! Mais où est le naturel là-dedans ?

Un bon marketing permet de faire de gros bénéfices, en construisant de petites cloisons ?

mercredi 15 mai 2013

France, dialogue social et réformes

Un meilleur dialogue social faciliterait-il les réformes françaises ? La Fabrique de l'industrie semble le croire :
Comme le souligne une note de La Fabrique à paraître le 12 juin 2013 sur les transformations du modèle économique suédois, la qualité du dialogue social a joué dans ce pays un rôle capital dans la mise en œuvre réussie de réformes ambitieuses. La concertation entre les élites dirigeantes et l’ensemble des acteurs économiques a permis d’assurer la pertinence et l’acceptation de changements profonds, sur les plans économique, politique, fiscal et social. La Suède est aujourd’hui, avec l’Allemagne, l’un des rares pays au monde à présenter une croissance durable et une base industrielle robuste et compétitive. (Pour s'inscrire : lien.)
Un ami suédois reconnaît qu'en Suède la confiance est de mise. Mais il propose une autre explication au redressement de son pays : une dévaluation de sa monnaie de plus de 25% et une économie mondiale qui était prête à absorber les exportations suédoises. Mais pourquoi ne pas essayer de reconstruire les relations sociales en France, sur le modèle suédois ? Après quelques centaines, voire quelques milliers, d'années de tensions et de guerres civiles ne serait-il pas temps qu'elles cessent ?

Injonction paradoxale comme principe éducatif

L’injonction paradoxale est un best seller de ce blog. Inattendu ! Ce qui m'a fait réfléchir. Et si l’injonction paradoxale était devenue un principe de notre société ? Et si, au lieu de nous contenter d’utiliser les lois sociales existantes à des fins de manipulation, nous les créions pour cela ? Et si, par exemple, nous faisions aimer les desserts à nos enfants pour pouvoir les en priver, et donc les manipuler ? (Manipuler = obtenir un comportement désiré, sans passer par le libre arbitre.)

Rien ne neuf, me dira-t-on. Pour Chester Barnard, pionnier des études de l’organisation des entreprises, l’amour de l’argent avait été inculqué aux Américains pour les rendre facilement manipulables. Et les pères fondateurs des USA désiraient injecter l’impérialisme et le nationalisme dans la culture nationale de façon à la canaliser. Et que dire des régimes totalitaires ?... La nouveauté est l’usage familial de ces techniques. Ainsi, j’ai entendu Les pieds sur terre de France culture donner la parole aux souvenirs d’une Américaine. Les procédés utilisés par sa mère, une féministe militante, pour inculquer sa cause à son enfant m’ont étonné. Ils semblaient sortis de cours de psychologie de la manipulation (qu’elle n’avait pas lus).

Doit-on s’offusquer ? Un individu « libéré » utilise ce qu’il peut pour obtenir ce qu’il veut de son prochain. Et les mécanismes sociaux sont les moyens les plus puissants pour ce faire. D'ailleurs cela ne fonctionne pas parfaitement. Les travaux de Skinner montrent que même un animal n’est pas totalement programmable. Ce qui me fait me demander si cette lutte entre la société et l’homme n’est pas un rite de passage. En effet, c’est en se dégageant de la manipulation ambiante que l'individu parvient à penser pour son propre compte. C’est une naissance qui demande un deuil. (Les Sophistes nous montrent-ils la voie ?)

Question finale. Et si le « libéralisme », et la manipulation sociale qu’il entraîne, produisait des surhommes ? Ce qui ne tue pas renforce. 

mardi 14 mai 2013

Pétrole et ordre mondial

On nous menaçait d’une crise énergétique, et voilà que l’on trouve partout du pétrole. Qu’est-ce que cela signifie ? Des éléments de réponse, venant de droite et à gauche :
  • Ce qui compte n’est pas la quantité, mais le prix d’extraction. S’il est élevé (ce qui pourrait être le cas), la crise pourrait revêtir la forme d’oscillations.
  • Le pétrole joue un rôle majeur dans la politique américaine. Il explique pourquoi l’Amérique a essayé de stabiliser le Moyen-Orient, en s’alliant à des régimes dictatoriaux. Par ailleurs, elle a une forte tendance à l’isolationnisme. Alors, ses nouvelles ressources énergétiques vont-elles l’inciter à laisser sombrer le monde dans le chaos ?
  • La Chine, qui, elle, dépend de l’importation de matières premières, va-t-elle devenir le stabilisateur du monde ? (Voir le paragraphe concernant l’Asie centrale, ici.) Avènement d'un nouvel ordre mondial chinois ?
  • Le pétrole n’est ni une bonne nouvelle pour l’effet de serre, ni pour l’innovation. C’est le signe d’une économie peu durable. Car elle est marquée beaucoup plus par l’exploitation que par la création d’un héritage. 

Enfants et manifestations

J’entendais un commentateur de la radio s’émouvoir du grand nombre d’enfants dans les manifestations. C’est vrai, me suis-je dit. Beaucoup de manifestations tournent mal. N’y a-t-il pas un risque pour les enfants ? Et que se passerait-il s’il y avait une panique de stade de foot ? D’ailleurs, même sans cela, je trouve l’atmosphère d’une manifestation peu rassurante. J’ai rencontré plusieurs fois des CRS qui barraient la route de ma promenade. Ils étaient korrects, mais inquiétants, avec leur harnachement noir et leur air méfiant.

Pourquoi faire participer des enfants, en dépit de tout ceci ? Les imprégner des rites de la démocratie ? Le psychologue Robert Cialdini, le spécialiste de l’influence, a mieux à proposer. L’homme est cohérent dans ses actes. Par conséquent, il ne peut que trouver bien ce pour quoi il a souffert. C’est pour cela que les bizutages et autres rites d’intégration sont, à dessein, des traumatismes. Selon cette interprétation, les parents de jeunes manifestants pourraient chercher à programmer leurs enfants. Ce qui ne serait pas très démocratique. 

lundi 13 mai 2013

La croissance : seule sortie de crise possible ?

Ce blog suit notre crise depuis 5 ans. Voici ses conclusions du moment.

Le monde n’a pas connu de croissance ces dernières décennies. Le gros de la population a été nourri à crédit par des formes de subventions publiques. Cette croissance virtuelle a permis à certains de s’enrichir colossalement, au détriment des autres. Mais le phénomène n’est pas qu’individuel. Les perdants et les gagnants comptent aussi des secteurs économiques et des Etats. Par exemple, l’industrie des contenus s’est faite pigeonner par la (fausse) mode du gratuit. Elle a profité aux opérateurs. De même, l’Europe du nord a exploité la crédulité de l’Europe du sud, par le biais de l’euro.

Les Etats seraient-ils coupables de la crise ? Sans leurs manœuvres dilatoires, jamais il n’y aurait pu avoir cette fausse croissance. (Et jamais « les 0,1% » n’auraient pu doubler leur part de la richesse globale.) Mais, il suffit de discuter avec un Français pour comprendre que la culpabilité est générale. Car il est férocement opposé à ce que l’on touche à son pécule. Il a applaudi à tout ce qui semblait lui rapporter. Il n’a pas compris les mécanismes de redistribution. Par exemple que la puissance publique tend à le faire travailler, en le payant bien (trop ?) ; ce qui n’est pas le cas du marché mondial, qui enrichit les intermédiaires.

Faire payer les pauvres ? Ou les riches ?
Que faire ? The Economist veut sabrer les « entitlements », les avantages acquis (la sécurité sociale, la retraite, etc.). Nous ne pouvons plus nous les payer dit-il. Malheureusement, pour la même raison qu’il a été facile d’arnaquer la classe moyenne, elle ne le permettra pas. Et elle a un poids politique colossal. Faire payer le riche ? Même une tonte courte n’enrichirait pas les pauvres. Surtout, les riches contrôlent l’économie. Ils possèdent des moyens de rétorsion redoutables.

Relancer la croissance
Bref, il n’y a pas d’autre solution que de relancer la croissance. Et ce, qu’on la pense nocive ou non. Comment ? Retour aux trente glorieuses. La guerre a provoqué un boom scientifique sans précédent. La planification étatique a fait profiter la planète de ses applications pratiques. En particulier, les nationalisations qui ont eu lieu à cette époque avaient pour objet d’empêcher la résistance au changement du secteur privé (Eh oui – pour la France : WORONOFF, Denis, Histoire de l’industrie en France du XVIème siècle à nos jours, Le Seuil, 1994.) Si l’on met de côté la guerre, deux idées peuvent être tirées de cette histoire.
  1. Notre économie financière a détruit le capital productif qui permet l’innovation et la croissance. Il faut recréer une économie entrepreneuriale.
  2. L'économie de marché, laissée à elle-même, tend à résister au changement. Elle doit être prise en main par une sorte d’intérêt collectif supérieur, dont la forme d’intervention demeure à concevoir.
Et une troisième ne doit pas être oubliée. Cette croissance ne peut plus être de la nature de la précédente. Elle doit être durable.

Nouvelle semaine de crise

The Economist s’intéresse aux banques d’investissement. Les belles années de la profession semblent derrière elle. Quelques banques américaines sont sorties victorieuses de la crise. (Ce qui n’est pas une bonne nouvelle pour le contribuable américain qui devra sauver ces monstres de la faillite.) Comme d’habitude, les européennes ont pris un bouillon. (Y aurait-il quelque-chose que l’Europe n’a pas compris dans les règles du jeu de l’économie mondiale ?) En particulier les banques françaises semblent sous-valorisées. Toujours est-il que les class actions gagnent l’Europe.

La productivité mondiale devrait baisser avec le vieillissement de sa population. A court terme, l’Europe va particulièrement mal, mais toutes les économies sont plutôt en recul. Cela pourrait s’améliorer un peu l’année prochaine. (Parce que ça ne peut pas être pire ?) Mais pas à long terme. D’après l’économiste en chef de HSBC, les gouvernements ont compensé le manque de croissance par des expédients. Situation malsaine, difficile à réformer sans susciter nationalisme ou révoltes populaires. (Question : les systèmes sociaux qu’apparemment l’on ne peut plus se payer, n’ont-ils pas été utilisés pour masquer aux pauvres qu’ils vivaient à crédit alors que les riches s’enrichissaient ? Les dits pauvres ne seraient-ils pas quelque-peu les dindons de la farce ?) Pas d'avenir pour l’OMC ? La mode serait maintenant à des négociations bloc à bloc.

Les Indiens ne paraissent pas beaucoup se préoccuper de l’emploi des masses de jeunes qui vont arriver sur le marché du travail. L’Inde est un pays difficile à faire évoluer.

Barack Obama a une majorité du pays pour lui, mais pas ses élus. Le découpage électoral les protège de l’opinion publique nationale. M.Obama se demande comment utiliser ses techniques de campagne pour les ébranler. Par ailleurs, on se demande quel va être l’impact de ses lois sur la santé, sur une industrie qui emploiera en 2020 « un travailleur américain sur 7, sans compter les entreprises auxiliaires, telles que les sociétés informatiques ou les cabinets de conseil spécialisés ». L’Amérique veut se concilier les économies asiatiques. Mais sa politique militaire semble hésitante et contreproductive. « La Chine est inquiète, mais les alliés de l’Amérique ne sont pas rassurés. » En tout cas, les relations américano-coréennes sont excellentes.

Le président du parlement européen désirerait que ce parlement élise le président de l’Europe. Ce pourrait être lui. Ou cela pourrait servir sa carrière en Allemagne, si je comprends bien. Allemagne où les manœuvres politiques sont toujours aussi compliquées à suivre (dernier épisode : les Verts sont en faveur d’une redistribution vigoureuse) et l’issue des prochaines élections, incertaine.

En Lybie, les milices semblent gouverner le pays.

Les revenus des 3 grands cabinets de conseil en stratégie ont cru fortement l’an dernier (17,3% pour Bain). Leur métier a évolué. « Ils tirent maintenant la plus grande part de leurs revenus de la mise en œuvre d’idées, de l’amélioration des processus internes de leurs clients, et d’autres missions non considérées traditionnellement comme du conseil en stratégie ». Si bien que les 4 grands cabinets d’audits essaient de les concurrencer, en achetant d’autres cabinets de conseil en stratégie. Windows 8 va mal. Décidément Microsoft semble incapable de sortir du marché du PC. Une start up lance un appareil qui photographie tout ce que vous voyez. Et il existe des systèmes d’évaluation des navires marchands. Apparemment, les fonds d’investissements s’intéresseraient au marché de l’occase navale.

Le dioxyde de carbone n’arrête pas de s’accumuler dans l’atmosphère. Personne ne s’en préoccupe. 

dimanche 12 mai 2013

Effet délétère du réseau social

Hier, j'entendais dire (Place de la toile, de France Culture) que les bonnes nouvelles se répandaient plus vite que les mauvaises sur les réseaux sociaux. Mais qu'elles étaient des armes de dépression massives : par contraste, elles soulignaient l'échec de ceux qui les lisaient.

Est-ce un phénomène mondial ou français ? Blues national, endémique, ou fond de justesse ? Ceux qui publient leurs succès claironnent la juste rétribution de leur mérite ? Les autres se sentent laissés pour compte ? Symptôme d'une société qui n'a plus rien de solidaire ? Frissonnements d'un printemps français ?

Pourquoi les enfants fuient-ils Facebook (suite)

Pourquoi les enfants semblent-ils ne pas aimer Facebook ? Voilà qui traumatise les publicitaires. Une nouvelle hypothèse est avancée. Facebook n'est pas "social". La société, c'est l'échange. L'enfant veut discuter avec ses amis. Immédiatement. Facebook ne convient pas.

Par certains côtés, serais-je encore jeune ?

Le patron français n'est pas un entrepreneur

J'interroge un ami, après avoir écrit Devons-nous revenir à un capitalisme entrepreneurial ? Pourquoi as-tu créé une entreprise ? Pour tes arrières petits enfants ?... Réponse : Non, pour ne plus dépendre d'un autre patron. La succession ne m'intéresse pas. L'indépendance si.

Une réponse qui me semble extraordinairement intéressante. Parce qu'elle éclaire une des nombreuses erreurs de Nicolas Sarkozy, et de The Economist. Si l'entreprise française ne se développe pas, ce n'est pas du fait d'un environnement défavorable, mais parce que le patron français n'est pas un entrepreneur. Il veut l'indépendance. C'est tout. (Voir aussi le deuxième point de ce billet.)

Si cette hypothèse est juste, arroser l'entreprise de fonds publics n'est pas judicieux. Le patron les utilisera pour ses besoins propres, non pour créer des emplois. Et s'il était plus efficace de rendre la grande entreprise plus hospitalière qu'aujourd'hui ? En effet, je soupçonne que notre économie aurait plus à gagner à mettre le talent de mon ami, et de quelques autres, au service d'une grande cause que de ses intérêts individuels...

samedi 11 mai 2013

Zone euro : point sur le changement en cours

Comment la crise de l’euro a-t-elle transformé sa zone ? Ce que je comprends de cet article me laisse penser qu’elle est méconnaissable, mais au milieu du gué. (Ou du fleuve ?)
  • Il y a eu centralisation « massive » « au niveau de l’UE, des pouvoirs exécutifs concernant les politiques économiques nationales ». La préoccupation de l’UE n’est plus le marché commun et l’accueil de nouveaux membres, mais la coordination et le contrôle des politiques nationales.
  • Le Conseil européen est devenu un décideur, la Commission mettant en œuvre ses décisions. Pour que tout ceci soit efficace et démocratique, il faudrait, en particulier, que le président du Conseil soit élu, sur un mode qui ressemble à celui des USA, et que la Commission soit constituée de spécialistes indépendants des Etats, avec un ministre des finances parmi eux. Le tout étant contrôlé par un parlement démocratiquement élu, et, indirectement, par les parlements nationaux. 
Ce qui me semble extraordinairement difficile à réaliser. Pour de nombreuses raisons. Ce changement est fort mal défini en termes de mise en oeuvre ; dans tous les cas, il se heurte à énormément d’usages et d’intérêts ; il n'y a pas de projet commun aux pays de l'UE, les derniers entrants, en particulier l'ayant confondue avec les USA ; les peuples n’en peuvent plus de Bruxelles. A ce point, je vois trois scénarios d’évolution :
  1. « Avancer dans le brouillard », comme Mme Merkel nomme son type de leadership. On ne fait rien en attendant la prochaine crise. Comme cela, on n’a pas besoin de demander son avis au peuple. Et on n’a pas besoin de penser, non plus.
  2. Une liquidation en bon ordre de l’euro, en cherchant à limiter les dégâts, tout en profitant au mieux des avantages de la mesure (gain de compétitivité, plus besoin d’ajustement).  
  3. Montrer qu’il y a un intérêt énorme à avoir un euro commun. (Piste : pourquoi a-t-on créé l’euro ?) Cela faciliterait fantastiquement le changement, s’il y avait de la lumière au bout du tunnel. 

L’américanisation de la France (suite)

Un article dit :
Nous avons fait l’an dernier une étude auprès de 10 000 jeunes de l’enseignement supérieur, toutes filières confondues. Qu’avons-nous constaté ? Que la génération Y, mobile, mondialisée, prête à partir travailler en Asie représente un quart des jeunes. Tous les autres, c’est-à-dire la très grande majorité, sont dans l’autre profil, celui pour lequel l’appartenance à un groupe est essentielle. Ils ne sont pas du tout les zappeurs permanents qu’on décrit. 
Les 25 % que vous avez identifiés ont-ils des caractéristiques particulières ? 
Ils sont plutôt dans les écoles de management. Je pensais qu’on en trouverait davantage dans les écoles d’ingénieurs, mais non ce n’est pas le cas. De façon générale, l’industrie est un univers où l’appartenance à un secteur, à un métier, à une entreprise est très forte. On ne peut pas les gérer comme une SSII, avec un turn over élevé.
Napoléon appelait l’Angleterre un pays de boutiquiers. Les écoles de commerce seraient-elles une 5ème colonne de la culture anglo-saxonne ? Ou un milieu favorable à son influence ? 

vendredi 10 mai 2013

Enrico Letta : enfin un leader pour l’Europe ?

Enrico Letta tente un changement. Il cherche à faire basculer la politique européenne de la rigueur à la relance. Et, de loin, il semble utiliser les règles de l’art.
  • Il bâtit une coalition d’alliés. Il a commencé par se rapprocher de Mariano Rajoy, son opposé politique. 
  • Il cherche à ne faire perdre la face à personne. S’il réussit, Mme Merkel pourra affirmer que c’est grâce à sa politique à elle.

Et si l’entreprise française était dysfonctionnelle par construction ?

Un exemple d'un exercice que je demande à mes élèves. C’est l’exercice du paradoxe : repérer un comportement bizarre ; l’expliquer par une logique qui n’est pas la nôtre. Un truc ? Commencer par une explication négative (idiotie), puis passer à une explication positive (dans les mêmes conditions, j’aurais fait pareil).

Que donne l’exercice ? Lorsqu’il est appliqué à l’entreprise, il la montre ridicule. Par exemple, pourquoi, pour ne pas perdre leurs congés, les contrôleurs de gestion de telle société sont contraints à les prendre en mai ?!

Voici deux explications proposées par moi. L’une positive, l’autre négative.
  • Explication positive. Conséquence de « l’organisation » sociale. L’activité collective est organisée par des règles. Et ces règles ont des exceptions. Mais, c’est un moindre mal. C’est ainsi que nous avons inventé le feu rouge. Le feu rouge est une bonne idée, mais, de temps à autres, il nous force à nous arrêter alors qu’il n’y a pas un chat dans la rue. Idem pour les entreprises et leur organisation.
  • Explication négative. Elle vient du professeur d'organisation Jean-Pierre Schmitt. Selon lui, l’entreprise française est conçue « par des ingénieurs (non formés à l’organisation) ». Il entend par là des théoriciens ne connaissant rien à la réalité. Résultat ?  Une organisation du travail théorique, inadaptée, pas conçue pour l’aléa, insensible à l’évolution de son environnement concurrentiel. Ce handicap monstrueux doit être compensé par l’exploit permanent des opérationnels (le fameux « mode pompier »). C’est un miracle non durable. En particulier parce que l’entreprise est quasiment incapable de changer (au mieux douleur, coût et improvisation) ou de croître.
Cette explication est aussi celle de Platon. Il disait que nous devions organiser la société selon des principes abstraits, que nous trouverions dans notre tête. Hannah Arendt pensait qu’il avait tiré cette idée de l’expérience de l’artisan, qui est guidé par l’idée de l’objet qu’il veut fabriquer. Certes, mais elle résulte d’une vie de pratique. Et s'il fallait que nos ingénieurs commencent par connaître la réalité avant d’avoir des idées ? (Est-ce ce que Hannah Arendt entend par vita activa ?)

jeudi 9 mai 2013

L’échec de Schröder et de Thatcher ?

Je me demande si l’on ne se trompe pas sur Thatcher et Schröder. Selon le camp auquel on appartient, on les juge des vampires ou des combattants de la liberté. En fait, ils ne sont ni l’un ni l’autre. Les mesures radicales qu’ils ont voulues devaient, après une période d’ajustement difficile, profiter à tous. Or, ce n’est pas ce qui s’est passé. Leurs pays se sont redressés, certes, mais ils demeurent extraordinairement fragiles. Surtout, et c’est sur quoi, curieusement, on n’insiste pas, la pauvreté qu’ils ont créée à titre provisoire ne s’est pas résorbée comme ils s’y attendaient.

C’est parce que Schröder a échoué, et que l’Allemagne continue à souffrir, qu’elle n’a pas retrouvé sa générosité d’après guerre. C’est une hypothèse que je fais. 

OGM : dangereux ou non ?

Les OGM sont-ils dangereux ? Le journal Nature essaie de débrouiller la question. Et sa conclusion est, si je comprends bien, que les pour et contre OGM sont des fous-furieux indignes de confiance. Et que, probablement, les OGM ne sont ni extraordinairement bénéfiques, ni terriblement dangereux. Mais ce n’est pas tant cette conclusion que je trouve intéressante que ce que cette enquête révèle de l’agriculture.

Car, si l’on ne sait rien sur les OGM, c’est parce qu’il n’y a pas d’argent pour faire des études sur leur compte. L’économie de marché éliminerait-elle les ressources de la recherche et nous forcerait-elle à être des cobayes ?

Surtout, si les OGM peuvent sembler bénéfiques, c’est en comparaison avec ce qui se fait ! Et ce qui se fait est effrayant. D'ailleurs nos critères d’évaluation de la dangerosité d’une technique méritent une discussion. En effet, on apprend que les techniques traditionnelles de culture sont redoutables. Cultiver, c’est avant tout combattre les mauvaises herbes. Jadis, on l’a fait par le labourage. Mais il détruit l’humus et contribue à l’effet de serre. On a aussi employé des masses de produits chimiques. Le principe des OGM était d’éviter le labourage et de diminuer la chimie. Mais la nature et les OGM semblent se livrer au jeu du gendarme et du voleur. En particulier les mauvaises herbes absorbent les gènes anti-produits chimiques transmis aux cultures. Il faut sans arrêt changer de tactique.

Tout ceci me fait me demander s’il ne serait pas temps de reposer le problème de l’agriculture. N’y a-t-il pas d’autres façons d’obtenir les résultats que nous cherchons (nourrir le monde) ? Ce problème ne doit-il pas être pris en main par autre chose que des activistes shootés à l’idéologie ? 

mercredi 8 mai 2013

Réformes japonaises : danger pour le monde ?

Les Japonais ont décidé d’un électrochoc. Par des mesures monétaristes d’une massivité sans précédent, ils veulent se sortir de leur stagnation économique (dettes colossales, déflation). Ils y sont encouragés par les Américains.

Cette décision semble poser deux problèmes. Le tissu économique japonais est vieillissant et peu propice à réagir positivement à ce type de stimulation. Mais aussi, ces mesures ont conduit à dévaluer le Yen de 20%. Ce qui menace les autres économies mondiales, notamment celles des ses voisins, et celle de l’Europe. (L’article.)

Qu’en tirer comme conclusions ? Les USA ont tout à y gagner ? L’Europe est tellement faible qu’elle n’arrive plus à se défendre ? En tout cas, il est fort possible que les réformes japonaises aient été faites au mauvais moment. Maintenant, vont-elles être un pétard mouillé, ou plonger l’économie mondiale dans le chaos ? 

Michael Porter et Confucius conseillent l'entreprise française

Je pense que son obsession de la "compétitivité" plonge notre économie dans le chaos. Les entreprises doivent, au contraire, chercher à se différencier. Pour cela, elles doivent bâtir une compétence unique. Bertrand Delage a trouvé des personnes qui partagent mon point de vue :
Celui dont la pensée ne va pas loin verra ses ennuis de près (Confucius)
L’essence de la stratégie est le choix d’accomplir ses activités d’une manière différente de celle de ses concurrents (Michael Porter)

mardi 7 mai 2013

Le Pakistan et la poudrière islamique

Les élections qui se tiennent au Pakistan éclairent les forces qui tentent de modeler le monde islamique. Rien ne va plus. Très intéressant article.
  • Au Pakistan, « une petite mais très motivée partie de la population a choisi la violence extrême comme forme d’expression politique ».
  • L’affrontement en Syrie déterminera l’équilibre entre Shiites et Sunnites. « Si les Sunnites gagnent, ils vont vouloir renforcer leur pouvoir dans les pays ayant une importante population shiite. Il est rarement su que le Pakistan a la deuxième plus importante population shiite du monde (…) elle a été attaquée impitoyablement à Karachi et Quetta ces dernières années, il y a eu plus de 400 tués. »
  • L’Occident a changé de ligne directrice. Il n’est plus question de l’ancien compromis « autoritarisme en échange d’un approvisionnement en pétrole sûr, de la protection des voies maritimes stratégiques et d’une certaine tolérance à l’endroit d’Israël ». 
  • Mais, une fois de plus, le nœud du problème semble bien plus économique que religieux. La coalition qui dirige le Pakistan a « réussi à créer une structure politique basée sur des fondations tout à fait stables », mais pas à donner au pays une croissance suffisante pour nourrir sa population. De ce fait, « augmentant le réservoir dans lequel les extrémistes tirent leurs recrues ». 

Et si le principe même de nos réformes était faux ?

On répète au sud de l’Europe qu’il doit se réformer. Il est inefficace. Il y est très difficile, par exemple, d’être taxi, ou d’ouvrir une pharmacie. De même qu’il est très difficile d’être ingénieur des mines, inspecteur des finances, ou chercheur en physique des particules. De ce fait, ces acteurs économiques peuvent prélever une « rente ». Ils gagnent plus qu’ils ne le devraient. (En général, ce raisonnement ne s’applique pas à Bill Gates. Il n’est pas un rentier, mais un « créateur de valeur ». L’économiste est un Marxiste inversé.) Il suffit de faire sauter ces barrières pour qu’il y ait plus de taxis ou de pharmacies, et que l’on puisse se déplacer ou se soigner pour moins. La logique de la rigueur est là : faire sauter des barrières, pour aller mieux.

Mais, il y a une autre explication au fonctionnement de la société. Elle vient des sciences humaines (et de la systémique) et elle amène à une nouvelle façon de voir la crise. Une société a des fonctions, comme l’homme a des organes. Par exemple, celle des taxis est le transport. Le rôle de ces fonctions n’est pas que l’action, il est aussi l’entretien et le développement de sa compétence. Dans cette vision des choses, il est aussi idiot de faire sauter les structures sociales que de vouloir éliminer les organes du corps. Mais ce n’est pas pour autant que tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes. Le corps peut tomber malade. Ce qui signifie que ses constituants ne sont plus dans des conditions correctes de fonctionnement. Il faut donc changer ces conditions pour le remettre sur pieds. Mais pas le changer, lui. 

lundi 6 mai 2013

La force de Hollande : la résilience ?

Peu de gens défendent François Hollande. Les partis de gauche semblent, en particulier, vouloir sa perte. Apparemment, la critique la plus assassine qui lui soit faite est qu'il gère la France comme le PS. Mais, en quoi est-ce une critique ? Il a tenu la tête du PS fort longtemps, et il est devenu président de la République. Où est l'échec ?

Du coup, je me suis dit qu'un tel homme devait tout de même avoir des qualités. Lesquelles ? Je tiens peut-être une piste : la résilience. Ce blog a découvert la résilience lorsqu'il a étudié Les limites à la croissance. La résilience est la capacité à résister à un choc sans perdre son identité. (Et, même, à se régénérer.) Le fondement de la résilience est la diversité. Plus un écosystème est divers, plus il est créatif dans l'adversité et durable. Le gouvernement illustre cette biodiversité. Ne va-t-il pas de M.Mélenchon à M. Valls ? La diversité d'opinion n'y est-elle pas la règle ? Il suffit d'écouter MM. Mélenchon, Valls, Moscovici et Mme Pellerin parler de Dailymotion pour s'en convaincre.

Or, la biodiversité politique est bien adaptée à un temps d'incertitude. D'abord, parce que lorsque l'on ne sait pas ce dont demain sera fait, il est une bonne idée de pouvoir disposer de plusieurs options. Ensuite, parce que la bonne solution pourrait demander un mélange. Le talent de François Hollande est de faire tenir ensemble un tel écosystème. Président systémique ? Président insubmersible ?