samedi 31 décembre 2016

Des dangers du président en CDD

MM.Obama et Hollande sont des présidents en CDD. Ils profitent des derniers feux du crépuscule pour mettre leur conscience en ordre. Ce faisant, ne trahissent-ils pas leur mission ? Car, ne sont-ils pas les représentants du peuple, pas de leur intérêt ? Quel précédent créent-ils, surtout ? 

En fait, la démocratie est fatalement représentative : ses élus se trouveront toujours confrontés à des circonstances où, faute des conditions pour consulter leurs concitoyens, ils devront décider seuls. John Stuart Mill disait que, sachant cela, l'électeur doit veiller à élire, plutôt qu'une personne qui partage ses valeurs, quelqu'un qui saura prendre des décisions judicieuses.

Ombre de Paris

Mes amis m'ont affirmé que je faisais une erreur de m'installer hors de Paris. Un de mes changements de cette année. La vie parisienne me manquera, m'ont-ils dit. 

Mais qu'en reste-t-il, de Paris ? J'ai couru à une époque les cinéclubs. Mais la majorité des films est porteuse d'un message moral bien lourd, et c'est lassant. Quant au théâtre, qu'est-il en comparaison de ce qu'il fût à l'époque de Victor Hugo ? Les concerts ? La vie dans les bars ? Cher et prétentieux. La ville elle-même n'a plus rien du charme auquel Walter Benjamin était sensible quand il s'y promenait. Les Champs Élysées ne sont plus que fast food et bling bling pour parvenu, les monuments historiques sont récurés, et la mairie et le pouvoir culturel, avec un goût de chiotte affirmé, y construisent partout des immeubles écoresponsables, qui font regretter l'esthétique soviétique. Il reste une librairie, rue des écoles, et quelques magasins, que l'on ne trouve pas en banlieue. Mais ils ne sont pas perdus.

Barack Obama règle ses comptes

M.Obama profite de ses derniers jours de présidence pour régler ses comptes. Les Russes, d'abord, qui ont cherché à influencer les dernières élections, et les Israéliens, pour le coup d'avant. La vengeance est un plat qui se mange froid.

C'est probablement de bonne guerre. La théorie de la complexité dit même que le "dent pour dent" est la meilleure façon de se faire des amis.

(C'est aussi un avertissement aux Israéliens : il n'est pas judicieux de se mettre à dos un allié sans lequel on ne serait pas grand chose... une Corée du nord, peut-être.)

Le progrès est-il un conservatisme ?

Lire l'actualité donne le tournis. Et si l'on parvenait à renverser le vieillissement ? par exemple. A quoi ressemblerait l'humanité ? Pourrions-nous nous projeter dans un monde qui ne nous ressemblera plus ? Tous ces "combats", qui ont modelé nos aspirations, qui ont eu pour seul objectif de construire une société dans laquelle nous aimerions vivre, ne paraîtront-ils pas absurdes ? etc.

Et si c'était la notion elle-même de "progrès" qui était en cause ? Et s'il était, fondamentalement, un conservatisme ? Nos pères sont nos enfants ? Et s'il fallait désormais se définir par rapport à l'avenir ? Parce que cet avenir ne gardera pas plus de traces de nous que nous n'en avons de l'homme préhistorique ?

Increvable nihilisme

Lorsque j'ai commencé mes travaux sur le changement, il y a quinze ans, je ne savais pas dans quoi je m'engageais. J'exécrai la philosophie, et j'y suis tombé. Elle m'a montré que rien ne change. Les mêmes idées ne cessent de revenir. Le "nihilisme", en particulier. C'est la doctrine nazie. On croyait qu'elle était définitivement morte. N'avait-elle pas fait suffisamment de dégâts ? Pourtant elle a réémergé sous la forme de la "destruction créatrice" des théories du management. Qu'est-ce qui explique la séduction du chaos ? 

C'est la question que je me posais en regardant des vidéos de sous-mariniers allemands de la seconde guerre. Conditions de vie, et de mort, effroyables. Et pourtant, ils rayonnaient de bonheur. On aurait cru des traders. Le nihilisme est peut-être le triomphe de l'animal sur l'homme. La joie de l'existence dans l'instant. Sans conscience.

vendredi 30 décembre 2016

L'année de l'injonction paradoxale

L'injonction paradoxale suscite, depuis quelques temps, beaucoup d'intérêt. C'est un concept fondamental, et banal, de psychologie, un peu comme l'addition en mathématiques. On trouvera, ici, les transparents que j'ai présentés, à son sujet, dans la salle du conclave du Palais des Papes. Comment expliquer sa redécouverte ? 

L'injonction paradoxale résulte de deux contraintes, l'une consciente, l'autre non, entre lesquelles nous sommes pris, et qui nous font souffrir, et parfois nous contraignent au suicide. C'est, selon moi, une caractéristique de notre temps : la société nous a donné des désirs contradictoires. Mais c'est aussi un signal d'alarme, qui nous avertit que nous devons nous interroger sur le sens de notre vie. Ayons le courage de l'entendre, nous saurons être à la hauteur du défi; et nous y gagnerons une vie digne de ce nom; une vie d'homme libre ; voilà ce que je crois. 

Et ce changement, il arrive ?

Heure des bilans. Ce blog parle de changement. Pour lui, comme pour la systémique, il est à "effet de levier". Une bonne décision et tout change. Jusqu'ici, il croyait que la tâche était au dessus de ses forces. Il se demande maintenant s'il n'y a pas un moyen de réussir.

D'ordinaire, quand on pense changement, on pense "politique". C'est une question de lois et de droits, et des justes combats qui nous les accordent. Pour Proudhon et Camus, le changement, au contraire, vient d'en bas. De vous et de moi. Il est social, pas politique. Ma façon de mettre en œuvre leur idée est la suivante. La multinationale a à la fois écrabouillé PME et citoyens en les mettant en concurrence parfaite, et diffusé son savoir-faire, à elle. Ce savoir-faire consiste à tirer du marché le maximum d'argent pour ce qu'elle fait, de maximiser ce que les économistes appellent la "valeur d'échange".

Si la PME s'empare de ce savoir-faire, elle peut non seulement se sortir de la panade, et connaître une croissance de start up, mais aussi résoudre les problèmes du chômage et d'intégration. Pour cela, il suffit que les dirigeants de PME se sortent un peu la tête de l'eau en se rencontrant les uns les autres. Par exemple en montant des conseils d'administration et en y invitant leurs collègues. (Il y a peut-être d'autres idées, mais, au moins, j'ai observé que celle-ci marchait.) Ce qui ne nous dédouane pas. Si nous ne leur donnons pas un coup de main, ils n'auront pas seuls cette idée.

En fait, je désapprouve Proudhon : agir ainsi est revenir à la définition initiale du mot "politique" : le citoyen prenant part au changement de la société.

La fin de l'agence ?

Un universitaire a remarqué que toutes les théories du management présupposaient que l'homme était le mal. En particulier, la théorie de l'agence. Elle part du point de vue du détenteur de capital et observe que "l'agent" en sait plus que lui sur l'entreprise. Comment faire pour que le premier ne soit pas filouté par le second ? La réponse, bonus et stock options. C'est faire que le dirigeant ait le même intérêt que l'actionnaire (financier, donc). Et les employés : n'en savent-ils pas, eux-aussi, plus long que le dirigeant ? Variante : le consultant, qui devient un opérationnel de confiance, et la machine.

Ce modèle est en bout de course, visiblement. On commence à se demander si son hypothèse fondatrice n'était pas erronée...

(Ghoshal, Sumantra, Bad Management Theories Are Destroying Good Management Practices, Academy of Management Learning and Education, 2005, Volume 4, n°1)

jeudi 29 décembre 2016

Blog 2016

Ce blog a franchi une nouvelle année. J'étais parti sur l'idée qu'un blog s'écrivait par réaction. J'avais donc choisi deux stimulants : The Economist et France Culture. Charybde et Scylla. J'ai fini par constater que l'analyse de The Economist était tellement biaisée qu'il n'y avait plus d'information, que du biais. J'ai cru que France Culture lui survivrait. Mais la France de la Culture croit avoir été vaincue avec ses propres armes, postmodernistes : la manipulation du langage. Elle se renforce dans ses certitudes en demandant l'avis d'intellectuels qui font "autorité", alors que le postmodernisme a détruit toute autorité, et que tous les intellectuels appartiennent au même système.

Au secours Münchhausen ! Pour se sortir de son "jeu sans fin", France Culture, la presse en général, va devoir faire un changement d'ordre 2. En attendant, l'information est en panne.

2017 : année libération ?

Les théories du management changent. Pendant quelques décennies elles ont parlé du dirigeant comme d'un "chaos maker", un "disrupteur" qui, par la destruction, de son marché ou du tissu social de son entreprise, suscitait, en réaction, la création. Aujourd'hui, on parle d'un "leader libérateur". L'homme et l'entreprise ont un potentiel qu'il s'agit de laisser fleurir. Le printemps après la terre brûlée. 

James March, quant à lui, décrit le leader comme un "poète" et un "plombier". Poète, parce que c'est sa fantaisie qui lui fait trouver de nouvelles voies. Plombier, parce que, comme le disait Napoléon, le succès est dans l'exécution, dans le détail. Lequel préférez-vous ?

2016 : année Poutine

La Russie est à terre, affirmait The Economist. Elle ne se relèvera pas des sanctions occidentales. La presse, d'une manière générale, dit du mal de M.Poutine. Pourtant, en 2016, M.Poutine a triomphé des forces du bien. En Syrie, il paraît avoir vaincu. On ne parle plus de l'Ukraine, qu'avec embarras, et de M.Trump à M.Fillon, il ne semble plus avoir que des amis. D'ailleurs, en France et aux USA, ne suit-on pas son exemple : et si l'on donnait de l'argent aux militaires ? La relance par la guerre froide ?

(Tolstoï avait vu juste : il y a des mouvements sociaux d'Ouest en Est puis d'Est en Ouest ?)

mercredi 28 décembre 2016

Le clan des Charentais

Cette année, j'ai découvert qu'il y avait un clan des Charentais. Une petite communauté, mais puissante. Surtout, les producteurs de Cognac. Mais aussi la famille Mitterrand. Ils étaient hommes d'affaires, riches, et, par nature, internationaux, polyglottes, très proches des Anglo-saxons, souvent protestants. Jean Monnet en est un cas intéressant. En 40, il a l'idée de la proposition que Churchill fait à la France, de la fusionner avec l'Angleterre en un seul pays. Pendant la guerre, il joue les intermédiaires entre l'Angleterre et les USA. Ensuite, il va être à l'origine du commissariat au plan et de l'Europe. Il utilise à chaque fois une technique très particulière. Il pense que c'est par l'exemple et par le commerce que l'on réussit. Il ne fait donc pas de grands discours compliqués, il lance quelques projets modestes, en espérant que leur succès fera école. C'est le changement par le bas, pragmatique. C'était l'anti de Gaulle.

Le plan ou l'anti-hasard

Si nous adoptons une stratégie combinant convenablement ces divers types d'actions, les agents économiques y gagneront d'être informés à l'avance de la règle du jeu suivie par le Gouvernement. La collectivité y gagnera de ne sacrifier aucune de ses chances de développement, tout en ayant créé des garde-fous contre les risques d'inflation et de sous-emploi. Enfin, le Gouvernement lui-même y gagnera de pouvoir mettre plus facilement en œuvre des mesures correctrices, dès l'instant que leur usage, proportionné à la gravité des distorsions, aura été prévu dans le plan. On peut même espérer que le fait d'avoir défini à l'avance certains seuils critiques pourra modifier peu à peu les comportements, favoriser une conception plus large de la responsabilité de chacun et, par conséquent, dispenser jusqu'à un certain point de recourir à des mesures correctrices.
Quelle vie ! Pierre Massé, auteur du livre dont il est question, réussit le concours de polytechnique en 1916, ainsi que celui de Normale Sup. Mais il s'engage immédiatement dans la guerre de 14. Pendant la guerre suivante, il est résistant. Quand il ne se bat pas, il est un des dirigeants d'EDF. C'est aussi un économiste et un mathématicien appliqué apparemment de première division. En 1965, à l'époque du livre, il est commissaire au plan. Le commissariat au plan est créé après guerre par Jean Monnet. Il utilise la technique du "changement planifié" décrite par Kurt Lewin. Le plan n'est pas imposé par un pouvoir omniscient ! Étonnement. Il résulte d'un travail de concertation, on parlerait de "co création" aujourd'hui !, avec les acteurs de l'économie (plus d'un millier de personnes, initialement, 3500 à l'époque de Pierre Massé). Résultat : non seulement le gouvernement a des informations de première main, mais tout ce monde, du syndicaliste au grand patron, partage une même vision d'où doit aller le pays. Et, il n'a aucun mal à appliquer quelque chose qu'il a conçu.

"Accepter les faits, mais non les fatalités"
Le plan a des lignes directrices qui nous surprendraient aujourd'hui, notamment le plein emploi !, mais surtout c'est un humanisme. C'est un troisième voie entre la planification technocratique, de type soviétique, et le libéralisme débridé, en pleine résurgence dans les années 60.
Le choix d'une politique économique, comme d'une politique tout court, repose sur une idée de l'homme. Dans le débat ouvert aujourd'hui, l'idée de confiance et l'idée de méfiance s'affrontent. Les hommes ne sont pas suffisamment raisonnables pour qu'on puisse, par exemple, supprimer le Code de la route et s'en remettre à la sagesse des conducteurs. De même est-il bon, dans l'ordre économique, de disposer de mécanismes qui régissent le quotidien, nous laissent l'esprit libre pour les grandes questions et nous défendent au besoin contre nos propres faiblesses. La confiance en l'homme est cependant un idéal irremplaçable en même temps qu'un facteur essentiel de notre avenir. La politique économique ne doit donc pas enserrer l'homme dans des mécanismes tels qu'ils fermeraient la voie à plus de confiance, méritée par plus de raison.
Pierre Massé est conscient que le pays vit un moment sans précédent, et peut-être sans lendemain : la croissance. Il perçoit aussi que l'avenir est pavé d'embuches. Mais il est optimiste. Malheureusement, il n'avait pas prévu qui allait lui succéder...

(Massé, Pierre, Le plan ou l'anti hasard, idées nrf, 1965. On le trouve ici.)

Pensée systémique

"M.X (Trump, Poutine...) n'a pas totalement tort quand il dit...", "ah vous êtes un partisan de X ?", "le reconnaître ne fait pas de moi un partisan", "ah, vous êtes un relativiste...". 

Nous tendons à penser qu'il y a un "bien" et un "mal", et que notre intuition nous le montre. Nous croyons que ne pas être pour c'est être contre. Et ne pas être contre, c'est être pour. Il n'en a pas toujours été ainsi. L'anthropologie, par exemple, est "anti anti-relativiste". Hannah Arendt parle d'une société plurielle. Et les Lumières et les Grecs (ou, du moins, une partie de leurs philosophes) pensaient que la vérité sortait de la confrontation. La systémique aussi. La société, la nature... sont complexes on ne peut espérer les appréhender que par un travail de recherche qui a besoin de témoignages multiples.

mardi 27 décembre 2016

Libérer le dirigeant de PME

Je pense que l'on peut être sauvé par la PME, et que le changement passe par la libération du dirigeant de PME. C'est une idée qui m'est venue lorsque je travaillais avec feue la fondation Condorcet. Il doit prendre de la hauteur. Il doit sortir de la gestion au jour le jour de sa société, et se comporter en créateur. En vrai entrepreneur.

Où chercher le levier du changement ? Je crois que c'est le conseil d'administration. Le meilleur service que l'on puisse rendre à un patron de PME, c'est de l'aider à constituer un conseil d'administration, qui se comporte comme l'entraîneur avec le champion. Le conseil d'administration est là pour lui montrer ce qu'il ne veut pas voir, et à réduire son anxiété d'apprentissage. Mais c'est aussi le faire entrer dans des conseils d'administration pour l'exposer à des idées qui lui seront utiles, et l'entraîner à la réflexion stratégique. Et c'est même la bonne technique de transmission. Le dirigeant lâche son entreprise qu'il aurait étouffée sinon, et passe dans son conseil d'administration d'où il peut la faire profiter de son expérience et de sa sagacité.

René Worms

Je découvre René Worms. Hasard. Normalien, agrégé à vingt ans, multi doctorats. Il a jeté ses forces intellectuelles immenses dans un combat : faire de la sociologie une science. Mais, il a échoué, probablement, parce qu'il avait une "conception organiciste de la société". Et on l'a oublié.

Beaucoup de gens se sont penchés sur la question. En particulier Durkheim, et toute la systémique d'après guerre. Pourquoi s'y sont-ils attaqués ? Probablement, parce que la science a une certaine efficacité. De ce fait, elle a du pouvoir sur l'opinion. Or, c'est une science de l'individu, atome, quark, corde... Ce qui n'est pas la caractéristique dominante de la nature. Surtout, lorsqu'il s'agit de questions globales, l'effet de serre ou un changement politique par exemple, nous en sommes réduits à l'invective, au rapport de forces, à la guerre. C'est la défaite de l'intelligence.

2016 : la défaite du système

L'électeur n'est pas aussi impuissant qu'on le dit parfois. 2016 aura été la défaite du système. Au moins à l'Ouest. Ses représentants : Cameron, Clinton, Hollande et Sarkozy ont coulé, corps et âmes. A leur place apparaissent des visages nouveaux, ou transfigurés. A la logique du calcul égoïste, se substitue ce qui semble le courage d'une conviction personnelle. Ce qui n'exclut pas un art de la manœuvre traitreusement efficace.

La première tentative de renouvellement, les Tsipras, Corbyn, Renzi et autres Podemos, a échoué. On tend à confondre changement et nouveauté... Alors, la nouvelle vague a-t-elle accumulé suffisamment d'énergie pour tenir la distance ? Si oui, faut-il s'en réjouir ?

lundi 26 décembre 2016

Empathie théorique

Le néoconservateur a fait de l'égoïsme une vertu. La gauche, elle, lui oppose l'empathie. C'est la justification du droit d'ingérence, notamment. Un des affrontements de notre temps est celui de l'empathie et de l'égoïsme.

2016 a été, probablement, une Bérézina de l'empathie. Car, si les démocrates américains et M.Hollande ont perdu le pouvoir, il semble que ce soit faute d'avoir compris que leur électorat souffrait. M.Hollande a bien fini par entendre quelque-chose. Mais il y a répondu par la déchéance de nationalité. Il a pensé, vraisemblablement, que le Français refusait le bien, et donc qu'il fallait lui donner le mal. Quant à M.Obama, il fait pénétrer le bien par la force.

Et si la vie n'était pas une lutte du bien contre le mal ? Proudhon aurait parlé "d'antinomie", et Aristote de "juste milieu" : la solution à nos problèmes est quelque part entre égoïsme et empathie. Peut-être dans ce que Victor Hugo appelle "l'horreur" ("awe" en anglais) : la peur et l'émerveillement, combinés. C'est le sentiment que l'on éprouve en rencontrant un dieu au coin d'un bois, disait un de mes professeurs. Interrogeons-nous, mes frères : et si le beauf était un dieu ?

Dieu reconnaitra les siens

Ce blog m'a fait faire un curieux exercice. J'ai cherché à décrypter la pensée de bien des gens, hommes politiques ou intellectuels. Et j'ai trouvé le contraire de ce que je croyais. Et de très très loin. Il n'y a rien de plus faux que le bon sens.

En fait, il est quasiment impossible de savoir ce que pense quelqu'un. D'autant que, généralement, il obtient l'envers de ses intentions lorsqu'il passe à l'action. Et que l'on ne le juge que par ses actions. Contrairement à ce que l'on dit, l'histoire a peu de chances de lui rendre justice. Le mieux que l'on puisse faire, est d'adopter la technique de la Bible. Conserver aussi longtemps que possible une trace de lui et en faire l'exégèse. Cela ne nous dira pas qui il était, mais au moins cela nous donnera des idées pour résoudre les problèmes auxquels nous sommes confrontés.

dimanche 25 décembre 2016

Test de recrutement

Are you prepared to die? If that’s O.K., then you’re a candidate for going.” —Elon Musk, the founder of SpaceX, describing the criteria for those interested in being the first humans sent to the colony he hopes to establish on Mars. (THE NEW YORKER.)

Une technique de recrutement efficace : identifier les motivations et comportements que requiert l'emploi. Si possible en s'enquérant de ce que le candidat a fait dans des situations similaires... 

CJR accusé

Le procès de Madame Lagarde aura été, en fait, celui du CJR, devant lequel elle a comparu. Il semble qu'il y ait une condamnation quasi unanime du CJR, par les candidats à la présidentielle. Signe que les politiques doivent sentir que l'opinion est mécontente. Ce que l'on reproche au CJR, c'est que, depuis ses origines, l'affaire du sang contaminé, des politiques jugent des politiques, et ne les condamnent jamais. (Mais, le CJR semble avoir été un progrès par rapport à la Haute Cour de Justice qui l'a précédé.)

Pour moi, le rôle de la justice est moins de condamner que de créer des précédents. C'est l'occasion de réfléchir à une question nouvelle, et de faire sortir des règles pour la "juger", au sens "mesure" du terme. Quant à la peine, celle qui me semble la plus terrible est de laisser l'accusé en face de sa conscience. Avec une telle définition, seul le CJR a eu droit à un procès en règle, effectivement. 

samedi 24 décembre 2016

Trump et Talleyrand

Talleyrand est fascinant. Ce qui a fait son succès, je crois, est la morale de son époque. Lui n'en avait pas. Il avait un objectif : installer sa famille, les personnes de son sang, dans la gloire et la fortune. Pour arriver à ses fins, il a joué sur l'hypocrisie ambiante : les parangons de la morale avaient tous quelque chose de honteux à cacher. Il a utilisé leurs secrets pour servir ses desseins. Il n'y a pas eu que du mauvais dans cette ambition : il a pensé que ses intérêts exigeaient une Europe en paix, et il en a été l'architecte. 

Il y aussi beaucoup de l'Américain du Far West dans Talleyrand. (D'ailleurs il était vu par les Américains comme un businessman digne des USA.) Et de Trump ? On me disait que ses conflits d'intérêt l'amenaient droit à "l'impeachment". Oui, mais quelles casseroles trainent ceux qui peuvent voter sa destitution ? Et si le seul ennemi de Trump était Trump lui même ?

Daniel Cohn-Bendit

Daniel Cohn-Bendit parle à France-Culture. Pas grand chose à déclarer sur 68. Au mieux, infortunes d'un élève un peu dissipé. Rien à voir avec "le pouvoir est dans la rue". Tout de même, on apprend que tous les révoltés n'étaient pas de la même nuance de rouge. Daniel Cohn-Bendit était  "libertaire", c'est à dire Arendt / Proudhon, l'antithèse des Marxistes et des Trotskistes. 

Et, effectivement, c'est un libertaire. Il a fait ce qu'il a voulu, sans être attaché à grand chose. Je ne sais pas s'il est propriétaire de quoi que ce soit, mais il n'aurait pas eu besoin de l'être. Il aurait pu dire "la propriété c'est le vol", et vivre en accord avec ses principes. Ce n'est pas donné à tout le monde. Peut-être est-ce plus sa vie que ses paroles qui méritent d'être un modèle ?

vendredi 23 décembre 2016

Analyse relationnelle

L'analyse relationnelle est une idée, simple et ancienne, dont on n'avait pas vu la portée. D'ordinaire on décrit les individus d'une population par leurs caractéristiques. Par exemple, pour un client potentiel : sexe, revenus, lieu d'habitation... En analyse relationnelle, les individus sont représentés par les relations qu'ils ont les uns avec les autres. Une relation peut être "a le même âge que", ou "est plus vieux que", par exemple. Toute variable descriptive peut fournir une relation.

A l'origine était Condorcet
L'idée vient de Condorcet. Il s'intéresse à des électeurs qui choisissent des candidats. Les "individus", ici, sont les candidats. Les relation sont, en quelque sorte, les électeurs. L'électeur X préfère le candidat C au candidat c.
Elle a des conséquences surprenantes. Premier exemple. Segmenter une population joue un rôle central en analyse de données. Il remplace des millions d'observations par quelques informations pertinentes. Or, les techniques "individualistes" aboutissent naturellement à la segmentation triviale (un segment = un individu) ! Du coup, on est obligé de fixer le nombre de segments que l'on cherche. Mais alors, on court le risque de rater l'essentiel ; par exemple de fondre dans un gros segment un segment émergeant, qui était, justement, celui qui annonçait l'avenir (un groupe d'innovateurs). Le phénomène est bien connu : la fortune d'une poignée de ministres du cabinet de M.Trump est équivalente à celle d'un tiers de la population américaine. Explication du naufrage actuel des sondages ?

En fait, les bénéfices de cette approche sont tellement radicaux qu'ils sont impossibles à résumer. La notation relationnelle a une capacité explicative étonnante, elle rend triviaux pas mal de problèmes, et permet d'en "linéariser" beaucoup d'autres. La question de linéarisation est décisive en informatique. La plupart des problèmes de "big data" consistent à optimiser une fonction. Dans l'approche ordinaire, cette fonction fait appel à des calculs de carrés. En analyse relationnelle, la fonction est linéaire. Cela fait que des problèmes incalculables normalement peuvent être résolus en quelques secondes... Peut-être, plus fondamentalement, le succès de l'analyse relationnelle pose la question de la nature de l'homme et de ce qui l'entoure... mais ça, c'est une autre histoire.

Passer aux choses sérieuses
Pour ceux qui veulent approfondir la question, voici une conférence sur ce sujet. Et aussi un complément d'information :
L'Analyse Relationnelle Mathématique (ARM) est une approche développée initialement par JF. Marcotorchino et P. Michaud à la fin des années 1970 et qui s'inspire des travaux de Condorcet en théorie des votes. L’ARM propose un cadre formel pour l'étude de l’association et de l’agrégation de relations binaires telles que les relations de préférences, les relations d'équivalence... et fait intervenir des outils de la théorie des graphes, des statistiques et de l'optimisation. L'étude des relations d’ordre trouve des applications en statistiques non paramétriques (tau de Kendall, ...) et en aide multicritère à la décision (agrégation des préférences, ordres médians, ...). L'étude des relations d'équivalence trouve des applications en statistiques de données qualitatives (coefficient de Rand, Chi-deux, ...) et en classification automatique (correlation clustering, algorithme sans fixation du nb de clusters,...) ... L'approche est élégante d'une part car elle est à la croisée de plusieurs disciplines et d'autre part car elle permet un angle de vue unificateur de plusieurs problèmes en mettant en lumière le rôle fondamental joué par les relations binaires. L’ARM, ses fondements, ses algorithmes et ses applications, ont principalement été développés en industrie, à IBM d'abord et à Thalès ensuite. Le but de cette journée est de communiquer plus largement sur les fondements théoriques et sur les applications récentes de cette approche notamment en co-clustering, en détection de communautés et en cyber-sécurité.

Data driven

Big data, analyse de données, machine learning, data mining... vous êtes paumés ? Dîtes "data driven". Pour JF Marcotorchino, c'est cela le sens de l'histoire. Hier les statistiques étaient "hypothesis driven". On présupposait un modèle, et l'exercice d'analyse consistait à le paramétrer. Par exemple, on partait de l'idée que la taille d'une population était distribuée selon une loi de Gauss, et on calculait les paramètres de la loi. Le "data driven" ne fait plus d'hypothèse. Cela a des conséquences révolutionnaires. Et incomprises.

Exemple d'application ? M.Fillon. Les sondages croyaient connaître la population qui allait voter à la primaire des Républicains. Raté. On était dans le champ du data driven, pas des statistiques ordinaires. Mais même dans le cas de la primaire de la gauche, le data driven peut-être utile. En effet, son propre est de repérer des "anomalies". Et ces anomalies ne sont autres que l'apparition de changements. De nouvelles tendances, qui peuvent être des occasions à exploiter. Le data driven ne fait pas votre travail, à votre place, comme on nous le dit. Au contraire, il détecte des problèmes imprévus. A vous de les résoudre. Impossible de dormir avec ce machin.

jeudi 22 décembre 2016

Rajeunir c'est possible

Expérience : des cellules et des souris rajeunissent. "Changement épigénétique". Le changement n'est jamais sans contre-parties. Le traitement pourrait aussi provoquer le cancer. Pour le moment. Va-t-on rajeunir ? Peut-être n'est-ce pas totalement contre nature ? La société permet à l'homme de faire ce dont, seul, il est incapable, pourquoi ne l'aiderait-elle pas à éviter les obstacles à la vie ? 

mercredi 21 décembre 2016

Appliquer la loi El Khomri

Comme je le disais dans un billet précédent, beaucoup de gens pensent que la loi El Khomri sert leur idéologie. Qui va gagner ? Celui qui ne se contente pas d'attendre, mais qui agit. S'il y a une leçon de l'histoire, c'est bien cela. Alors, comment mener le changement ?

Méthode des scénarios
Une bonne façon d’affronter un avenir incertain, c’est la méthode des scénarios. J’en vois trois. 
  • Si l’application de la loi se fait en situation de crise, ce sera favorable au scénario « zone franche ». Avec effet domino du type de celui que provoque la loi sur les faillites américaine. L’entreprise améliore sa compétitivité à court terme. Ses concurrents sombrent. Ils utilisent la loi, à leur tour. Cercle infernal. Jusqu’à ce que la concurrence cesse faute de combattants. 
  • Le scénario allemand permet à l’entreprise de se tirer de ses difficultés par le haut. Il augmente ses marges et sa différenciation. Malheureusement la crise est favorable au changement, mais pas à la sagesse. 
  • En conséquence, un scénario vraisemblable est celui du village gaulois frappé par le choc de complexité. Car le droit social a été singulièrement complexifié par la Loi El Khomri, si j'en crois ce que l'on me dit...
Elan vital
Moment difficile. 
  • Premier danger : la complexité. L’antidote à la complexité, c’est la simplicité. Il faut un cap. D’abord, un projet de transformation fort. Les obstacles seront d’autant moins gênants que les bénéfices attendus seront motivants. Surtout, il ne faut pas perdre de vue l’esprit de la loi, et les intérêts vitaux de l’entreprise. En fait, l’un va avec les autres. 
  • Second danger propre à un environnement chaotique : la surprise, le coup de théâtre. Le succès est dans la préparation. En particulier, la méthode des scénarios dont il est question plus haut. A condition d’en comprendre le véritable intérêt. L’expérience montre que ce n’est pas de prévoir l’avenir. C’est impossible. C’est, au contraire, de vous entraîner, de vous préparer mentalement à saisir les chances que crée l’incertain. Un homme averti en vaut deux, autrement dit… 
Morale ? Je crois que c'est celle dont je parlais dans mon article sur le succès des start up. Ce qui fait réussir, c'est la détermination. Et elle se trouve. Difficilement. Il faut chercher la fondation de ses convictions. Ce qui demande d'affronter ses contradictions. C'est la façon dont Socrate voyait l'accouchement : balancer le nouveau né dans de l'eau glacée, pour voir s'il survit. C'est comme cela que se révèle "l'élan vital". Au moins en théorie.

Logique de la schizophrénie

On me parlait de comportements schizophréniques chez les jeunes. En fait, je me demande si ces comportements ne dépendent pas du contexte. Le "schizophrène" dit à chacun ce qu'il veut entendre. Histoire de faire ce qu'il veut. Quant à lui, il cherche à satisfaire son seul intérêt immédiat ? Prédication auto-réalisatrice ? La civilisation du marché produit l'individu prévu par la recherche en économie ?

mardi 20 décembre 2016

Loi El Khomri

On dit que le problème de la France, perte de compétitivité, millions de chômeurs, montée du FN…, c’est son droit social. Vrai ou pas, si M. Fillon devient président, il faudra passer des paroles aux actes. Le changement s’appellera El Khomri. Selon le billet précédent, cette loi vient de loin. 
J’ai rencontré il y a des années certains de ses promoteurs. Je n’ai pas saisi ce qu’ils cherchaient à faire ! Cela en dit long sur le sujet, et son manque de clarté. Car la loi est au confluent de plusieurs courants idéologiques, puissamment culturels, d'où confusion. 

Ultralibéralisme
  • Le législateur a voulu que la politique de l’entreprise s’élabore au plus près du terrain. Parce que c’est là où tout se joue, pense-t-il. C'est aussi le modèle de "l'agilité". C'est une idée qui est associée à la "transformation numérique". Mais qui n'est pas du tout récente. Déjà dans les années 90, lorsque j'étudiais en MBA, on me farcissait la tête de textes contre la "bureaucratie" et pour "l'adhocratie". Idéologie individualiste, à la fois ultralibéralisme à la Hayek, néoconservatisme, mais aussi trotskisme. 
  • C’est aussi la loi des zones franches en situation désespérée. Venez chez nous vous ferez vos lois sociales ! Et c’est peut-être bien pour cela qu’elle inquiète. C'est la menace de la destruction de tout droit social.
La tradition française
Mais ce n'est pas que cela,  ce type de pensée est solidement implanté dans notre histoire. Et c'est pour cela qu'il n'est pas évident que tous ses promoteurs soient vendus à l'ennemi.
  • Un raisonnement que j’ai entendu est le suivant. Le mal de la France, c'est le dirigeant de droit divin. Il n'écoute rien. L’environnement concurrentiel est très complexe. Seule l’organisation, dans son ensemble, possède l’information qui permet de le décoder. En forçant le patron à s’entendre avec ses collaborateurs, le système allemand est efficace. C’est ce type d’efficacité que recherchent nombre de promoteurs de ce type de loi. On pourrait appeler ce courant de pensée "co gestion".
  • Il y a surtout une tradition française. M.Macron est un disciple de M.Rocard, lui-même héritier d'un des plus puissants courants de pensée de notre culture nationale. Quel est son nom ? humanisme, radicalisme, personnalisme, solidarisme, voire anarchisme ? Parmi ses promoteurs : Proudhon voire Vercingétorix. L’idéal de cette pensée est l’association de libertaires. C’est le modèle qui réconcilie capitalisme et communisme. C’est aussi le principe de l’économie sociale : l’entreprise comme une république d’égaux (ou d’égos). Ses principes sont férocement anti étatiques, libertaires, mais aussi associatifs. L'individu seul n'est rien. C'est le "ni ni". Ni capitalisme, ni communisme. C'est un modèle anti technocratique. C'est la pensée de la 3ème République, qui a bu un bouillon avec Pétain puis avec les trente glorieuses et sa 5ème République, qui ont installé le règne de l’État.
Une première morale de cette histoire, est que l'on voit ici pourquoi des gens de tous les horizons de pensée ont pu se retrouver dans le pétainisme, le nazisme, 68 ou la révolution française : ils y entendent les idées qui leur sont vissées au corps, et pensent que l'histoire va dans leur sens.

Le droit social change

Discussion avec une "travailliste" (une avocate en droit du travail), qui connaît très bien l'entreprise. Le droit du travail évoluerait de manière radicale. Depuis une quinzaine d'années, le législateur, tous gouvernements confondus !, désire pousser l'entreprise française du côté de l'entreprise allemande. Bouquet final : Rebsamen et El Khomri. La révolution numérique, ou quel que soit le nom du changement en cours, demande d'être "agile". Cela signifie faire l'usage le meilleur de ses ressources critiques : ses personnels. La loi cherche à ce que, d'une part, ils fassent profiter, comme leurs équivalents allemands, la stratégie de l'entreprise de leur compétence, et d'une connaissance de la réalité que n'a pas le dirigeant, et, d'autre part, ils gagnent en autonomie. Le principe de cette évolution est la démocratie. Moyennant le respect de droits fondamentaux, l'entreprise peut créer son droit social. Et elle doit le faire par négociation. 

Information supplémentaire. Certes, la loi est inutilement, invraisemblablement, compliquée. Cependant, entre les mains d'une personne compétente, à peu près tout est possible !

lundi 19 décembre 2016

La devise du changement ?

"Tout ce qui était n’est plus, tout ce qui sera n’est pas encore. Ne cherchez pas ailleurs le secret de nos maux." (Musset, Confession d'un enfant du siècle.)

Crise existentielle du romantisme (1836), qui ressemble à celle que nous vivons ?

Choisit-on de faire le mal ?

Ma théorie : Les actions de Mao sont en grande partie prédéterminées. Sa vie (la longue marche, et le changement de l'intérieur) illustre le type de changement que subit la Chine depuis des millénaires. Ensuite, il mène une lutte contre l'influence extérieure qui vide le pays de sa substance, le réduit à la misère, et l'empêche de se redresser. L'intellectuel chinois en est arrivé à penser que la solution au problème est de mettre la culture occidentale au service de la chinoise. Pour cela Mao, le pays ayant récupéré sa souveraineté, utilise des techniques de conduite du changement classiques : la révolution culturelle. Il s'agit de faire rentrer dans la culture (au sens anthropologique du terme) chinoise le savoir-faire occidental, par une expérience collective réussie. (C'est comme cela qu'un match de foot gagné soude une bande de gamins.) Millions de morts. Ses successeurs poursuivent dans la voie du changement social, eux aussi. Mais, ayant constaté l'échec de Mao, ils ont essayé autre chose. Ils ne sont donc pas forcément plus sympathiques que Mao. Ils sont seulement plus jeunes que lui. Moins de morts, mais tout de même des conséquences : une pollution effroyable. J'ajoute à cela que Mao n'a pas eu beaucoup de temps pour s'entraîner à diriger le pays le plus peuplé du monde : il vient d'un milieu paysan, et il a passé sa vie à se battre. Pourquoi le Chinois aime encore Mao, en dépit de ce raté sanglant ?  Que se serait-il passé, si la Chine n'avait pas réussi à sortir de l'état dans lequel elle était encore avant guerre ? Comment serait son peuple ? Peut-être compare-t-il la Chine à l'Afrique ?...

Mon interlocuteur me disait que tout dirigeant, de nation ou d'entreprise, peut choisir de faire le bien ou le mal. Mao avait choisi la voie du mal. Quant au Chinois, il ne pense pas. J'ai demandé à mon interlocuteur ce qu'il aurait fait à la place de Mao. Il m'a répondu que ce n'était pas la question.

Moteurs de la décision

Je me demande si l'homme n'est pas aux prises avec deux forces :
  • Ses convictions. Elles portent sur sa vision du monde, par exemple s'il est individualiste, ou humaniste. (Autrement dit s'il ne voit pas plus loin que son intérêt instantané, ou s'il pense qu'il sert une cause plus large.)
  • Son inertie naturelle, qui tend à le pousser à croire que ce qu'on lui dit est conforme à ses convictions, et donc qu'il peut rester dans un état végétatif. 
à cela vient s'ajouter le fait qu'il part avec un bagage. La société lui a lavé le cerveau, afin qu'il ne vienne pas bouleverser l'ordre existant. Ce n'est que petit à petit qu'il va comprendre que ce qu'on lui présente comme parfait est plein de contradictions. S'il a le courage de dépasser son inertie, il approchera petit-à-petit de ses convictions. Jusqu'à ne plus être victime de cette inertie. 

C'est peut-être le sort des saints ou de Socrate, ou ce que dit Confucius de l'homme de 70 ans, ou le message du Tao. Tous ce monde, plus ou moins rapidement, a trouvé sa "voie" ? Ses actes et ses paroles sont cohérents. Et ils sont adaptés à l'univers qui l'environne.


dimanche 18 décembre 2016

Artiste dégagé

Les artistes américains ont pris, comme un seul homme, fait et cause pour Mme Clinton, ce qui ne l'a pas sauvée. Dernièrement, les artistes français ont fait de même pour M.Hollande. Pas plus réussi. 

Le psychologue R. Cialdini dit que les gens qui ont une "aura", que nous admirons, ont une influence sur nous. Les artistes n'ont plus d'aura ?

Les raisins verts

Et nous tous, les révoltés, les violents, nous sommes le péché de cette société injuste, de ce monde à grimace de vertu, et nous jugeons, nous frappons nos pères coupables. La faute enfante une violence qui punit la faute : c'est la loi de l'histoire ; la vraie loi d’airain. Je sens bien qu'il pourrait y avoir une autre morale, celle qui essaie de trancher le fil fatal par la miséricorde et l'amour. Je la repousse : elle m'amollirait ; je parie pour l'ordre qui nait de la guerre. 
Affrontement, fort civil, entre un fils et son père, gens intelligents, qui annonce peut-être bien tous les conflits du demi-siècle à venir, qui ont donné notre société actuelle.

Écrivain remarquable et honnête homme dont on ne parle plus beaucoup de nos jours. 

(SIMON, Pierre-Henri, Les raisins verts, Le Seuil, 1950.)

samedi 17 décembre 2016

Foie

Quelle est l'origine de la curieuse orthographe de "foie" ? ce serait une traduction de "de figues" en Grec (selon le Robert). Pas parce que le foie ressemble à une figue, mais à cause de l'expression grecque "foie d'oie engraissée aux figues". 

Notre terme foie viendrait donc du foie gras, produit désormais honni. Mais qui a marqué notre culture. Que fait la police de la morale ?

M.Macron nouvel Obama ?

L'ambassadeur d'Angleterre disait de M.Obama, peu avant son élection (en substance), que c'était un homme de grandes capacités, mais qui n'avait pas "trouvé ses repères". Autrement dit, il n'était pas mûr pour gouverner. Je pense que l'histoire lui a donné raison. M.Obama est un cérébral, qui a trouvé une bonne histoire pour se faire élire. Mais une fois au pouvoir, il n'a pas compris que gouverner était autre chose qu'une belle histoire, c'était résoudre des problèmes du moment, sans a priori. M.Obama a été victime du mal de l'intellectuel supérieur : il a cru que gouverner c'était, seul dans sa chambre, trouver "l'unique bonne solution".

Je me demande si M.Macron ne repart pas sur le même chemin. Il représente l'attrait de la nouveauté. Il est intelligent. Comme M.Obama il a la double propriété d'être une bête politique tout en paraissant frais, neuf et honnête, voire innocent. Mais est-il parvenu à atteindre des convictions solides, ou n'en est-il encore qu'à un jeu de concepts ?

vendredi 16 décembre 2016

Gauche suicidaire ?

Un ami se demande pourquoi la primaire de gauche est une foire d'empoigne. Mon interprétation.
  • C'est culturel. La gauche est, depuis toujours, une question de courants. La force de Jaurès, et de ses successeurs, a été de parvenir à les tenir ensemble. Paradoxalement, alors qu'elle parle de la dimension sociale de l'existence, elle n'est faite que d'individualités. Il y a donc quelque-chose de sain à une belle bagarre. C'est une forme de résistance à une récupération rampante par le modèle gaulliste. 
  • La primaire permet à chacun de connaître sa force. Cela lui donnera une place dans un genre de futur "shadow cabinet". Rampe de lancement pour 2022, que l'on vise la présidence, lorsque l'on sort en tête, ou un ministère, en échange d'un pouvoir de nuisance manifeste.
Conclusion. Il devrait y avoir un éparpillement du vote. Et je ne vois toujours pas comment M.Valls, et ses tendances dirigistes, ne pourrait ne pas être éjecté comme un bonnet de nuit. Mais je me trompe toujours...

Esprit, Ordre nouveau et personnalisme

Avant guerre, il y a eu un courant de pensée qui a cherché une voie, entre le capitalisme et le Marxisme : le "personnalisme". Le nœud du problème est la question de l'individu. Individu = chose qui maximise son utilité, selon le Marxisme et la théorie économique. Ils sont matérialistes. Ils nient "l'humanité" = essence de l'homme. (Essence divine pour le croyant, mais pas besoin d'être croyant pour penser que l'homme est autre chose que la seule matière. D'où présence d'athées.) L'antithèse de l'individu est la personne. On appellerait probablement ce courant "humanisme".

Il est divisé en deux principaux : "Esprit, qui est avant tout Emmanuel Mounier, approfondira surtout la réalité de la personne alors que l'Ordre Nouveau s'attachera plutôt, en s'inspirant plus directement de Proudhon, à définir le cadre organisationnel qui va permettre à l'humanité nouvelle d'émerger." (wikipedia.) Il y a aussi "Jeune droite" qui "rassemblait de jeunes intellectuels plus ou moins dissidents de l'Action française". 

A ces idées sont liés des gens comme MM.Delors, Rocard, Mendès-France, mais aussi la CFDT, le PSU, la nouvelle gauche, la deuxième gauche, Daniel Cohn-Bendit. Il y avait une proximité avec la pensée de Camus. Mais, pour compliquer les choses et brouiller le message, il y a eu les épisodes opposés du Pétainisme et de 68, qui semblent avoir, au moins un temps, séduit beaucoup de Français. Ce sont ces épisodes qui m'ont fait me tromper sur tous ces gens. Jusqu'à penser qu'Ordre nouveau sonnait fasciste.

Critères de jugement
Morale de cette histoire ? Pour parvenir à décrypter quelqu'un, il faut 
  • savoir à quelle famille de pensée, à quelle tradition, il se rattache ;
  • comprendre sa tactique. En particulier, croyant servir ses idéaux, il peut être amené à utiliser une cause qui aura des conséquences contraires à ses convictions. (Comme Heidegger et le nazisme ?)
(M.Macron, qui serait dans cette mouvance, ne serait donc ni libéral, ni de gauche - au sens gauchiste du terme ? C'est un humaniste, et pas un matérialiste ?)

La fin du vote contre ?

Alexandre Jardin dit que l'on vote contre. Cela n'est-il pas en train de changer ? Les votes Fillon, Macron et Mélenchon semblent des votes pour. Mme Le Pen demeure un vote contre. Mais elle peut se faire rogner à gauche par M.Mélenchon, et à droite par M.Fillon. Sera-t-elle au second tour, comme le disent les sondages ? M.Macron, qui représente une voie moyenne de type Juppé, avec l'avantage de la nouveauté, a peut être toutes ses chances.

jeudi 15 décembre 2016

Qu'est-ce qui fait réussir une start up ?

Très bon concept, et pourtant ça ne marche pas. Et pourtant la presse adore. Depuis 6 ans. Qu'est-ce qui explique qu'une start up marche ou non ? me demandè-je en rencontrant un entrepreneur.

Et Facebook ? A l'origine, M.Zuckerberg avait conçu une application de comparaison entre meufs, qui a mis à genoux le système d'information de Harvard, tel était son succès. M.Zuckerberg est un homme de marketing. Et surtout, il se bat pour ce à quoi il croit. On peut dire tout le mal que l'on veut du fondateur d'Uber, mais on ne peut pas lui retirer le fait qu'il est convaincu de livrer une lutte du bien contre le mal, et qu'il est prêt à sacrifier à son combat son existence (de missionnaire de la vraie foi) et la nôtre (d'infidèles).

Voilà ce qui me semble fatal à la start up française. Son fondateur ne croit pas assez en son produit pour se comporter comme un activiste. Du coup, il n'atteint pas la masse critique qui provoquerait la naissance d'un cercle vertueux. Le changement, ça se démarre à la manivelle. Ce produit est théorique.

Le parasitisme pour les nuls

Discussion avec un ami. Il me parle d'un logiciel qu'il a développé. Déformation professionnelle, trente ans d'obsession, je lui construit en deux mouvements un plan d'action. Mais ça ne l'intéresse pas. C'est un poète qui a horreur de la contrainte. C'est alors que j'ai compris comment il gagne son argent. Son comportement, ses diplômes, font croire qu'il est commercial. Il a constitué un réseau de spécialistes qui ont pensé qu'il allait vendre leurs services. Du coup, il s'est trouvé avec une offre exceptionnelle. Il la propose au hasard des rencontres qu'il fait. Cela lui permet de vivre, mais rapporte très peu au dit réseau. D'ailleurs, il a fini par vendre ses propres services ! A force d'écouter les autres, il sait laisser entendre qu'il est aussi compétent qu'eux.

Morale ? Comme ce fabriquant de polos turc, dont on raconte qu'il a découvert qu'ajouter un crocodile à ses produits les faisait vendre, nous constatons que certains comportements nous rapportent beaucoup, miraculeusement. Ils consistent, sans toujours que nous le sachions, à ne pas faire ce qu'exige, implicitement, de nous ces comportements. Étrangement, la dite société encourage une façon d'être qui la ruine.

mercredi 14 décembre 2016

Source de l'autorité

Pourquoi ne nous croit-on plus ? se lamente-t-on chez France Culture. C'est peut être une question d'autorité. Ceux qui dominent la société pensent qu'ils tirent leur légitimité de leur situation. En fait, il est possible que ce soit, plutôt, le parcours qui donne l'autorité. 

Le "fils à papa" n'a pas d'autorité. Même s'il a de beaux diplômes. Car il ne les a pas gagnés à la loyale. Idem pour l'acteur, ou le sportif.

Connais-toi toi-même

L'homme suit son intérêt, affirme la doctrine libérale. Mais quel est notre "intérêt" ? Pour Robert Cialdini, le psychologue de l'influence, c'est économiser notre cerveau. Nous choisissons de préférence ce qui nous évite de penser. Voilà pourquoi nous sommes faciles à manipuler.

Et si nous ne pouvions plus nous  laisser aller à notre naturel ? Le changement de notre temps ?

mardi 13 décembre 2016

Trump et l'Empire du Milieu

Il y a eu la finance non conventionnelle. Maintenant, il y a la diplomatie de M.Trump. Elle confirme peut-être une de mes hypothèses : c'est une diplomatie du rapport de force. Pour négocier en situation favorable avec les Chinois, M.Trump, qui sait ?, cherche à les ennuyer. 

C'est de bonne guerre ? Que pourraient faire les Chinois en retour ? Peut-être ce qu'ont fait les Américains avec les Russes, lors des événements ukrainiens. Ils ont cherché à toucher les intérêts des leaders et pas du peuple. Et si les Chinois remplissaient les hôtels Trump de Chinois ? Cela ferait fuir les autres clients et rendrait M.Trump totalement dépendant de l'Empire du Milieu. (Au sens italien du terme ?)

Le taxi crée de l'emploi

J'entendais parler taxis. France Info. Une enquête indépendante d'une assurance montre, si mes souvenirs sont bons, que les VTC créent 13000 emplois en Région Parisienne, quand les taxis traditionnels en perdent 750. Et qu'un nouvel emploi sur 4 créé dans la dite Région est un taxi. 

Je me suis demandé si l'on comparait bien les mêmes types d'emplois. Et si on avait réparti les salaires des 750 personnes en 13000 ? (ou à peu près) Quand on parle de réduction du chômage, a-t-on ce type d'emploi en tête ? Tu seras taxi indépendant, mon fils ? Au fait, pourquoi une société d'assurance se met-elle à faire des enquêtes sur ce type de sujet ? Sachant qu'une assurance est bien plus un fonds d'investissement qu'une société de secours à proprement parler, peut-on réellement la considérer comme "indépendante" ?

Couple et attachement

La résilience est une question d'attachement, dit B.Cyrulnik. A.Jardin demande au couple d'aider ses membres à devenir eux-mêmes en s'extrayant du lavage de cerveau familial et social. Et si, ça semble évident a posteriori, le rôle du couple était l'attachement ? Fournir, selon le terme de B.Cyrulnik, une "base de sécurité" qui permet d'apprendre à vivre en société, par des allers et retours exploratoires ? (Comme le fait l'explorateur avec son camp de base.)

Et si c'était le concept moderne de couple, la consommation de l'autre, qui en faisait un feu de paille ?

lundi 12 décembre 2016

La valeur est dans la PME

C'est étrange. Lorsque l'on réfléchit à ce qui s'est passé ces dernières décennies, on voit un grand mouvement de "dévalorisation" venu d'en haut et appliqué en bas. En même temps, les techniques de "mise en valeur", jadis réservées aux grandes entreprises, se sont démocratisées. Et si cela permettait au "bas", à la PME, de lancer un mouvement de "revalorisation", qui l'affranchisse, au moins en partie, du haut ? (Libérons les PME !)

Qu'est-ce qu'une saine hygiène de vie ?

"Ce qui protège le mieux nos fonctions cognitives, c'est l'hygiène de vie : les exercices physiques, les efforts intellectuels, le réseau affectif familial et amical, les petits stress qui nous éveillent et les vacances qui nous engourdissent créent des alternances qui empêchent la routine et donnent la sensation de vivre. Le sport de bas niveau, le mariage, l'amitié et les désaccords intellectuels sont nos meilleurs médicaments. L'hérédité et les traumatismes ont un faible effet sur les vieillissements morbides." (Boris Cyrulnik, De chair et d'âme.)

Proudhon

Voilà un curieux livre. Un travail de bénédictin. Un évêque, Pierre Haubtmann, a consacré une partie de sa vie à Proudhon, anarchiste pour qui "Dieu c'est le mal". Il en est sorti un ouvrage énorme. On suit Proudhon presque au jour le jour. C'est remarquablement bien écrit. Mais c'est très frustrant car, l'auteur étant mort prématurément, l’œuvre n'est pas finie. D'autant que le second tome, la dernière partie de la vie de Proudhon, est épuisé. 

De ce début d'existence, voici ce que j'ai compris de Proudhon. Proudhon c'est une œuvre, mais c'est peut-être, comme Socrate, avant tout une vie.

Proudhon est une sorte de force de la nature. C'est un pauvre qui va s'élever grâce à l'ascenseur social de l'éducation. C'est un homme qui est tout dans ses idées. C'est un styliste remarquable. Probablement un de nos plus grands écrivains. Et on pourrait lui appliquer la devise de Camus : "je me révolte, donc nous sommes". Il rêve d'une société heureuse. Il croit y parvenir par des moyens pacifiques. On dirait "systémiques" aujourd'hui. La révolution ce n'est pas pour lui. Pourtant il lui sera associé.  

L'oeuvre
Son œuvre intellectuelle semble un bricolage confus. Pourtant elle est remarquable. Il est dommage que l'on ne l'ait pas reprise pour l'approfondir. En fait, Proudhon est à lui seul le pendant de toute l'école philosophique allemande : Hegel, Feuerbach et Marx ! Leurs démarches sont proches. Ce qui a fait croire aux Allemands, à tort, qu'il était de leur côté, alors qu'ils étaient opposés.

Tous essaient de comprendre un phénomène nouveau : le capitalisme. Et on adopte une méthode qui est, comme ils le disent, et contrairement à ce que je pensais, "scientifique". En effet, on cherche à le modéliser d'une façon que l'on appellerait maintenant "systémique". Dans les deux cas, on pense que le problème est une question "d'économie". Marx et Proudhon se disent "économistes". La question est le "surplus". Pourquoi le capitaliste gagne-t-il beaucoup, et le prolétaire peu ? Proudhon trouve une explication lumineuse : quand on rassemble des gens, ils font ce qu'ils n'auraient pas pu faire séparément (par exemple construire un pont). Le capitaliste s'approprie la part sociale du travail collectif (le pont). La seconde partie du problème semble être la circulation de l'argent, et le crédit. Le capitaliste détourne ce processus d'intermédiation dans le sens de ses intérêts.

Comment résoudre ce problème ? Hegel et Marx répondent "dialectique". A un phénomène, il faut opposer son antithèse, qui doit déboucher sur une synthèse, un monde heureux. Lutte des classes : bourgeois, prolétaire, communisme. La solution est politique, c'est la révolution ! Pour Proudhon, le monde est fait "d'antinomies", des opposés. Cela ressemble à du Hegel, ce qui trompe Marx, mais ce n'est pas du Hegel. Toute chose est à la fois bien et mal, selon la façon dont on l'utilise. C'est en comprenant ces antinomies que l'on parvient à remettre la société en équilibre. Et voilà pourquoi il ne faut pas faire la révolution. Et voilà pourquoi la solution au problème de la société n'est pas politique. Un problème économique a une solution économique, et pacifique ! Application. Les individus peuvent s'approprier le surplus collectif en formant une "association progressive". Ce qui correspond à la plate-forme Uber, qui serait possédée par les taxis, et qui s'étendrait petit à petit, jusqu'à inclure tous les taxis du monde. De ce fait, la valeur créée par l'association va aux taxis et pas à un fonds d'investissement. De proche en proche, informaticiens après boulangers après taxis... nous nous partagerions équitablement le surplus créé par l'espèce humaine. En outre, il essaie de créer une banque qui permettrait de faire du crédit sans argent, et sans intermédiaire. Mais ça a fait long feu.

L'homme 
Mais ce n'est pas l'oeuvre, peut-être, qui est la caractéristique marquante de Proudhon, mais sa vie. Dans un récit de Xénophon, une personne dit de Socrate, qu'il est quelqu'un de "bien". Proudhon est probablement quelqu'un de bien, et de droit. Et d'un courage hors du commun. En quelque sorte, il va passer sa vie à se placer du côté de l'opprimé. Même si celui-ci semble son ennemi, et lui a fait du mal. Et s'il risque sa liberté ou sa vie dans l'affaire. Et à s'opposer au dogmatique, quand il croit qu'il a tort, même si la real politik voudrait qu'ils fassent cause commune. Ce qui lui vaudra bien des misères, mais aussi une immense popularité, et une sorte d'estime générale, et posthume.

dimanche 11 décembre 2016

Patron de gauche : oxymore

Simon and Garfunkel : like a bridge over troubled water. Mon prof d'anglais de 1ère a tenté de faire travailler ma classe sur ce texte. Flop. Même problème, lorsque j'ai voulu utiliser un blog dans un cours. Raison : lutte de classes. Si l'enseignant se sert de ce qui compte pour l'élève (musique, jeux...), ce n'est que pour mieux le manipuler. Un ami se dit "patron de gauche". Je parie que ses employés sont convaincus qu'il est deux fois plus exploiteur que le reste de son engeance maudite. Le bon patron ou le bon enseignant est un patron ou un enseignant mort. Ce n'est qu'alors que l'on peut constater avec certitude qu'il voulait notre bien. Et qu'on peut le regretter. 

Le propre de notre culture est qu'elle croit à une lutte entre le haut et le bas. Il faut faire avec. S'il veut faire le bien, le patron ou le professeur doit se comporter comme un tortionnaire. Il y gagnera le paradis.

Tactique Trump

M.Trump découvre que le programme Air force One, d'avion présidentiel, coûte 4md$. Il l'annule. On conteste. Il a raison. 

Et si M.Trump était l'image même de Sun Tzu ? Il a vu la faille de son adversaire : l'hypocrisie. Maintenant wu wei, non agir: tactique : Mr Smith au Sénat. L'homme du peuple qui arrive au pouvoir et qui y trouve partout la corruption. Il lui suffit de mettre au jour les petits arrangements de ses prédécesseurs démocrates, parti de la morale, pour les décridibiliser. Une fois qu'il aura réussi, il fera ce qu'il veut. Qui pourra lui jeter la première pierre ? Certainement pas la presse, démocrate.

samedi 10 décembre 2016

Wilbur Ross

Mes amis pensent parfois que je décerne le prix Nobel. En effet, quand je m'enthousiasme pour quelqu'un j'en parle sans cesse. Il se trouve parfois qu'il obtienne le prix Nobel. Eh bien, le phénomène prend de l'ampleur. Cette fois, c'est du cabinet de M.Trump qu'il s'agit. Voici ce que j'écrivais de Wilbur Ross, à qui il envisage de donner un ministère, celui du commerce. Cela date d'il y a un peu plus de dix ans :
le fonds d’investissement du financier Wilbur Ross, après avoir redressé des banques japonaises, multiplié par 10 en 2 ans sa mise dans l’acier, investi dans le textile et tout ce que la planète peut compter d’entreprises sinistrées, dispose maintenant de 15md$ pour construire un empire dans l’équipement automobile - secteur qui connaît une crise sans précédent…
M.Trump pense que les USA sont une entreprise sinistrée qu'il faut mettre en valeur pour en remonter la rentabilité ? (Il la revend dans 4 ans, exactement l'horizon d'un fonds ?)

Les microparticules de Mme Merkel

Depuis quelques temps, et depuis quelques années à cette période, je suis pris de quintes de toux, qui ne sont pas liées à un rhume. Et si c'était un coup des microparticules qui nous polluent depuis une semaine ? Et si ces microparticules venaient des centrales à charbon de Mme Merkel ? comme on l'entend depuis deux ans. 

La guerre des lobbys
Prev'air donne la carte ci-dessus. On voit, pour le 10, que la pollution est centrée sur l'Allemagne, mais aussi sur la Hongrie. Une enquête rapide sur Internet ne donne rien de concluant. Ou plutôt, une information très intéressante : on ne peut pas croire ce que l'on lit. Nous sommes soumis à de la désinformation. Il semblerait que deux lobbys s'affrontent. D'un côté, il y a ceux qui affirment que les particules viennent des voitures, de l'autre que la voiture n'est pas en cause, que c'est une question de centrales. 

Les arguments des uns et des autres ne sont pas très convaincants. Pour exonérer les centrales, on affirme que la pollution est essentiellement locale, et que les vents dominants ne viennent pas d'Allemagne. Certes, mais les pics de pollutions ne sont pas des questions de moyenne, mais d'exception. Et, oui, il semble bien que les centrales produisent beaucoup de microparticules. La carte ci-dessus est l'argument majeur des anti Allemands. Mais elle ne prouve rien non plus. Elle peut résulter de la situation climatique et des émissions locales. 

Et si tous ces gens comprenaient qu'il y a quelque chose de plus important que leur idéologie : la santé publique ? Et si l'on faisait, à nouveau, appel à une science désintéressée et non manipulée pour étudier la question ?  

(C'est ce type de comportement honteux qui fait dire à M.Trump que les travaux sur le réchauffement climatique ne prouvent rien. A force de vouloir défendre ce qu'il croit "bien", le scientifique a perdu toute légitimité, et a nui à sa cause.)

(Compléments.)

Le Watergate de Trump ?

La presse américaine a subi le phénomène Charlie Hebdo. La haine qu'elle avait pour M.Trump a fait, qu'habilement provoquée, elle n'a parlé que de lui ! Il est possible qu'autant d'acharnement l'ait rendu sympathique. Au moins il a fait savoir que quelqu'un irritait au plus haut point l'establishment. Ce type de presse est une presse d'opposition. Quand elle est associée au pouvoir, elle ne peut que s'opposer au peuple. Car il lui faut un ennemi.

Si M.Trump devient impopulaire, la presse américaine va retrouver son rôle naturel. Alors elle fera jouer son arme fatale : sa capacité d'enquête, sans équivalent. Elle produit des Watergate. (Mais elle aurait tort de sous-estimer M.Trump.)

Salon de musique

Dans Le salon de musique, Satyajit Ray montre la chute d'un noble indien. Le noble avait un rôle social. Il était l'assurance du peuple contre les catastrophes naturelles, la crise. Surtout ?, c'était un esthète. Sa vie était une œuvre d'art.

Partout dans le monde, le noble semble ferment de la culture. Partout, la société qu'il représentait est détruite par l'inculture, celle du bourgeois et du colonisateur, chez S.Ray. L'inculture, c'est l'individualisme, négation de la dimension collective de l'existence. L'individualiste utilise sa position sociale à son profit. Il devient un oligarque. Ce qui détruit la société, qui ne peut plus fonctionner, et produit la crise. Or, sans société, rien ne marche.

Le développement durable sous-entendrait-il le communisme ? Communisme au sens originel du terme : auto-contrôle de l'individu, de façon à pouvoir maintenir en fonctionnement le "bien commun" qu'est la société. 

(L'individualisme, agent du changement ? En "détruisant" la société, il la force à se "recréer" autrement. Destruction créatrice. Peut-on changer sans crise ?)

vendredi 9 décembre 2016

Le nihilisme existe-il ?

Nihilisme. C'est le reproche que font des Camus, Proudhon, Arendt ou Dostoïevski à ce que, faute de mieux, on pourrait nommer "gauche bourgeoise", Marx, Sartre, la pensée 68, les intellectuels qui ne sont pas venus du peuple, ou qui n'ont pas été fidèles à leurs racines. Le nihilisme est l'antinomie d'autorité. C'est penser que la fin, l'atteinte d'un utopique idéal, justifie tous les moyens. La Terreur en particulier. Cette fin peut être le néant. Détruisons la société, le mal, elle se renouvellera miraculeusement. C'est ce que dit Heidegger, qu'ont beaucoup aimé nos intellectuels.

Mais les nihilistes sont-ils vraiment nihilistes ? Les casseurs de 68 sont à l'Académie française, dans les palais de la République, ou à la tête de nos grandes entreprises. Le nihiliste ne veut pas détruire la société. Il la trouve très bien. A condition d'en profiter. Ce qu'il nie ce n'est pas l'Autorité, mais celle de ses parents. Cependant, il n'a pas compris qu'en attaquant la seconde, il faisait tomber la première. Et il se trouve bien dépourvu quand il constate qu'en créant l'anarchie, il a sapé sa propre autorité. 

L'intellectuel a été le vecteur du néant. C'est maintenant à la société de reconstruire une histoire qui ait du sens pour elle. Logiquement, l'intellectuel devrait trouver sa justification dans ce travail. Sera-t-il capable de faire sa révolution culturelle ?

Injonction paradoxale

Un dirigeant approche l’âge de la retraite, est fort stressé par un travail de tous les instants, a besoin d’argent, et aimerait bien vendre son entreprise. Mais il veut aussi imposer à son acquéreur sa façon, difficile à comprendre, de faire les choses. Façon qui rend son affaire très, très, peu rentable, par ailleurs. Car son affaire, c'est sa vie. Que dis-je ? une œuvre d'art.

J’ai l’impression que beaucoup d’entre-nous, dirigeants ou non, sommes dans ce cas. Nous sommes mus par une « volonté de puissance ». Nous voulons plier le monde à notre volonté. Car nous avons raison. Nos parents ne nous ont-ils pas encouragés à n'en faire qu'à notre tête ? Interdit d'interdire. Mais nous sommes rappelés à l’ordre par la réalité matérielle...

Et si nous avions mis tout à l'envers ? Et si nous devions chercher le bonheur dans notre vie privée, et pas dans nos affaires ? Et si, du coup, cela nous permettait de comprendre que l'autre n'est pas un ennemi ? Qu'il est, au contraire, celui dont nous avons besoin pour nous soulager de tout ce qui nous fait souffrir ? Et, si, de manière imprévue, c'était ainsi que l'on finissait par réaliser nos rêves de puissance ?

jeudi 8 décembre 2016

La croissance est-elle un mal ?

On a franchement l'impression que la croissance, c'est fini. Mais si cela tenait à la forme que prend la croissance ? C'est une croissance matérielle. Une croissance "spirituelle" ne rencontrerait pas les mêmes obstacles. 

Comment passer de l'une à l'autre ? Il faut parvenir à faire entrer la création de connaissances dans le circuit financier et marchand. Aujourd'hui, les bonnes idées, comme l'eau, l'air ou la terre, sont gratuites. Il faut aussi trouver un moyen pour les échanger. La connaissance ne doit plus être enjeu de pouvoir, elle doit être vulgarisée. Économie du partage ?

La liberté, ça marche

La libération de l'entreprise, une nouvelle mode de management ? J'en ai déjà vu tellement en trente ans, qu'elles me révulsent instantanément. Pire. Ce livre semble une résurgence de ceux, à la gloire des dirigeants qui réussissent, que l'Amérique a produits, après guerre, à la cadence des liberty ships. Il cite d'ailleurs des textes anciens, qui m'étaient familiers. N'est-ce pas ridicule de réutiliser de vieux témoignages pour appuyer une nouvelle théorie ?

Une idée dont l'heure est venue
Mais, si cette théorie ressurgit, c'est peut-être que son heure est venue. Il y a une aspiration générale à la responsabilité. Et ce n'est pas un hasard si la nouvelle théorie du leader libérateur s'applique à n'importe quel dirigeant qui transforme son entreprise. En effet, si vous voulez faire plus avec ce que vous avez, il faut que vos équipes sortent de leur routine, donc qu'elles prennent des responsabilités. La liberté est un facilitateur de changement ! Surtout lorsque l'on manque de moyens. Autre point surprenant : les leaders qui parlent dans ce livre, semblent être extérieurs à leur entreprise. Souvent, d'ailleurs, ils lui consacrent relativement peu de temps. Leçon : la libération de l'entreprise commence par celle de son dirigeant ! C'est parce qu'il découvre qu'il y a mieux à faire qu'une gestion tatillonne, qu'il la confie à ses collaborateurs, qu'il leur laisse le champ libre pour l'initiative. 

Leader libérateur ou créateur ?
Qu'ai-je retenu ? Des théories que je n'avais pas prises au sérieux. Par exemple théories X et Y. Le libérateur est Y : il croit que les hommes sont de la même espèce. Le non libérateur est X. Il se sait différent des autres, des paresseux qui ne marchent qu'à la schlague. On peut passer de X à Y. Il y a aussi le "servant leader". Subtil. Il veut le bien de son organisation. Il la connaît intimement. Il ressent sa souffrance, en particulier. S'il en prend la tête, c'est parce qu'il perçoit en elle le besoin d'une transformation, et qu'il est le seul à pouvoir la porter. Surtout, et c'est plus surprenant, ce type de leader fait émerger les valeurs du groupe, pas les siennes. Ce n'est qu'une fois que l'organisation est consciente de ses valeurs, que le changement peut commencer. Et il se fera par rapport à elles. Ce qui semble signifier que le principal projet que porte ce type de leader est l'efficacité du groupe. Pas tel ou tel objectif rationnel. Ce n'est pas tant un leader libérateur qu'un leader créateur. Il donne vie à une créature, l'entreprise, dotée de son libre arbitre. Elle fera des choses dont il n'a aucune idée. Une sorte de Dieu qui disparaîtrait au septième jour. 

Un livre que je conseille aux dirigeants que je rencontre. Qu'est-ce que cela vous inspire ? leur dis-je.

(GETZ, Isaac, La liberté, ça marche, Flammarion, 2016.)

mercredi 7 décembre 2016

Connaissance en conserve

Dans ma jeunesse, on disait que le service allait se substituer à l'industrie. Mais on n'en donnait aucune justification claire. Je me demande maintenant, si la raison n'en était pas "les limites à la croissance". Si l'on transforme le matériel en immatériel, alors, il n'y a plus de limite ! Aujourd'hui, on a beaucoup de service, mais plus de croissance. Pourtant, on dit que la connaissance croit en s'échangeant. A moins que, pour que l'immatériel se transmette à un volume compatible avec l'économie de marché, il faut qu'il soit inclus dans du matériel ? 

Le produit industriel contient déjà de la connaissance. Mais, peu. L'avenir serait-il à une enveloppe matérielle de plus en plus fine qui contiendrait de plus en plus de connaissance ? On pourrait mettre aussi la nature à contribution : la biomimétique dit qu'il y a une énorme quantité de connaissance dans le moindre être vivant. Et on pourrait inventer des objets qui créent de la connaissance par échange. C'est le principe de la société, certes. Mais on sait mal l'exploiter. 

Morale. Et si notre croissance s'était faite par destruction ? Et s'il nous restait à apprendre à utiliser le potentiel créateur de la nature ?

De chair et d'âme

"Les neurosciences posent aux psychologues des problèmes de science fiction : comment un douillet affectif invente une manière de vivre qui le mène au bonheur ; comment l'organisation parfaite d'une société devient une fabrique de merveilleux sadiques ; comment l'urbanisme technologique attire les damnés de la terre qui s'y installent avec leurs processus archaïques de socialisation par la violence ; et comment ce nouvel univers façonne le cerveau des enfants qui s'y développent.
La conscience n'est plus ce qu'elle était. Les neurones créent un lien biologique dans le vide entre deux personnes ; les nouvelles galaxies affectives sculptent des formes étranges dans la pâte à modeler de nos cerveaux ; les déterminants humains sont si nombreux et de nature si variée que la durée d'une existence leur donne à peine le temps d'émerger. Chaque histoire humaine est unique. "

Les facteurs qui font de l'homme ce qu'il est sont incompréhensibles. Or, jusqu'ici, nous l'avons cru ultra simple. Certains ont pensé qu'il était tout d'âme, d'autres de matière. La science l'a étudié en multipliant les spécialités et les spécialistes. Elle a fini par comprendre que cela ne l'amenait nulle part. Le point de départ de l'enquête c'est la complexité, et le hasard. 

Pour autant, si la science n'a pas trouvé ce qu'elle cherchait, elle n'a pas travaillé pour rien. L'histoire d'un homme est une question "d'attachement". En effet, sa vie est un apprentissage permanent de l'inconnu. Cet apprentissage se fait par une exploration prudente. Sa condition nécessaire est une "base de sécurité", d'où partir à l'aventure et vers laquelle revenir, pour reprendre des forces. Bref, si vous n'allez pas bien, c'est probablement une question d'attachement.

A quoi ressemble une base de sécurité ? Ce peut-être un parent, dans son enfance, la société, l'idée de Dieu... Si vous n'avez pas une base correcte, vous devrez inventer la vôtre. Et là, tous les coups sont permis. Mais c'est mon interprétation.

(CYRULNIK, Boris, De chair et d'âme, Odile Jacob, 2006. Très bien écrit, et plein d'observations surprenantes.)

mardi 6 décembre 2016

Que faire quand rien ne va plus ?

Je déjeunais avec un investisseur inquiet. Brexit, Trump, populisme, banques en délire, taux 0, etc. rien ne va plus, ça ressemble à 29... Comment protéger mes enfants et petits enfants ? 

Défense active. Résilience. Autrement dit, en se faisant des amis. Mais ce n'est pas facile. Car notre éducation nous a donné des égos démesurés... Mais la menace justifie d'essayer de se changer, non ? (Ma "tribune" de Focus RH.)

Gaston Lagaffe est-il de gauche ?

Gaston est-il de gauche ? se demandait France Culture. Gaston semble plutôt un libertaire. Il n'en fait qu'à sa tête. C'est surtout un poète. Ce qui pourrait le faire croire de gauche est qu'il rend fou les gens sérieux, l'autorité. Son chef, l'agent de police, M. De Mesmaeker (qui se prénomme Aimé, d'après wikipedia). Mais, ce qui est encore plus de gauche, c'est la société de l'époque. Imagine-t-on une entreprise tolérer un Gaston ? Aujourd'hui, il serait dans une poubelle. Qu'elle est surprenante la tolérance de cette société ! Non seulement elle n'a pas envoyé les révoltés au bagne, comme elle le faisait au dix-neuvième siècle, mais elle a nourri des gens qui la niaient. Ce ne serait plus concevable aujourd'hui. La censure a fait des pas de géant en quelques décennies.

Notre définition de la gauche a changé du tout au tout. Les anarchistes, comme Proudhon ou Elisée Reclus étaient des gens d'ordre. La gauche pensait que l'homme n'avait besoin d'aucune règle, il avait l'ordre en lui. La gauche aimait le progrès, elle reconnaissait l'autorité de la science et de l'art. Elle avait un culte de l'école. Le Canard Enchaîné cultive encore cette tradition : c'est un fondamentaliste de la langue française, comme Proudhon, Reclus, Vallès, Brassens, Villon. La gauche était "socialiste", elle croyait aux bienfaits de la société, et voulait les faire partager à ceux qui contribuaient à leur production. Aujourd'hui, elle est individualiste.

Manuel Valls est-il un rassembleur ?

Manuel Valls est-il un rassembleur ? Pour rassembler la gauche, il faut quelqu'un qui soit au centre de la gauche, donc très à gauche. (Et peut-être encore plus : la droite de la gauche a besoin de se croire révolutionnaire et populaire.) M.Valls est un homme du centre, comme M.Macron, Bayrou ou Juppé. Le système de primaires favorise les Fillon : des gens qui savent déplacer les purs et durs de leur famille. Les gens du centre gagnent le second tour. Mais ils n'ont aucune chance d'y parvenir. 

Sommes-nous condamnés à une politique de guerre civile ? Un candidat étant élu pour faire "la politique de son camp", c'est-à-dire punir l'autre camp ? Pas sûr, heureusement. Comme Sadat et Begin, ce sont les généraux et les terroristes qui signent les paix.

Trump ne change pas ?

Trump, un Républicain comme les autres ? Il est revenu sur toutes ses promesses. Pourtant, avec les Chinois, il ne semble pas changer. Il dit ce que tout le monde dit, mais qu'aucun politique n'ose exprimer. Et il risque l'incident diplomatique, au moins.

Joueur de poker ? Imprévisible ? Doit convaincre l'autre qu'il est capable de tout. Même du pire. Ce qui, d'ailleurs, est peut-être vrai.

lundi 5 décembre 2016

Renzi coule l'Europe ?

Cette fois-ci, c'est la fin ? Les journaux économiques étrangers le disent depuis quelques semaines. Pour une fois, les sondages ne se sont pas trompés. Ils ont vu que M.Renzi, Cameron II ?, perdrait son référendum. Ce qui veut dire que Cinq étoiles va gagner. Or il veut sortir de l'euro. Ce que n'aiment pas les marchés. Or, l'Italie et ses entreprises sont en très très mauvaise situation et dépendent énormément des marchés. Or, toute l'économie européenne est systémiquement liée. (L'économie mondiale est aussi liée à l'européenne, mais cela ne semble pas être perçu par les dits journaux.) 

Que va-t-il arriver ? Autodestruction de l'UE et de l'économie mondiale ? Difficile à dire. Il semble que l'on soit dans une phase d'apprentissage. Le politique, l'électeur, l'économie... découvrent les conséquences de l'irresponsabilité. Si l'on veut éviter de disparaître, il va falloir apprendre à renoncer aux solutions radicales et découvrir que nous avons besoin de tout le monde pour nous tirer d'affaire. Peut-être que l'on ne peut y parvenir que lorsque l'on est dos au mur ?

Résilience et attachement

B.Cyrulnik fait de « l’attachement » la condition de la résilience. Qu’est-ce que cet attachement ? "Une base de sécurité" qui nous a permis d’explorer notre environnement, et d’apprendre à y vivre.

Remonter la pente
Mal dans votre peau ? Probablement une question d’attachement. Il y a un tas de facteurs, du biologique au social, qui entrent en jeu. On ne sait jamais ce qui est à l’origine d’une résilience défaillante. (Certes, notre modèle de société n’est pas favorable à l’attachement !) De toute manière, si vous n’êtes pas adapté à la société, chercher un coupable ne vous réparera pas. Vous êtes, d'après B.Cyrulnik, handicapé à vie. Mais beaucoup d'handicappés vivent bien.
Comment remonter la pente ? Je suggère de prendre sa pente à l'envers. Le peu résilient manque d’affection. Il en demande trop à la société, et est hyper sensible aux agressions. Du coup, d’échec en échec, il se replie : « learned helplessness ». Il a besoin d'une base de sécurité. Pas une maman, plus possible, mais un réseau relationnel. Un réseau qui puisse l’aider à explorer le monde. Pour le construire, il ne doit pas demander d’affection, mais de petits avantages matériels. Il doit commencer par des relations ténues. Le succès lui donnera confiance. Il deviendra ambitieux.

(Résilience ? Si nous sommes bien adaptés à notre milieu, si  nous profitons de la vie, nous sommes résilients. Nous avons confiance en nous. La résilience doit être quelque-part dans les étages inférieurs de la pyramide de Maslow.)

Les destinées sentimentales

Les gens ne sont pas comme nous aimerions qu'ils soient. Ils sont, fondamentalement, des étrangers. C'est de cette constatation que part le véritable amour. Voici ce que je crois comprendre de ce livre. (Ce qui peut être à la fois interprété comme de la grandeur d'âme ou comme une profession de foi d'un misanthrope réactionnaire à qui la réalité échappe.)

C'est aussi une plongée anthropologique dans une société peu connue. Celle des porcelainiers de Limoge (la famille Haviland) et des producteurs de Cognac, avant la première guerre mondiale. Ce sont les frères de notre "élite mondialisée". Ils sont extrêmement riches, protestants, vivent entre eux, parlent les langues des pays étrangers, où ils ont été éduqués, voyagent beaucoup. Comme les nobles de jadis, ils partagent l'idée qu'ils ont un talent, artistique, que nous ne possédons pas. C'est lui qui leur a permis de créer leur entreprise et de donner du travail aux indigènes. Car, s'ils ont construit leurs châteaux dans le Limousin et les Charentes, c'est, comme les colons venus en terres hostiles, pour en exploiter les ressources naturelles. En échange de quoi ils donnent la civilisation à leur population d'arriérés ingrats. 

(Jacques Chardonne était un des auteurs favoris de François Mitterrand, charentais. Notre président faisait-il partie de la société de ce livre ?)

dimanche 4 décembre 2016

La Faute de Charles le grand ?

Le rêve de la troisième et de la quatrième républiques, c'était un peuple qui se gouverne. Seulement, ce n'était pas très stable. Alors, Charles de Gaulle a eu l'idée d'une légère modification. Il s'agissait de remplacer le gouvernant par un monarque.

Mais les choses n'ont pas tourné comme prévu. Le monarque a été remplacé par deux courants opposés. Gauche et droite. Et cela a conduit à une série de règlements de comptes, bien loin des préoccupations fondamentales, et existentielles, du citoyen. Et de l'intérêt général, qui est aussi l'intérêt particulier bien compris du dit citoyen. Et ce quel que soit sa fortune, ses opinions ou autres.

Rhétorique

N'avez-vous jamais été frustré de constater que vos raisonnements ne convainquent personne ? (Y compris lorsque vous êtes enseignant.) Il est simple de comprendre pourquoi. Imaginez vous à la place de "l'autre". Vous allez vous méfier. Même, spontanément, soupçonner une tentative de manipulation. 

L'art de convaincre sans rencontrer la méfiance s'appelle, depuis les Grecs, la rhétorique. (L'art de l'usage de la raison est la dialectique.) La rhétorique est une sorte de méta langage. Elle dit : faites moi confiance, ce que je fais est bien. Dans ces conditions, il est inutile de vous esquinter le cerveau à comprendre ce que je vais faire (ce qui est l'objet de la dialectique). Exemple :

"L'establishment" représenté par Mme Clinton a un discours de bons sentiments. Mais une partie de l'électorat constate que sa situation s'est dégradée alors que celle de l'establishment s'est améliorée. L'électeur en déduit que establishment = profiteur. Bon sentiment = manipulation. Le comportement de M.Trump fait alors passer le message : je ne suis pas l'establishment, je suis, comme vous, sorti d'un film de Clint Eastwood.