Limits to Growth (MEADOWS, Donella, RANDERS, Jorgen, MEADOWS, Dennis, Chelsea Green, 2004) est une mise à jour, 30 ans après, de l’étude, commandée par le Club de Rome au MIT, qui a affirmé que l’humanité allait rapidement à sa perte, si elle continuait sur la même pente.
De quoi s’agit-il ? C’est un modèle mathématique,
paramétrable, de l’évolution d’un certain nombre de grandeurs :
population, espérance de vie, production de biens, pollution, ressources
naturelles… En jouant sur ses paramètres, on en tire des scénarios d’avenir. Il
ne donne donc pas une prévision, mais fournit un moyen d’aide à la décision.
Dans ces conditions pourquoi a-t-il fait autant de
bruit ? Parce que, 40 ans après, l’évolution du monde ressemble à ce que prévoyait son premier scénario ; or, celui-ci se
termine en « effondrement ».
Baisse brutale de la population mondiale, de son espérance de vie, de la
production de nourriture, etc.
Car notre modèle de développement a un vice : la croissance. Plus
exactement notre obsession de produire toujours plus de biens matériels. Elle
nous pose des problèmes de plus en plus difficiles à résoudre : pollution,
empoisonnement, disparition des ressources naturelles… Pire : cette
croissance est exponentielle : la centrifugeuse va de plus en plus vite. La
résolution de ces questions coûte tellement cher à l’humanité qu’elle n’a plus
les moyens de s’occuper de ce qui est essentiel pour elle : ce qui fait de
l’homme un homme (santé, éducation, épanouissement…). D’où chômage, pauvreté,
déséquilibres physiologiques… auxquels nous cherchons une solution dans
toujours plus de croissance !
On a beau introduire les hypothèses les plus favorables dans
le modèle du MIT, on ne fait que reculer pour mieux sauter. D’ailleurs, il
serait peut-être mieux de sauter tôt que tard : par exemple, un scénario
qui prévoit un surcroît de réserves de ressources naturelles se termine en
crise environnementale. Tout est lié : quand on bouche un trou, cela fuit
ailleurs.
L’économie de marché apparaît comme un système
extraordinairement efficace d’essorage systématique des ressources naturelles
et des pauvres au profit des riches. Ainsi la famille africaine consommait, en
moyenne, 20% de moins en 1997 qu’en 1972. Autre exemple : l’élevage du
poisson. Du fait de la destruction des populations de poissons, par ailleurs
nourriture de beaucoup de pauvres, 30% de ce que consomme l’humanité vient
d’élevages (une catastrophe écologique en eux-mêmes) ; du fait de son
prix, ce poisson va chez le riche. « La
technologie et les marchés servent généralement les segments les plus puissants
de la population ».
Depuis des années nous consommons beaucoup plus que ce que
la terre est capable de renouveler. (À noter qu’à l’époque du livre, seulement
8% de la population mondiale possédait une voiture.) Autrement dit nous
accumulons une sorte de dette écologique, qui croit exponentiellement et que
nous n’avons plus les moyens de payer, puisque pour cela il faudrait les
ressources de plusieurs planètes. Comme ces personnages de bande dessinée, nous
courrons au dessus du vide.
Nous nous dirigeons donc vers des moments difficiles.
Et la terre et l’humanité, s’ils en réchappent, ne seront plus comme avant.
Quoi qu’il arrive, le message central du livre est, me semble-t-il, que nous
devons transformer nos aspirations et notre vision du monde. Nous devons sortir
de l’individualisme, de la concurrence et du court terme. Nous devons
comprendre que notre bonheur ne tient pas à toujours plus de colifichets, mais
à plus d’humanité, de société. C’est ici que se trouve la solution à la
pauvreté, au chômage, et la réponse aux besoins premiers de l’homme.
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