Le swap. C’est une sorte d’assurance, qui ne demande pas l’immobilisation de garantie. Le type d’innovations qui a eu la faveur des financiers. Il y a quelques dizaines de milliers de mds€ de swaps en circulation. Attention danger !
Imaginons qu’un émetteur d’obligations (par exemple une multinationale) et que l’organisme qui les garantissent défaillent en même temps : il n’y a plus d’assurance ! Effet Titanic : ce qui devait permettre au navire de rester à flot en cas d’accident est rompu par l’accident ! On comprend que les gouvernements tentent de garantir le statu quo à tout prix. Et qu’avoir laissé choir Lehman Brothers ait été imprudent.
Il semblerait aussi qu’il y ait eu mélange d’actifs risqués (prêts immobiliers), avec des actifs solides, de façon à profiter de la notation des derniers. (C’est ce qui expliquerait que les fonds de pension qui ne doivent investir que dans ce qui est sans risques soient maintenant en péril.)
Le journaliste Kurt Eichenwald a appelé son enquête sur Enron (qui utilisait ce type d’outils) : Conspiration d’idiots. On aurait envie d’employer la même expression ici. La finance mondiale recrute (comme Enron) ce que nos universités ont de plus intelligent. Que fait cette élite ? Des erreurs d’une stupidité sans nom.
Pourquoi ? Tversky et Kahneman disent que le jugement de l’homme seul est irrémédiablement biaisé. Il est systématiquement faux. Notamment l’homme est fâché avec les probabilités. Et le fait d’appartenir à l’élite a son biais particulier : on est invincible. N’a-t-on pas tout réussi ? Nos idées ? Forcément bonnes : nos maîtres ne nous ont-ils pas dit que nous avions toujours raison ?
Donc, ce qui a détruit l’économie est d’avoir laissé la bride sur le cou d'individus isolés. Les mécanismes de contrôle, quand ils existaient, étaient dirigés par leurs frères. Cette configuration est présente partout dans notre société. Les organes les plus puissants et les plus dangereux sont occupés par des solitaires, par une élite qui pioche ses certitudes dans une culture biaisée.
La solution ? Pas des règles qui contrôleraient pour nous l’élite. Ça ne marche pas. Mais la démocratie : les décisions qui engagent l’avenir de la communauté ne doivent pas être laissées à l’individu, mais prises par la communauté.
Compléments :
- Du swap : Boom goes the CDS et Settlement Auction for Lehman CDS: Surprises Ahead?
- Sur les dégâts occasionnés au monde par l’idéologie de l’élite américaine : Grande illusion (qui parle aussi d’Enron et de Kurt Eichenwald).
- Sur le parallélisme entre la France et les USA (histoire de ne pas penser que l’erreur est chez eux) : Parallélisme France USA.
- Sur l’irrationalité de l’individu : MYERS, David G., Intuition: Its Powers and Perils, Yale University Press, 2004.
- Sur l’inefficacité du contrôle par les règles : Dangers de la réglementation.
- Mon propos sur la démocratie est un peu expéditif. C’est le format du billet qui le veut. Je crois que le bon fonctionnement de la démocratie demande des méthodes appropriées, des méthodes qui aboutissent au consensus, et pas à un constat de l’existant (vote). Changer de changement.
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