Livre de Maurice Genevoix.
Des héros de notre temps ai-je pensé en lisant ce livre. Ce n’est
pas un récit de guerre. C’est l’histoire d’hommes confrontés à l’absurde. Des
hommes face à la mort quasi certaine ou à des mutilations effroyables. Comment
peut-on rester digne, droit, et ne pas être détruit par la peur, dans ces conditions ?
Livre surprenant. D’abord par son style. Phrase courte,
simple, lumineuse. Il n’est non seulement pas daté, mais il est, en quelque
sorte, plus moderne que l’écriture moderne. Ensuite par ce qu’il décrit. La vie
du fantassin de 14, jour après jour, parfois minute par minute. Guerre
effroyable où l’on ne voit jamais l’ennemi, où l’homme est enseveli sous la
boue, dans laquelle il se noie parfois, dans un déluge d’acier. Le rôle du
fantassin n’est rien sinon garder un espace conquis, ou le reprendre, dans une
guerre qui avance et recule par centimètres, pour faire du surplace. (Tout le
livre se déroule exactement au même endroit.)
Qu’est-ce qui a fait tenir ces hommes ? Ce n’est pas l’endoctrinement
ou la haine de l’ennemi. On l’appelle « le Boche », on le craint.
Mais on l’aide quand il est blessé, et on plaisante avec lui quand il est prisonnier,
et on admire sa dignité dans la souffrance. Il me semble que c’est avant tout
la capacité à se concentrer sur l’instant, à tirer parti des plus infimes
bonheurs de la vie (de la paille sèche dans un abri de boue, quelques jours de repos). Il me semble
surtout que c’est l’amitié entre des hommes qui affrontent ensemble un monde incompréhensible.
Une leçon.
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