J’ai commenté chapitre après chapitre, La France en mutation, 1980 – 2005 (Presses de la fondation nationale des Sciences politiques, 2006), une collaboration entre Harvard et Sciences Po. Qu'est-ce que j’en retire ?
Comment sommes-nous passés de ce que Galbraith appelait « la société d’abondance », à la souffrance au travail, la crise du logement, l'acceptation qu'une partie de la population est définitivement inemployable ? Un monde qui ressemble étonnamment à une société qu’il croyait révolue, celle qui avait valu à l’économie, qui la décrivait, le nom de « dismal science ». Une science lugubre qui ne prévoyait que la pénurie.
Dans cette histoire, il n’y a ni héros, ni coupables. C’est tout le système français qui s’est effondré, un système bâti sur le modèle d’Ancien régime. Avec un État omnipotent et théoricien, qui nous considère comme des assistés incapables de savoir ce qui est bon pour eux, veut tout régler et croit à la solution miracle. Faute de conscience de la complexité de la réalité, ses décisions ont une fin calamiteuse. Avec des hauts fonctionnaires qui gèrent des « champions nationaux » sans en connaître le métier. Avec une population d’exécutants sous-qualifiés fruits d’une Éducation nationale incompatible avec l’économie.
De ce fait, notre système d’État providence, basé sur l’école, l’armée, le plein emploi, qui garantissait l’intégration, un revenu, le logement, la protection sociale, l’égalité et plus généralement le respect de nos valeurs fondamentales, a sombré. Il était incompatible avec le coût d’un chômage durable. Il en a résulté un modèle proche du modèle anglo-saxon, parce que notre structure sociale est proche du modèle anglo-saxon.
Cependant la transformation n’a pas été complète : les vestiges de l’ancien système sont demeurés, parce qu’il représente ce à quoi nous croyons. Ce qui rend le fonctionnement de notre société particulièrement difficile.
De là, où faudrait-il aller ? Le Français ne ressemble pas au portrait qu’en font les journalistes et les politiques. Il est « progressiste » et ouvert. Il veut une « économie sociale », qui permette l’initiative individuelle tout en protégeant l’homme de l’anarchie du laissez-faire. Pour atteindre cet objectif, il semble qu’il faille reconstruire une sorte d’Etat providence à l’ancienne mode. En corrigeant ses failles : il doit être capable de résister aux aléas de l’économie. Probablement une forme de la flexisécurité qui a la faveur actuelle des économistes. Donc il faut des Français adaptables parce que bien formés, des dirigeants qui leur ressemblent, et un gouvernement qui apprend à mettre en œuvre les volontés de la nation, selon le modèle de la démocratie représentative.
L’Europe a certainement un rôle à jouer dans cette transformation. Elle doit évoluer vers un modèle fédéral de type américain qui permette de définir démocratiquement des politiques globales et non plus sectorielles.
Compléments :
- Les 12 chapitres du livre tels que je les ai commentés :
- Protection sociale
- France et immigration
- L’Éducation nationale change
- France : guerre des générations
- Les relations de travail en France
- Le changement de l’économie française
- 5ème République et partis politiques
- Crise de la représentation politique
- Chaos européen
- France : crise de gouvernance ?
- La régionalisation de la France
- Transformation de l’entreprise française
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire