En lisant Le pragmatisme de William James (billet précédent) j'ai compris à quel point le pragmatisme est consubstantiel à ce que j'appelais la systémique. Plus exactement à l'application de la systémique à la psychologie.
J'ai découvert ces travaux par l'intermédiaire de Bateson, qui était à l'origine de l'école de Palo Alto, l'origine de cette école de psychologie. Et Bateson était un homme de systémique. D'où mon erreur.
L'apport du pragmatisme, essentiel, est celui de "réalité" (ou de "vérité"). Nous créons notre réalité. Nous donnons un sens au flux des événements qui nous entoure. Sans cela nous ne pourrions pas vivre. Cette capacité d'interprétation n'est pas totalement libre. Elle doit obéir à des règles. Elle doit s'inscrire dans la réalité collective, au moins. Mais il nous demeure une latitude d'ajustement. Ce qui nous permet de choisir (inconsciemment) des options qui ne sont pas toujours bonnes pour notre santé. Nos maladies psychologiques viennent d'une construction pathologique de la réalité.
Le rôle du psychologue est alors de nous aider à trouver une autre option qui restaure notre équilibre. C'est le "changement". Je me demande d'ailleurs si la "méthode" que le pragmatisme dit être n'a pas pour objet la réalisation de ce changement. C'est le moyen de nous aider à construire une réalité "saine".
Les vrais travaux sur le changement ?
Ce qui me renvoie à mon métier. Je comprends maintenant que tout mon travail a toujours consisté à amener une organisation à voir la réalité d'une nouvelle façon. Et que ce travail ne peut pas réussir si, moi-même, je ne transforme pas ma propre interprétation de sa réalité. C'est aussi ce que l'anthropologue Eric Minnaert dit de son travail.
Toute la question de la mise en oeuvre du changement, que je croyais essentielle, est secondaire. Une fois que la perspective a changé, la mise en oeuvre du changement est évidente. En fait, c'est plus subtil que ça. C'est cette technique de mise en oeuvre qui, parce qu'elle est rassurante, débloque la remise en cause qui va produire la nouvelle réalité.
Depuis des années, j'essaie de me raccrocher à une science du changement. Pour cela, je cherche des travaux qui pourraient en être les précurseurs. Mais, à chaque fois, y compris avec Kurt Lewin, les études que je trouve ne portent pas sur "le" changement, c'est à dire le processus que suit tout changement social, mais sur "un" changement, une transformation à faire subir à la société (ou à l'entreprise). Kurt Lewin, par exemple veut faire entrer la démocratie dans l'entreprise. Ce qui est un rien totalitaire.
Cette fois, je crois avoir découvert ce que je cherchais. Dire que je considérais ces travaux avec condescendance. Ils me semblaient trop "évidents", trop proches de mon expérience. Surtout, ils manquaient d'ambition. Ne parlaient-ils pas de couples alors que mon métier est le changement d'entreprise ?
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