On nous
enjoint de réformer nos États, de réduire nos dettes, de déréglementer notre
économie pour qu’elle crée enfin « des richesses » et de l’emploi.
Sans cela « les marchés » nous grilleront de leurs feux. Le discours dominant est massivement libéral. Mais le
doute s’est installé.
De la Chine à l’Europe en passant par l’Inde et la Russie,
le monde s’est systématiquement libéralisé à partir des années 80. Les États
ont vendu ce qui générait des revenus (par exemple la production d’énergie, les
télécoms, parfois des banques) et ont conservé ce qui n’était pas rentable. En
outre, ils ont relâché leur rôle régulateur. Cela a créé de grandes fortunes,
mais aussi beaucoup de souffrance et de résistance à l’injection d’une seconde
dose du même traitement. Partout, le populisme menace.
Et les feux de l’enfer ? L’Amérique refuse de se
réformer et n’a pas été punie pour cela. C’est plutôt les pays vertueux qui
vivent l’enfer : Irlande, Angleterre, Espagne, Grèce… (les trois premiers
sont, curieusement, les champions du libéralisme européen). Et la BCE
n’a-t-elle pas infligé une défaite aux marchés financiers ? Au fait, qui
sont-ils ? Une force de la nature, aveugle, ou un mouvement entraîné par une
clique de copains, qui pourrait être remise au pas pour peu qu’on le
veuille ?
Petit à petit, les idées de Paul Krugman gagnent du
terrain : il faut une relance Keynésienne. Ce qui sous entend, au moins à
court terme, plus d’État, et pas moins. On peut d’ailleurs se demander si la
prochaine série d’élections européennes ne va pas connaître une vague
socialiste.
Le changement comme
dégel
Le changement a quelque chose d’extrêmement contrintuitif,
et celui-ci ne semble pas être une exception. Une majorité se forme, qui
rejette les idées qui occupent le haut du pavé. Mais, étant composée d’individus
isolés, elle ignore qu’elle est une majorité. Il faut une sorte d’incident pour
qu’elle se découvre. Alors, ce qui semblait un consensus est renversé, à la
surprise générale.
Et l’avenir ? Il est imprévisible. Il se cristallisera
autour d’une idée qui aura probablement deux caractéristiques : comme le
libéralisme en son temps, elle sera portée par des gens extrêmement déterminés
(pour qu’elle puisse percer), elle semblera répondre aux maux à court
terme de la population.
Compléments :
- Le modèle du dégel est dû à Kurt Lewin, c’est aussi le modèle de la transition de phase, en physique.
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