mardi 6 janvier 2009

La démocratie en guerre

Lutte entre le Hamas et Israël. On reproche à Israël d’employer des moyens disproportionnés. Dans Le Monde, André Glucksmann se demande ce que seraient des moyens proportionnés :

Quelle serait la juste proportion qu'il lui faudrait respecter pour qu'Israël mérite la faveur des opinions ? L'armée israélienne devrait-elle ne pas user de sa suprématie technique et se borner à utiliser les mêmes armes que le Hamas, c'est-à-dire la guerre des roquettes imprécises, celle des pierres, voire à son libre gré la stratégie des attentats-suicides, des bombes humaines et du ciblage délibéré des populations civiles ? Ou, mieux, conviendrait-il qu'Israël patiente sagement jusqu'à ce que le Hamas, par la grâce de l'Iran et de la Syrie, "équilibre" sa puissance de feu ? A moins qu'il ne faille mettre à niveau non seulement les moyens militaires, mais les fins poursuivies. Puisque le Hamas – à l'encontre de l'Autorité palestinienne – s'obstine à ne pas reconnaître le droit d'exister de l'Etat hébreu et rêve de l'annihilation de ses citoyens, voudrait-on qu'Israël imite tant de radicalité et procède à une gigantesque purification ethnique ? Désire-t-on vraiment qu'Israël en miroir se "proportionne" aux désirs exterminateurs du Hamas ? Dès qu'on creuse les sous-entendus du bien-pensant reproche de "réaction disproportionnée", on découvre combien Pascal a raison et "qui veut faire l'ange, fait la bête". Chaque conflit, en sommeil ou en ébullition, est par nature "disproportionné". Si les adversaires s'entendaient sur l'usage de leurs moyens et sur les buts revendiqués, ils ne seraient plus adversaires. Qui dit conflit, dit mésentente, donc effort de chaque camp pour jouer de ses avantages et exploiter les faiblesses de l'autre. Tsahal ne s'en prive pas qui "profite" de sa supériorité technique pour cibler ses objectifs. Et le Hamas non plus qui utilise la population de Gaza en bouclier humain sans souscrire aux scrupules moraux et aux impératifs diplomatiques de son adversaire.

Le problème que semble poser le Hamas à Israël est qu’il est infiltré dans la population palestinienne (d’ailleurs, y a-t-il un trait clair entre les deux ?). Pour le frapper, Israël doit faire « des bavures », ce qui n’est pas permis à un état démocratique. D’une certaine façon le Hamas a mis Israël en contradiction avec ses valeurs.

Exemple de « stretch goal » ? Comment faire coïncider le désir de ne pas recevoir de missiles avec celui de ne pas faire de morts en représailles ? (D’ailleurs, un état démocratique n’est-il pas opposé à la peine de mort, même pour les tireurs de roquettes du Hamas ?)

Pas facile. Mais le jour où la démocratie aura résolu ce dilemme, elle aura fait la démonstration de sa supériorité. Il est possible que peu de régimes puissent alors lui résister.

Complément :

  • Ce problème me rappelle un compte-rendu de la campagne d’Égypte de Napoléon : les Égyptiens avaient été surpris que les troupes françaises jugent l’assassin de Kléber (Vivant Denon / Abdel Rahman El-Gabarti Sur l'expédition de Bonaparte en Égypte, Babel, 1999). L’exemple aurait-il, parfois, plus de persuasion que la force ?

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