mercredi 31 mai 2017

Richard Ferrand

M.Ferrand a commis un crime. Il a fait travailler sa famille. Pistonner sa famille ou ses amis est un jeu national. Il est flagrant en ce qui concerne les stages. Le réseau relationnel joue à fond. Un cadre d'une grande entreprise dit qu'il ne cherche jamais de stagiaires : ils lui sont imposés par sa direction générale. Le dirigeant d'un département universitaire m'expliquait qu'il recrutait des élèves du 16ème, car leurs parents leur trouvaient des stages ; ce qui était bon pour les statistiques de l'établissement. Un homme que j'admire a occupé des postes très importants dans plusieurs très grandes entreprises. Curieusement, ses deux fils occupent des postes très importants dans ces mêmes entreprises. L'autre jour je disais un peu fort le nom d'un actionnaire de l'entreprise dans laquelle j'étais, lorsque je vois une tête se tourner : c'était son fils. Il m'est même arrivé qu'un conducteur de taxi me demande si je ne pouvais pas aider son enfant à sortir d'un lycée de banlieue. (Et je ne vous parle pas du jour où un taxi nous a pris, un collègue et moi, pour des députés...) Il suffit de regarder une affiche de théâtre ou de cinéma pour trouver des "enfants de". 

D'ailleurs, est-ce toujours un mal ? Si je travaille avec des amis, c'est parce que je les apprécie. D'ailleurs, j'ai même des relations professionnelles étroites avec des personnes avec qui j'ai eu des moments difficiles. Seulement, j'ai appris à les connaître. "My word is my bond", la confiance est fondamentale dans les affaires, et la vie. Or, celle-ci passe par une forme de népotisme. Car il est dur de juger les gens sur leur mine.

Mais, au fait, que dire de la presse ? Est-elle régie par une éthique sourcilleuse ? Par exemple, quid de sa relation au politique ou au gouvernement ? La vie privée du journaliste, en particulier, est-elle au dessus de tout soupçon ? Que signifie cette fureur de dénonciation ? Après l'affaire Fillon, la presse est-elle emportée par son élan ? Craint-elle quelque-chose du gouvernement ? Est-elle animée par un esprit nihiliste ?... à creuser. 

Intransigeance

Ce qui caractérise M.Macron, c'est l'intransigeance. Contrairement à ce qui se passait jusque là il semble insensible à la concession. Y compris au langage : il ne prend aucun soin de trouver une façon commerciale de présenter ce qu'il va faire. D'ailleurs, il ne semble pas tellement désireux d'en parler. Sa communication est non verbale ?

Pendant longtemps ce blog a eu l'impression que le jeu politique consistait à dire : il n'y a que deux partis, et l'autre est pire que moi. Ce qui produisait un cercle vicieux de médiocrité. La seule opposition réelle était le mouvement de foule. M.Macron semble avoir pris à contre ce système : je peux faire ce que je veux, il n'y a personne en face de moi ? Et, si je peux écraser la main de M.Trump, je n'ai pas peur d'une manifestation de la CGT ?

mardi 30 mai 2017

Brésil

Le président du Brésil est contesté. Le pays est en crise. Il semble victime de la malédiction de l'Amérique du sud. Il est pris dans une lutte des classes entre une gauche clientéliste et une droite exploiteuse. Le dénominateur commun du tout étant la corruption. Comment s'en tirer ? 

Le pays vit au gré des fluctuations du prix des matières premières. Il est incapable de faire des économies, en période faste, qui lui permettraient de subventionner, en période maigre, le développement d'entreprises non cycliques.

La Norvège a créé un fonds pour les périodes difficiles. C'est une solution simple et élégante à ce type de problèmes. Mais probablement pas compatible avec la culture du système politique brésilien.

(Il est aussi possible que c'ait été le principe de la dîme : l'Eglise prélevait un dixième des récoltes, qu'elle redistribuait en période de disette. Avec l'avantage de réduire l'offre dans les hauts, et de l'augmenter dans les bas. Avec effet inverse sur les prix.)

Stratégie électorale

Législatives. Je me renseigne sur les candidats qui se disputent mon suffrage. Surprise. Le candidat du mouvement présidentiel, Hugues Renson, est un ex proche de M.Chirac. Or, le député en place, M.Lamour, est un gaulliste. Pire : M.Debré, sans doute le meilleur ami de M.Chirac, appuie M.Renson, qu'il traite, lui aussi, "d'ami". 

Mon quartier a une autre particularité. C'est une sorte de village gaulois. Il résiste depuis longtemps au maire actuel de Paris, qui tente de s'y faire élire... La tactique de M.Macron semble partout la même. Il oppose au sortant quelqu'un de sa couleur, mais qui n'est pas contaminé par les pratiques politiciennes. Les aspirations de l'électorat, sans les désagréments de la politique ?

Si c'est le cas, c'est une manoeuvre brillante. 

lundi 29 mai 2017

Hacking

ENRON a été près d'une décennie synonyme du renouveau et du triomphe du modèle américain. Puis elle a fait une faillite frauduleuse. Un universitaire a expliqué alors que toute la culture d'ENRON reposait sur la subversion (identifiée à l'innovation). Quand on favorise la tricherie, il ne faut pas s'étonner qu'elle se retourne contre vous. 

A l'époque, on a traité ENRON de cas isolé. Or, si l'on y réfléchit bien, on nous encourage, depuis des années au "hacking". Or, le "hacking", c'est la fraude. Montesquieu a parlé "d'esprit des lois". Les sociétés sont bâties sur un principe. Que peut donner une société dont "l'esprit des lois" est la fraude ? Une société schizophrène ? 

Interprétation

Curieux François Mitterrand. Il était apparenté à la haute bourgeoisie charentaise, ce que la France fait peut-être de plus proche du capitalisme anglo-saxon (cf. Les destinées sentimentales de Jacques Chardonne). Or, il s'est converti au Marxisme, en 68. Pourquoi ? Parce qu'il pensait que le Marxisme était vendeur. Que la France en demandait. De même, et si l'image ridicule que nous avons à l'étranger venait de ce que nos politiques ont pensé que le Français réclamait de la "grandeur de la France", à la de Gaulle ?

Quant à M.Sarkozy, le film qui lui est consacré, semble dire qu'il a cru que nous partagions ses aspirations, "bling bling". M.Trump, pour sa part, a constaté, grâce à une émission de télé, qu'il y avait appétence pour le message "politiquement incorrect" qu'il véhiculait. 

Comme le disait M.Macron, M.Trump est un homme pragmatique. Quand il rencontre une résistance, il ne s'entête pas. En tout cas, ce qui manque encore, c'est ce que l'ouvrage de management appelle le "leader serviteur". C'est à dire, un dirigeant qui n'est pas aveuglé par des idées reçues, qui sait comprendre les aspirations (constructives et communes) de la nation, et s'en faire le champion. 

(Une réflexion qui s'applique à nous tous ? Soit nous plaquons sur les autres des idées préconçues, soit nous leur servons ce que nous pensons qu'ils veulent entendre, soit nous cherchons à les comprendre, dans toute leur complexité... "aime et fais ce que tu veux".)

dimanche 28 mai 2017

Président normal

Ce qui me frappe en lisant la presse internationale, c'est que M.Macron y paraît un président "normal". Depuis de Gaulle, au moins, la France était une sorte d'exception culturelle. Son président se comportait différemment de ses collègues. C'était une sorte d'extra terrestre. Très arrogant, quelque peu ridicule, accroché à des principes théoriques difficiles à comprendre, il les mettait mal à l'aise. Pour une fois, il semble que nous ayons un dirigeant qui partage les rites communs. 

(M.Sarkozy est peut-être le premier à avoir voulu entrer dans ce moule international. Mais, comme M.Berlusconi, du fait de ses excès, il paraît avoir été vu comme une caricature inquiétante.) 

Les oncles de Sicile

Quatre nouvelles de Leonardo Sciascia. La Sicile à quatre moments de son histoire. 

Où l'on voit que le romancier peut être le meilleur des anthropologues. Surtout s'il sait compter des histoires. Ici chaque événement est vu par les yeux d'un pauvre, instruit. Il donne la parole aux uns et aux autres, avec ce qui semble être une grande objectivité. Mais, à chaque fois, ce qui domine la nouvelle est le spectacle, fascinant, de l'hypocrisie dont les élites grandes ou petites font preuve dans ces moments là. 

samedi 27 mai 2017

France Info

France Culture traversant une période de deuil, j'écoute France Info. Il y a de la vie. 

Mais cela m'a fait redécouvrir un phénomène oublié. Le traitement par les médias de masse du drame sordide. Actuellement, c'est l'attentat de Manchester. Hier, il s'agissait d'un crime familial atroce. Il se passe alors quelque-chose de typique : on parle pour ne rien dire. Comme l'information va beaucoup plus vite que l'enquête, il faut meubler les temps morts. Donc on cherche de quoi parler. On interviewe les voisins, les victimes, l'homme qui a vu l'ours, on fait des enquêtes sur la taille de la salle de spectacle, sur tout et n'importe quoi pouvant avoir la moindre relation à l'événement. 

Quel peut-être la conséquence de cet acharnement médiatique ? Rendre concret l'événement, abstrait ? Nous communiquer une saine compassion ? C'est, au contraire, une forme de voyeurisme ? Cela fait du sujet, le terrorisme et la fracture sociale, une idée fixe, qui renforce le mal ?... 

Cela mériterait une étude. 

Ordre contre chaos ?

Coup d'oeil aux sondages. Il semblerait que j'ai vu juste : M.Mélenchon s'affirmerait comme l'opposant premier à M.Macron. Il est possible que nous ayons le choix entre trois options de gouvernement :
  • M.Macron, c'est l'ordre. Il propose un gouvernement fort, qui puisse réformer le pays rapidement. 
  • Les Républicains, les socialistes dans une moindre mesure, c'est le débat démocratique. Ils veulent une cohabitation. 
  • M.Mélenchon, c'est la lutte des classes. Il refuse tout en bloc.
D'après le sondage, l'opinion serait en faveur de la première option. Ce qui explique peut-être que les tenants de l'option deux se montrent modérés : ils s'affirment d'accord avec une grande partie du programme de M.Macron : faire jouer notre pouvoir de nuisance, non. Ce qui laisse une place à une opposition frontale. Celle de M.Mélenchon.

(Quant au FN, il semble avoir été victime de son leader.)

vendredi 26 mai 2017

Lobby

L'autre jour, le gouvernement annonce qu'il va maintenir l'état d'urgence. Les informations de la radio disent qu'un nombre étonnant d'ONG s'élèvent contre cette mesure. La violence de l'indignation m'a surpris. Que pensent les Français ? me suis-je demandé. 

Nous sommes à une époque de lobbys. Il y a les lobbys qui défendent les intérêts des entreprises, mais aussi les lobbys qui portent des sujets de société. Quel est le résultat de l'affrontement de ces lobbys ? 

Peut-être l'individualisme. C'est ce qu'ils ont en commun. Or, paradoxalement, leur force vient de leur puissance sociale. C'est parce que les dirigeants de l'entreprise disposent de l'argent collectif qu'ils peuvent l'utiliser pour défendre leurs intérêts. Idem pour l'ONG, qui joue sur des mécanismes sociaux, par exemple sa proximité avec les gouvernants, pour faire réussir ses combats. Pas sur une légitimité qui lui viendrait de la société.

Peut-être que M.Cameron avait vu juste lorsqu'il parlait de "big society". La société doit se réapproprier sa propre puissance ?

Combat de Taureaux

Cinq nouvelles de Yasushi Inoue (1907, 1991). 

Elles ont été écrites après guerre, et j'y ai retrouvé ce que j'apprécie dans les films des "grands réalisateurs" de l'époque. C'est à dire ? 

Un sentiment de calme et de repos, de paix. Une observation émerveillée du monde. Chaque nouvelle s'achève par une interrogation. Un mystère modeste, quotidien, et pourtant qui met en défaut notre rationalité, et peut-être tout ce que nous croyions certain. 

Est-ce cela qui fait le prix de la vie ? 

jeudi 25 mai 2017

Financement de l'innovation

Contrairement à ce que l'on pourrait croire, il est étonnamment facile de trouver de l'argent pour lancer une entreprise innovante, en France. Je doute que cela soit aussi facile à l'étranger. Seulement, celui qui réussit semble alors soumis à un prélèvement massif. Cela pourrait conduire à l'effet vicieux suivant : les bons partent à l'étranger ; restent, majoritairement, les parasites, qui se nourrissent de subventions. 

Un autre effet vicieux, dont on me parle, d'expérience : la grande entreprise s'associe à la petite, innovante, qui se fait financer sur fonds publics ; l'innovation une fois au point, la grande laisse crever la petite (qu'elle ne paie pas), et s'empare du produit. Elle a trouvé un moyen de faire financer sa recherche par la collectivité. 

Etat d'esprit consternant. 

Géants

Des "nains sur des épaules de géants". On entend par là que nous avons été précédés par des génies. Est-ce juste ?

Prenons l'exemple des vedettes de la chanson des années 50. Elles ont survécu à leur talent. Celui-ci s'est brutalement arrêté. Jacques Brel a eu l'élégance de reconnaître qu'il n'avait plus d'inspiration. Dans le meilleur des cas, les autres n'ont eu ensuite que quelques succès sans lendemain, quasiment d'estime. La seule exception qui me vienne à l'esprit est Serge Gainsbourg. Lui s'est totalement transformé. De parolier, brillant, il est devenu musicien, hyper brillant. Il a absorbé, et peut-être transcendé, toutes les tendances de son époque. (Il en est mort, prématurément ?)

Tout ceci m'amène aux conclusions de Robert Merton. Il avait étudié les scientifiques, Newton et autres. Aucune découverte n'a été faite isolément. Le nom que l'on retient est celui du premier sur la ligne d'arrivée. Mais l'idée était dans l'air. Au mieux peut-on reconnaître que certains découvreurs, comme Newton, ont été exceptionnels par ce qu'ils ont chevauché plusieurs domaines scientifiques. 

La question est alors de savoir si ces gens sont interchangeables, ou si, tout de même, ils nous font entrer sur une voie que nous n'aurions pas empruntée sans eux. Et, apparaissent-ils spontanément, ils correspondent à une caractéristique humaine, ou faut-il les fabriquer ? ou option intermédiaire ? 

mercredi 24 mai 2017

Marketing

J'ai longtemps enseigné le marketing "B to B" (vente d'entreprise à entreprise). J'ai même mis le texte de mon cours chez Slideshare, et, vu son volume, c'est un succès inattendu de téléchargement (4,4% des vues sont des téléchargements !). 

Qu'est-ce que le marketing ? 
Comme son nom l'indique marketing c'est "faire marché", faire ce qu'il faut pour que ce que peut produire votre entreprise tire le meilleur du marché. 

Le résultat fondamental est le "marketing mix". Prix, produit, communication, commercial. Mais, ce qui est encore plus important est la "segmentation". Il s'agit de diviser le marché en des groupes homogènes. Homogènes en quoi ? En termes de comportement. Et ce comportement ne se trouve pas dans les bases de données, mais s'évalue au coup d'oeil, à l'expérience. Il y a des leaders et des suiveurs. Les premiers sont capables d'évaluer votre offre, les autres achèteront, qu'ils en aient besoin ou pas, si les premiers achètent. Le marketing mix est donc l'armement dont a besoin l'homme ou l'unité de terrain pour agir efficacement en fonction des conditions qui lui sont spécifiques. Comme les armées, en particulier les commandos, les forces commerciales ne peuvent pas être programmées d'en haut. 

La stratégie, oui, le dirigisme, non
Je pense qu'il en est de même de l'Etat. Et que c'est ce qui se joue actuellement. Alors que partout il y a eu libéralisation, notre Etat semble avoir légiféré dans tous les sens (les avocats deviennent fous), ce qui pourrait avoir contribué à étrangler le pays. Comme dans mon histoire de marketing, l'Etat efficace est probablement un "Etat stratège". Il doit organiser l'autonomie. Pas vouloir faire notre bien contre notre volonté. Cela demande du talent, la connaissance de et la confiance en ses troupes de terrain...

Génie

Pourquoi n'y a-t-il plus de génies ? Plus d'artistes dignes de ce nom ?

Lorsqu'on lit la vie de gens aussi divers que Rousseau, Champollion, Zweig, Musset, Mozart... On découvre une même trame. Ils ont eu une obsession, et ils ont travaillé comme des fous pour la réaliser. C'est aussi vrai pour les peintres. Une théorie dit que, si l'on travaille comme un fou, au bout de dix ans, on peut faire quelque-chose de réellement génial. Durée du changement ?

Tocqueville et Flaubert ont vu juste ? La "massification" de la société a éliminé la fabrique du génie ? Il suffit de regarder un programme de lycée et ceux qui l'enseignent pour comprendre qu'il n'y a rien là pour enflammer un jeune Proust en fleur. On transforme de l'or en plomb, à la chaîne. Hier on espérait la gloire, aujourd'hui, un diplôme, et la planque ?

Qu'est-ce que cela nous prépare-t-il ? Un communisme de Schtroumpfs ? 

La fracture

Une étude des causes du djihadisme en France, par un universitaire "de terrain", qui parle arabe. C'est un peu la face cachée du phénomène. Ce que le petit peuple, dont je fais partie, ne perçoit pas. Voici ce que j'ai reconstitué, avec un peu de peine. (Le livre est très facile à lire, mais Gilles Kepel s'adresse à des gens qui en savent plus long que moi.)

"Le djihadistes est le passage à l'acte du Salafisme"
A l'origine est le Salafisme, la religion d'Arabie saoudite. Grâce aux milliards du pétrole, ce pays (un des meilleurs alliés des USA) fait un prosélytisme mondial. Le Salafisme est un fondamentalisme islamique. Comme beaucoup de fondamentalismes, il ne l'est pas. En effet, le Coran est impossible à interpréter. Donc il est complété par des textes d'explication. La plupart de ceux utilisés par le Salafisme sont jugés illégitimes par les experts. A cela s'ajoute un phénomène qui a paralysé les gouvernements occidentaux. En effet, avec leurs intellectuels (particulièrement les universitaires américains, qui prononcent de véritables fatwas contre la France !), ils ont considéré que notre société était "islamophobe". Cela a eu deux conséquences. La première a été de juger que cette islamophobie était à l'origine du terrorisme. Donc qu'il fallait corriger l'Occident, pas les terroristes. La seconde est qu'il est impossible de dire un mot, y compris lorsque l'on est victime d'un attentat, évoquant la question musulmane, sans être censuré. Le débat qui permettrait de régler le problème est impossible. Donc, non seulement l'Occident n'a rien fait, mais il a démantelé ce qui aurait pu l'avertir, en particulier tout ce qui permettait une étude de proximité des populations concernées, en Occident, et en Orient. De ce fait, il n'a pas vu arriver la mutation du terrorisme. 

"Paris (...) cible principale de la rhétorique islamique"
Les réseaux sociaux se sont mis à disséminer des kits de terrorisme. Ils sont utilisés par des loups solitaires en mal de vie, souvent des repris de justice. L'objectif de ce terrorisme de "troisième génération" est la guerre civile en France : susciter un mouvement nationaliste, qui, en commettant des pogroms, unirait la communauté musulmane. Une conséquence pouvant être la prise de pouvoir par celle-ci. Il y a peut-être pire. Au plus haut niveau de l'Etat, il aurait été dit que "la Syrie est notre guerre d'Espagne". Il fallait donc faire tomber Bachar el Assad, incarnation du Mal, à tout prix. D'où un Moyen-orient transformé en chaos. D'où Daech et le djihadistes. A cela s'ajoute l'Union Européenne, vue comme ventre mou de l'Occident, et le "laxisme exceptionnel" des autorités belges, qui pensaient que les religieux salafistes mettraient de l'ordre dans leur trafic de drogue. Elles ont laissé s'installer chez elles des foyers de non droit. 

La rupture
"La culture, voire la religion, qui s'empare du malaise social." En réalité la cause du terrorisme n'est pas la religion. C'est "la rupture". Elle explique aussi bien le djihadisme que le FN. Il y a eu abandon d'une partie de la société. Elle aurait produit une "désaffection pour la nation française". Le renoncement à "l'élitisme" républicain (un système scolaire qui cherche à propulser des talents du bas vers le haut, et assure de ce fait une cohésion d'ensemble, une forme d'égalité des chances) serait une raison majeure. Il y aurait aussi le désintérêt de la gauche (PS et PC) pour la banlieue. Elle y aurait pratiqué, au mieux, une "politique du béton". Or, ce qui comptait, c'était l'emploi et l'éducation. Aussi, la gauche s'est mise à défendre des valeurs, l'homosexualité en particulier, qui ont choqué un électorat musulman qui lui était, traditionnellement, acquis. (On retrouve le parallèle avec le FN.) 

"François Hollande et son entourage de hauts fonctionnaires coupés des réalités
Bref, je comprends pourquoi Gilles Kepel n'est pas aimé des gouvernants. Il nous dit que nous avons loué M.Hollande pour son attitude face au terrorisme. Mais, peut-être que, sans lui et les siens, il y aurait eu quelques centaines de morts en moins en France et quelques centaines de milliers de vivants en plus au Moyen-orient, et des millions de personnes qui n'auraient pas dû partir à l'aventure... L'erreur est humaine, me direz-vous, que faire pour ne pas persévérer ? Il faut réduire la fracture, répond Gilles Kepel. Il semble croire que M.Macron a saisi la question. Mais encore ? En revenir aux fondations de la République ? Autre forme de fondamentalisme ? Le fondamentalisme vrai est une juste interprétation de "l'esprit des lois" ?

(KEPEL, Gilles, La fracture, Gallimard, 2017.)

mardi 23 mai 2017

Années Mitterrand

Le livre précédent, François Mitterrand, permet de découvrir nos hommes politiques, sous un angle inattendu. Ils sont tous porteurs d'une idée fixe, et ils utilisent les courants qui remuent la société pour la faire triompher. Du coup, on s'y trompe. On les confond avec ces courants. Peut-être même avec le premier qui les a amenés à notre connaissance. 

Pour Mitterrand, c'est l'homme qui voulait être roi. Ou faire selon son bon plaisir. Ensuite, la fin justifiait les moyens. Paris vaut bien une messe, ou une conversion au Marxisme. Pour Rocard, c'est "l'auto gestion". Le progrès comme bien commun de la société. C'est la sociale démocratie. Il est constamment perdant. Paradoxalement il s'illustrera en 68, contrairement au reste de la gauche. Lui, semble y avoir vu un propulseur à ses combats. Quant à Jean-Pierre Chevènement, qui paraît aujourd'hui un farouche nationaliste, c'était l'aile gauche du PS, le Marxiste très pur et très très dur, l'intermédiaire avec le PC. Comment interpréter ses revirements ? Peut-être M.Chevènement est-il le défenseur du petit peuple ? Dans le combat qu'il mène, les extrêmes se rejoignent. Et il y a aussi Pierre Mauroy. Je l'aurais pris pour un militant venu du peuple, façon sans culotte. Eh bien non, c'était un modéré, à la droite du PS. Il était du côté Rocard. Mais il avait le sens du devoir. Alors il a appliqué une politique qu'il n'approuvait pas.

Mais l'homme n'est pas qu'un surfeur d'idées. Il est aussi parfois piégé. En particulier par l'argent. M.Mitterrand le savait bien, qui ne voulait jamais y toucher, et, dit M.Winock, faisait payer aux autres ses repas (et l'entretien de sa famille illégitime). M.Fillon a retenu la leçon. L'argent aurait fait des ravages dans les rangs socialistes. M.Béregovoy en aurait été la triste victime. 

François Mitterrand

Qui était Mitterrand ? On l'a dit "florentin", mais c'est plutôt à Talleyrand qu'à Machiavel qu'il me fait penser. C'était un homme de réseau, d'abord. Comme Talleyrand, il avait des amitiés partout, dans tous les camps. Et il leur était fidèle. Il n'y a pas de réseau sans fidélité. C'est ce qui fait son étonnante capacité à rassembler, la recette de son succès. En contrepartie, il est demeuré ami de gens peu recommandables, et jusqu'au bout, il a fleuri la tombe de Pétain. Ce n'était pas un homme de "ou", mais de "et". Il a été à la fois de Vichy et résistant. 

Sa force semble, indéniablement, un pouvoir de séduction hors du commun. Ce fut aussi un tacticien étonnant. Dès ses débuts il est vu comme retors et dangereux. Et, pourtant, il excelle dans l'alliance. Son coup de génie est celle qu'il noue avec les communistes. On a oublié que, en ce temps, ils sont à la fois ostracisés (cinquième colonne de Staline) et la plus puissante force politique française. Son destin bascule le jour où de Gaulle décrète l'élection du président au suffrage universel. Mitterrand se dresse contre de Gaulle. Il devient le héraut de la résistance au général. Il comprend, surtout, que la présidence est pour lui : l'élection à deux tours, lui permet de liquider les communistes au second. De Gaulle obtient le contraire de ses intentions : Mitterrand fait triompher une politique des partis. Et le FN en prime ! FNUMPS, c'est lui. Finalement, ce fut un incroyable narcissique. Sa présidence a été celle du Roi soleil : constructions de prestige, et dépenses somptuaires. Puis, dans les deux années finales, il s'absorbe dans la perspective fascinante de sa mort. Nous ne comptons plus. 

Cependant, comme Talleyrand, il avait une exigence de respectabilité, ce qui, très tôt, l'a amené à réinventer son passé, et à mentir sur lui. Mais, contrairement à Talleyrand, il n'a pas été un visionnaire en termes d'évolutions sociétales. Il s'adapte après coup. Il est d'une famille de la haute bourgeoisie conservatrice. Il est croix de feu. Il est haut fonctionnaire de Vichy (son emploi lui a été trouvé par sa famille), puis il sera ministre quasi permanent de la 4ème République. Il est alors très colonialiste (l'Afrique est l'avenir de la France). Il est aussi ministre de la justice, à une époque où l'on applique les méthodes industrielles au massacre et à la torture, en Algérie. Il donne son accord à beaucoup de décapitations, d'ailleurs. Et il ne comprend rien à 68. Mais il devient marxiste parce qu'il estime que c'est le moyen de gagner les voix du peuple. Cependant, il a des convictions, mais encore une fois, après coup. Peut-être se convainc-t-il des histoires qu'il nous raconte ? D'où des moments de rigidité, désastreuses pour nous. C'est notamment ce qui arrive au début de son premier mandat. Contre l'avis de Rocard et de quelques autres, mais avec l'assentiment d'Attali, il a procédé à une politique quasi collectiviste, particulièrement à contre temps. La France, notamment le chômage et le déficit, a plongé. On peut se demander si elle s'en est relevée. 

Au delà du bien et du mal
Abjecte ? L'auteur ne semble pas loin de le penser. Mais est-ce une bonne façon de juger ? La politique de Mitterrand a été maladroite en Afrique, plus heureuse en Europe, dont il a été un bâtisseur, mais c'est surtout notre pays qu'il a métamorphosé. Qu'on les aime ou non, il a balayé la France d'après guerre par les idées de gauche. Il a donné un nouveau souffle au pays. (Destruction créatrice ?) Or, il n'y avait que lui qui pouvait rassembler les opposés, et utiliser la puissante et inquiétante force communiste, pour mieux la liquider. Et c'est peut-être les histoires de Mendès-France et de Rocard qui appuient le mieux cette thèse. En effet, tous deux apparaissent, dans ce livre, comme des "gens bien". Ils ont des convictions, du talent, et, eux, voient juste. Seulement, leur intransigeance les écarte du pouvoir. L'auteur traite Rocard de "pirate qui reste au port". Et cela, je pense que Mitterrand l'avait compris. Au delà du bien et du mal, c'est l'homme qui a changé la France ?

(WINOCK, Michel, François Mitterrand, Folio Histoire, 2016.)

lundi 22 mai 2017

Slideshare

Slideshare, est-ce que ça marche ? 

J'y mets quelques documents, très irrégulièrement, et j'ai des résultats qui me surprennent. En termes de vues, c'est l'affichage sur mon blog qui amène le gros du trafic. Ainsi, la "méthode Münchausen", un précurseur de l'entreprise libérée, a été vue plus de 115.000 fois. Viennent ensuite, pas loin, le rapport sur les ERP, de 2002 !, qui ne semble pas avoir vieilli, et mon recueil de cas sur le changement (mis en ligne plus récemment). Les ERP ont été téléchargés près de 600 fois ! Quant à la méthode pour rédiger des business plans, plus de 4% des vues conduisent à un téléchargement. Idem pour le cours de marketing B to B. Ce qui est surprenant, compte-tenu de sa taille (celle d'un livre de cours). 

GM&S

GM&S ou les mauvaises habitudes qui reviennent au galop ? Un sous-traitant de l'automobile boit la tasse. Il appelle à l'aide le gouvernement. Celui-ci décroche son téléphone. PSA et Renault obtempèrent. L'affaire est résolue. Mais il y a des tas d'entreprises qui ont crevé, et des tas de gens qui se font virer. Pourquoi le gouvernement n'intervient-il pas pour eux ? Décidément, Macron ou pas, la France c'est le clientélisme ? 

En tout cas, c'est un nouvel exemple d'Heuliez. La sous-traitance a un tout petit nombre de clients. Michel Crozier, dans son étude de l'organisation bureaucratique de la société française, disait que ces entreprises servaient de "tampon" à la rigidité de l'Etat. Mais, aujourd'hui, nos ex "champions nationaux" ne se sentent plus d'obligations vis-à-vis de ceux qui dépendent d'eux. Sont-ils encore français ? C'est une particularité de chez nous. En Allemagne, et surtout au Japon, il y a dépendance étroite, mais sentiment d'obligation. Le donneur d'ordre sait que sa performance dépend de son écosystème, et il fait ce qu'il faut pour que celui-ci s'améliore. Dans les pays anglo-saxons, c'est la loi de la jungle, mais les règles sont claires. Chez nous, c'est le pire des deux mondes. Et c'est cela qui n'est pas durable. Certes il y a un début de changement. Valeo en est l'exemple type. Faurecia, aussi, mais dans une bien moindre mesure. Si le gouvernement pouvait comprendre cela, et faciliter les conditions d'une transition vers un modèle un peu moins suicidaire, on aurait fait un grand pas. 

Ecole libre

Hier j'entendais l'émission Rue des écoles, de France Culture, traiter du cas de l'enseignement primaire. On y disait que le gouvernement semblait ne rien connaître à la réalité et qu'il prenait des mesures qui mettaient les enseignants en injonction paradoxale. Chaque cas était particulier, en termes d'enseignants, de classes, d'élèves... il fallait laisser à chaque établissement la capacité de s'adapter aux conditions qui lui sont propres. 

En écoutant cela, j'ai pensé que si l'on s'oppose aux lois de M.Macron sur le principe, on les réclame en pratique. 

dimanche 21 mai 2017

Intelligence artificielle

On nous répète que nous vivons à l'heure des machines, et qu'elles vont remplacer l'emploi. Mais pourquoi ne dit-on pas aussi que l'Intelligence artificielle, dans les années 80, a été une mode, et un désastre sans nom. Qu'est-ce qui a changé ? Expliquez-moi. J'ai fait une thèse de MPhil sur la question, et je vis au milieu de quelques-uns des meilleurs experts du sujet. 

Il y a quelques temps, je participais à une conférence. On y a expliqué que La Poste avait gagné 40% en productivité, sur une dizaine d'années, du fait de la seule menace de l'innovation. Et s'il en était de même de l'Intelligence Artificielle ? Et si sa seule utilité était de faire peur ? Une façon d'extraire encore plus d'argent de la société ?

Méthode

Une amie me parle de sa fille. A l'école, elle ne comprenait rien en maths. Elle choisit une formation littéraire. Et fait des études de philosophie. Ce qui la force à un gros travail de structuration de son raisonnement. Il est victorieux. Conséquence inattendue : les maths ne lui posent plus de difficultés. Ce qui lui manquait était la méthode. 

Une (très grosse) faille de notre éducation nationale ? 

samedi 20 mai 2017

Google : agence de communication ?

Un "cadre à haut potentiel", lors de sa préparation à l'exercice de ses futures responsabilités parcourt le monde et va chez Google. Surprise : tout le monde y est jeune. Car personne ne parvient à y rester. 

Un ami y a passé des entretiens. Ingénieur, visionnaire, à sa place partout dans le monde, travaillant jour et nuit, il semblait fait pour Google. Il a fuit : il y a retrouvé les conditions de travail dont il avait constaté qu'elles ne marchaient pas ailleurs. Pour lui Google est une "boîte de pub". Ses revenus viennent des annonces Internet. Pour le reste, Google gaspille son argent dans des investissements stupides. 

Et si Google était une agence de communication, plutôt ? Et si sa force était de nous faire prendre des vessies pour des lanternes ? 

Le Havre

Notre premier ministre a été maire du Havre. Voici ce qu'en pense une de ses administrées :
Eh bien il n'a pas non plus récupéré le Havre dans un état idéal, il est arrivé en 2010 et il a mis en place le tramway, beaucoup de commerçants ont fermé en ville à cause des diverses décisions d'aménagement de la ville et les 500 ans du Havre ont coûté 22 millions, il me semble, à la ville alors que nous avons déjà des dettes. Il jette un peu l'argent par les fenêtres. Surtout que tout ça il l'a fait pour rendre le Havre plus attractif. 5 ans après la ville a toujours la même image. Je ne le considère donc pas comme un bon maire.
Exemple d'un changement sans contrôle ? Erreur fatale. Espérons que notre premier ministre se sera fait la main sur sa ville ?  Au Havre, la patrie reconnaissante ? 

vendredi 19 mai 2017

Brigades du Tigre

Les Brigades du Tigre étaient un feuilleton de ma jeunesse. J'aimais les voitures, et les costumes d'époque. Mais j'imaginais que les histoires avaient été inventées, pour montrer notre pays mieux qu'il n'avait été. 

Eh bien non. Les Brigades du Tigre sont peut-être bien une illustration dont devraient s'inspirer les pssionarias du numérique. Début XXème, la France est victime d'une vague de criminalité. En 1907, Clémenceau (le Tigre), y réagit non seulement en dotant la police de moyens, mais surtout en lui donnant ce que la science a de meilleur. Cependant, au lieu de le faire à la manière numérique, par nettoyage ethnique de l'espèce humaine, il le met à la disposition des individus. Et il a raison car la technologie moderne ne fonctionne pas encore très bien. Par exemple, les voitures tombent en panne. Si bien qu'on les équipe de porte-vélos, de façon à pouvoir continuer une poursuite, en cas de panne. Puis on invente le mécanicien. Et ce n'est pas que de la technique, on forme aussi le policier à la savate. Aujourd'hui, on parlerait de "performance" : le changement fut massivement efficace. Des dizaines de milliers de criminels sont capturés en peu de temps. La France a peut-être bien été le pionnier mondial de la police moderne

Voilà ce qui fait la force de notre modèle jacobin ? Une idée fixe partagée, un leader visionnaire et pragmatique, honnête et compétent, qui sait "organiser l'autonomie", et alors la motivation du Français et son système D font des miracles. Qu'y a-t-il de jacobin, là dedans ? "Organiser l'autonomie" : un mode efficace de coordination, dirigé d'en haut, mais qui laisse la liberté, et la motivation, au bas. Car, lui aussi, est honnête et compétent. 

Gouvernement

Que penser du nouveau gouvernement ? Je m'attendais à plus de gens de droite, histoire de désorienter la droite. Mais, en y regardant bien, il semble qu'il y ait une répartition de postes très mathématique : les hommes, les femmes, les politiques professionnels ou non, et les partis politiques. Pour arriver à un tel résultat, le président et le premier ministre ont dû utiliser un algorithme d'optimisation... 

L'Etat entreprise
Mon premier sentiment a été qu'il s'agissait d'un gouvernement de gens sérieux, de "gens qui font". 
J'ai aussi entendu dire que le gouvernement était organisé comme une entreprise. Il y a même une DRH au ministère du travail. (Ex DRH de mon premier employeur.)
Pour ma part, j'aurais tendance à regarder le gouvernement sous l'angle du changement. Classiquement, on divise un changement en sous-projets. Ensuite, on répartit les ressources suivant les caractéristiques du projet : 
  • il doit réussir (coeur du changement), 
  • il ne doit pas rater (provoquerait, par contamination, la faillite de tout le changement), 
  • pas prioritaire. 
On assigne à ceux-ci les gens qui ont les compétences pour les mener à bien. Il est recommandé de ne pas attaquer tous les sujets de front. Procéder par "domino", qui va entraîner le reste.

Pour passer à l'application de ces principes, il faudrait regarder en détails les plans du gouvernement : droit social, Europe, formation professionnelle, rendre le moral aux forces de l'ordre, etc. Vais-je le faire ?

(Avec une difficulté : le gouvernement n'a pas précisé le changement qu'il cherche à réaliser. Il dit beaucoup de choses, mais il n'y a pas d'indicateur simple et clair de succès. A moins que ce ne soit "rendre la confiance"...)

jeudi 18 mai 2017

Fake news

Depuis quelques temps, j'entends que Theresa May se plaint des manoeuvres de l'Europe, qui se coalise pour faire échouer son élection. Ce qui surprend les dirigeants européens, qui la préfèrent à ses concurrents. En fait, ils savent que c'est une tactique qui sert à Mme May à assurer sa victoire. (Une victoire qui pourrait bien être fatale aux travaillistes.) Alors ils sourient en silence. D'ailleurs, s'ils disaient que Mme May est leur candidate, cela ne serait pas bon pour elle. Et peut-être même qu'ils s'ont d'accord : une forte Mme May pourra faire des concessions impopulaires ?

Ce type de comportement n'est pas une nouveauté. Mais, dans ces conditions, qui a le droit de critiquer M.Trump et ses "fake news" ? N'y a-t-il pas des façons de se faire élire sans utiliser le mensonge ? En parlant à l'intelligence des gens ? 

Career Anchors d'Edgar Schein

Comment mener sa carrière pour en tirer la plus grande satisfaction ? Voici un livre que tout le monde devrait lire. Son origine est une étude de longue durée d'un groupe d'anciens étudiants. Elle débouche sur une constatation : tout homme semble être attaché à une "ancre", qui correspond à ce qui lui convient ; s'il s'en éloigne trop, il s'exerce une force de rappel brutale, il est insatisfait de son travail. Donc, si vous désirez être heureux, il faut chercher quelle est votre ancre, et agir en fonction. 

Ce livre est un manuel d'exploration. A partir de questionnaires, il vous permet de vous découvrir. (J'ai testé, c'est surprenant.) Et de savoir à quelle ancre vous êtes attaché :
  • compétence technique ou fonctionnelle ;
  • compétence de direction générale ;
  • autonomie / indépendance ;
  • sécurité / stabilité ;
  • créativité entrepreneuriale ;
  • service / engagement pour une cause ;
  • défi pur ;
  • vie privée. 
Un test est ici

SCHEIN, Edgar H., Career Anchors, Pfeiffer and company, 1993.

Changement planifié

Que peut-on reprocher à M.Macron ? Ce que l'on a reproché à M.Hollande, qui disait à sa compagne que la vie était belle, qu'il fallait en profiter. Sans apparemment comprendre qu'il y avait beaucoup de gens qui passent un mauvais moment, et qui n'ont pas droit à la parole. Eh bien M.Macron a été béni des dieux. Mais, lorsque l'on entend son discours d'investiture, il n'est pas interdit de croire qu'il ait compris ce qui ne va pas. En fait, c'est curieux que je ne m'en sois pas aperçu plus tôt, mais il reprend les obsessions de ce blog, au moment où j'avais renoncé à livrer bataille. 

Changement planifié
Tout d'abord en termes de stratégie, "d'intention stratégique". L'Europe doit être une machine de guerre au service des intérêts collectifs, et pas un repère de théoriciens qui appliquent aveuglément une utopie. M.Macron me semble une sorte de nationaliste européen. Par ailleurs, la formation professionnelle est, évidemment, fondamentale : il faut s'adapter toute sa vie. (Mais, ce sera compliqué : "formation professionnelle" et France ne riment pas.) Cela traduit un des grands enseignements que j'ai tirés de mes travaux : la société doit être un "donneur d'aide". C'est ainsi qu'elle sera "résiliente". 

Ensuite, il semble un adepte du "changement planifié", la méthode qui écoute le bas, pour en formuler les aspirations, et organiser le changement qui y correspond.

Surtout, il parle de "confiance". Comme le disait Albert Hirschman, la condition nécessaire de réussite d'un changement est "d'y croire". Or, la France doute. Elle doit redevenir optimiste. Et cela passe par de premiers succès, pas forcément grands, mais symboliques. Je le répète depuis quinze ans : le critère de réussite du changement, c'est l'optimisme.

Et le leader du changement ? Il doit être "honnête et compétent", dis-je aussi. Et surtout "in quiet" (pour voir émerger à temps les humeurs négatives) et plein d'énergie. Car, au moins au départ, il faut lancer le changement "à la manivelle" : il faut repérer les quelques leaders d'opinion qui "tirent la tronche", et aller à leurs côtés, façon Whirlpool. S'ils retrouvent le sourire, alors, nous saurons tous qu'il est temps de se retrousser les manches. 

mercredi 17 mai 2017

Gustave Hervé

Gustave Hervé fut un pacifiste forcené, ce qui lui a coûté cher. Mais à l'approche de 14, il change radicalement d'avis, et devient belliciste. Puis, il devient fasciste. Mais très tôt, il dénonce l'antisémitisme nazi. Il appelle de ses voeux Pétain et une République forte, mais il semble quasi immédiatement s'être opposé aux décisions de Pétain, président.

Wikipédia : "Peu de temps avant sa mort, il se décrivait comme le premier bolcheviste, le premier fasciste, le premier pétainiste, le premier membre de la Résistance et le premier gaulliste".

Comme quoi, ne jugeons pas sur les apparences. 

Sociale démocratie

Il y a eu le tournant "social démocrate" de M.Hollande. Qu'entendait-il par là ? Je l'ai interprété comme un tour de passe-passe, qui annonçait la déréglementation pour tous. Virage Blair. 

En fait, Michel Winock (dans son François Mitterrand) explique que les socialistes sont, depuis toujours, des crypto socio démocrates. La sociale démocratie, qu'est-ce ? Pour Michel Winock c'est un concept qui veut que l'on n'ait pas besoin de Marx pour être socialiste. Pas de révolution et de dictature du prolétariat. C'est, simplement, le capitalisme à visage humain. 

Le problème s'est posé à Blum et à Mitterrand. Tous les deux étaient par tempérament des socio démocrates. Mais il y avait les communistes, et les communistes étaient marxistes. Et les communistes avaient beaucoup de succès auprès de l'électorat populaire. Et les socialistes étaient supposés représenter le peuple. Donc les socialistes devaient être marxistes, et révolutionnaires. 

Et c'est ainsi que la France a acquis son image effrayante ? 

Toujours est-il que cela semble montrer la faille du parti socialiste : il est coupé de la population, parce qu'il ne la comprend pas. C'est un parti d'intellectuels. Pour eux, la politique c'est un brassage d'abstractions. Ils ont une tête mais pas de coeur ? 

Elite

On a dénoncé l'élite. Or, le gouvernement Macron s'annonce comme un gouvernement d'énarques... 

En dépit de tout le mal que je pense de l'ENA, je crois que c'est un bien. Si M.Macron fait si bonne figure, c'est qu'il a été préparé à ses fonctions par sa formation. 

Il y a quelques années j'ai croisé le chemin de Francis Mer, corps des Mines, grand patron, ministre. Il semblait en vouloir à l'élite. Elle n'avait pas fait son travail. Elle était incapable d'écouter, donc de résoudre, les problèmes du pays. Une question d'éducation, disait-il. Eh bien, je me demande si "l'élite" n'est pas en train de mener le changement. 

Injuste, me direz-vous ? Elle nous a mis dans la panade, et, maintenant, elle essaie de nous en sortir (un peu ?). Ce faisant elle conserve son poste, sans payer pour ses fautes ? 

Mais, peut-être, simplement, qu'elle retrouve son rôle. Isaac Getz rappelle la théorie ancienne du "servant leader". Le meilleur "leader", est, d'abord, un serviteur de la collectivité. Et si notre "élite" devenait une "élite de serviteurs" ? Alors, ce serait à nous de nous demander ce qu'elle nous a apporté de nouveau, et comment l'employer au mieux de nos intérêts. 

(On parle de "grand commis de l'Etat" : la vocation de notre élite, n'est-elle pas de nous servir ?)

mardi 16 mai 2017

Art moderne

L'invention de l'art moderne semble illustrer la théorie du "cluster". Pendant une trentaine d'années, Montmartre, puis Montparnasse deviennent la plaque tournante de l'art mondial. Tous les artistes, mais ils ne sont qu'une poignée, s'y mélangent, peinture, sculpture, littérature, musique. Et l'art se transforme, radicalement. Curieusement, des artistes comme Picasso et Braque, qui vivent ensemble, créent un moment des oeuvres qu'il est quasiment impossible de distinguer. (Un film.)

Comme quoi, le changement est une question de société, plus que d'individus. Mais qu'a voulu dire la société au travers de ses artistes ? (LA, ou une partie d'elle, d'ailleurs ?) Question difficile. Peut-être, justement, que l'art a à vous "dire" quelque-chose. D'intuition, l'art s'est voulu raison ? Et il en est mort ?

Député

J'entendais un député socialiste marseillais s'en prendre à M.Mélenchon. M.Mélenchon veut lui voler son poste. Le député expliquait qu'être député, ce n'était pas pour les amateurs. Cela demandait de connaître la réalité locale en profondeur. Mais, est-ce le cas ? 

Marc Abélès, un anthropologue qui a étudié le député, dit que le député "se fait bouffer". C'est à dire que son rôle principal est de rendre service. Par exemple, il a accordé beaucoup de dispenses de service militaire. Mais qui en profite ? Clientélisme ? Politique de lobbys ? Mon député publie une feuille de chou à sa gloire. Je n'y vois pas grand chose qui parle de questions qui me concernent. Les députés nous donnent surtout un triste spectacle. Ils produisent des lois incompréhensibles. Sauf lorsqu'il s'agit de leurs propres intérêts. 

M.Macron semble vouloir sélectionner des gens honnêtes et compétents. Sauront-ils réinventer le débat démocratique ? Rome ne s'est pas faite en un jour ?

lundi 15 mai 2017

Mélenchon contre Macron

M.Mélenchon et Macron semblent les deux vrais adversaires des législatives. Ils représentent deux visions opposées de la politique. Contrairement à ce qu'il dit, M.Mélenchon est le seul vrai gaulliste des deux. Il est dirigiste. Pas mal pour un trotskyste. M.Macron est "libéral", au sens où il veut libérer la capacité d'initiative. Pas mal pour un haut fonctionnaire ? Qui a raison ? Et s'il y avait un temps pour le dirigisme, et un temps pour le libéralisme ?

Le libéralisme a fait des dégâts. Même là où il n'y a pas de chômage, l'emploi est souvent de très mauvaise qualité (Angleterre, Allemagne, USA). D'ailleurs, il est surprenant que M.Mélenchon ne s'en émeuve que maintenant. Le phénomène a donné son plein il y a bien longtemps. (voir FINGLETON, Eamonn, Unsustainable: How Economic Dogma Is Destroying U.S. Prosperity, Nation Books, 2003.) Mais est-ce le libéralisme qui a nuit à la France ? Ou un dirigisme mal à propos, dont la maginite a étranglé la nation ? Et, les conditions qui ont permis au libéralisme de faire des dégâts, à savoir des pays émergents troquant le savoir-faire occidental contre leurs bas salaires, ou l'ouverture des frontières, sont-elle toujours présentes ? Et si nos "oligarques" ne nous voyaient plus comme des salariés, à éliminer, mais comme des clients, dont la fortune est dans leur intérêt ?

Nettoyage ethnique

Comment M.Macron sélectionne-t-il ses candidats députés ? Il définit des critères de performance, et il fait un appel d'offres. Il ne retient que ce qui correspond à ce qu'il veut. 

Est-ce ce que, dans les années 80, on a appelé "reengineering", dans l'entreprise ? On fait table rase du passé, et l'on définit l'idéal, et on reconstruit en fonction. Le reengineering a été un désastre. Mais, est-on dans la même situation que celle de l'entreprise des années 80 ? Il est simplement possible que M.Macron cherche à donner à l'homme politique un nouvel état d'esprit, une éthique. Au lieu de s'épuiser avec l'existant, il le remplace par du neuf, qui partage son point de vue. Plutôt que de reengineering, il s'agit probablement de nettoyage ethnique. 

Troisième République

« Je songe au général De Gaulle qui œuvra pour redresser la France et lui rendre son rang dans le concert des nations. Je songe à Georges Pompidou qui fit de notre pays une puissance industrielle majeure. A Valéry Giscard d’Estaing qui sut faire entrer la France et sa société dans la modernité. » Il a continué en rendant hommage à François Mitterrand « qui accompagna la réconciliation du rêve français et du rêve européen », à Jacques Chirac « nous donnant le rang d’une nation sachant dire non aux prétentions des va-t-en guerre » et à Nicolas Sarkozy « ne comptant pas son énergie pour résoudre la crise financière qui avait si violemment frappé le monde ». (Le Monde.)

Discours du nouveau président. C'est très surprenant, car très à contre courant. On s'était habitués à haïr nos gouvernants, à ne voir que leurs ridicules. On retrouve une sorte de tradition de l'école républicaine, de "nos ancêtres les Gaulois" : la France est le fruit d'une construction à laquelle chacun a participé. 

dimanche 14 mai 2017

Ruse de l'histoire

"Par une ruse de l'histoire, le général de Gaulle, qui entendait installer une république "au dessus des partis", une république "de rassemblement", va, mieux que personne, favoriser ce qu'il honnit : le clivage droite gauche." (François Mitterrand, de Michel Winock, Folio Histoire.) 

Sur l'institution de l'élection présidentielle au suffrage universel. 

François Mitterrand, qui s'y oppose, comprend immédiatement qu'il a là le moyen de parvenir au pouvoir. En effet, l'élection présidentielle, du fait de son second tour, force les partis de gauche, qui semblaient irréconciliables, à s'allier. 

Ce qui se joue en ce moment est peut-être une nouvelle ruse de cette histoire... 

Prédiction auto réalisatrice

Robert Merton est à l'origine du concept de "prédiction auto réalisatrice". C'est une idée fausse qui provoque des conséquences qui la renforcent. Si vous vous méfiez de quelqu'un, vous l'inquiéterez, et il se méfiera de vous... C'est le fléau de l'homme. Ayez peur de la prédiction auto réalisatrice !

Je me demande si cette histoire d'abstention n'est pas une prédiction auto réalisatrice. Soudainement, il y a quelques temps, on a entendu dire que Marine Le Pen gagnerait, parce qu'elle serait confrontée à quelqu'un qui ne mobiliserait pas les foules. Puis, à nouveau après le premier tour, il n'a été question que d'abstention et de nuls. Puis, après l'élection, on a, de nouveau, parlé d'abstention et de nuls. 

Giverny

Visite à la demeure de Claude Monet. Eh bien ? Monet avait une passion pour les gravures japonaises, que je ne partage pas. Sinon ? En termes d'attrape touristes, c'est une réussite. Pour le reste c'est une maison agréable, vaste, lumineuse, avec de grandes pièces peintes de couleurs vives, comme dans les pays nordiques, et un beau jardin. Il suffit de jeter un coup d'oeil au reste du village pour constater tout ce que l'on a perdu en termes de beauté en passant d'un siècle à un autre. Mais, Monet devait être très riche pour payer l'entretien d'une telle propriété. Cependant, elle n'a réellement d'intérêt que parce qu'il y a habité, et parce qu'il y a peint des nymphéas. Ils faisaient d'ailleurs triste mine lorsque je suis passé.

(Le "modèle économique" de Monet, du moins à la fin de sa vie, semble avoir été la "série". Il peignait un même thème de différentes façons. Les collectionneurs attendaient avec intérêt ses nouvelles idées. Cela ressemble à la technique de la mode, dans le domaine du textile. Monet, pionnier de l'art business ?)

samedi 13 mai 2017

John Dewey

John Dewey (1860, 1952) est présenté souvent comme Le philosophe américain de son temps. A la différence de nos normaliens, c'était un homme de pratique et de simplicité, qui parlait avec le langage de vous et de moi, des questions pratiques qui nous préoccupent. 

Sa philosophie s'appelle "le pragmatisme". Sa grande idée est que l'homme et la société font sans cesse face à des "problèmes". Ces problèmes viennent de l'interaction entre nous et notre environnement. Soit que ce dernier change, soit que nous changions. Il faut alors faire un travail pour retrouver une cohérence. Ce travail est la démarche scientifique, à proprement parler. La démarche scientifique fonctionne sans a priori, "elle ne sait pas". Elle avance par "expérience". Elle déduit des dites expériences des modèles, qu'elle teste. S'ils fonctionnent, elle les applique. 

Cette pensée s'oppose à celle qui veut qu'il y ait des "absolus". C'est à dire des vérités immanentes, indépendantes du contexte. 

L'absolutisme est la norme en France. Depuis des décennies nos gouvernements réforment à coup de grandes idées, de grands principes. Ils ne tiennent ni compte de l'évolution du monde, ni des caractéristiques du pays. M.Macron sera-t-il un pragmatique, qui ne sait pas, ou un absolutiste, qui sait ?

Robot

"La semaine dernière Jack Ma, fondateur de l'infrastructure de commerce électronique Alibaba, nous prévenait : aucun poste ne sera à l'abri d'être remplacé par un robot, pas même celui de CEO. Il ajoute que pour les entreprises désorientées, il est de leur devoir d’aller chercher des jeunes pour se faire expliquer la transition numérique." Voici comment commence une lettre d'information qu'a reçu un ami. 

C'est curieux comme les choses changent. Aujourd'hui, faire fortune vous rend omniscient. Hier pour parler d'avenir on aurait demandé son avis à un Einstein.

Peut-être aurait-on eu tort. L'avenir est imprévisible dit le scientifique. Sauf, lorsque l'on veut y mettre un terme. Il n'y a rien de plus crédible qu'un général qui vous annonce votre fin. Et un Jack Ma est une forme de général. 

Rôle de l'école

Mon exploration du cinéma d'après guerre montre que le talent n'était pas associé au diplôme, en ce temps. Même les dialoguistes qui ont fait son succès, les Audiard, Boudard ou Prévert, n'avaient pas dépassé le certificat d'études !

Aujourd'hui, vous n'êtes rien sans diplômes. A quoi sert l'école ? A révéler le talent, ou à légitimer les avantages héréditaires ?

vendredi 12 mai 2017

Investissement d'avenir

Si le numérique est destructeur (un précédent billet), à quel saint se vouer ?

En fait, il y a des entreprises qui ont un potentiel. Mon expérience n'est peut être pas statistiquement significative, mais ce que je vois de la PME lorsque je travaille pour elle prouve un potentiel de transformation bluffant. De même, j'ai mené à répétition des études qui montrent que des technologies qui ressortissent au big data pourraient changer des pans entiers de l'industrie. 

Pourquoi cela ne bouge-t-il pas ? Une question de conduite du changement. Aujourd'hui, le numérique est positionné comme "remplaçant" du traditionnel, alors qu'il devrait être un facilitateur (dans ma jeunesse, on disait "enabler"). Pourquoi n'en est-il pas un ? Parce que cela demanderait au dirigeant de se retrousser les manches pour changer son entreprise, et qu'il est bien plus agréable de manier de grandes idées dans le calme de ses appartements présidentiels.

Vol de la bécasse

La théorie du vol de la bécasse, de C.Kozar, explique le changement systémique. La bécasse est très difficile à tirer, parce que son vol est illogique. Il ne prend sens qu'après coup. Le changement, aussi, ne prend sens qu'après coup. Ce n'est que rétrospectivement que l'on a l'impression qu'il avait une logique imparable. La question qui se pose est : est-ce que le changement Macron est systémique ? Pour commencer, quels sont les gens qu'il a choisis pour l'entourer ? A posteriori sont-ils une évidente bonne solution ? 

Pour ceux qui ont publié, ou qui sont connus (Minc, Attali...), ou ceux pour qui l'on a un début de CV (présidente du mouvement, futur premier ministre), il se dégage un point commun, inquiétant pour un homme d'entreprise, grande ou petite. Ce sont des oligarques. S'ils sont passés dans l'entreprise, c'est après un séjour au gouvernement. Ce sont des ultra privilégiés. Ce sont des gens qui se croient des hommes d'entreprise, alors que ce sont leurs relations, et l'argent de l'Etat, qui font leur fortune. La précarité, ils ne la connaîtront jamais. 

Il reste un espoir peut-être. Qu'ils soient comme ce que j'aperçois de Stéphane Richard. C'est à dire que, après avoir profité de leur situation, ils se sentent le devoir d'en revenir à leur mission initiale. Ce sont ce que les théories du changement appellent des "hybrides". C'est à dire des gens qui viennent du système à changer, donc savent le faire bouger, mais qui ont appris les règles du nouveau. 

Espérons que cette théorie est juste. En tout cas, si elle l'est, il y a des vérités dures à avaler par le petit peuple qui a toujours bien fait son travail. 

Années folles

Des années furent folles par réaction à la volonté des anciens combattants de 14 d'imposer un deuil national. Années de fantaisie ou d'orgie, d'ailleurs ? Mais pas pour tout le monde. Vraisemblablement, la majorité de la population n'a rien vu de fou dans sa vie. En tout cas, cette agitation semble avoir été une provocation pour certains et a suscité une réaction violente quand la crise fut venue. (Film sur le sujet.)

Comme quoi la vie en société demande de la modération. Les rescapés de la guerre ont peut-être cru que le cauchemar qu'ils avaient vécu leur donnait beaucoup de droits, mais on n'a des droits que s'ils sont acceptés, et compris, par le reste de la société. Quant aux fêtards, ils ont peut-être cru être seuls au monde, que la vie pouvait être une bulle de plaisirs.

jeudi 11 mai 2017

Rendements décroissants

Depuis deux ans, je me trouve dans le monde des start up numériques. Que peut-on en dire ? Il y a une tentatives massive de "disruption". Tout ce qui est traditionnel est attaqué. Mais cela ne donne pas grand chose. Car ce qui est traditionnel est hyper optimisé. Dès que l'on demande un business plan, l'illusion s'effondre. C'est d'ailleurs pour cela que l'on n'en demande plus. Le croyant n'a pas besoin de lumière. 

Même là où ça marche, ça ne marche pas. L'histoire des progiciels de gestion : pas de gain de productivité. On le fait parce que les autres le font. Jeu de dupes. L'entreprise se déleste de ses richesses au profit de beaux parleurs.

Et si la révolution numérique réussissait en coupant les vivres à l'industrie traditionnelle ? Alors, nous serons dans un monde à la Mad Max : le numérique repose sur le traditionnel ; pour survivre il devra le maintenir au minimum. Seul le riche pourra s'offrir ce que nous avons tous. (L'eau et l'air par exemple.)

J'abandonne

Depuis 15 ans, je consacre la plupart de mon temps au changement. Qu'ai-je appris ? Un article

J'ai surtout décidé de ne plus écrire. Car ce que j'écris est hors sujet. Si le changement rate sans cesse, c'est parce qu'on le veut bien. Le principe de notre société est le statu quo. Et plus on proteste de son amour du changement, moins on veut changer. (En fait, on exige que les autres changent, pour ne pas avoir à changer.) Et je n'ai pas envie de changer le monde contre sa volonté. Le jour où il voudra changer, il saura certainement le faire.

mercredi 10 mai 2017

Droit du travail

France Info discutait droit du travail, hier. L'entreprise doit pouvoir s'adapter aux conditions qui lui sont particulières, expliquait un partisan de M.Macron. On lui répondait qu'il y avait un déséquilibre de forces et que l'employé avait besoin d'être protégé du patron. 

Comme je le disais ailleurs, il y a, depuis longtemps, un mouvement dans le droit français, qui cherche à faire de l'entreprise une entreprise, c'est-à-dire quelque-chose d'autonome. Un peu comme en Allemagne. C'est une remise en cause du modèle dirigiste d'après guerre, régit par le haut. 

Qui a raison ? L'entreprise qui a comme seule pratique de baisser ses prix n'est pas un modèle durable. L'entreprise dirigée d'en haut, non plus. De toute manière, si le système dirigiste avait réussi, on ne serait pas en train de le remettre en cause. En particulier, il n'a pas empêché une grande partie de la population de se retrouver dans une situation précaire. Et le maintenir n'empêchera pas que le phénomène s'accélère. 

Le problème n'est pas une question de lois, mais d'état d'esprit collectif.

Cependant, comme souvent en France, les deux camps oublient l'essentiel. C'est la complexité, très française, du droit du travail. Elle peut être bien plus dangereuse que la bonne ou mauvaise volonté d'un l'un ou l'autre camp.

Miracle et changement

Qui aurait parié un kopeck sur les chances de M.Macron quand il est sorti du gouvernement ? Certes il n'a fait aucune erreur. Mais il aurait suffi que M.Hamon parte à droite plutôt qu'à gauche, ou que M.Fillon, élégamment, démissionne, pour que l'histoire soit totalement changée. 

On retrouve les théories de Bergson. Le changement est un miracle. Pas au sens mystique du terme, mais à son sens probabiliste. C'est peut-être ce qu'entendait Pascal par son fameux "pari". En tout cas, c'est ce qui fait que l'avenir n'est pas prévisible, et que nous ne sommes pas déterminés. 

Seulement, ce que dit aussi Bergson, c'est que le hasard ne se trouve pas où on le croit. Bergson, utilise l'exemple du sable. Si vous mettez la main dans le sable, ses grains vont s'auto organiser. Ils vont obéir à la logique du système auquel ils appartiennent, dirais-je. De même, MM. Hamon et Fillon ont probablement eu le comportement que dicte le système politique français. Il étaient peut-être condamnés. Ce qui est surprenant, c'est que M.Marcon, intuitivement si l'on en croit Bergson, ait trouvé comment exploiter ce système. 

(Reste maintenant à faire le miracle au sens premier du terme. Comme les grains de sable, nous pourrions en être les premiers acteurs.)

mardi 9 mai 2017

Chercher une formation

J'ai longtemps enseigné dans un Master 2 de contrôle de gestion. Stupéfiant, et c'est un mot faible. Les étudiants, qui pourtant avaient fait des stages, n'avaient aucune idée de ce qu'était le contrôle de gestion, et l'entreprise. Ils avaient visé une université prestigieuse. Puis ils avaient été orientés selon leur capacité en maths. En fin de parcours, les garçons avaient choisi finance, pour faire du trading, et être riches, et les filles le contrôle de gestion, qui semblait moins violent. Je discute avec des étudiants d'école de commerce : idem, aucune idée de ce qu'est une entreprise et de ce qu'on y fait. 

Et c'est bien pire en première ou terminale. En dehors de quelques bêtes à concours, qui se trouveront plus tard extrêmement mal dans la vie active, le reste ne sait pas où il veut aller. C'est de l'apathie. On a l'impression qu'en dehors des grandes écoles, de sciences po, de médecine, et de droit (dans l'ordre), il n'y a rien. Or, sauf pour quelques crânes d'oeuf, ces formations n'ont franchement rien d'émerveillant. Je ne compte plus les exemples d'enfants qui ne trouvent pas la motivation de sortir de leur lit. L'Education nationale nous paralyse.

Que faudrait-il faire ? Le plus important est de briser l'apathie. L'élève doit comprendre qu'il peut trouver une voie qui l'intéresse. Et que cela demande une enquête. Pour cela, il aurait besoin qu'on lui mette le pied à l'étrier. Qu'on témoigne : "comment j'ai mené mon enquête, et trouvé un job que je suis heureux de faire." Ou "oui, on peut vivre heureux sans avoir fait les grandes écoles". Il faudrait faciliter l'échange d'expériences. 

Succès scolaire

Ce qui est frappant, c'est le manque de motivation de beaucoup d'élèves. "Mon enfant ne voit pas pourquoi il perdrait trois ans de sa vie à faire des études stupides, au motif qu'elles lui ouvriraient de vastes horizons", me dit-on, en substance. Je rencontre aussi des accros des études. Mais eux aussi sont déçus : HEC, normale sup, finalement, ce n'est pas le paradis attendu. L'ENA, peut-être ? 

Ce qu'illustre probablement le succès des enfants d'enseignants, c'est l'importance de la pression sociale dans le succès scolaire. C'est ce milieu qui donne un sens à la vie. Du moins pendant ses premières décennies. Ensuite, comme aurait dit Camus, se pose la question de l'existence, et de son sens. Et, pour résoudre cette question, les générations précédentes, et le milieu enseignant, ont été particulièrement peu secourables. 

lundi 8 mai 2017

Verre à moitié vide

C'est étrange. Ce que j'entends depuis hier soir présente l'élection de M. Macron comme un échec. Il n'a eu que 24% au premier tour. 50% de ces voix étaient "par défaut". Donc il ne représente que 12% des votants du premier tour. Autant dire, rien. Ou, pire, un groupe d'affreux privilégiés. D'ailleurs il y a eu une abstention énorme, et beaucoup de bulletins blancs. Et Marine Le Pen a récolté 11m de voix, du jamais vu. 

Certes, mais beaucoup de beaux esprits prévoyaient la victoire de Marine Le Pen. On disait que si M.Macron n'obtenait que 55% des voix, il se ferait balayer lors des législatives. En 2002, M.Chirac, a gagné le premier tour de la présidentielle avec moins de 20% des voix. Pourtant personne n'a mis en cause sa légitimité. En termes d'abstention et de blancs, cette élection se compare à celle de Pompidou. Or, il n'y avait pas eu, alors, une telle pub pour le vote blanc et l'abstention, et  cela n'avait ému personne en son temps. Et Pompidou n'a jamais été vu comme un président faible. Finalement, en Angleterre, il n'y a généralement guère plus d'un tiers de la population qui vote pour le parti du premier ministre en place. (Qui, lui, n'a aucune légitimité directe.)

Ce que je vois de la presse étrangère tend à dire que M.Macron a fait systématiquement mieux que ce que l'on attendait de lui. Et que l'on souffle de voir que la France n'a pas été submergée par une marrée nationaliste. D'ailleurs, qui aurait mis un kopeck sur ses chances quand il a annoncé son projet ? Aujourd'hui, il se présente avec une équipe de vieux briscards et de jeunes loups, qui vont renouveler la politique française, dit le Financial Times. Certes il a encore du boulot. Mais, à quoi cela sert-il de partir perdant ? De toute manière, à vaincre sans péril...

Changement Macron : décodage

Comment juger le programme de M.Macron ? J'y cherche une vision stratégique. Une phrase qui expliquerait pourquoi ce que l'on a fait jusque là nous a mis dans la mélasse, et comment en prendre le contre-pied. Mais, si elle y était, on n'entendrait qu'elle... Cependant, il y a une autre façon de juger son programme : chercher si les ingrédients qui ont ruiné les politiques précédentes s'y trouvent. 

Les formations que je donne et mes livres sont basés sur la multiplication d'exemples. Au début, je parlais d'exemples d'entreprises. Mais la France hait l'entreprise. Alors j'ai cherché ailleurs, notamment en politique. (Ce qui marche le mieux, c'est l'exemple tiré de la vie privée !) Il se trouve qu'il y'a un nombre considérable d'études (scientifiques) sur le sujet. Toutes disent que nos mesures ont donné le contraire de leurs objectifs. Il est assez facile de raccrocher nos maux majeurs, éducation, sort des immigrés, compétitivité économique, déficits, manque de logements, etc. à un tout petit nombre de décisions malheureuses. 

Changement systémique
La particularité de ces mesures a été d'attaquer de front un lobby (les taxis, par exemple, pour Nicolas Sarkozy), mais en passant sous silence ce que signifiait la réforme (les taxis avaient tout à perdre). Leur conséquence imprévue a été un renforcement de ces lobbys, au détriment de certaines couches de la population. Inégalités scolaires, mais aussi inégalités de statut professionnel, par exemple entre fonctionnaire et non salarié. Soyons clair, le principe du changement en politique a été la lâcheté.

On a dit que si HP avait vendu des sushis, il aurait dit que c'était "du poisson mort, froid". L'art de la communication de M.Macron s'apparente à celui de HP. Il est courageux, mais inutilement. Il annonce que ses mesures vont faire des perdants ! Il ne leur dit même pas qu'un jour ils pourraient être gagnants. Il leur explique que c'est une perte mineure, dont on peut éventuellement attendre la récompense que Dieu accorde à une action charitable. Le principe de ses réformes ? Contrairement à notre tradition, il ne cherche pas à aligner les revenus de M.Arnault sur les miens. Plutôt, il veut gommer les différences de traitement flagrantes entre gens qui se ressemblent. Une forme contre-intuitive de justice sociale ?

Dans ces conditions, il aurait une "vision", mais elle ne serait pas exprimée. Il pense peut-être que si l'on redonne une chance à ceux qui se trouvent dans la mélasse, on disposera d'une source d'énergie considérable. (C'est ce que les économistes comportementaux les plus distingués appellent "nudge". L'art du coup de pouce.) C'est une vision qui l'apparente à Proudhon et aux radicaux, c'est à dire au courant de pensée qui a géré la France depuis Napoléon III jusqu'à de Gaulle. 

Faire hurler
A ce point, j'en arrive à me demander si je ne suis pas injuste. Je dis toujours que le bon changement doit "faire hurler". Le présenter comme facile endort "l'anxiété de survie" nécessaire à sa réussite. Il est plus efficace d'en exagérer la difficulté. En masquant les effets vertueux qu'il attend de son changement, M.Macron ne peut que nous faire hurler. (Il serait suprêmement habile qu'il possède, dans sa manche, une mesure qui donne des résultats immédiats : si nous pensons que ses bénéfices résultent de notre action, cela créera une formidable dynamique de changement.) 

Morale ? Ce qu'il y a de vraiment surprenant dans cette histoire, si j'ai vu juste, c'est d'être parvenu à se faire élire avec une telle tactique. Je connais les limites de mes conseils... 

(A suivre.)

Vérité

Combien de gens n'ont-ils pas dit que leur motivation était la quête de la vérité ? Mais qu'entend-on par vérité ? Deux acceptions possibles (au moins) :
  • Il existe des sortes de "lois de la nature". Frederick Taylor, dans le domaine de l'entreprise pensait qu'il y avait "the one best way" de la faire fonctionner, la seule bonne façon. Cette définition de la vérité sous-entend que l'homme est déterminé. Il y a une seule bonne façon de mener sa vie. Il y a un bien et un mal. 
  • Il y a des faits, des "donnés". Par exemple telle personne a prononcé telle ou telle parole à tel moment. Il n'y a jamais une certitude totale par rapport à ces faits. (On peut avoir mal compris les dîtes paroles.) Mais il y a tout de même quelque-chose sur lequel on peut bâtir une action. Cette vérité s'oppose au mensonge. Le mensonge, volontairement, travestit ce qu'il sait. "Fake news" dit-on maintenant.
La science est-elle la recherche de la première vérité, ou de la seconde, une connaissance, ou plutôt une description, de notre monde, qui nous permette d'agir ?

dimanche 7 mai 2017

Egalité

Gilles Kepel : jadis, la société se battait pour la répartition des fruits du travail ; lutte des classes. Mais il y avait obligation d'entente. Aujourd'hui, il y a ceux qui ont du travail et les autres. Ces derniers n'ont plus aucun pouvoir. (Alors, ils ont recours à la nuisance.) Justesse des idées de Rousseau ? La condition nécessaire de l'égalité est l'égalité de "puissance". Ce n'est pas l'égalitarisme. L'interdépendance est, elle, un vrai critère d'égalité. 

Application. A l'époque de l'étude par Durkheim du suicide, l'homme tendait à se suicider quand il perdait sa femme, alors que le contraire n'était pas vrai. Cela pourrait indiquer que, contrairement aux apparences, l'homme était inférieur à la femme.

(Par ailleurs, toute la théorie de Durkheim vise à montrer que nous sommes interdépendants.)

Emploi public

L'emploi public aurait cru de un million et demi en une trentaine d'années. Cause : la décentralisation. Les collectivités locales se sont mises à recruter sans retenue. Et l'Etat central ne semble pas avoir réduit ses effectifs. Cas classique de changement incontrôlé ?

Ce qui me surprend, c'est que, en trente ans, j'ai l'impression que les services publics se sont dégradés sérieusement. Que s'est-il passé ? Nous en demandons toujours plus aux services publics ? Le potentat local se fait élire en dépensant toujours plus de l'argent public ? Cercle vicieux de désorganisation bureaucratique ?...

Après tout, cela fait de l'emploi. Certes, mais il faut financer tout ce monde, et cela se fait au détriment du consommateur et de l'entreprise. En ces temps de concurrence mondiale, on peut imaginer que cela produit des faillites et des chômeurs, et des mécontents, et des terroristes... Un cercle vicieux en appelle un autre ? 

M.Fillon, et ses 500.000 suppressions de postes, était-il dans le vrai ? Tout est une question de manière. Créer 500.000 chômeurs et dégrader encore les services publics, cela aggrave la situation. Il est mieux de commencer par restructurer le service public pour plus d'efficacité (en termes de résultat, avant de penser coûts). Cela va créer des personnels surnuméraires. Ils doivent sortir du système, pour ne pas le pénaliser, tout en étant préparés à une reconversion. Si le changement est efficace, on peut imaginer qu'il transforme le cercle vicieux ci-dessus en un cercle vertueux et que les personnels publics soient aspirés par la demande nouvellement créée. 

samedi 6 mai 2017

Effet Clinton

J'entendais un dirigeant des "Insoumis" dire qu'il avait fait le marché et qu'il avait rencontré un grand nombre de gens très remontés contre M.Macron. Je ne fais pas les marchés, mais je rencontre aussi beaucoup de gens qui l'exècrent, simplement pour ce qu'il représente, pour sa simple apparence. Et pourtant, ce ne sont pas des perdants de la globalisation, et ils sont même à la pointe de la transformation numérique. 

Effet Clinton ? Sans s'en rendre compte, les classes dirigeantes ont accumulé une énorme haine contre elles. C'est devenu épidermique. 

Que le phénomène ne soit pas plus violent montre peut-être la sagesse de la population. Mais  M.Macron vit sur une poudrière. 

Débat

Retard à l'allumage : un billet sur le débat présidentiel. (J'écris quand je le peux...)

Débat entendu sur France Info. Je n'ai pas tenu la distance. J'ai été suffoqué par la violence de Mme Le Pen. Sa "diabolisation" avait fini par la rendre sympathique. Elle ne pouvait pas ouvrir la bouche sans se faire agresser. En outre, elle semblait croire à ce qu'elle disait. Et c'est une femme, et notre société défend la veuve et l'orphelin. Mais là, je l'ai imaginée en présidente de la République, et j'ai pris peur. 

La société est devenue comme elle : chacun cherche uniquement à provoquer l'erreur de l'autre, pour en profiter. Il devient de plus en plus risqué de vouloir aider quelqu'un. Comment vivre dans un tel monde ?

(Quant à M.Macron, j'ai admiré les bénéfices d'avoir fait l'ENA. Il ne s'est pas laissé démonter. A sa place je n'aurais certainement pas tenu. En revanche, il n'y a pas eu le cri du coeur qui aurait peut-être frappé juste et mis KO son adversaire.)

vendredi 5 mai 2017

Mysticisme

Je pense que Bergson aurait appelé M.Macron un "mystique". L'homme politique tel que nous le côtoyons veut être président : la fin justifie les moyens. M.Macron me semble porter un projet qui le dépasse. Et ce projet n'est pas le libéralisme financier, même s'il peut être confondu avec lui. Car, si M.Macron n'est pas l'émanation de "l'élan vital", comme l'aurait aimé Bergson, au moins il semble animé par un courant de pensée majeur dans notre tradition. Un courant auquel on peut rattacher Proudhon. C'est comme cela que je lis les lois El Khomri : ce sont des lois d'association, d'économie sociale. 

Pour Bergson, le mystique est un homme d'action. Il agit bien, par intuition, parce qu'il est animé par le bien (l'élan vital). Quant à M.Macron, je crois surtout qu'il a la bonne formation. Cela a certainement servi de Gaulle d'être un militaire en temps de guerre. Aujourd'hui, dans une France dominée par l'inspection des finances, et les hauts fonctionnaires de l'ENA, il n'est pas, probablement, possible de faire quoi que ce soit quant on ne connaît pas ses rites. 

Lino Ventura

Drôle d'homme que ce Lino Ventura. Il a tourné son premier film sans avoir suivi de cours d'interprétation. Et il a été immédiatement une vedette. Et il a été crédible dans tous ses rôles, du malfrat au commissaire, en passant par le professeur de la gifle, ou l'ingénieur de l'armée des ombres.

A quoi a-t-il dû sa popularité ? Peut-être à ce que la France, en son temps, comptait de grands metteurs en scène, de grands auteurs et d'encore plus grands dialoguistes. Peut-être aussi parce que le Français s'est reconnu en lui. En tant qu'Italien, il était le succès de la République : il montrait que tout était permis au pauvre méritant. Mais, aussi, ses personnages étaient tous, du malfrat au policier, des gens droits, de principes sourcilleux, d'honneur. Souvent manipulés, parce qu'intègres. Les principes, on apprend à en parler dans les salons, et à les incarner dans la rue ?

jeudi 4 mai 2017

Programme Macron

Une militante d'En Marche. Je vais comprendre le programme de M.Macron, sans me fatiguer ! Première étape : je reçois une bonne dizaine de liens vers des documents qui expliquent que des gens importants pensent comme M.Macron. Plus simple ? Le programme est en ligne. Plein de transparents, plein d'idées éparses. Elles ne semblent aller nulle part. C'est le type même de la fausse démarche démocratique. On a discuté avec 30.000 personnes, et il en est sorti une liste à la Prévert d'idées, sans fil conducteur, et surtout sans quantification. C'est efficace ou non ? M.Macron sera-t-il capable de le mettre en oeuvre ? Effets pervers ?... Comment voulez-vous qu'on le sache.

Bonne méthode ? Notre problème c'est x, voilà comment nous allons le régler. Illustration du procédé. Imaginons que Mme Aubry ait formulé son programme ainsi : le problème de la France c'est le chômage ; je vais l'éliminer en partageant le temps de travail. Il y a dix pourcentage de chômeurs en réduisant de 10% le temps travaillé, c'est fait. Et qu'elle ait mis en place un processus de négociation salariés / employeurs qui s'assure qu'elle atteignait bien son objectif. Voilà qui aurait eu de la force et de l'efficacité.

Il reste peut-être des choses à apprendre à M.Macron. Espérons que, contrairement à Mme Aubry, il n'en sera pas rendu incapable par ses certitudes. 

Changer l'Allemagne

Et si l'Allemagne était le problème de l'Europe ? Mais comment la faire changer ? Les circonstances sont peut-être favorables. Partout, les frontières se ferment. Les exportations allemandes vont en souffrir. Elle a donc intérêt à un marché européen fort. Au lieu d'exploiter les bas salaires de l'Est, et forcer l'Ouest à s'aligner sur l'Est, elle pourrait avoir intérêt, maintenant, à une Europe homogène et riche. Quant aux exportations, il y aura toujours de la place pour le produit unique, la Mercedes, plutôt que pour le produit pas cher. Pourquoi l'Allemagne ne deviendrait-elle pas l'intégrateur et le vendeur d'une Europe du talent ? 

Bourvil

Les acteurs sont-ils à l'image de la société ? Bourvil ? C'est la France de l'ascenseur social. C'est le premier de canton au certificat d'études, destiné à l'école normale. Mais il cherche un peu de fantaisie. Et c'est comme cela qu'il finit, par hasard, par devenir acteur. Curieusement, en jouant les pauvres types. Cependant, lorsqu'il abandonne son rôle de clown triste, comme dans le cercle rouge ou les grandes gueules, on découvre qu'il a un talent fou. Un talent naturel, contrairement à celui des acteurs modernes, qui empilent les écoles.

Bourvil, c'est l'antithèse de l'acteur moderne. Fini le pauvre qui doit son succès à son talent. C'est désormais la naissance qui fait l'acteur ? Qu'il soit "fils de", ou qu'il appartienne au milieu du pouvoir. 

mercredi 3 mai 2017

Storytelling

Le Français voulait une présidence de droite, ai-je entendu le soir du premier tour de la présidentielle. Le Français me semble vouloir une solution à ses problèmes, et il ne la trouve nulle part, et encore moins dans une idéologie. Le Français me semble pragmatique. On a aussi entendu dire, avec insistance, que la déroute de M.Hollande venait de ce qu'il n'avait pas tenu ses promesses de campagne. Mais qui croît, et même connaît, les promesses d'un homme politique ? M.Hollande a ét élu, parce que la France ne voulait plus de M.Sarkozy. Dans une certaine mesure, il pouvait promettre ce qu'il voulait, il aurait été élu. 

Tout cela me semble illustrer la fâcheuse tendance moderne au (mauvais) storytelling : chercher à influencer l'électeur, ou le consommateur, par des sophismes.