samedi 31 mars 2012

Écosystème et changement

J’ai découvert récemment la notion d’écosystème. En grande partie grâce à Dominique Delmas. De quoi s’agit-il ? Nous ne sommes rien sans ce qui nous entoure. C’est aussi ce que dit la systémique : nous sommes formés par les échanges que nous avons avec notre environnement.

J’ai ensuite découvert que l’homme était lui-même un écosystème. Ce qui a une conséquence inquiétante : l’hygiène, la médecine… bouleversent notre équilibre physiologique. On commence ainsi à croire que certains de nos maux pourraient provenir d’un excès de propreté.

En fait, ce n’est pas nouveau : quasiment toutes les épidémies qui ont ravagé l’espèce humaine ont une cause sociale. Par exemple, le rapprochement hommes / animaux produit par l’élevage stimule la création de pathogènes innovants.

Bref, je crois que les écologistes ont à la fois raison et tort. Ils ont raison de nous dire qu’aucune innovation n’est gratuite, car nous finissons toujours par en payer les conséquences. Par contre, ils ont tort de croire que l’on peut stopper notre développement : le changement est une caractéristique humaine.

Ce qui nous manque probablement est une forme de « changement responsable », c’est-à-dire un moyen de nous assurer que nous avons des chances raisonnables de survivre aux changements que nous lançons. 

8 commentaires:

Anonyme a dit…

Darwin a dit "Les espèces qui survivent ne sont pas les espèces les plus fortes, ni les plus intelligentes, mais celles qui s'adaptent le mieux aux changements". Cela reste d'actualité. Mais cela suggère des changements "extérieurs", subis, et une sorte de fatalité ... Ce qui est très intéressant dans le billet de Christophe, c'est la notion de responsabilité vis - à-vis du changement. A deux niveaux me semble-t-il : l'homme serait à la fois initiateur et comptable de ses changements ...

Christophe Faurie a dit…

Ce qui est plus facile à dire qu'à faire!

Mais il faut bien commencer quelque part!

Hubert Arquillière a dit…

Et si la base d'un "changement responsable" résidait dans l'expression de la richesse et de la diversité populaire plutôt que dans le cloisonnement idéologique des partis dirigeants ? Contrairement aux systèmes politiques qui dépendent avant tout des logiques de marché dans leurs configurations actuelles, ce sont bien les êtres humains, par leurs comportements existentiels, qui les premiers possèdent cette responsabilité d'adaptation. Ils sont les termes de cette interaction omniprésente avec la nature vivante qui nous offre l'existence. Par là, le changement, comme l'adaptation au changement planétaire qu'impose la mondialisation, ne trouverait-il pas sa voie d'expression en l'humanité par une considération grandissante des ressentis humains de chacun au sein de notre société démocratique ?
Car même si beaucoup d'individus ne s'intéressent pas trop à ce qui se passe ( à force de les éduquer à déléguer leur responsabilité à d'autres notamment ... ), les véritables capacités d'adaptation au changement semblent résider dans le vivant individuel plutôt que dans le raisonnement intellectuel.
Je suis tout à fait d'accord avec une de vos définitions du changement : "changer c'est apprendre à faire ce que l'on ne sait pas faire." ... Vu notre incapacité grandissante à nous adapter, il serait peut-être temps d'oser changer nos configurations d'évolution communautaire. Même si, comme pour tout véritable changement, une part de ce qui en découlera restera imprévisible ... ( je l'ai lu dans un commentaire d'un de vos articles et j'y adhère complètement ). Tout pourrait donc être question de foi ou de doute en les capacités humaines du peuple à pouvoir par lui-même devenir davantage responsable ...

Christophe Faurie a dit…

Il me semble effectivement qu'un de nos maux est d'être "cloisonnés", et qu'un changement désirable serait que l'humanité se considère "une". Ce qui ne signifie pas uniformité: c'est la diversité des idées qui fait la richesse du groupe. (C'est d'ailleurs ce que pensaient les Lumières.)
Les Anglo-saxons ont une idée intéressante: il faut rêver l'avenir et se battre pour qu'il survienne. Tous les avenirs ne sont pas possibles, par contre, il me semble que nous avons la capacité d'influencer notre devenir collectif, et que nous ne devons pas nous en priver. Alors les techniques de conduite du changement peuvent être utiles: elles visent à ce que le changement aille dans la bonne direction.

Hubert Arquillière a dit…

Merci pour votre réponse, qui va dans le sens de mes sentiments.
J'ai eu ( jadis ) un cursus en management d'entreprise que j'ai rapidement délaissé faute de pouvoir / vouloir m'adapter aux considérations en place dans les sphères dirigeantes. Mes aspirations me poussaient à considérer les revendications humaines des salariés dans des proportions que les considérations économiques étroites des dirigeants d'entreprise ne pouvaient accepter, notamment sur leur faculté à eux-mêmes évoluer. En lisant votre site sur le changement, qui m'inspire vraiment, je m'aperçois qu'outre le fait d'être moi-même resté bloqué dans mes convictions, je n'ai pas su percevoir l'effet de levier dont vous parlez. En fait, je devais à l'époque être incapable de l'envisager.
J'ai été par la suite magnétiseur et cet effet de levier dont vous parlez me fait penser aux interventions subtiles que l'on peut apporter en séance aux individus. En effet, par une simple remise en configuration naturelle d'un petit aspect intérieur, on peut permettre à l'ensemble de la machine humaine de retrouver de sa limpidité naturelle et de pouvoir davantage évoluer vers l'expression de sa raison d'être.
Avec le temps, je ressens la globalité de la communauté humaine comme un être humain, dont l'amalgame interne est lui aussi très complexe. Tout me semble résider dans la faculté de pouvoir redonner un état de fonctionnement naturel aux constructions inappropriées, voire parfois maladives, que le vécu a pu engendrer.
A cette fin, je viens de lancer une initiative citoyenne que vous pourrez visiter sur http://www.osonsunefrancedavantagepopulaire.org/
Sans vous demander de vous prononcer sur ce qu’elle est, je serais intéressé de connaître votre opinion quant à sa potentialité à justement révéler cet effet de levier dont la société humaine française aurait peut-être besoin afin de pouvoir s’offrir le changement. Je comprendrais tout à fait si vous préférez ne pas vous prononcer là-dessus.
Merci en tout cas pour tout ce que vous transmettez via ce site.

Christophe Faurie a dit…

Les questions que vous posez semblent rejoindre une des problématiques qu’explore ce blog. N’ayant pas trouvé de réponses, je ne peux pas vous apporter grand-chose. Quelques idées cependant :

Ce qui nous paraît dysfonctionnel dans notre pays est en grande partie dû à des caractéristiques culturelles, dont les origines remontent à la nuit des temps. (Un des billets que j’ai programmés pour la fin de semaine analyse les rasions de nos tendances révolutionnaires.) Ces caractéristiques ne peuvent pas changer. Il faut, au contraire, inscrire le changement à l’intérieur d’elles.
(D’ailleurs, c’est un enseignement que vous pouvez tirer de votre début de carrière. On ne fait pas bouger une entreprise par la force, parce que l’on pense avoir raison, mais en comprenant la logique de ce groupement social et en traduisant le changement dans son vocabulaire propre.)

Une de nos caractéristiques françaises est d’attendre tout de nos dirigeants, donc de nous comporter en irresponsables. Or, le rôle de notre gouvernement est « d’exécuter », c'est-à-dire de mettre en œuvre la volonté populaire. Et, sur le long terme, c’est effectivement ce qu’il fait. Attention, donc, à ne pas être trop exigent, et trop critique. L’incompétence de nos gouvernements reflète avant tout le manque de projet de notre société (ou l’échec de ceux qu’elle avait jusque-là).

Le gouvernement dangereux est celui qui a une volonté propre, qui n’est pas la nôtre, ou qui cherche à disloquer le pays en jouant sur une veine populiste (ce qu’a très bien analysé Aristote – voir http://christophe-faurie.blogspot.fr/2010/12/demagogie.html).

Par ailleurs, l’expérience montre que la volonté populaire ne peut pas s’exprimer telle que. Elle a besoin d’être analysée, synthétisée, et transformée en un projet, qui va, s’il est bien conçu, paraître évident à tous.

Finalement, toute société humaine est basée sur des principes directeurs (cf. Aristote et sa notion de Constitution - http://christophe-faurie.blogspot.fr/2010/12/les-politiques-aristote.html, ou Montesquieu), qui assurent sa cohérence. Ces principes peuvent changer pour correspondre à l’évolution de la dite société, mais ils ne peuvent le faire que d’une manière concertée, afin d’éviter des contradictions internes qui dissoudraient le groupe. Cela a une conséquence importante : une législation construite sur une forme de bon sens populaire (législation au fait divers) est extrêmement dangereuse : elle ne tient pas compte de ses conséquences à long terme. Un projet qui veut le bien commun doit avant tout s’assurer qu’il a les moyens de contrôler l’atteinte de ses objectifs.

Il faut noter que les Lumières ont beaucoup réfléchi à ces questions et y ont apporté des réponses élégantes, que l’on semble, malheureusement, avoir oubliées.
(Voir http://christophe-faurie.blogspot.fr/2012/02/les-lumieres-et-lidentite-de-leurope.html et aussi, http://christophe-faurie.blogspot.fr/2011/12/kant-et-les-lumieres.html et http://christophe-faurie.blogspot.fr/2010/01/les-lumieres.html)

Hubert Arquillière a dit…

Partie 1 :

« Les Lumières sont avant tout une lutte à mort avec le Christianisme, vu comme le pire des fanatismes. C’est l’affrontement de l’esprit critique et du mythe. » … et si justement le nouveau terme à trouver est de sortir de ce confit séculier entre philosophie et croyance et d’enfin permettre à l’être humain de s’ouvrir à sa nature, laquelle est assurément leur source commune ?

L’humanité est en constante progression. Les Lumières ont établi un mode conceptuel de pensée libératrice des dogmes et pouvoirs religieux. Si elles ont par là offert à l’humanité une propension psychique à s’épanouir, elles l’ont par la même privé de ce qui fait sa grandeur : sa nature mystique.

De ces deux extrêmes de pensée ( l’une croyante et métaphysique, l’autre philosophique et raisonnée ) émerge progressivement la considération du Vivant comme le manifeste l’écologie ( dans toutes les formes auxquelles cette démarche existentielle peut s’appliquer ) et l’ensemble des démarches considérant que l’être humain n’est rien sans la nature, qu’il en est l’enfantement constant comme l’instrument d’équilibre. Là reposent peut-être les germes d’une nouvelle évolution d’humanité, par laquelle l’être humain possèdera la faculté de repositionner ses raisons et aprioris face aux effluves naturelles et obtiendra la propension à l’épanouissement.

Si les Lumières en sont arrivées à la lutte contre le Christianisme, c’est bien aussi car le système de croyance en vigueur devenait hérétique à la libre expression mystique. L’être humain était devenu prisonnier de pouvoirs qui ne se préoccupaient plus de lui.

Si le temps d’une nouvelle évolution d’humanité arrive, c’est probablement car les systèmes communautaires actuels n’ont fait qu’accroitre le schisme enclenché par les Lumières en projetant l’être humain hors de ses domaines naturels d’expérimentation source de véritable liberté. Quelque part, l’être humain se retrouve une fois de plus prisonnier de pouvoirs qui ne se préoccupent plus vraiment de lui.

La croyance se perd dans la Foi aveugle, comme la philosophie s’égare dans les sciences de la Raison. Entre ces deux pôles conflictuels siège l’essence de l’humanité, laquelle n’est que propension à jouir de l’existence. Elle est là, imperturbable depuis l’avènement de notre race, et possède peut-être désormais l’occasion de pouvoir s’ériger en guide de nos évolutions.

A partir de là, tout peut devenir possible. Si l’esprit de l’humanité est voué au consensus, les manifestations qu’en font les êtres humains en sont trop souvent éloignées. Mais cela ne relèverait-il pas du fait qu’on les a formatés à ne pas être en les plongeant dans des conceptions idéalistes voire illusoires de la Liberté ? Je ne peux m’étendre davantage sur ce sujet pour cause de longueur potentielle. Cependant, réapprendre à vivre avec sa nature et à se sentir vivant semble être une des premières démarches à insuffler en l’humanité pour lui permettre d’advenir davantage.

Hubert Arquillière a dit…

Partie 2 :

Le changement, je le pense, est déjà en marche. C’est désormais à l’humanité de se prendre en main. Même s’il est sûr que son énorme majorité ne sera pas en phase avec ce que je viens de dire, le potentiel semble être là pour que la société retrouve un visage plus humain et naturel. En se libérant des bourbiers de la Foi et du Doute, l’humanité pourra progressivement s’élever vers sa destinée d’équilibre source d’émancipation.

Les considérations qui pousseront la majorité au changement ne seront pas de cet ordre. Peu importe. L’humanité est en constante évolution et tout changement inclut l’imprévisible et le risque d’erreur. Comment pourrions-nous de toute façon retrouver notre propension à être sans trébucher alors qu’il nous est depuis si longtemps rendu impossible de véritablement nous exprimer ?

Il règne assurément une crainte des penchants maladifs de l’être humain ( à critiquer, se braquer, violenter, révolutionner ) dans la non-volonté de donner au peuple davantage de droits d’expression. Mais, à force de l’en priver sous diverses formes d’artifices prônant le respect de ses intérêts ( l’autorité religieuse, la direction politicienne ), il devient naturel qu’il y aspire, surtout en temps de crise comme actuellement où nombre de ses piliers existentiels vacillent d’incertitude.

Oui, comme le dit Aristote, « Sans guides, le peuple devient une « masse », une sorte d’animal collectif, mu par des désirs primaires. » Mais tant qu’on le considère ainsi, tant qu’on l’étouffe d’incapacité, tant qu’on le voue à l’irresponsabilité, tant qu’on le convoite principalement comme voix et clients potentiels, quelle faculté lui offrons-nous d’évoluer plus humainement ?

Entre pérennisation systémique source de potentielle stabilité comme d’inertie et volonté d’évolution républicaine entrainant davantage d’incertitude, ne devrait-il pas être remis au peuple, suite à une étude nationale et approfondie d’experts indépendants en tous les domaines de compétence, la seule capacité de décider ? Ensuite, s’il opte pour le changement, pourraient être définies par ces mêmes experts les modalités comme les conséquences des différentes possibilités d’adaptation des principales revendications populaires aux nécessités d’évolution de la société. Peut-être le peuple pourra-t-il alors retrouver goût et fierté à participer à un élan national novateur et constructif ?

( avec plaisir de continuer cet échange avec vous sur ce blog ou par mail, mais j'ai besoin de prendre un peu de recul : d'autres obligations m'attendent )