lundi 31 mai 2021

Ayyam Soureau

France Culture interviewait Ayyam Soureau. En bon Français, j'ai commencé à me demander si elle n'était pas une "pistonnée". Elle appartient visiblement à la très haute société égyptienne, son père connaissait Jean d'Ormesson, qui l'a, apparemment, aidée. (En particulier à entrer à l'UNESCO - UNESCO, gaspillage d'argent public, si je l'entends correctement.)

Mais, j'ai toujours tort. Elle a pris l'initiative de remédier à la défaillance de l'Etat quant à l'intégration des immigrés. Elle le fait d'une manière très particulière. En quelque sorte par la culture. Ses "professeurs", semblent être des Français ordinaires, qui, simplement, viennent parler de leur passion. Et, dans son "école", pas question de ne pas respecter la culture française. Si on a choisi notre pays, ce n'est pas pour y faire la loi, en quelque sorte. Elle représente une sorte de troisième voie, entre la droite intolérante, et l'intellectuel, de gauche, qui fait de l'immigré une victime (entre l'islamophobie et l'islamogauchisme, pour le cas particulier de l'Islam). Ce qu'elle disait m'a fait penser aux idéaux de la IIIème République, à une France généreuse, et idéaliste, mais combattive. Retour aux sources qui nous serait utile ? Et, surtout, peut-on faire grandir son succès ?

Elle parlait aussi de Martin Buber, un philosophe que j'ai découvert à l'époque où je lisais Emmanuel Levinas. Y aurait-il là une utile philosophie de "l'autre" ? 

Les clusters de Michael Porter

Dans les années 90, Michael Porter, éminent spécialiste de la stratégie d'entreprises, produit un livre qui semble à contre-courant. Pour lui c'est le "business cluster" qui fait la richesse des nations. (Voir article.)

Comment traduire ce terme ? Je crois qu'il n'y a pas d'équivalent en français. Peut-être faut-il employer le mot "d'écosystème" ? "Les clusters sont des concentrations géographiques d'entreprises et d'institutions interconnectées, dans un secteur particulier." C'est un mélange très curieux "de coopération et de compétition", de clients en avance sur le marché, d'entreprises stimulées par la proximité de leurs concurrents, d'une sous-traitance spécialisée, d'institutions publiques ou para publiques. Et la caractéristique de ce mélange est la "productivité". Ce que je comprends ainsi : il transforme particulièrement vite et bien tout ce que lui fournit le reste du monde, en des produits uniques et de nouvelles tendances de consommation. Car c'est avant tout un creuset d'innovation. L'innovation y est permanente. Non seulement les entreprises y ont sans cesse de nouvelles idées, mais il s'y crée sans cesse de nouvelles entreprises. 

Un cluster est avant tout un "bien public". Les clusters ressemblent beaucoup à la "cité" des Grecs. Les membres-citoyens partagent une même identité. Ils savent que leur force vient du cluster, et que leur intérêt est intimement lié à celui de chacun de ses membres, à commencer par celui de leurs concurrents. (Par exemple, l'entreprise a besoin d'une université forte, et l'université d'une entreprise forte.) En conséquence il n'y a pas de frontière entre l'investissement public et privé. 

Surtout la relation y est informelle, basée sur la confiance, et c'est comme cela que se diffusent aussi vite les idées, qui sont le matériau de son succès, et que la coordination entre entreprises est aussi efficace. (Pas "d'économie de la connaissance" digne de ce nom sans cluster ?) "Confiance et coordination" sont ses atouts maîtres face à ses adversaires : organisation hiérarchique (multinationale intégrée verticalement) et marché. 

Et tous deux sont peut-être les maux qui le menacent, s'il n'y prend pas garde... Mais s'il est prudent, le cluster est un cercle vertueux : plus il réussit, plus il attire le succès. Quels sont les facteurs qui font la performance d'un cluster ?

  • La qualité de ce qui y "entre" (par exemple celle des employés, donc du système de formation local)
  • "La sophistication des clients locaux" (marché test)
  • "La nature et l'intensité de le concurrence locale" (point critique : la stimulation de la concurrence est le moteur de la productivité du cluster)
  • "La richesse locale et la sophistication des fournisseurs et autres entreprises connexes"
  • La "proximité" géographique entre entreprises, clients et fournisseurs, qui "amplifie toutes les pressions à innover et améliorer"

dimanche 30 mai 2021

Le vaccin et le brevet

Pour que les populations démunies soient vaccinées, faut-il priver les vaccins de brevet ? 

Cela ferait un fâcheux précédent. 

Mais, d'un autre côté, comment expliquer que, lorsque cela va mal, les Etats sauvent les entreprises, et que, quand cela va bien, elles les laissent s'enrichir au delà de toute limite ? Les fabricants de vaccins peuvent-ils être de nouveaux "profiteurs de guerre" ? 

Les lois ne sont pas immuables, quand elles paraissent injustes, il est de coutume de les changer. La démocratie, c'est le pouvoir du peuple, pas du marché. 

Changement en France

Le RN pourrait-il gagner les présidentielles ? Il est le seul parti ayant un socle électoral solide et maintenant très important. En cela il est quasiment une exception mondiale. Ensuite, ses adversaires sont divisés, et, aussi bien à droite qu'à gauche, on peut être tenté de jouer avec le feu. 

Comment en est on arrivé là ? Cela viendrait d'un constat, dont les journaux ne se font pas l'écho : le pays s'est fracturé en communautés. Et ces communautés sont malheureuses. Et le gouvernement ? Une "élite" auto-proclamée de petits jeunes ridicules. 

La solution ? Remplacer cette bande de bras cassés par des gens sérieux. (Et l'homme politique traditionnel, fraichement "dégagé", n'entre pas dans cette catégorie.) Le généraux en retraite ne feraient donc que dire tout haut ce qu'une grande partie de la population pense tout bas. 

Bonne solution ? La particularité de la France est son mécanisme d'intégration, par l'emploi et par l'école. Ce sont eux qui ont failli, et qui ont créé la situation actuelle. Ce sont eux qu'il faut relancer. Et non faire appel à la légion. 

Vert, couleur de l'argent ?

Les investisseurs "activistes" imposent aux compagnies pétrolières de se préoccuper d'écologie. (Shell en a fait les frais récemment.)

Surprenant ? Une hypothèse est que la nature, réelle, de ces investisseurs est la spéculation. Ils sentent les mouvements qui parcourent la société et sur lesquels ils parient. C'est risqué, mais, si ça marche, on peut gagner très gros. La bourse n'est qu'un casino parcouru par les "esprits animaux" disait Keynes. 

Les écologistes ont crée une mode ? Les spéculateurs s'en servent ? Et demain ? 

(Financial Times : "Shell verdict sets scene for more corporate climate cases. Ruling establishing duty of care on human rights grounds suggests more companies will face litigation".) 

samedi 29 mai 2021

MGM et Amazon

Différence de cultures ! La fusion entre Amazon et MGM va échouer ! Voilà ce que j'entendais. 

Il y a beaucoup de travaux sur les fusions. Ils montrent que, dans la très grande majorité des cas, elles échouent, effectivement. Mais, dans celui-ci, je crois surtout que le problème est mal posé. 

Car ce qui compte réellement pour juger cette décision est la différence de valorisation des deux sociétés. MGM vaut moins d'un pour cent d'Amazon. Une erreur de cette dimension ne compte pas. 

Il y a quelques temps, je lisais que la valeur moyenne de la PME française de plus de 5 ans est de l'ordre de 800.000 euros. En estimant qu'il y a 1m de telles PME, et que ce sont les seules à avoir de la valeur, puisqu'elle ont fait la preuve de leur viabilité, notre tissu de PME vaut 800md€, ce qui est inférieur à la valeur d'Amazon ou d'Apple. Cela reflète-t-il la valeur réelle de ces entreprises ? Qui ferait le plus de dégâts : la disparition des PME françaises, ou celle d'Amazon ? 

Conclusion : la valeur est un jeu essentiellement spéculatif, et Amazon en est le champion ?

Le sens des mots

Il y a peu de temps j'ai eu à consulter plusieurs médecins. Ce qui m'a surpris, c'est qu'ils n'étaient pas d'accord les uns avec les autres, alors que j'avais une pathologie banale. Pire : ils ne se privaient pas de dire le mal qu'ils pensaient de leurs collègues. D'ailleurs, le résultat ne fut vraiment pas brillant. Depuis j'ai décidé de me tenir à distance de cette profession. 

Il semble que ce soit une caractéristique française : l'autre comme menace. En particulier, quelqu'un qui fait le même métier que vous est un "concurrent". 

On me dit qu'en Allemagne les choses sont tout autres. Celui qui fait votre métier est un "confrère", en quelque-sorte un "compagnon" (au sens artisanal du terme : il a passé par les mêmes épreuves que vous, ce qui garantit son sérieux). Il semble qu'il en soit de même entre Allemands : on respecte un autre Allemand parce que l'on sait que c'est quelqu'un de bien sur qui l'on peut compter. 

Comment peut-on être allemands ? se demandera-t-on.

vendredi 28 mai 2021

Radio de gauche, télévision de droite

Il me semblait que la gauche avait gagné la bataille des médias. Un journaliste de France Culture disait le contraire l'autre jour. Cette impression fausse vient de ce que je n'écoute que la radio publique, qui est "de gauche". Alors que la télévision serait "de droite". 

Paradoxe du libéralisme ? Au lieu de produire, comme prévu, une société d'individus débattant vigoureusement, il en résulte des communautés qui ne s'écoutent plus ? Le grégarisme est le propre de l'homme ?

Le marché, idée erronée ?

La céramique est une des plus anciennes inventions de l'humanité. Curieusement, aujourd'hui, elle a des applications de "pointe". Outre le bijou, il y a la greffe, et tout ce qui ressortit aux très hautes températures, qu'elle supporte mieux que tout autre matériau (donc, application aux moteurs d'avion). La céramique a été un des pionniers de l'utilisation de la nouvelle technologie de l'impression 3D. 

Il en est ainsi de l'innovation. Elle est le fruit de l'empilage local de savoir-faire, de leur combinaison, au cours du temps, de la constitution "d'écosystèmes" d'entreprises et de compétences professionnelles... auxquels de nouvelles circonstances donnent de nouvelles applications. 

Et c'est ce qui explique peut-être pourquoi nous allons aussi mal, et pourquoi le Brexit a eu lieu. Il semble qu'une forme de pensée nommée "libérale" ait cru que ce qui était ancien était dépassé, et que l'innovation se faisait par l'opération du saint esprit, quelque part au sein d'un "marché" mondial. En France, en Angleterre et ailleurs, on a donc liquidé les industries traditionnelles, sans comprendre qu'elles avaient le potentiel de renaître. Rien ne les a remplacées. Sinon des déserts économiques pleins de chômeurs mécontents. 

L'erreur est humaine...

jeudi 27 mai 2021

Candide essuie-glace

 "On pouvait penser, depuis Voltaire, que chaque génération avait besoin de son Candide. Chacune ayant ses propres façons d'enfumer ou de salir les vitres qui la séparent des saines réalités, cet entrain à les asperger d'eaux claires est un art de salubrité publique. Or, dans l'ère de progrès où nous voici engagés, dans la bousculade et la frénésie qui "accélèrent" (on nous le dit) l'Histoire où nous sommes emportés, c'est tous les ans qu'il faudrait un Candide, et, d'aventure, tous les mois ; ou, mieux encore, périodiquement, plusieurs Candide." (Maurice Genevoix)

Comment se fait-il que notre société ait, effectivement, une telle capacité au délire ? Qu'il lui faille des crises comme celles que nous vivons actuellement pour que celui-ci soit un rien ébranlé ? Nous faut-il des Candide ou, plutôt, abattre les remparts que nous avons édifiés pour nous protéger de la nature, qui nous empêchent de voir, et de nous adapter ? Sommes-nous, nous et notre éducation, devenus, trop "artificiels" ? 

Le bestiaire de Maurice Genevoix


Bestiaire ? Il y a beaucoup d'animaux, certes, mais on ne fait souvent que les entrapercevoir. "Lorsque l'idée m'est venue d'embarquer sur mon arche le peuple de mes amis à plume, à poil (...) je pensais que j'allais le faire au gré de mes seules préférences (mais) c'est vers moi (qu'il) me ramenait comme à l'envi."

Un très beau livre, des dizaines de petites histoires, très agréable, très simplement écrit, mais un peu triste. 

Grande sensibilité à l'injustice ? Injustice de la guerre de 14, enfer absurde qui a fait d'un jeune homme plein de vie et de promesses un invalide. Sensibilité à la souffrance qui lui donne une empathie pour l'animal ? Et qui le rend capable, étonnamment, de le comprendre ? 

Livre aussi qui montre à quel point nos parents vivaient au milieu même de la nature, et à quel point elle faisait leur bonheur, et ils l'aimaient. Ces esprits frustes n'avaient-ils pas une bien plus grande sensibilité face au spectacle de la nature, n'étaient-ils pas de plus grands poètes, sans le savoir, que nos intellectuels de l'écologie qui nous rebattent les oreilles de leurs leçons, alors que, s'ils mettent un pied hors du Quartier latin, c'est pour entrer dans un avion ? Incompréhension d'une société toute gonflée du contentement de soi, mais qui n'a plus d'âme ?

mercredi 26 mai 2021

De l'importance du pot de chambre dans l'art de Proust

"mais mon ravissement était devant les asperges, trempées d’outre-mer et de rose et dont l’épi, finement pignoché de mauve et d’azur, se dégrade insensiblement jusqu’au pied — encore souillé pourtant du sol de leur plant — par des irisations qui ne sont pas de la terre. Il me semblait que ces nuances célestes trahissaient les délicieuses créatures qui s’étaient amusées à se métamorphoser en légumes et qui, à travers le déguisement de leur chair comestible et ferme, laissaient apercevoir en ces couleurs naissantes d’aurore, en ces ébauches d’arc-en-ciel, en cette extinction de soirs bleus, cette essence précieuse que je reconnaissais encore quand, toute la nuit qui suivait un dîner où j’en avais mangé, elles jouaient, dans leur farces poétiques et grossières comme une féerie de Shakespeare, à changer mon pot de chambre en un vase de parfum." (Proust devant l'asperge de Manet - et du côté de chez Swann.)

Le délice des senteurs du pot de chambre. Il n'y avait que Proust pour le dire ? L'art se rit des conventions sociales ? Ou amour de soi porté au paroxysme ? 

Le pot de chambre serait-il plus important, dans l'oeuvre de Proust, que le "petit pan de mur jaune" ? 

Le musée retrouvé de Marcel Proust


Bonne idée : le texte de Proust et les tableaux qu'il cite sont côte à côte. 

Il n'y a pas tant de tableaux que cela, et ils sont assez conventionnels. Il semblerait que Proust ait aimé beaucoup d'autres peintres que ceux qui sont présents ici, mais ils ont eu le tort de ne pas passer à la postérité. 

Il se prend de passion pour un "petit bout de mur jaune", qui semble bien quelconque. Il y voit le principe même de son oeuvre, et de sa vie : le peintre a poussé la perfection à soigner le moindre détail. Eh bien, c'est ce qu'a fait Proust : il développait chaque détail, puis les détails du détail... Ce qui l'amène à une très intéressante réflexion, très peu de notre temps : pourquoi ce luxe de détails, alors qu'il ne rapporte rien ? Et si nous naissions avec, en nous, des impératifs altruistes venus d'on ne sait où ? 

Proust semble avoir été un homme de son temps. La culture était la principale occupation de la très haute société. L'artiste était un héros, probablement l'équivalent d'une rock star, actuellement. Le grand artiste se devait d'être un grand innovateur. Il n'y avait pas de plus grand titre qu'amateur d'art. Et l'amateur était celui qui décelait les nouveaux talents avant tout le monde. Cela donnait lieu à des joutes entre beaux esprits.

L'intérêt de ce livre ne vient peut être pas des tableaux, mais des textes qui les accompagne. Proust n'a probablement pas tant été un grand esthète qu'un artiste exceptionnel. Un artiste de la perfection du détail. 

mardi 25 mai 2021

Gouvernement d'élite

Il y a un paradoxe concernant le gouvernement. D'un côté on entend (un institut de sondage) qu'il n'est pas sérieusement remis en cause. D'un autre il est dit qu'il va sévèrement perdre les régionales (comme s'il pouvait en être autrement, compte-tenu de son absence d'implantation locale), et que ce sera le signal de l'hallali pour M.Macron. 

Qu'en est-il ? On lit que lui et son équipe représentent la fameuse "élite" si décriée. Ce sont à la fois les causes et les gagnants de la grande transformation du monde, qui a fait tant de perdants. Explication du rejet ? Mais, d'un autre côté, il semble surtout mécontenter les états majors de droite et de gauche. N'a-t-il pas frustré bien des ambitions ? Les "dégagés" ne rêvent-ils pas de prendre leur revanche, quoi qu'il en coûte au pays ? 

Tout cela est extrêmement mystérieux. Qu'est-ce que cela peut donner ? Quelqu'un peut-il battre M.Macron au premier tour ? Et si cette personne est à gauche, ou a droite, n'a-t-elle pas beaucoup plus de chances de perdre contre Mme Le Pen que lui ? Ceux qu'ils frustrent peuvent-ils le faire perdre au second tour ? Comment pourra-t-il se maintenir avec un parti aussi faible en talents et en légitimité ? Aura-t-il une majorité à l'assemblée ? Nos partis politiques "les plus bêtes du monde", et qui ne représentent plus personne (sinon l'ambition de leurs dirigeants), pourraient-ils se transformer, gagner en QI, et adopter des stratégies de coalition ?... 

Rien ne va plus ? Moment de changement passionnant à observer. Si ses enjeux n'étaient pas aussi grands...

Le paradoxe de La Boétie

J'entendais Marc Ferro dire que, en URSS, la terreur n'avait pas commencé en haut de la société, mais en bas. Pourquoi le petit n'est-il pas solidaire avec le petit ? se demandait déjà la Boétie. 

Peut-être que tout est une question de circonstances. Le petit qui est dans une grande organisation devient à la fois puissant et irresponsable (car anonyme). En outre, une personne qui est en situation de puissance par rapport à une autre, à un moment, ne pense pas que ce ne sera pas toujours le cas.

Mystérieux et inquiétant. 

lundi 24 mai 2021

Le coronavirus et le changement

L'épidémie de coronavirus est l'histoire d'un changement mondial. Par essais et erreurs, l'humanité a cherché à s'adapter. Le processus que nous avons suivi ressemble à la théorie du "dégel" de Kurt Lewin. Celle-ci dit que nos comportements sont pilotés par des règles inconscientes. Le changement se produit lorsque ces comportements deviennent manifestement inefficaces. On ne peut pas continuer comme si de rien n'était. Alors, il y a une remise en cause, un "dégel", des règles inconscientes. Il s'ensuit une phase d'expérimentation. Puis, petit à petit, si la situation se calme, les nouvelles règles qui ont semblé réussir sont "congelées". Par ailleurs, il semble que le dégel ne soit pas aléatoire. Il commence par les règles les plus superficielles. Moins l'expérimentation réussit et plus se dégèlent les règles fondamentales et anciennes. 

Théorie et pratique

Que s'est-il passé ? On a eu la phase de négation, la phase confinement, par imitation de ce qui avait été fait lors d'épidémies asiatiques, la phase couvre feu, le déconfinement-progressif-alors-que-les-experts-sont-contre, le gel hydro alcoolique partout, le masque (qui-semble-donner-de-bons-résultats-sans-que-l'on-sache-vraiment-pourquoi), les experts über alles, puis les experts ridiculisés, le professeur Raoult, les vaccins, les anti vaccins, le vaccin OGM, le vaccin thrombose, eh puis zut : je veux sortir quoi qu'il en coûte, et tout cela dans un mouvement mondial remarquablement uniforme, mais sans aucune coordination centrale, les organes prévus à cet effet ayant subi le sort des experts. 

Surtout, nous avons vécu un changement idéologique majeur. De Reagan à Roosevelt ? Après un demi siècle libéral, de marché en libre concurrence, et de "supply chain" triomphante, nous sommes devenus quelque-chose comme nationaux-socialistes. Et voilà, peut-être, un enseignement de systémique que n'avait pas vu Kurt Lewin : les règles ne changent pas au petit bonheur, elles semblent obéir à un "principe" ("l'esprit des lois" de Montesquieu), elles ont une sorte de dénominateur commun. Un changement est avant tout un changement de principe. 

On s'inquiète désormais de "souveraineté". Et on ne parle plus que de "fonds de solidarité". Les entreprises ont été tenues à bouts de bras pour leur éviter une faillite. La population a non seulement découvert le travail à distance, mais aussi le chômage partiel. L'inefficacité de la "bureaucratie libérale" qu'était devenu l'hôpital (et qu'est l'Etat en général) a crevé les yeux. 

Prévoir est difficile, particulièrement l'avenir...

Que va-t-il rester de tout cela ? Un changement de notre inconscient qui se transmettra de génération en génération, dit Kurt Lewin. La structuration en blocs régionaux amorcée il y a une décennie s'est renforcée. Peut être aussi un changement dans l'organisation du travail, et des voyages (en particulier d'affaire), du tourisme, de l'occupation du territoire... Probablement un souci permanent de la pandémie, la recherche inquiète de facteurs annonciateurs, et lors de leur apparition, le retour quasi réflexe de ce que nous avons connu : confinement, masques, etc. 

Bien sûr, tout n'est pas encore joué, le congélateur n'est pas rempli. Beaucoup de choses dépendront certainement de la phase dans laquelle nous entrons : la relance. Tout changement est un bouleversement. Notre pays peut-il en pâtir ? En profiter ?... Et si l'on cherchait a attaquer les épidémies à leur cause ? Voilà qui, quasi certainement, enfoncerait le dernier clou du cercueil du "laisser-faire" de notre demi-siècle libéral. 

En tout cas, notre comportement collectif, mondial, a changé. Il est désormais dirigé par de nouvelles règles. Il est "organisé" différemment. Et c'est là la définition de changement qui intéresse ce blog : un changement de comportement collectif. 

Mérite et devoir

On s'interroge aujourd'hui beaucoup sur le "mérite". La critique de "l'élite", qui bat son plein, révèle qu'elle estime qu'elle a du "mérite", pour avoir réussi des études difficiles. En échange de ses mérites, elle a des "droits". Ce que l'on dit moins, mais ce qui est totalement logique, est qu'elle considérait le reste de la population comme "paresseuse". Elle avait donc, tout de même, un devoir, qui était de forcer ces paresseux à se mettre au travail, en leur coupant les aides qui leur permettaient de rester oisifs. (Enquête.) 

La panne de l'économie s'expliquait peut-être ainsi : ces gens ne voulaient pas "traverser la rue" pour aller chercher un travail, dégradant car correspondant à leur mérite réel, jusque-là surestimé par des gouvernements paternalistes. Retour à la réalité, fin de la récréation. Pour l'économiste Thorsten Veblen, les riches étaient la "classe oisive". Pour ces nouveaux riches, la classe oisive était celle des pauvres. 

Il y a eu un temps, que l'on raille aujourd'hui, où "l'homme blanc" avait des "devoirs". Parvenir au sommet de la société (et de l'humanité en ce qui concerne "l'homme blanc") s'accompagnait d'obligations sociales. On parlait aussi de "pauvres méritants". Les électeurs de M.Trump ont préféré cette élite ancienne à la nouvelle. 

Comme quoi le conditionnement social joue un rôle énorme dans notre façon de voir le monde. Ce qui est d'autant plus paradoxal que l'on a vécu un demi siècle d'individualisme effréné, durant lequel on a nié l'existence même de la société !

dimanche 23 mai 2021

Dégel et conduite du changement ?

Comment arriver à faire coopérer des concurrents, qui auraient tout intérêt à coopérer ? C'est la question que doit résoudre, presque quotidiennement, F.Becquelin. (Article.)

Son expérience semble illustrer la théorie du changement comme "dégel" - de K.Lewin. Dans son rôle de dirigeant d'un groupement d'entreprises, il doit aller au devant des désirs de ses adhérents. En effet, les entreprises perçoivent la nécessité d'une coopération, mais, étant concurrentes, elles ne peuvent pas faire le premier pas. C'est à lui de deviner qu'il doit les mettre autour d'une table et leur présenter le problème qu'elles ont à résoudre collectivement. 

On ne joue pas avec l'extrêmisme

Donald Trump ne semble pas vouloir rentrer dans sa boîte. El il conserve énormément de partisans. Il a révélé que la population américaine pouvait être prise d'une haine irrationnelle, qui ne se calme pas facilement. (On dit même que le Parti Républicain devient fasciste.) Heureusement, l'Amérique est un pays riche et puissant. On peut imaginer qu'à coups de milliers de milliards la prospérité reviendra et que les rancoeurs s'éclipseront. 

Mais c'est aussi une leçon. En particulier pour les stratèges politiques. On ne peut pas jouer avec l'extrémisme. Car, le propre de l'extrémisme est l'irrationalité. Il déclenche chez l'homme des forces destructrices insoupçonnables en temps normal. En fait, il se nourrit de la crise, il la provoque. 

samedi 22 mai 2021

Enseigner la réalité

Une particularité de la France est que la communauté enseignante possède, collectivement, une culture dans laquelle l'entreprise n'a pas de place, ou, peut-être, plutôt, elle a la place qu'elle occupait dans la pensée marxiste du 19ème siècle. A un temps où il n'est question que d'économie, et où notre économie est faible, n'est-ce pas un sérieux handicap, pour notre pays et ses citoyens ?

Ne serait-il pas important que l'Education nationale réexamine le "récit" qu'elle fait de l'entreprise et de l'économie ? Peut être pas en prenant le contre-pied de ce qu'elle dit aujourd'hui, mais, simplement, en regardant la réalité en face ? 

Comme souvent, chez nous, une association a pris l'initiative. Elle cherche, simplement, à faire découvrir à l'enseignant ce qu'est une entreprise. (Article.)

Contes cruels


Villiers de l'Isle-Adam appartenait au groupe des Baudelaire, Huysmans et autres Flaubert. Un rentier en manque de rentes. Un nobliau qui se croyait descendre de grands seigneurs. Un contempteur de la bourgeoisie, qui aurait aimé mener grand train, mais, qui, n'en ayant pas les moyens, en voulait au monde entier. 

Tout cela fait qu'avec beaucoup de talent, on peut écrire un livre dont le seul intérêt est le titre. Il est de peu d'originalité : on y retrouve tout ce qui était à la mode à l'époque. Par exemple la dernière nouvelle est un récit biblique, débordant d'un vocabulaire incompréhensible, qui semble une copie d'Hérodias de Flaubert. Pour le reste, il s'agit de, fort bêtes, règlements de comptes avec la bourgeoisie et le progrès, un massacre entre propriétaires m'a fait penser à Brassens, et, par contraste, d'histoires d'êtres nobles et purs, sans goût et sans saveur et étrangement ridicules. 

vendredi 21 mai 2021

Suicide : Durkheim et l'amour

Mourir d'aimer ? France Culture rappelait une affaire célèbre. En 68, une enseignante a une aventure avec un élève. Les parents de l'élève la poursuivent en justice pour "détournement de mineur" (apparemment, ils veulent avant tout retrouver leur enfant qui a fuit leur domicile). Un premier procès se solde par une peine légère. Mais il y a appel. Elle se suicide la veille du second procès. Cette affaire a fait l'objet d'un film. 

Je me suis demandé si elle illustrait les théories de Durkheim sur le suicide. Théories issues d'analyses statistiques. Si je comprends bien ses thèses, la société joue un rôle dans le suicide de deux façons : 

  • position de l'individu par rapport à la société, soit trop à la marge, soit trop lié à elle, 
  • action régulatrice de la société défectueuse (ou "anomie" : absence de règles). 

Il y avait probablement de cela dans ce cas. En effet, l'enseignante écrit, avant de se suicider, qu'elle est "perdue", elle ne comprend pas ce qui lui arrive. 

  • Elle même est pleine de contradictions : c'est une mère exceptionnellement rigoureuse pour ses enfants, mais une amie pour ses élèves. De plus, elle est décrite à la fois comme provocante et doutant d'elle-même. 
  • Quant à la société, elle est, probablement, entre deux eaux. Après le tout est permis de 68, c'est le retour de l'ordre. L'appel aurait pu être un signal envoyé aux enseignants : ne suivez pas cet exemple. (Appel auquel notre société souscrirait probablement, si l'on en juge par l'importance qu'elle donne aux affaires de moeurs impliquant des mineurs.)

Intelligence et mathématiques

Le hasard m'a amené à regarder la fiche wikepedia d'un criminel, qui a terrorisé l'Amérique, à coups de colis piégés, durant plusieurs décennies. On apprend qu'il a un QI exceptionnel (167), et qu'il a été un mathématicien hors pair. Mais il semble n'avoir jamais réussi à s'adapter à la société. 

Son comportement m'a fait penser à celui d'Alexandre Grothendieck, un mathématicien admiré, et qui, lui aussi, ne semblait pas très bien comprendre la société. Et même paraître particulièrement idiot lorsqu'il exprimait une opinion qui ne concernait pas les mathématiques.

Qu'est-ce qu'être intelligent ? Est-ce comprendre ce que personne ne comprend, mais ne pas comprendre ce que tout le monde comprend ? 

Je me souviens avoir disserté sur la question, dans une sorte de prémisse du "grand oral", en seconde. Alors, j'étais parti de l'idée que l'intelligence était la capacité à comprendre (ce qui est la définition du dictionnaire). Il me semble avoir dit que j'eusse préféré qu'intelligence soit entendue comme capacité à décider, correctement. 

En tout cas, j'avais tenu trente minute sur le sujet, sans que mon professeur ne pense à me rappeler que l'exercice ne devait durer que dix minutes. 

En tout cas, comme pour le terme "mérite", on voit ici le danger de la dérive des mots. Certains mots acquièrent une connotation favorable, puis, ils dérivent jusqu'à faire porter cette connotation à une caractéristique qui ne la mérite pas. Voilà qui explique pourquoi Confucius accordait de l'importance au sens des mots, et que l'on ferait peut-être bien de suivre son exemple ? 

jeudi 20 mai 2021

Marc Ferro et la vérité

Cette semaine, France culture rediffusait une émission d'entretiens avec Marc Ferro. J'ai compris que sa vie a été consacrée à comparer ce que disent l'ensemble des témoignages dont on dispose avec ce qu'affirme la "doxa" officielle.  

Et en ce qui concerne les sujets qu'il a étudiés (l'URSS ou le nazisme) ou même qu'il a vécus (la résistance, la colonisation), il y a des contradictions extrêmement surprenantes. Par exemple, on apprend que les résistants de l'intérieur, qui semblent avoir eu beaucoup de courage, étaient vus par une grande partie de la population comme des terroristes, et méprisés par le général de Gaulle. Ce qui faisait que longtemps ils ont tu leurs actions.

Dommage qu'il n'ait pas fait école.

C'est la société qui fait Shakespeare

Maurice Pialat se demandait pourquoi il n'y avait plus de Shakespeare. 

Il me semble que c'est la société qui fait, en très grande partie, le Shakespeare. Elle fait aussi la "chanson française" des années 50, ou l'éditeur de logiciel américain. Le talent de Shakespeare, par ailleurs lui-même façonné par la société, est d'avoir les bonnes compétences au bon moment, de même que la bonne vague demande un bon surfeur au bon endroit. 

Et quand, il n'y a plus de vague, le surfeur ne sert plus à rien. C'est ce qui est arrivé à Jacques Brel et à ses collègues, dans les années 70. Panne d'inspiration.

mercredi 19 mai 2021

La gauche et l'Allemagne

On parle beaucoup de l'incapacité de la gauche à s'unir. Mais on ne s'interroge pas sur la cause de cette désunion. 

Je me demande si, pour la comprendre, il ne faut pas regarder vers l'Allemagne. L'Allemagne est un pays de coalitions. Cela signifie que l'on y adopte des compromis. Or, il me semble que ceux-ci ne proviennent pas d'un calcul, mais résultent plutôt de la conviction que l'autre n'a peut-être pas totalement tort. 

Les groupements d'entreprises semblent obéir à un phénomène similaire. Celles-ci ne se regroupent pas tant parce qu'elles ont beaucoup à y gagner que parce qu'elles sentent qu'elles partagent quelque-chose de fondamental avec leurs concurrents. 

Le respect mutuel serait-il la condition nécessaire de toute union solide ?

Mérite et promotion

Lorsque j'étudiais à l'INSEAD, on me demandait de lire des études qui expliquaient ce qu'était un "bon dirigeant". Curieusement, je ne crois jamais avoir rencontré de dirigeant qui réponde à ces critères. 

L'explication pourrait être que le pouvoir ne va pas au mérite, ce que ces études décrivaient, mais à celui qui sait le prendre. Comme en politique, il faut savoir naviguer dans "l'appareil du parti". Cette navigation peut d'ailleurs prendre des aspects surprenants. Dans le roman I Claudius, on voit Claude parvenir à devenir empereur en faisant croire qu'il est un imbécile, qu'il n'a aucun mérite. C'est probablement ce qui est arrivé à MM.Hollande et Biden : ils ont obtenu le pouvoir, parce que les autres combattants s'étaient éliminés les uns les autres, et qu'ils ne semblaient présenter aucun risque, qu'ils n'avaient apparemment aucun mérite. 

Dans cette histoire, il y a un imbécile : moi. Car, je me rends compte que, moi, j'ai cru au mérite et à sa reconnaissance par la société. Et que je ne fais que prendre conscience, aujourd'hui, que je suis hors jeu. Je pense que cela m'avait été inculqué par la société de mon temps. Mine de rien, elle devait tout de même fonctionner au mérite... 

mardi 18 mai 2021

Fish love

Nous aimons au sens "aimer le poisson", dit un rabbin. Une amie m'a envoyé sa vidéo ("fish love"), peut-être parce que je dis quelque-chose de semblable : moi, je parle de poulet. 

Mais la comparaison s'arrête là. Le dit rabbin pense en effet que tout amour est égoïste et calcul. C'est pourquoi, paradoxalement, on peut aimer donner : j'aime dans l'autre ce que je lui ai donné. Pour ma part, il me semble qu'une grande partie de ce que l'on associe au mot "amour" est irrationnel. Nous sommes pris d'élans que nous ne contrôlons pas. Paradoxalement ces élans peuvent être de mauvais calculs, mais il nous arrive de ne pas regretter nos échecs... 

La diversion, l'art du changement ?

"J'ay autrefoy esté emploié à consoler une dame vraiement affligée (...) on y procède mal quand on s'oppose à cette passion, car l'opposition les pique et les engage plus avant à la tristesse (...) au contraire, doncq, il faut ayder d'arrivée et favoriser leur plaincte, et en tesmoigner quelque approbation et excuse. par cette intelligence vous gaignez credit à passer outre, et, d'une facile et insensible inclination, vous vous coulez aus discours plus fermes et propres à leur guérison."

Montaigne recommande de "faire diversion". Il n'a guère été entendu par les champions modernes des idées "socialement avancées", qui ont choisi de combattre le mal par le mal, et de nous "faire honte" pour nos valeurs rétrogrades, et de nous condamner au silence. 

Au lieu d'affronter le courant, il faut plutôt chercher à l'utiliser ? Tout l'art du changement ?

lundi 17 mai 2021

Génération amnésie

J'ai perdu la dernière démonstration mathématique dont j'étais fier dans un changement de version logicielle. J'avais bêtement oublié de l'imprimer. Paradoxalement, à l'heure du numérique, nous sommes menacés d'amnésie. Jadis on écrivait dans la pierre, puis sur le papier. La correspondance, d'ailleurs, est souvent la partie la plus importante du matériau utilisé par ceux qui étudient la pensée d'un grand homme. Le numérique est le support le moins fiable qui soit.

Comment conserver la mémoire de l'humanité ? D'autant que, comme le montre la question de la correspondance, cela a quelque-chose d'aléatoire ? Une question que l'on devrait considérer sérieusement ? 

France : rien ne va plus ?

Les dernières élections de Madrid ont produit le chaos dans la politique espagnole. Un article se conclut ainsi :

"Mais le scrutin de Madrid offre deux autres leçons qui, au-delà de l’Espagne, valent pour l’Europe, à commencer peut-être par la France. La première est que la volatilité de l’électorat est extrême. Les électeurs ne sont ni fidèles, ni constants. Ils votent avec leurs tripes. Leur vote est tout autant un vote de colère que d’adhésion. Sa cristallisation est donc extrêmement difficile à cerner. (...) La seconde est que dans les crises politiques qui ont recomposé les électorats et les structures politiques, l’avantage ne va pas aux formations nouvelles. (...) D’autres pays ont connu des recompositions électorales spectaculaires (l’Italie avec le mouvement 5 étoiles et la Ligue de Salvini, la France d’Emmanuel Macron…). L’Espagne, je crois, n’a pas vocation à être un cas particulier et nous indique des tendances partagées de la vie électorale européenne."

C'est une conclusion extrêmement inquiétante, car quelque peu myope. En effet, en France, ce qui est fort, ce ne sont pas les partis politiques traditionnels, mais le Front National. 

Délation


Quelle ne fut pas ma surprise lorsque j'ai reçu trois messages comme celui-ci. Mes publications sont jugées illégales. Avec menace de fermeture définitive d'un blog qui représente 12 ans de travail. 

Cela m'est apparu comme tellement ridicule que j'ai cru à une opération de piratage. Jusqu'à ce que je reçoive trois autres messages me disant que mes billets avaient été jugés dignes d'être remis à leur place. 

Mais, surtout, il y a la phrase "nous a été signalé". Voilà qui aurait fait frémir mon père. Voici la belle société, le paradis numérique que l'on nous a promis : une société de la délation et de la censure, dans laquelle des anonymes, devenus justiciers par le simple fait qu'ils sont salariés d'une multinationale étrangère, décident de votre sort ? 

dimanche 16 mai 2021

Marge et classe moyenne

Les Grecs semblent avoir eu la plus grande peur de l'hybris. La démesure. C'est la maladie des classes extrêmes de la société. De ce fait, ils en étaient arrivés à louer le "juste milieu", et la classe moyenne. (Voir  article de Jacqueline de Romilly et sa citation d'introduction : "II existe en effet trois catégories de citoyens (μερίδες) : les riches, citoyens inutiles, qui brûlent toujours d'acquérir plus ; les non-possédants, privés des moyens de vivre, qui sont dangereux ; car, faisant la part large à la jalousie, ils lancent des dards redoutables contre les possédants, séduits qu'ils sont par la parole de mauvais chefs. Des trois groupes (μοιρών), celui du milieu fait le salut des cités, en préservant le système que l'État s'est donné".)

Pendant longtemps, nous avons fait le contraire. Il n'était question que de "marge". Elle était, semble-t-il, de deux natures. D'un côté, le "premier de cordée", le "créateur de valeur", de l'autre, l'opprimé. Il y a actuellement apparemment un retour de balancier. On s'intéresse, à nouveau, à la classe moyenne, qui, entre temps, a beaucoup souffert. 

Pour les Saint Simoniens, l'aristocratie, les rentiers, étaient des parasites. La marge exploiterait-elle la classe moyenne ? Ou, au contraire, son utilité serait-elle d'apporter un changement à une classe moyenne naturellement conservatrice ? Mais, lorsqu'on lit les travaux de Ph.Kotter sur le changement, on voit qu'il tend à partir plutôt de l'intérieur de l'organisation...

Mystérieux. Les Grecs semblaient penser qu'il y avait une bonne constitution de la société, qui était un mélange de différents régimes. Peut-être, effectivement, que tout est une question de mesure. Il faut de tout pour faire un monde. Le danger est de croire avoir la bonne solution ?

Le paradoxe du libéralisme (fin)

Conclusion de mon bilan du libéralisme (deux précédents billets). Donc 1) il a créé une bureaucratie dysfonctionnelle, 2) tout en ponctionnant l'économie, maintenant exsangue. Il a donc fait exactement le contraire de ce qu'il disait être sa mission : tout économie, zéro bureaucratie. 

Ceci n'a rien de surprenant. Depuis longtemps, on sait que l'idéologie produit le contraire de ses intentions. C'est le phénomène que la systémique appelle "énantiodromie". Les Essais de Montaigne sont pleins d'illustrations de ce phénomène. L'homme révolté, de Camus, en est un autre exemple. Le terme lui même remonte à Héraclite. Les Grecs déjà avaient remarqué les dangers de l'hybris, et l'importance de chercher le "juste milieu". 

Seulement, pourquoi persévérons-nous dans l'erreur ? Comment se fait-il que l'humanité soit saisie d'accès de bêtise collective ? 

Déconfinement durable

Paradoxe. Le gouvernement fait comme si l'épidémie était finie. Alors que les riches Indiens fuient leur épidémie nationale pour s'installer en Angleterre, et que l'on parle d'une épidémie en Tunisie. Comment la France peut-elle se protéger de pays avec qui elle a des contacts aussi étroits ? 

Il faut savoir parfois soulever les soupapes quitte à prendre des risques ? Si l'épidémie repart, au moins, l'opinion ne critiquera pas le gouvernement de l'avoir tenu inutilement confinée ? De l'art du bon usage du principe de précaution ?

samedi 15 mai 2021

Qu'est-ce que la souveraineté ?

On parle de souveraineté. Qu'entend-on par là ? Comme souvent tout est une question de définition. 

On entend parfois que souveraineté signifie autarcie. Etre auto suffisant. Mais peut-on être auto suffisant dans un monde qui change ? Les Chinois furent auto-suffisants, ainsi que les Indiens d'Amériques. Mais comme ils ne participaient pas au changement mondial, ils ont été balayés. 

La souveraineté c'est donc, probablement, pouvoir dévaler le torrent du changement, sans boire la tasse. C'est à dire tenir sa place dans l'écosystème des nations. J'ai besoin de l'autre, et il a besoin de moi, c'est pour cela qu'il ne peut pas me couper les vivres. Peut-être mieux, toujours dans la logique d'écosystème naturel, c'est pouvoir remplacer un maillon défaillant par le reste de l'écosystème ?

Le paradoxe du libéralisme (suite)

Dans un précédent billet, je disais que le libéralisme avait créé la bureaucratie. 

En fait, cela s'est accompagné d'un second phénomène extrêmement curieux. Il aurait commencé avec le premier des libéraux : le président Giscard d'Estaing. Le pouvoir, peut être pour s'acquérir des électeurs, a distribué des subsides très largement. Nouveau paradoxe : il en prélevait les moyens sur l'entreprise. 

Comment expliquer qu'un gouvernement, libéral de droite la moitié du temps, affaiblisse l'économie ? 

Peut-être se disait-il que c'était la "mauvaise économie", une économie d'entreprises industrielles qui ne paie pas de mine ? En cela la gauche et la droite étaient probablement d'accord. Grâce aux fonds de capital risque une "nouvelle économie" numérique et propre, respectueuse de valeurs "socialement avancées", allait naître. 

Et le peuple ? Soit la nouvelle économie, une fois émergée allait le nourrir, comme a fini par le faire toute innovation, soit, ce ne serait pas le cas, mais au moins, il n'aurait rien vu venir et n'aurait pu s'opposer au changement ? Une fois fini, on "sifflerait la fin de la récréation", comme je l'ai souvent entendu dire ? Arbeit macht frei ?

vendredi 14 mai 2021

Défaillances du marché

L'économiste parle de "défaillance du marché", comme si c'était une exception. Mais c'est la règle ! Le marché n'est qu'erreurs. Et c'est pour cela que certains l'aiment tant. Parce qu'ils sont passés maîtres dans l'art d'en tirer parti. 

D'où viennent ces défaillances ? De l'irrationalité de la société. Vous pouvez lui faire prendre des vessies pour des lanternes. Et c'est pourquoi l'art du management est un art de la tchatche, du boniment. M.Trump, maintenant honni, en est l'exemple même. Il a longtemps été le plus admiré des plus admirés. Jack Welsh est un Donald Trump qui a bien tourné. 

Une source première de défaillance est la loi sociale. Ce qui est conçu pour faire le bien de la société est un coût par le marché. Par exemple l'Etat. En conséquence, les virtuoses du marché cherchent à nous faire voir la situation avec leurs yeux, de façon à ce que nous démontions ce qui est bon (mais qui est généralement difficile à comprendre) pour nous à leur profit. C'est ce que l'on nomme "libéralisation". Interdit d'interdire. S'il n'y avait pas de feu rouge, ça accélérerait la circulation...

Une autre grande source de défaillance est l'incapacité pour le marché d'évaluer ce qui se passe à l'intérieur d'une entreprise. Tesla est une société relativement ordinaire, qui n'a probablement pas le dixième de la compétence d'un constructeur ordinaire, y compris dans son domaine. Or, elle vaut dix fois le constructeur ordinaire, pour le marché. (Ce qui, au passage, est une prédiction auto-réalisatrice : grâce à sa survalorisation, AOL a acquis Time Warner, en 2001.) Cette défaillance a peut être bien conduit au phénomène "start up" : un savoir-faire valant plus "dehors" que "dedans". Seulement, le savoir-faire se développe mieux dedans que dehors... Car, il a besoin, pour émerger, de moyens et de compétences complémentaires. On les trouve dans une entreprise, pas dans un marché dont la règle est l'affrontement et pas la coopération ! D'où les fonds d'investissement, incubateurs et accélérateurs, qui cherchent à isoler la start up des lois du marché...

Les Lumières espéraient que la raison dominerait un jour le monde. Elle semble encore loin du but...

Le paradoxe du libéralisme

Pendant des années, on nous a parlé de libéralisme. Et même de néolibéralisme. On s'attendait à un grand massacre de la "bureaucratie", donc de l'Etat. Beaucoup le craignaient. Or, nous n'avons jamais eu autant de bureaucratie et d'Etat ! Que s'est-il passé ?

L'impeccable exercice de la logique du libéralisme. Le libéralisme, c'est la concurrence. On a donc organisé la concurrence. Dans le secteur de la recherche, par exemple, on se finance désormais par appel à projet. Donc le chercheur ne cherche plus, il rédige des dossiers. La plupart du temps pour rien : il gagnerait dans 12% des cas, d'après ce que j'ai entendu. Mais il faut aussi toute une administration pour choisir les projets, brasser du dossier et l'évaluer. (Et quid de l'évaluation par une administration d'une idée de génie, qui renverse les idées reçues ?) Mieux : le critère de mesure du scientifique est sa publication, une publication qui doit être citée le plus souvent possible. Donc, comme le professeur Raoult, il a monté tout un dispositif pour écrire des articles. Et, comme les chercheurs italiens, il est devenu un champion de la citation des copains. Idem dans l'hôpital, où le personnel utile est moins nombreux que le personnel administratif, et dans l'enseignement, etc. 

Le libéralisme a créé la bureaucratie ! 

jeudi 13 mai 2021

Heureux les simples d'esprit

Ce qui est frappant est la bêtise de la personne "admirable", qu'elle soit grand patron de la Silicon Valley, ou grand "expert", ou même ministre. La pauvreté de sa pensée est affligeante. 

L'explication vient peut être du champ de bataille. Pour être un héros, il faut courir sus à la mitraille. Et, pour cela, il faut être un simple d'esprit. Bien sûr, beaucoup périssent. Mais c'est le seul moyen de réussir. Le sage, qui aura évité les coups, lui, n'a aucune chance. C'est aussi le principe de la loterie nationale. 

Nous vivons à l'heure du marché. Et le marché, c'est la guerre, et le héros. 

Montaigne, prix Nobel ?

"Combien de fois embrouillons nous nostre esprit de cholere ou de tristesse par telles ombres et nous inserons en des passions fantastiques qui nous alterent et l'ame et le corps !" dit Montaigne. 

Les Essais rappellent sans cesse l'irrationalité humaine. C'est aussi ce que disent les stoïciens et les épicuriens grecs et romains, dont le gros de l'enseignement consiste à combattre les errements de l'esprit, en particulier des terreurs sans cause. 

Et pourtant, une grande partie de la "science" économique est construite sur l'hypothèse selon laquelle l'homme est parfaitement rationnel. Et pourtant cette "science" vaut de prix Nobel, et les économistes guident le monde. 

Comment peut-on appeler "science" quelque-chose qui ne tient compte ni de l'observation quotidienne, ni de la science ? 

Système immunitaire mondial

Un rapport commandé par l'OMS semble dire qu'il aurait été possible d'empêcher l'épidémie. Pour cela, il aurait fallu réagir beaucoup plus rapidement qu'on ne l'a fait, en Chine d'abord, en Occident, ensuite. (Article du FT.) Type de conclusion qu'il est toujours plus facile de faire après que pendant. 

La solution proposée consiste à retirer la lutte contre les épidémies au marché et aux gouvernements, pour la confier à un organisme mondial. La santé étant considérée comme un "bien public mondial". 

La question qui demeure est comment gérer un tel "bien public", sans que quelque intérêt particulier ne s'en empare ? D'ailleurs, ses raisons peuvent-elles s'imposer à tous sans discussion ?...

(Travaux d'Elinor Ostrom.)

mercredi 12 mai 2021

Napoléon ou la triste et édifiante histoire de la France ?

On parle beaucoup de Napoléon ces derniers temps. 

Napoléon, c'est une longue tradition française : défaite et ridicule. L'histoire de notre pays semble être faite de flambées d'enthousiasme qui se terminent en désastre. Hybris et Nemesis, sans catharsis. Beaucoup d'énergie pour rien. Il y a eu les guerres italiennes de François Ier et consorts, Louis XIV qui affronte l'Europe, et ruine le pays. Ses successeurs creusent le déficit, pour la gloire. Puis Napoléon I et III. Une guerre de 14, où l'on évite le désastre d'un cheveu, et la déroute honteuse de 40. Et je passe les éternelles guerres de religion, qui semblent se poursuivre aujourd'hui (entre "intellectuels" et "traditionalistes") et qui vident le pays de sa substance et de sa force. Franchement, pas de quoi se vanter. Même pour un coq.

Et si la France avait été l'agent du changement ? Napoléon a changé l'Europe. Il y a diffusé nos idées. 

Au fond, la France ressemble à une étoile. Elle émet ses lumières, son énergie, alors qu'elle même devient un trou noir. 

Peut-être serait-il temps de changer ?

Le préfet, hirondelle de la réforme de l'Etat ?

On annonce la suppression du corps des préfets. Un article décode la nouvelle.

"Chaque corps instaure une hiérarchie sociale en son sein. Les préfets forment une barrière douanière qui protège de l’extérieur." Les corps administratifs sont des corporations, ils ont leur vie propre, c'est cela qui est en jeu. Apparemment il est maintenant prévu qu'une carrière administrative se fasse en passant de corps en corps. Les préfets ne sont qu'un exemple parmi d'autres. 

Va-t-on utiliser une technique que l'on attribuait aux Japonais, dans ma jeunesse : ils faisaient passer un employé par toutes les fonctions de l'entreprise, de façon à ce qu'il la connaisse et acquiert le sens de l'équipe ? 

Si c'est le cas, l'Etat pourrait donner des leçons à l'entreprise... 

(En tout cas, je constate que la politique du gouvernement est toujours aussi illisible pour le commun des mortels.)

Mérite et dignité

On entend beaucoup parler du professeur Michael Sandel, de Harvard. Il réfléchit à un sujet du moment : le mérite (interview). 

Ce spécialiste de la justice a mis un nom sur un changement hautement injuste : la méritocratie. Comme souvent le terme "mérite" cache un sens très particulier. Le mérite c'est le diplôme. Ce n'est pas le mérite de "l'ordre du mérite", ou même du "mérite agricole". D'ailleurs, ce n'est pas n'importe quel diplôme : c'est le diplôme des "meilleures écoles". Quelqu'un comme M.Biden, le président américain, qui n'a pas reçu leur formation, n'a pas de mérite...

Ce qui produit "mécaniquement" une énorme inégalité. Puisque, par définition, l'immense masse de la société n'aura jamais de mérite. Voilà qui va bien au delà de la façon actuelle de traiter le problème en France, puisqu'il est vu seulement sous l'angle de la reproduction des élites. (Seuls les enfants issus de certains milieux privilégiés pouvant faire les "meilleures études" donc avoir du mérite, installons des quotas et le problème est réglé.)

Comment résoudre la question ? En remplaçant mérite du diplôme par dignité du travail. Il n'y a pas de sot métier disait-on dans ma jeunesse. Paradoxalement, dignité était peut-être ce que l'on entendait par "mérite", en ces temps éloignés. 

mardi 11 mai 2021

Panne d'idées

Jacques Attali : pourquoi la gauche est-elle en piteux état ? C'était, à peu près, la question posée ce matin par France Culture. (Emission.)

Réponse : panne d'idées. On les a toutes épuisées en 81. 

Ces idées, si j'ai bien compris, sont de l'ordre des "droits". Il propose, après le droit de la femme, celui de l'enfant. 

Il y a des attentats, des gilets jaunes, des guerres dans tous les sens, des populations qui crèvent de faim, la Chine veut envahir Taiwan, le monde est ravagé par des épidémies, dues à l'hybris humain... et la gauche ne voit pas où trouver des idées ? 

Hier, on disait à M.Mitterrand qu'il n'avait pas le "monopole du coeur". N'est-ce pas là le drame de la gauche ? Elle n'a plus de coeur. Elle n'est plus qu'une tête (et pas bien brillante ?). 

(Au passage : J.Attali explique pourquoi la gauche historique n'aimait pas le passé de F.Mitterrand. Terrible réquisitoire !)

Marketing artificiel

Je lisais quelque part que l'Intelligence Artificielle avait fait faire une découverte capitale aux sciences bibliques. Ce qui m'a semblé ridicule, au temps du coronavirus. 

Le marketing de l'IA semble avoir utilisé un biais cognitif humain : notre tendance à généraliser des faits marquants. On nous a dit que l'IA battait les champions d'échec et de go, qu'elle démontrait que Shakespeare n'était pas Shakespeare, etc. Tout cela pour nous faire croire que l'IA pouvait tout faire. (Les pro Brexit utilisaient les mêmes techniques : ils faisaient courir le bruit que l'UE réglementait les cornemuses...)

Mais le miracle, c'est maintenant qu'il faut le faire ! 

C'est ce qu'un de mes collègues appelait une "crash stratégie". Va-t-on lire demain : "le coronavirus démontre que l'IA est du vent" ? 

Chine - USA : des choix douloureux en perspective ?

Il va falloir choisir entre la Chine et les USA. Des deux côtés, on se prépare à une guerre froide. Un cours du Collège de France rappelait que cela allait nous obliger à quelques choix difficiles. (Et que se passerait-il si la Chine attaquait Taiwan, ce qu'elle compte bien faire ?)

En effet, si notre coeur va vers les USA, et sa démocratie, plutôt que vers le Parti Communiste chinois, il en est tout différemment des intérêts de nos multinationales. (Et de l'Allemagne.)

Quant aux USA, c'est devenu une "puissance du Pacifique", qui se fiche de l'Europe, comme de sa première chaussette.  

L'Europe saura-t-elle devenir adulte et indépendante ? Voilà un changement qui s'annonce douloureux. En tout cas, elle devrait commencer à s'y préparer. 

lundi 10 mai 2021

Risible gauche ?

L'élection de François Mitterrand fut-elle le chant du cygne de la gauche ? Aujourd'hui, elle est en miettes, constatait la revue de presse de France Culture, ce matin. 

Cela m'a fait penser à François Hollande et Ségolène Royal. Ils ont beaucoup de choses en commun. D'abord d'avoir eu plusieurs enfants ensemble, et d'avoir grandi dans l'ombre du président Mitterrand. Ensuite d'avoir été deux des champions du PS. Ils l'ont représenté à deux élections présidentielles. Finalement, qu'une forme très particulière de ridicule leur soit attaché. Quelque-chose qui paraît très rare. Pour trouver mieux, il faut peut-être remonter à Valéry Giscard d'Estaing. 

Faut-il en appeler à Bergson ? Le rire, dit-il, est un signal d'alarme. Est risible ce qui est "contre nature". La gauche, emmenée par son couple vedette, aurait-elle décollé de la réalité ? Elle sera à nouveau puissance politique le jour où elle ne sera plus risible ? 

Modéliser c'est comprendre

D'où vient la pluie ? La chaleur fait s'évaporer l'eau des mers, qui s'élève et se condense en nuages, nuages qui, dans des conditions favorables, se transforment en liquide - pluie. Liquide qui va rejoindre les mers... 

Voilà ce que l'on nous dit. Mais est-ce suffisant ? En fait, comme toutes les explications, il ne s'agit que d'une modélisation. Et la vertu de la modélisation est d'abord de faire taire l'enfant, qui demande dis, pourquoi ?, par KO. Accessoirement, c'est de permettre de faire des prévisions, au moins approximatives. 

Une grave erreur serait de prendre la modélisation pour la réalité. Le propre de celle-ci étant d'être imprévisible ?

dimanche 9 mai 2021

Inégalité des sexes

Etrangement les histoires de Jane Austen démentent ce que l'on dit aujourd'hui de l'esclavage de la femme dans le passé. Dans ses livres, les êtres de raison sont les femmes. L'homme a quelque-chose d'un objet, il doit, avant tout, être riche et beau. Il doit se montrer digne de celle qu'il convoite. Ce qui signifie un terrible parcours du combattant (une Odyssée dans le cas de Persuasion), qui doit l'amener à prouver ses vertus, en faisant de grands sacrifices, notamment en renonçant à bien des préjugés. 

Tout n'est peut être pas le mieux dans le meilleur des mondes, mais l'homme a le talent de s'adapter aux circonstances dans lesquelles il se trouve ?

Persuasion


Roman posthume de Jane Austen. Ce qui explique peut-être qu'il soit inférieur à ses autres oeuvres. 

Ce que j'en retiens surtout, c'est l'introduction que fait son frère. Son style est insupportable de prétention à bien écrire. Il révèle l'extraordinaire talent de Jane Austen : une étonnante facilité à exprimer ses idées. L'histoire s'enchaîne avec une parfaite fluidité. Les sentiments les plus complexes sont dits en quelques mots. C'est une Madame de Sévigné anglaise. 

Quant à l'histoire, une fois de plus, c'est celle d'une cendrillon, qui se distingue par sa liberté et son intelligence. Elle est mal aimée de ceux de ses parents qui comptent dans la famille, mais elle a tout de même une marraine fée. Une fois de plus les conventions sociales l'ont éloignée de celui qu'elle aime, et qui l'aime, et il va falloir faire preuve de trésors d'ingéniosité pour parvenir à une heureuse fin. 

C'est l'occasion d'entrer dans le milieu des officiers de marine, car le Roméo de cette histoire est un capitaine. La fin des guerres napoléoniennes les a renvoyés à terre, fort riches. En effet, la marine anglaise, c'est l'esprit des corsaires. Les prises rapportent beaucoup. Le marin anglais ne court pas après la gloire, mais l'argent. Mais avec l'esprit du boutiquier : il fait bien son travail. Comme le rock aujourd'hui, la marine fournit un formidable ascenseur social. Ce qui n'est pas sans agacer les nobliaux. 

On y voit aussi comment Jane Austen considérait le couple idéal. C'est celui d'un amiral. Sa femme l'a accompagné sur toutes les mers, on ne voit jamais l'un sans l'autre et c'est elle qui conduit leur voiture...

Génocide au Rwanda

Le gouvernement français serait-il responsable d'un génocide au Rwanda ? On l'entend dire. Un rapport a été produit sur le sujet. Question mystérieuse pour bien des citoyens, dont je suis, qui ne savaient pas que la France s'était mêlée des affaires de ce pays. Et même qu'il existait. 

Rafaëlle Maison étudie ce rapport pour La vie des idées. Si je comprends bien, cette histoire ressemble beaucoup à ce que Hannah Arendt a nommé "banalité du mal". Le gouvernement de l'époque semble avoir cru que soutenir un gouvernement génocidaire était un moindre mal. Peut-être, plus grave, il aurait été convaincu que l'ethnie en cours d'élimination avait des raisons de l'être. Pour agir, il a utilisé des circuits parallèles, au sein même de l'appareil d'Etat français, pourtant remarquablement dénué d'esprit critique. Si l'on applique la jurisprudence internationale, il paraît clairement qu'il serait jugé coupable. 

nous avons depuis quelques années une jurisprudence sur la complicité de génocide, qui émane des deux Tribunaux pénaux internationaux créés par l’ONU en 1993 (ex-Yougoslavie) puis 1994 (Rwanda – TPIR), jugeant des individus, ainsi que de la Cour internationale de justice, jugeant des États. Sans entrer dans le détail, on peut certainement affirmer que tant les individus que les États peuvent être, en droit international, complices de génocide. La complicité n’exige pas que soit présente l’intention propre aux auteurs du génocide de détruire le groupe ciblé. Il suffit d’établir que le complice a apporté une aide directe et substantielle aux auteurs de crimes en ayant conscience de leur intention de détruire ce groupe. Il n’est donc pas nécessaire de trouver l’expression d’une « volonté de s’associer à l’entreprise génocidaire » pour établir la complicité.

Ce qui est en cause, dans cette affaire, ce n'est pas "la France", mais les usages de ceux qui nous gouvernent. 

Hier, le Rwanda, et demain ? Savoir qu'ils ne sont pas au dessus des lois est probablement le meilleur moyen de leur éviter de persévérer. Dans ce cas, la justice devrait être l'outil du changement. Un changement qui serait certainement bien plus dans l'intérêt de la France que dans celui du Rwanda. 

samedi 8 mai 2021

L'irréductible Breton et la délocalisation


Dans les années 90 l'idée se répand selon laquelle il faut concevoir en France, et fabriquer à l'étranger. 

En Bretagne, une poignée d'irréductibles décide de résister. Ils créent "Produit en Bretagne". Aujourd'hui, c'est 472 entrerprises. Chaque année elles sont vingt de plus. Et c'est un gros succès : non seulement le Breton achète breton, mais c'est aussi le cas du reste du pays ! 

Et voilà le "pacte" qui est à l'origine de cette histoire :

"Cela s’est accompagné d’une sorte d’accord moral. Le distributeur s’engageait à donner plus de place aux produits bretons que ne l’aurait voulu une logique à court terme, à les mettre en avant, et à en faire des promotions régulières. Le consommateur devait, à qualité et prix égaux, acheter breton. L’entreprise devait en donner aux clients pour leur argent, il fallait qu’ils puissent dire : « on est fiers, ce sont de bons produits »". (La suite de l'histoire.)

Qu'est-ce que lire ?

Il y a fort longtemps, un dirigeant client, que j'agaçais un peu, m'a dit : au fond, votre force, c'est de savoir écrire. A quoi, je lui ai répondu : non, c'est savoir lire. 

Que signifie "savoir lire" ? Je pense que c'est, d'abord, se demander comment appliquer ce qu'on lit. Que puis-je tirer d'Hannah Arendt, de Montaigne ou d'Aristote ? En quoi peuvent-ils me servir ? Que disent-ils, pour commencer, qui contredit ce que je croyais ? Ou, au contraire, ne me rappellent-ils pas une expérience que j'avais oubliée ?... 

Je constate que très peu de gens ont l'idée de faire cet effort. Pourtant, il n'est pas bien sorcier.

vendredi 7 mai 2021

Chaos en Inde

Inquiétante Inde, si j'en crois l'émission de Christine Okrent, de la semaine dernière. 

La nouvelle "vague" de coronavirus s'est déclarée sans crier gare. Le gouvernement, par ailleurs vraiment très populiste, a choisi de l'ignorer superbement. Dans tous les cas, l'économie qui avait déjà beaucoup souffert, pourrait se porter bien plus mal. Ce qui est terrible pour un pays où vivent autant de pauvres... 

Plus ou moins, tout le monde espère que l'épidémie va finir par s'arrêter, et que tout va recommencer comme avant. Mais, pourtant, l'équilibre mondial paraît extrêmement précaire. Il semble bien que l'on ait dansé sans s'en rendre compte sur un volcan, épidémique et populiste, entre autres. Et qu'il serait bien de ne pas recommencer... 

Pourquoi croissance n'est pas français

Le patron de PME ne peut pas grandir, parce qu'il se trouve dans un "puits". Il est dans une "zone de confort" inconfortable, mais toute autre situation est inacceptable. Voilà ce que je retiens du rapport sur le syndrome de Peter Pan, déjà cité :

Pour l'entrepreneur, l'entreprise est à la fois le moyen de se libérer, et une expression de son ego. L'entreprise, c'est lui. Avec ses forces, et ses limites d'autodidacte. D'autant qu'il doit lutter avec de formidables handicaps. Il se retrouve dans un univers extraordinairement toxique. Car les valeurs de notre société sont exceptionnellement hostiles à l'entreprise. Il doit sans arrêt faire avec. Ce qui est épuisant, et terriblement injuste. Et cela produit un comportement totalement irrationnel. L'entreprise n'est pas guidée par ses intérêts économiques, mais par le conflit entre le "narcissisme" du dirigeant et les injonctions, anti économiques, de la société. Sa survie est donc un miracle. On ne peut pas lui demander, en plus, de grossir, et de créer des emplois ! D'ailleurs, le dirigeant ne rêve que de réussir pour pouvoir abandonner son affaire et consacrer sa vie au bénévolat ! 

Le dirigeant étant incompris, il cherche du réconfort parmi ses pairs, dans des clubs de dirigeants locaux. Il peut même tant s'y investir qu'il en oublie les intérêts de ses affaires ! Nouveau paradoxe : ces clubs ont un rôle opposé à leur mission !

Ce qui ressort des entretiens (mais pas de leur synthèse) est que l'entrepreneur est devenu entrepreneur parce que, bien souvent, la société ne lui réservait qu'une place indigne de son potentiel. Il est tentant de penser que notre société est profondément injuste, et que l'entrepreneur, nouveau paradoxe, ressemble au syndicaliste. Le système ne lui donne pas la place que devrait lui valoir son talent. Il recherche un ascenseur social alternatif. Mais, seul contre tous et lourdement handicapé par un système qui ne lui a donné aucun bagage, il ne peut aller très loin. 

La rigidité d'une société qui prétend nous assigner une place, dès la naissance, est source de conflits, et du fameux "désengagement" ? 

jeudi 6 mai 2021

Nettoyer la mer

Apparemment, le plastic qui envahit la mer viendrait d'un pour cent des rivières mondiales (un millier). En nettoyant rivière par rivière, on peut donc espérer faire beaucoup de bien à l'océan. 


Un exemple à suivre ?

Les vertus de la liberté

Joe Biden se révèle. Il renverse un demi siècle de politique américaine, et fait passer pour un benêt le si génial B. Obama et son QI hors norme. 

C'est étonnant quand on y songe. Pendant 8 ans, lorsqu'il était vice président, il a joué un rôle de potiche.

Drame de l'organisation hiérarchique ? Elle fait de nous un rouage, elle se prive de notre talent ? Et si, entre l'anarchisme et la bureaucratie, il y avait un juste milieu optimal ?

mercredi 5 mai 2021

Art dévoyé ?

Il semble qu'il n'y ait plus d'art. Pourquoi ? J'aurais bien du mal à définir ce qu'est l'art. Mais ce qui ne me plaît pas semble avoir deux causes : le marché et l'intellectuel. 

Plus précisément ? Par "marché", il faut entendre une sorte de "populisme" : c'est considérer l'être humain comme une "masse animale", ramenée à des instincts aussi bas que possible. Par intellectuel, il faut entendre quelque-chose comme ce qu'est devenu le mot "élite" dans l'esprit de beaucoup de gens : un dévoiement ridicule du sens original du mot. 

Voilà qui rappelle Aristote et son "juste milieu". Et si "l'art" était, comme chez lui, le "juste milieu" entre les deux dérives extrêmes que sont "le marché" et "l'intellectuel" ? On ne serait probablement pas beaucoup plus avancé. 

Peter Pan entrepreneur français

3 futurs ingénieurs du corps des mines rédigent un rapport (en 2009). Qui est le dirigeant de PME ? se demandent-ils.

Leur réponse, à l'issue d'un texte à l'image de leur héros : Peter Pan. Un être virevoltant et plein de ressources, qui ne veut pas devenir adulte. Cela explique pourquoi, quoi que fasse le gouvernement, la PME ne change pas : 
Le personnage de Peter Pan (...) fermement opposé à l’âge adulte, qui va dans l’ouvrage d’origine jusqu’à exécuter ceux de sa troupe qui grandissent, a donné son nom à un syndrome médical. (...) Dans quelle mesure le dirigeant est-il atteint ? C’est que ce puits du réconfort que le patron rejoint, cette « zone de confort » que nous évoquions dans le chapitre précédent, n’est pas, en général, une zone de croissance en France. (...) Nous avons parlé de recherche de valorisation en dehors de l’entreprise, d’instrumentalisation de l’entreprise par narcissisme, de forces de rappel sociétales, et plus généralement d’irrationalité économique engendrée par le paradoxe altruisme-narcissisme. Nous avons aussi décrit longuement la prévalence de la volonté d’indépendance, d’omnipotence parfois, et ses risques, en particulier sur le plan de la vision stratégique. Nous avons enfin relevé le phénomène de protection du patrimoine au détriment de l’innovation. Tous ces éléments correspondent à des forces de rappel qui éloignent le chef d’entreprise de la croissance et édulcorent ses ambitions initiales.

Plus original, peut-être, est ce qu'ils disent de son antithèse, le dirigeant allemand : "Et si le patron de PME allemand était un nouveau « Wendy », un enfant qui ne s’est pas perdu dans les mirages du pays imaginaire et qui a réussi à grandir, contrairement à Peter Pan ?"

Le Français résiste au vaccin

 


Anne-Marie Moulin et Gaëtan Thomas, pour La vie des idées, analysent notre résistance à la vaccination. Conclusion de leur article :

"À travers le refus ou la temporisation à propos de tel ou tel vaccin, les citoyens manifestent leur besoin irrépressible d’explications. Prendre l’hésitation vaccinale comme la simple résultante d’un illettrisme médical et de l’empire des réseaux sociaux sur des populations passives pose problème. Car cette hésitation vaccinale peut être, dans beaucoup de cas, la preuve d’une attitude critique vis-à-vis des pouvoirs publics, et correspond à une attente, une demande légitime, à laquelle il faut effectivement prêter une attention respectueuse."

mardi 4 mai 2021

La relance des sous-préfets

Les sous-préfets à la relance : qui sont-ils ? (Référence.)

  • Ingénieurs : 10. Ponts : 6 ; Armement : 2 ; Mines : 1 ; Territorial : 1.
  • Santé : 6. Santé vétérinaire : 4 ; Directeur hôpital : 1 ; Directeur établissement sanitaire : 1.
  • Administrateurs : 6. Territorial : 3 ; Civils : 2 ; Inspecteur de l’administration : 1.
  • Sous préfets : 4.
  • Autres corps administration : 4. Conseil d’Etat : 2 ; Cour des comptes : 1 ; Conseil régional des comptes : 1.
  • NSP : 1
D'après leurs grades ils sont souvent jeunes, voire très jeunes. 

Mission ? "Dans le contexte économique lié à la pandémie de covid-19, le sous-préfet à la relance est chargé d'animer et d'accompagner le déploiement des mesures du plan de relance dans le département et de renforcer l'État déconcentré au plus près des élus, des entreprises et des citoyens." (Préfet de la Nièvre)

Pour un entrepreneur : "ce sont les premiers à se confronter à la réalité des relations de l'entreprise et de l'économie avec l'administration. Personne ne s'est confronté à cela, jusqu'ici. Il faut que ça bouge, il faut des résultats, il faut nettoyer, c'est le peuple (par l'entreprise) qui va leur dire ce qu'ils doivent faire, pas le contraire. Ce qu'il faut faire, c'est l'un avec l'autre et pas l'un contre l'autre." 

Autrement dit, ce pourraient être ce que la théorie du changement appelle des "hybrides" : l'amorce de la génération de fonctionnaires dont nous avons besoin ?

Soumission

J'ai toujours tort. Je pensais qu'avec la disparition de M.Trump, le Monde et France Culture parleraient moins des USA. Eh bien non. Je me demande parfois s'ils ne s'intéressent pas plus à l'Amérique qu'à nous. Rien ne les enflamme plus que le meurtre d'un Américain noir par un policier blanc, ou que la politique de M.Biden. Un chanteur ou un écrivain ne peuvent qu'être américains. D'ailleurs nos chanteurs chantent en américain...

A un moment Michel Houellebecq avait envisagé une soumission à l'Islam. Mais est-ce d'Islam qu'il s'agit ? La "soft power" américaine n'aurait-elle pas conduit nos intellectuels dirigeants à faire allégeance aux USA ? Le général de Gaulle se retourne dans sa tombe ?

(Un sujet pour anthropologues : l'élite dirigeante ne se convertit-elle pas très vite à l'influence extérieure ? - cf. ce que dit Marc Bloch de la conquête de la France par les Francs, ou la colonisation récente. Aurait-elle des valeurs plus fluctuantes que celles du peuple ? Peut-être une plus grande tendance à l'individualisme ?... à creuser.)

lundi 3 mai 2021

Chaos en Afrique

La mort d'Idriss Deby nous rappelle à quel point l'armée française est encore présente dans nos anciennes colonies (en fait, elle n'en est jamais partie), et à quel point le renversement de M. Kadhafi a été un facteur de chaos, régional et mondial. (Emission de France Culture.)

Leçon ? Le printemps arabe, poussé par "l'élite" occidentale a été, décidément, un désastre. Mais, surtout, le post colonialisme a été un changement raté. Et si l'on se demandait sérieusement de quoi les Etats africains auraient besoin pour vivre en paix sans nos armées ?

L'explication en héritage

Une des raisons qui fait que "l'élite" est tournée en dérision est que, elle qui prétend avoir un QI exceptionnel, n'a pas compris la chose la plus simple qui soit : ce que la société attendait d'elle.

C'est un problème dont parle Bergson, notamment. Il explique qu'étant un enfant remuant, son dentiste lui donnait des bonbons pour le tenir en place. Ce qui peut très bien être interprété par le fait que le dentiste est un tortionnaire, qui paie pour exercer son vice. C'est d'ailleurs peut être comme cela que les colonisés ont interprété les soins que leur apportaient les médecins des colonisateurs. 

Autrement dit, rien ne va de soi, tout est une question d'interprétation. Et il y a des facteurs puissants (intérêt personnel, par exemple) pour qu'une interprétation soit logique, mais fausse. Voilà pourquoi il est important d'expliquer à ses héritiers clairement ce que l'on veut leur transmettre... 

dimanche 2 mai 2021

Le sablier et le nain de jardin

Changement aux USA. Aussi bien à gauche qu'à droite, il n'y en a plus que pour le "col bleu" et pour la classe moyenne. 

Hier, les prospectivistes parlaient de "sablier". La révolution "digitale" créait une société sans classe moyenne. Quelques esprits supérieurs en haut, une masse non qualifiée en bas. Mais, "digital" ou pas, il semble que la classe moyenne ait fait l'objet de la haine des nouvelles élites, celle des diplômés, qui y voyaient, comme Sartre probablement, les valeurs de la bourgeoisie honnie, et de son mauvais goût. Leur programme : le génocide du nain de jardin. 

« la notion de « classes moyennes », qui devait prendre tant d'importance chez Aristote, ne correspondait pas à une réalité sociale ou économique de la cité grecque, coupée entre riches et pauvres : elle prit corps comme une espérance pour échapper aux maux des guerres civiles. » dit J.de Romilly.

L'élection de M.Trump, le Brexit, la menace RN toujours présente, le djihadisme... voilà qui a fini par nous faire croire qu'il y avait quelque chose de juste dans la pensée grecque ? 

Plutôt nain de jardin que mort ? 

Comment apprend-on ?

L'éducation nationale a la folie de l'abstraction. Mais est-ce par l'abstraction que l'on apprend ? Même les concours portant sur des sujets les plus abstraits se préparent par "bachotage", c'est à dire en s'entraînant avec des exercices concrets, qui semblent plaire au futur examinateur. Contrairement à l'Intelligence Artificielle, l'homme a la capacité de tirer toute une théorie d'un ou deux cas particuliers. Mais l'envers ne fonctionne pas. 

J'ai certes connu des as de l'abstraction, mais, à chaque fois que leur abstraction rencontrait la réalité, j'ai constaté qu'elle leur faisait dire des absurdités. La théorie qu'ils utilisaient était bien applicable, seulement ils ne l'avaient pas comprise. Ils arrivaient à faire un bruit convaincant, qui leur avait valu d'excellentes notes, c'est tout. 

Et si, au lieu de gâcher des esprits, on regardait la réalité en face ? 

Héritage

"La Cour constitutionnelle allemande a jugé jeudi que la loi de 2019 sur la protection du climat, qui prévoit des réductions d'émissions au cours de la prochaine décennie, était en partie inconstitutionnelle car elle transférait le fardeau des réductions les plus douloureuses sur les générations futures. Ce qui viole leurs droits constitutionnels, a jugé le tribunal, car «des mesures suffisantes pour de nouvelles réductions des émissions après 2031 font défaut»" lisait-on dans la lettre de Politico.eu de vendredi dernier.

Du coup, l'Allemagne se demande comment faire vite et bien ces réductions. 

Voilà un précédent dont nous devrions nous inspirer ? Peut-être serait-il temps, dans notre politique de "RSE" nationale, de tenir compte de nos descendants ? 

samedi 1 mai 2021

Vous avez dit putsch ?

Cette semaine, on a parlé d'un appel au "putsch" de quelques généraux retraités. Etrange histoire. 

Curieusement, lorsque l'on parle de FN, on pense que ses sympathisants sont des pauvres. Or, une partie de la haute société lui apporte son soutien, sans le dire, bien sûr, aussi fort que les généraux. Pourquoi le phénomène n'est-il pas mieux étudié ? 

Quant aux généraux, ils doivent faire sourire les pays étrangers. Avec une telle armée, ils n'ont rien à craindre. Ils nous rappellent, d'ailleurs, une étrange tradition française. Pour la gauche ou la droite, l'ennemi est à l'intérieur. D'où une succession de défaites humiliantes. Sans que l'on soit, apparemment, capable d'en tirer aucune leçon. 

Comment en imposer ?

Montaigne vivait en un temps de guerre de religions et de dissolution sociale. Il raconte qu'un jour, il est attaqué et détroussé. Mais, étrangement, le chef de la bande qui l'a malmené revient vers lui et s'excuse, et lui rend ce qu'il lui a pris. 

Montaigne pense que cela tient à son attitude. Le bandit a vu que Montaigne était un homme droit. 

Une certaine attitude pourrait-elle "en imposer" ? Il m'est arrivé plusieurs fois de faire des choses curieuses, et de ne pas en subir les conséquences. Par exemple, pendant les "classes" de mon service militaire, j'étais incapable de suivre les ordres, que je trouvais ridicules. Parfois, c'était moi qui les donnait. Comme lors d'une marche pendant laquelle ma section s'était égarée. Le sergent, probablement fatigué, a voulu s'arrêter. J'ai refusé au motif que nous ne pourrions pas arriver avant la nuit. Il a obtempéré.

Je pourrais multiplier les exemples. A chaque fois j'étais persuadé d'avoir raison. Ce n'est, parfois, que 40 ans après, que j'ai compris ce que j'avais fait et ce qu'il aurait pu m'en coûter. 

Peut-être la société a-t-elle beaucoup de mal à résister à un véritable croyant ? "On n'a pas besoin de lumière, quand on est conduit par le Ciel." dit Molière.