samedi 21 novembre 2009

John Suart Mill, du gouvernement représentatif

Considerations on representative government, John Stuart Mill. Comment faire fonctionner la démocratie ? Un traité qui donne un zéro pointé à la nôtre.

Gouvernement représentatif
Qu’est-ce qu’un « gouvernement représentatif » ? C’est un mécanisme qui fait que la volonté du peuple, dans toute sa diversité, émerge, et que ce qu’elle implique est réalisé.

Représentatif et exécutif
Un tel comportement a deux composants, le corps représentatif (les élus), l’exécutif.
Le corps représentatif est là pour faire émerger la volonté du peuple, cette volonté est un objectif que le peuple désire atteindre. C’est à l’exécutif de trouver le moyen approprié pour le satisfaire. Le corps représentatif s’assure que l’exécutif est adapté à sa tâche, le nomme, le contrôle, fait connaître au peuple ce qu’il fait, et finalement lui donne ou non l’autorisation de mettre en œuvre ses plans. Par contre le corps représentatif ne s’occupe pas de mise en œuvre (y compris de la rédaction des lois), parce qu’il n’est pas compétent pour cela. Seul sait correctement mettre en oeuvre une décision un corps d’élite de bureaucrates spécialement formés et entraînés à leur tâche.

Construire un gouvernement représentatif
Pour établir un tel gouvernement, il faut un terrain favorable. Il faut que le peuple le veuille, qu’il soit prêt à appliquer ses lois. Il faut aussi un forum de débat et le moyen de mettre en œuvre ses décisions.
Ceci résulte de l’histoire, d’une évolution par étapes successives. Elle a d’abord acclimaté le peuple à la discipline nécessaire. C’est l’œuvre d’une dictature. (Avant d’être libre en société il faut avoir été esclave.) Progressivement elle se parfait jusqu'à devenir le lieu d'un vigoureux affrontement d’idées entre esprits libres et bien formés. C’est un monde d’individualistes dont le talent est mis au service de la communauté.
Et c’est ce que doit être le corps représentatif : le forum des idées du pays. Chacun doit y trouver un homme (pas forcément toujours le même) qui est sensible à et qui va représenter ses opinions, préoccupations, doléances du moment, et faire qu’elles sont entendues et prises en compte.
Ce corps doit être constitué de représentants de la majorité, des minorités, et d’individus exceptionnels qui ont démontré une capacité à penser remarquable. Aucun ne doit pouvoir dominer par son seul poids les autres. Le débat d'idées est obligatoire.

Juger un gouvernement représentatif
Le critère de jugement d’un gouvernement représentatif est donc le progrès qu’il a permis. Il doit amener son peuple à développer une capacité de jugement de plus en plus évoluée, à libérer de plus en plus sa pensée ; il doit utiliser de plus en plus efficacement les talents individuels pour faire le bien collectif ; surtout, il doit progresser dans la direction de la perfection la plus grande de son modèle de démocratie.

Les maux
Ce qu’il faut éviter est probablement tout aussi important que ce qu’il faut atteindre.
Le mal absolu du régime représentatif est la dictature d’une classe, de la majorité, qui la conduit à faire triompher ses intérêts les plus vils. L’antidote, c’est le débat, c’est la stimulation que produit la confrontation des idées. C’est pour cela qu’il est important que toute idée soit entendue.
Autre mal : excès de ses compétences par le corps représentatif. Il sait débattre, contrôler, critiquer, il ne sait ni mettre en œuvre ses décisions, ni concevoir des lois qui prennent en compte leurs conséquences, et qui s’inscrivent correctement dans les codes existants.

Solutions pratiques
La pensée de Mill est avant tout pratique, et pour nos critères actuels, politiquement incorrecte.
  • Il est contre un homme un vote. D’une certaine façon, il cherche à forcer le débat en évitant les majorités, en donnant le même poids à toutes les opinions. Il pense qu’alors il se trouvera des gens de bon sens dans chaque camp, qui feront basculer la décision du côté du bien commun. Si un tel débat est efficace, alors il en sortira une décision dont la mise en œuvre paraîtra évidente à tous.
  • Il est contre le vote à bulletin secret. Le vote est un acte social, chacun doit dire ce qu’il pense bien pour la société, il doit donc être capable de défendre son choix.
  • Il est contre une représentation locale. Il propose un mode de scrutin qui permettrait à chaque homme de voter pour plusieurs personnes. Il propose le mécanisme suivant. Chaque élu représente un nombre égal de voix. Une fois qu’il a atteint son quota, les voix qu’il a obtenues qui excèdent le quota vont vers leur second choix, etc. Ainsi, pense-t-il, des personnalités exceptionnelles, peu connues mais universellement respectées, pourraient être élues.
  • Chacun doit avoir le rôle qui correspond à ses forces. Le représentatif doit débattre, contrôler, critiquer ; l’exécutif doit mettre en œuvre ; le représentatif local, proche des problèmes de la population, doit les traiter, mais sous le contrôle et en appliquant les directives d’un corps représentatif central qui a un accès large au talent et à l’expérience, une grande ouverture d’esprit. De même ce corps doit être une sorte d’enseignant pour le peuple. Car, si l’exercice de la démocratie locale est la meilleure formation de la pensée individuelle, il ne peut se dérouler correctement spontanément.
  • Et nos représentants ? Ils doivent partager le petit nombre de nos valeurs fondatrices. Mais être avant tout des hommes exceptionnels, des hommes d’esprit indépendant et de sain jugement. Notre responsabilité sociale est d’élire de telles personnes. Qui sont-ils ? Les moins tentés par le pouvoir, ils y viennent par peur de la menace de l'incompétence.
  • Le premier magistrat ? Élu par le corps représentatif, ainsi il sera de meilleure qualité que s'il est le choix direct du peuple.
  • Une réflexion sur le fédéralisme, qui permet de profiter du talent de peuples qui ne sont pas prêts à se constituer en nations. Le modèle efficace serait celui de la Suisse et des USA. Le citoyen obéit à deux états. La pièce clé du dispositif est la Cour suprême. Elle construit ses lois à la fin d’un long processus qui a vu un différend partir de l’individu et faire l’objet d’un débat de plus en plus riche. Ce qui lui permet de décider en ayant tous les éléments en main.
  • Et les colonies ? Elles peuvent se justifier, si elles sont une dictature éclairée et durable qui amène des peuples manquant de rigueur à une étape supérieure de progrès.

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