HABIB, Laurent, La communication transformative, puf, 2010. Apparemment, un livre pour publicitaire sur la communication. En fait, étonnant bilan de l’évolution de notre société.
Le basculement d’un capitalisme entrepreneurial à un capitalisme financier a coïncidé avec une destruction de valeur systématique. Un nettoyage à sec, version solution finale. Tout y est passé. La valeur boursière, le travail – remplacé par le chômage, la légitimité de l’entreprise et de ses produits… Symbole le plus frappant de cette destruction : la fonction présidentielle.
Résultat : cynisme et méfiance.
La communication a été l’agent des basses œuvres du changement. Après guerre, elle faisait découvrir de nouveaux produits, montrait comment les utiliser. Puis elle a mis en relief ce qu’ils avaient d’unique ou de rare. Mais, progressivement, elle est devenue manipulation. Elle a parlé à l’émotion. Elle a exploité les mécanismes d’influence sociaux pour modifier nos comportements. Elle nous a dit ce qui était le bien et le mal. Elle a si bien réussi que nos gouvernants et dirigeants confondent maintenant communication et action.
Comment rompre ce cercle vicieux ? Gouvernants et dirigeants doivent proposer à la société, dans leur domaine de légitimité, un projet de transformation, à long terme. Répondre aux bouleversements sociaux au moyen de ce que le patrimoine de l’organisation a d’unique. Effet vertueux : notre adhésion à ce projet le fera profiter de notre enthousiasme de consommateur, d’électeur, mais aussi de contributeur.
Commentaire
Démonstration courte, simple, impeccable, agréablement écrite.
Retour aux livres de cours de la stratégie (la communication transformative c’est « strategy as stretch » d'Hamel et Prahalad), du marketing et de la gestion de marque (Kapferer). Pas de conduite du changement. Le changement des comportements organisationnels va-t-il se faire par miracle ?
D’ailleurs je ne crois pas que la communication transformationnelle soit bonne pour le publicitaire, comme le dit L.Habib. Si l’entreprise apporte quelque chose d’unique et d’important à la société, elle n’aura plus besoin d’une communication sophistiquée.
Surtout, la transformation qu’exige L.Habib n’est-elle que communication ? Ne demande-t-elle pas un changement d’attitude de nos dirigeants ? L.Habib les enjoint de nous dire où ils veulent nous emmener. Mais est-ce dans leur intérêt ? La destruction de valeur dont il parle tant n'a pas fait que des victimes…