Comment les Égyptiens voyaient-ils le changement ? Une question à
Nathalie Lienhard du département d’égyptologie de la Sorbonne.
Au fond, les Égyptiens anciens ont été heureux et n’ont pas eu d’histoire. Ils appartenaient à une société de type « hydraulique »
hiérarchisée et structurée en multiples métiers nécessaires pour
tirer au mieux parti des ressources du Nil. Le pharaon, représentant des dieux sur terre et garant de l'ordre établi, y
fait régner la stabilité. Les prêtres le représentent, à son tour. Le temps
s’y écoule de manière circulaire.
Fort de sa richesse, c’est un pays accueillant à l’étranger.
C’est aussi probablement, comme l’Égypte actuelle, un pays qui
n’est pas fataliste, ainsi qu’on le dit parfois, mais confiant. Si
quelque chose se produit, c’est que cela a une raison.
Mais c’est un monde qui craint le changement comme la peste. Car le
changement, c’est-à-dire le passage d’une dynastie à une autre,
produit le chaos. Brutalement, l’intérêt personnel domine
l’intérêt collectif. Plus personne n’est à sa place et plus rien
ne fonctionne.
Le dialogue du désespéré, un texte écrit par un noble lors
d’une transition entre dynasties, montre un tel changement,
écroulement de l’ordre social. Dans ces conditions, la seule issue
est la mort, qui est une seconde vie apparemment bien plus paisible que
la première.
Le déclin égyptien a peut-être été un long changement.
Progressivement l’ordre hiérarchique s’est dilué, le pouvoir
s’est démocratisé, les rites se sont complexifiés.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire