vendredi 13 juin 2008

Trophées Insead 2008 et staying power

J'assiste aux Trophées Insead. Une remarque m’a frappé. Échange entre Jean Burelle, président d’honneur de Plastic Omnium et président du MEDEF international, et Reinold Geiger, lauréat et P-DG de l’Occitane. Tous les deux ont traversé des moments difficiles dans leur expansion internationale, et tous les deux ont tenu bon face au doute de leurs collaborateurs, actionnaires… Jean Burelle en déduit que la « staying power » est une des vertus majeures de l’entrepreneur.

A-t-il raison ? Nous connaissons tous le contre exemple de dirigeants qui se sont enferrés dans l’erreur. Eux aussi avaient une grosse « staying power ». Mon expérience me dit cependant qu’il y a une différence entre ces deux cas :

  • Le premier est celui de l’entrepreneur. L’entrepreneur a généralement une vision claire de la fin qu’il poursuit (il sait qu’il veut s’implanter en Asie, par exemple), par contre cette fin justifie ses moyens : il n’a pas d’idée fixe de comment y arriver, il est prêt à faire feu de tout bois, il subit échec après échec sans jamais se décourager. Ce qui le fait réussir est sa « staying power », une détermination qui déplace les montagnes. Il n’écoute pas toujours ses conseillers, mais il écoute le marché.
  • Le second est souvent celui du dirigeant professionnel, « de droit divin ». Il a une confiance aveugle en sa raison. Il ne s’accroche pas à la fin mais aux moyens : il est certain qu’il sait comment faire. Lui n’écoute personne, et finit pas sombrer (alors que la stratégie qu’il suivait était la bonne). Un invité du Club Télécom de l’Insead disait ainsi d’un dirigeant alors très à la mode : « C’est un mage (…) dont le brillant sert à arrondir les angles d’une situation devenue catastrophique et qui, porté par des illuminations qui le font décoller du réel, conduit (son entreprise) à une folie meurtrière ».
Selon Joseph Schumpeter, l’entrepreneur est l’agent de la « destruction créatrice », l’innovation, moteur du capitalisme : l’innovation qu’il fait réussir transforme la société. L’entrepreneur est donc l’agent du changement par excellence, et d’un changement particulièrement difficile. Quelles conclusions peut-on en retirer en termes de conduite du changement ?
  1. L’agent du changement doit avoir une détermination indestructible.
  2. Il ne doit pas confondre fin et moyen : il est peut-être déterminé, mais il sait se remettre en cause, changer de fusil d’épaule.

Pour en savoir plus:

  • Joseph A. SCHUMPETER, Capitalism, Socialism, and Democracy, Harper Perennial, 3ème edition, 1962.

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