Depuis toujours, je pense que l’économie est une caricature de science, oeuvre de scientifiques ratés ; que le « marché » est le mal absolu, destructeur de tout ce qui est beau dans le monde, à commencer par la culture (au sens ethnologique du terme). Le désert culturel américain ne prouve-t-il pas mon propos ? Eh bien, à force d’écrire sur l’économie, et de démontrer qu’elle est ce que je pense, je comprends que j’ai tort.
Ma réflexion sur Google et la numérisation m’a fait prendre conscience de l’efficacité d’une entreprise déterminée. Enron ou Monsanto en sont deux autres exemples remarquables, mais Google peut produire un bien public, pas Monsanto ou Enron, c’est cela qui m’a converti.
Ce qui fait la force quasiment irrésistible d’un Google, d’un Enron ou d’un Monsanto, c’est l’absence totale de responsabilité : ces entreprises poursuivent avec une détermination monomaniaque leur objectif. C’est invraisemblablement efficace, à l’image du héros de films d’Hollywood qui vient à bout de tout.
Sumantra Ghoshal a parfaitement vu ce trait caractéristique de la société américaine, mais il n’en a pas compris l’utilité. Il a dit que l’économie et les sciences du management faisaient l’hypothèse implicite que l’homme était mauvais, et qu’il fallait le contrôler, d’où, par exemple, la théorie de l’agence en économie.
En fait, comme Adam Smith, l’Américain ne fait pas l’hypothèse que l’homme est mauvais, juste qu’il est irresponsable. Cependant, Adam Smith croyait que le marché s’autorégulerait (main invisible), l’Américain a compris que laissé à lui-même le marché ne produit pas que des Google, mais aussi des Monsanto et des Enron. Alors, il faut un contrôle. Il le croît du ressort des lois.
Au lieu de rejeter en bloc cette idéologie, comme le fait M.Ghoshal, il me semble qu’il faut y prendre ce qui est bon, et corriger ce qui ne va pas. Ce qui est bon est la formidable énergie de l’Américain, ce qui ne va pas c’est qu’on ne peut pas contrôler l’homme par des lois. Seul l’homme peut contrôler l’homme. Nous devons donc essayer de comprendre les lois du marché, come nous avons compris d’autres phénomènes naturels, afin de les utiliser pour le bien collectif.
Compléments :
- Sumantra GHOSHAL, Bad Management Theories Are Destroying Good Management Practices, Academy of Management Learning and Education, 2005, Volume 4, n°1.
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