Le gouvernement anglais s'interroge. Doit-il s'engager dans le projet Hinkley Point d'EPR, avec EDF et son associé chinois, CGN ? Deux raisons pour hésiter : peut-on se fier aux Chinois ? Le projet n'est-il pas trop rentable pour EDF ? Question qui surprendra, en France. On entend ici que l'EPR est une technique complexe. L'EPR finlandais aurait d'ailleurs provoqué la faillite d'AREVA. Même le directeur financier d'EDF a estimé que le projet est trop risqué. Il a démissionné.
Ce que les Anglais reprochent au projet, ce n'est pas sa rentabilité, mais le fait que le prix d'achat de la production de la centrale garanti à EDF est élevé. Quant à EDF, il annonce un taux de retour sur investissement (TRI) de 9%. Ces 9% représentent la rémunération théorique de son investissement. Cela paraît beaucoup.
Entre la théorie et la pratique, il y a un monde. Par exemple, la plupart des TRI que j'ai rencontrés dans l'automobile étaient de l'ordre de 15%. Et l'automobile, ce n'est pas le Pérou ! L'explication du problème, se trouve dans les chiffres. Il faut dix ans pour construire un EPR. Ensuite, il fonctionne 35 ans. L'investissement estimé est de 18md£ (21,5md€). Ce qu'il faut comparer avec la capitalisation d'EDF (19md€) et surtout ses dettes (37md€). Financer autant, avec de telles dettes, aussi longtemps, va coûter très, très, cher. (Car, comme l'explique le FT, la dette d'EDF deviendra "spéculative" (ou "junk" en anglais).) Le TRI ne mesure donc pas la rentabilité réelle du projet. C'est une astuce qui permet de forcer ses concepteurs à un ajustement réaliste des revenus et des risques (toujours sous-estimés), afin d'atteindre une sorte de minimum vital.
Mais sont-ce les bonnes questions ? L’État ne laissera pas EDF partir en faillite, on l'a vu avec France Télécom. Et l'Angleterre a besoin d'énergie. Alors, passe d'armes dans une négociation entre États ?
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