Dans un billet, je disais que l'on était passé de l'hypothesis driven au data driven. (et du français à l'anglais). Je développe, et m'interroge : révélateur d'un changement social ?...
Pour prévoir le résultat d'élections, les instituts de sondage partent d'une hypothèse : il y a dans la population e1 électeurs qui comptent voter pour le candidat c1, e2 électeurs qui comptent voter pour le candidat c2, etc. Ensuite, par un tirage aléatoire on estime ces valeurs. On applique pour cela la théorie des probabilités. Cela ressemble à : sachant qu'il y a b boules blanches et n boules noires dans un saladier, si je tire t boules, combien en trouverais-je de noires et de blanches ? Avant le "data driven", il y avait "l'hypothesis driven". Cela avait des conséquences :
Le cas des primaires des Républicains en montre une première. La population qui allait voter était inconnue. Du coup, les sondeurs savaient qui gagnerait si les adhérents républicains votaient (M.Sarkozy), ou si c'était le pays (M.Juppé), mais pas ce qui se passerait dans les conditions de la primaire. Mais surtout, on n'est plus dans le modèle des boules de couleur. Nous sommes devenus des caméléons, nos couleurs changent sans cesse, y compris celle de l’abstention. Les électeurs sont, d'une certaine façon, clientélistes. Désormais, ce qu'il faut comprendre, ce sont les "couleurs émergentes", ce qu'il y a de nouveau.
Les démocrates furent victimes de leurs hypothèses. Ils pensaient que certains électeurs ne voteraient jamais pour M.Trump, et que l'électeur voulait un président compétent. Or, si l'on regarde les sondages d'après vote, on voit deux bizarreries. Même l'électeur qui a voté pour M.Trump ne le considère par compétent. Ce qu'il voulait, c'était du changement. Par ailleurs, contrairement aux élections précédentes, le mécontentement avait cru dans le camp des votants du parti au pouvoir plutôt que dans celui de ceux de l'opposition.
De la certitude au doute et du sondeur à l'exhausteur
Le "data driven" n'est qu'un effet d'un changement social. Notre monde est devenu incertain. Nous entrons dans l'ère du doute ! Avant de décider, il faut étudier la question, avec humilité. Ce qui va demander, pour commencer, une révision déchirante aux instituts de sondage. En effet, par définition même, le "sondage", l'échantillonnage, ne fonctionne plus. Il faut collecter une information exhaustive et systémique. Le sondeur doit devenir exhausteur.
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