J'entendais une fille d'immigré maghrébin dire qu'elle avait découvert tardivement que son grand-père avait été le disciple favori d'un sage soufi, et que son père avait appliqué cette sagesse dans sa vie. Ce qui lui a donné une grande force. Cette histoire est celle de la France. Les gens qui ont fait la France d'après guerre, immigrés inclus, étaient dépositaires de richesses culturelles. Dans leur communauté ils étaient des gens qui comptaient. Une élite avancée. Mais ils ont cru que la France avait mieux à proposer. Ils ont accepté une vie difficile pour que leurs enfants profitent du miracle du progrès.
Cette histoire a été réécrite. On en a fait des exploités, des pauvres types. Et ceux qui ont tenu ce discours, lorsqu'ils se sont trouvés au pouvoir, ont cru qu'il était une politique. Ils n'ont pas vu qu'ils avaient une responsabilité. Celle de faire que l'édifice qu'avaient construit leurs parents puisse respecter sa raison d'être : créer les conditions qui permettrait à l'homme de ne plus être tenté par la folie. Le plein emploi était la clé de voute de l'édifice.
Du coup, tous ces sacrifices n'ont servi à rien. On n'est pas en 33, et M.Trump n'est pas Hitler. Mais la façon dont ils ont pris le pouvoir a de curieuses similitudes.
(Note technique. Le dispositif qui permettait la prospérité d'après guerre, ou l'équilibre de la zone euro, n'est pas statique, comme le croient les économistes, mais dynamique. C'est l'effort de tous qui empêche la barbarie. Pas une prétendue "loi naturelle". Il fallait réinventer Bretton Woods, pas le détruire.)
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