Le philosophe Schelling observait que l'évolution détruisait ce qu'elle avait créé. Ce qui m'a fait penser que Schumpeter, qui a inventé l'expression "destruction créatrice", n'est sans doute pas à l'origine du concept.
Hegel, adversaire et quasi exact contemporain de Schelling, a lui aussi travaillé sur la mécanique du changement, qu'il voyait comme une "dialectique". Thèse, antithèse, synthèse. (Ce qui ne signifie pas forcément destruction.) La pensée allemande, au moins à partir du 18ème siècle semble avoir été obsédée par le changement. Un changement violent. Je me demande si elle n'a pas produit deux nihilismes modernes : le marxisme, basé sur la dialectique hégélienne, plus tard stalinisme, et le nazisme (et la pensée de Heidegger).
La "destruction créatrice" sert aujourd'hui à justifier le changement pour le changement. Ce n'est pas la seule théorie du changement. Aristote parlait du changement comme de la réalisation d'un potentiel que l'on a en nous, par exemple. Observons-nous : l'enfant devient il un homme par auto destruction ? De même, la philosophie chinoise, qui est toute changement, ne parle pas de destruction. Et y a-t-il eu extinction d'espèces ou adaptation ? Le dinosaure, par exemple, a donné naissance à l'oiseau. Idem pour Proudhon, Bergson, la systémique, la théorie de la complexité : le changement est émergence et réglage.
S'il y a quelqu'un qui produit l'extinction totale, c'est l'homme, semble-t-il. Et si la "destruction créatrice", était une innovation de l'espèce humaine ?
(Joseph Schumpeter est né en 1883 en actuelle République tchèque, il a été un proche de sociologue tels que Max Weber. Bien qu'ayant enseigné aux USA, c'est un continuateur de la pensée allemande.)
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