dimanche 28 avril 2019

L'âge de la colère

Une idée apparue il y a trois siècles a changé le monde. Elle explique ce qui nous arrive... Ce livre est le produit type de l'élite intellectuelle anglo-saxonne, à son meilleur. Une dissertation sur l'évolution de l'humanité. Une analyse des travaux des plus grands penseurs mondiaux. Il est écrit par un Indien, qui n'a étudié qu'en Inde, mais qui s'est marié à la haute société anglaise (il est apparenté à  David Cameron). On est au coeur du sujet.

Cette "idée" est la pensée des Lumières. Elle dit à l'individu qu'il n'est pas soumis à la nature et aux usages, il ne tient qu'à lui de réaliser ses rêves, d'enrichissement matériel, les plus fous. Séduit, il détruit l'ordre ancien, mais il se trouve gros Jean comme devant. D'où "ressentiment" qui finit en "nihilisme", nettoyage par le vide. Au fur et à mesure que cette idée se répand au travers du monde, les mêmes phénomènes se reproduisent, de la France à l'Allemagne, puis à la Russie et à l'Italie et enfin à l'Afrique et à l'Asie. Enthousiasme, révolution, chaos.

Tout commence avec Voltaire et Rousseau. Voltaire est un grand bourgeois qui veut être noble à la place des nobles. Il met son esprit au service de ses intérêts. Ses idées, venues d'Angleterre, sont le moyen de détruire l'ordre social qui empêchait la réalisation de ses ambitions. Il s'acoquine avec les Staline et Mao de son temps. Les despotes éclairés, Catherine II de Russie et Frédéric II de Prusse. Il les enjoint de réformer les peuples, arriérés, à la baïonnette. Quant à Rousseau, puis Tocqueville, s'ils s'opposent à Voltaire, ce n'est peut être pas tant parce que ses idées sont erronées, que par "ressentiment". Car, du fait de la nature asociale de l'un, et de l'aristocratie de l'autre, ils n'ont pas de place dans le monde de Voltaire.

Le moteur du changement mondial est le "ressentiment" et le "mimétisme", dit le livre. Exemple : Voltaire. Mais, ce sont les Allemands qui font du ressentiment une arme, rationnelle et systématique, de destruction totale. D'une part, ils construisent leur identité comme projet de liquidation de la France qu'ils ont tant aimée, et qui les a humiliés. D'autre part, partant de Rousseau, ils inventent la philosophie moderne. Au fur et à mesure de leur entrée dans le modèle occidental, les autres nations l'adopteront en l'adaptant. Cette philosophie exploite les failles de la pensée des Lumières. Elle les érige, chacune, en système, en absolus, par mimétisme. Il y a les Romantiques qui s'opposent au matérialisme. Il y a ceux qui promeuvent l'intelligence du peuple contre celle des élites. Il y a le nationalisme, contre l'individualisme. Nietzsche dit aux perdants qu'ils sont des surhommes. Et tout cela finit dans l'anarchie de Bakounine, et le nihilisme de loups solitaires : faisons sauter ce monde pourri, et repartons de zéro.

En quoi cela explique-t-il notre époque ? La société mondiale est homogène par ses aspirations "occidentales". Elle est dominée par un petit groupe de parvenus. Il doit sa fortune à de belles paroles, que l'humanité a crues. Ce qui provoque un violent "ressentiment" des laissés pour compte. Mais il se croit porteur de la modernité. Il ne peut y avoir que des arriérés, des fanatiques, qui s'y opposent. Il les combat par l'excommunication. Réduits à la déchéance, ils n'ont qu'un moyen d'exprimer leur liberté : le choix de leur mort.