dimanche 4 mars 2012

Qui connaît ce grand humaniste Konrad LORENZ?

Quel bonheur de re découvrir Konrad LORENZ au hasard d'un article jauni datant de 1980 (?) exhumé lors du tri de mes archives perdues!

LORENZ né à Vienne en 1903, a été prix Nobel de Médecine en 1973 pour ses découvertes sur "l'organisation et la mise en évidence des modes de comportement individuel et social". Il s'agit du seul prix Nobel jamais remis à un spécialiste du comportement.Ces travaux constituent les fondements d'une nouvelle discipline de la biologie : l'éthologie ou l'étude du comportement des espèces animales. LORENZ, est surtout un vrai humaniste et ce malgré un passage délicat en 1940, qui lui a valu de nombreuses attaques de la classe scientifique. Ce biologiste de formation, a succédé à KANT à la chair de philosophie de KONIGSBERG.

Dans cet article, LORENZ, alors âgé de près de 80 ans, explique pourquoi le comportement de l'homme du XXème siècle est suicidaire et propose des remèdes. Il rappelle qu'il a publié en 1969 "l'agression" ouvrage dans lequel il explique que les animaux, les hommes y compris, ne sont pas les bons sauvages chers à JJ ROUSSEAU. Ils sont agressifs et hiérarchisés ainsi, l'animal privé d'exercer son agressivité tombe malade.

Est ce à dire que l'homme n'est qu'un animal? LORENZ précise que l'Homme possède des facultés propres acquises par l'instinct et l'inné, mais il n'est pas une page blanche à la naissance. Il n'est donc pas malléable à merci et son comportement ne peut être modifié dans n'importe quelle direction. Les travaux de Konrad LORENZ, et d'autres, ont permis à la pensée biologique de se faire une place dans les sciences du comportement humain.

Nous ne serions donc pas égaux et la base de cette inégalité est d'origine biologique ce qui sous tend qu'il existe des différences de capacités entre les hommes. LORENZ explique que l'égalitarisme a une responsabilité dans ce qui se passe dans le monde (de 1980).

Les analyses scientifiques et philosophiques de LORENZ débouchent sur un véritable humanisme et une vision prémonitoire. Déjà en 1973 LORENZ parle des huit péchés capitaux :
  1. le surpeuplement,
  2. la dévastation de l'environnement,
  3. la tiédeur de l'homme moderne,
  4. la course contre soi-même,
  5. le risque de dégradation génétique,
  6. la rupture de la tradition,
  7. la contagion de l'endoctrinement,
  8. le développement de l'arme nucléaire.
LORENZ détermine une marque d'auto-domestication qui modifie physiquement et moralement l'espèce humaine vers plus d'intelligence et moins de fierté. Ce phénomène est poussé par l'espace sur le globe, qui se réduit sous l'influence du commerce et des communications qui poussent vers une uniformité accélérée. (On est en 1973!) Le phénomène sélectif naturel, qui a fait notre grandeur, n'est aujourd'hui gradué que par la seule capacité économique...

LORENZ de conclure que la catastrophe est inéluctable et le remède est l'éducation.

N'est ce pas là une vision très prémonitoire de ce que nous voyons aujourd'hui? Ne faudrait il pas vite relire LORENZ? Je vous le recommande car c'est riche, très riche!

5 commentaires:

Christophe Faurie a dit…

Cela semble un peu sombre tout cela. N'est-ce pas aussi un peu déterministe? Peut-on prévoir l'avenir?

Est-ce réellement prémonitoire ou une forme de millénarisme, qui revient régulièrement ?

Quant à l'égalitarisme, Lorenz pense-t-il qu'il y a des êtres absolument supérieurs aux autres, ou que nous sommes tous différents, et que cette différence est une richesse ?

Dominique Delmas a dit…

Si l'on s'en tient à ses travaux sur les animaux, les oies, les choucas, les perches et d'autres LORENZ pense cette différence est une richesse. Par ailleurs, s'il évoque l'éducation comme remède c'est qu'il considère que tout n'est pas déterminé.

Je ne crois pas qu'il ait "prévu l'avenir", je crois plus qu'il a analysé des paramètres qui étaient alors, replaçons nous en 1973, ignorés des autres scientifiques comme la croissance de la population, le rétrécissement de l'espace, et la dévastation de l'environnement, la dégradation génétique par l'alimentation (obèsité, ...) c'était tout de même visionnaire, et l'endoctrinement par les lobbys n'est-ce pas une réalité, la politique n'est elle pas poussée par des lobbys?
Sur l'égalitarisme, c'est le débat mou d'aujourd'hui sur la biodiversité encore une belle vision, LORENZ disait en 1980 aujourd'hui il y a moins d'écart entre un anglais un allemand un français de même génération que ces mêmes personnes avec leur descendance...La lutte entre génération a toujours existé mais avant un père et un fils partageaient des valeurs fortes durables aujourd'hui tout les oppose, la génération Y refuse les valeurs des anciens parce qu'elles ont conduit dans le mur (chômage,retraite morte, crises...)
Alors ce n'est pas prévoir l'avenir mais c'est avoir une vision claire des évolutions, comme un DARWIN qui l'a expliquée...

Christophe Faurie a dit…

à l'époque, il n'était pas le seul à penser que notre développement n'était pas durable, cf. le Club de Rome : "Le Club de Rome se fit connaitre mondialement en 1972 par son premier rapport, The Limits to Growth, traduit en français par l'interrogation Halte à la croissance ?." dit wikipedia (http://fr.wikipedia.org/wiki/Club_de_rome). Je me demande donc s'il n'y a pas des sortes de modes.
(voir aussi Serge Antoine : http://fr.wikipedia.org/wiki/Serge_Antoine - au passage "1971 nommé au cabinet du tout premier ministre de l’environnement, Robert Poujade.")

Par ailleurs, je me demande, s'il n'y a pas souvent affrontement entre une génération et la précédente: les soixantehuitards semblent avoir rejeté leurs parents, par exemple.

Dominique Delmas a dit…

Peut être y a t il des conjonction d'époque qui fait que.. Comme la machine à vapeur inventée conjointement par plusieurs savants.
Mais ce que je trouve de remarquable chez LORENZ c'est son approche par la biologie ce qui était plutôt unique à son époque et encore rare aujourd'hui.
ainsi selon WIKIPEDIA, "De son point de vue d'éthologue, Konrad Lorenz a aussi étudié le rite qu'il interpréta comme une forme adaptative qu'une culture donne à l'agressivité individuelle de ses membres pour circonscrire ses effets désordonnés et indésirables et a contrario valoriser sa contribution à la conservation du groupe".

Autre élément troublant qu'évoque LORENZ dans sa téhorie de l'agression :
La théorie de l'agression de Lorenz est une généralisation de la théorie anthropologique du bouc émissaire. En premier lieu, Lorenz démontre que la parade nuptiale de plusieurs espèces animales est une variation du comportement d'agression. Le schéma général de la parade nuptiale consiste en un comportement d'attaque entre le mâle et la femelle qui, à la dernière seconde, est réorienté vers un ennemi commun, pouvant être un congénère dans le cas des animaux sociaux.

Pour Lorenz, ce schéma général provient du fait que pour qu'une relation interindividuelle soit possible, cela nécessite que deux individus partagent un même territoire. L'instinct de territorialité faisant en sorte que cette situation fasse augmenter inexorablement la motivation d'agression, la sélection naturelle a simplement permis ce rapprochement en permettant de détourner cette agressivité vers un ennemi commun.

L'application de cette théorie à l'homme fait en sorte que pour que l'amour soit possible, il faille nécessairement haïr les mêmes choses ensemble. De même, tout regroupement social ne peut exister que par réorientation de l'agressivité interindividuelle contre un ennemi commun : nation contre nation, classe supérieure contre inférieure, syndicat contre patronat, parti politique contre parti politique, équipe contre équipe, etc,

Ceci ne se heurte t il pas à notre volonté ( tous les deux ) de provoquer le dialogue constructif pour progresser ensemble?

Christophe Faurie a dit…

Remarque: Dans les biologistes de la même période (un peu avant), il y a aussi von Bertalanffy. Ma citation favorite :
« Nous connaissons et contrôlons les forces physiques trop bien, les forces biologiques plus moyennement et les forces sociales pas du tout. Si nous possédions une science de la société humaine assez développée et la technologie correspondante, ce serait la fin du chaos, de la destruction imminente de notre monde actuel ».

J'ai été aussi frappé par ce que tu dis quand j'ai lu le texte de wikipedia concernant Lorenz. (J'ai même fait un billet sur le sujet, qui devrait paraître bientôt...)
Je ne crois pas que la théorie de Lorenz tienne la route. L'entreprise, par exemple, n'est pas un projet "contre", mais un projet "pour".
Je ne suis pas sûr que l'on puisse tirer de grandes théories sociales de comportements individuels. Pas plus que l'on puisse définir l'individu uniquement par sa tendance à "l'agression", ou à faire le mal, comme dans une certaine tradition anglo-saxonne. (Cf. livre de Marshall Salhins, dont je parle ici: http://christophe-faurie.blogspot.com/2011/09/homme-mal-fondement-de-loccident.html)