Nous en sommes arrivés à croire que la monnaie était le régulateur du bonheur mondial. Résultat : les banques centrales sont les maîtres de la planète. La démocratie est devenue une farce. Or, les grandes manœuvres monétaires nous plongent dans un cercle vicieux déflationniste. Voilà la constatation sur laquelle je débouche dans un précédent billet.
D'où vient ces croyances ?, me suis-je demandé. Une recension d'un ouvrage sur Friedman et Bretton Woods me donne les idées suivantes :
- Le monde est aux mains de l'idéologie du laisser-faire. L'idée de Bretton Woods, et des gouvernements d'après guerre, était la maîtrise du marché, de façon à assurer le plein emploi. C'était (aussi ?) le temps de l'Etat providence. Mais, cela rendait fous certaines personnes, Hayek et Friedman en particulier. Elles y voyaient la promesse du totalitarisme. Vieille idée des Lumières. Seule une "loi naturelle" permet la liberté humaine. (L'homme ne peut pas se diriger lui même, sans recourir à la dictature.) Et cette loi est celle du marché. Autrement dit, ces gens exigeaient, pour nous, le chômage ! (Quant à l'idée centrale du monétarisme, c'était que le marché avait, tout de même, besoin d'un coup de pouce : une politique de la monnaie judicieuse. On réintroduisait l'homme dans le système. Mais pas n'importe lequel : l'économiste éclairé, l'élu de Dieu ?)
- Mais ce ne sont pas eux qui ont eu la peau de Bretton Woods. Ce sont ses vices de conception, et le marché. C'est-à-dire nous. Autrement dit, nous avons estimé, probablement, que nous devions suivre notre intérêt à court terme et éliminer ce qui nous contraignait, plutôt que de faire un effort pour adapter le modèle de l'Etat providence aux circonstances du moment. Banalité du mal, aurait dit Hannah Arendt ?
Et maintenant, tentative de raisonnement systémique. Si l'on veut se remettre en piste, il faut sortir du laisser-faire. (Au moins, nous avons démontré qu'un marché libéré ne crée rien, sinon de la destruction.) Donc, en revenir à la politique au sens premier du terme : le peuple prenant son sort en main. Ce n'est que lui qui peut décider d'une répartition équitable des revenus de son labeur collectif. Et qui peut contenir la tentation au parasitisme de ses membres (i.e. les "forces du marché"). Contrairement à ce que pense Hayek et Friedman, la société humaine est assez grande pour s'auto-contrôler sans Staline. (Voir travaux d'Elinor Ostrom.)
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