- Typologie. Le livre segmente la population américaine selon son comportement. Cela correspond, grossièrement, à un niveau de revenus et, surtout, d'éducation. "L'élite" est avant tout définie par son éducation supérieure. Elle est très riche. La "classe laborieuse" s'est généralement arrêtée à l'enseignement secondaire. Elle a des revenus intermédiaires. Et, enfin, les pauvres. Pas d'études, revenus faibles
- En fait, il s'ajoute à cela une quatrième classe, dont on ne parle que peu : les "riches". Peut être éduqués, ils sont perçus par la classe laborieuse comme ayant réussi par le travail. Ils fournissent de l'emploi à ceux qui aiment travailler. (A l'opposé d'Uber, qui a mis sur la paille le taxi, issu de la classe moyenne.) La classe laborieuse s'identifie à cette classe de riches. "Nous, en plus méritant", en quelque sorte.
- Car ce sont les valeurs qui font la classe laborieuse. La classe laborieuse aspire au bonheur familial. Point. Pour cela, elle a besoin d'un emploi qui paie comme il payait jadis. Les études supérieures. ne sont pas pour elle. Elle ne veut pas ressembler à un intellectuel, ce lunatique "qui ne sait pas faire son travail, mais dit aux autres comment faire le leur". Le travail intellectuel n'est pas un travail. Sa situation s'est dramatiquement dégradée. Pour éviter à leurs enfants de "mal tourner", les parents doivent parfois se relayer, l'un travaillant le jour l'autre la nuit.
- Même si le livre ne s'intéresse qu'aux "blancs", on découvre que les noirs et les latinos, dans les mêmes conditions de revenus et d'éducation, ont quasiment les mêmes valeurs et aspirations. Et, même, ils auraient tendance à être beaucoup plus conservateurs que les blancs. Mais ils votent démocrate pour des raisons tactiques.
- Racisme. La classe laborieuse blanche est accusée d'être raciste. En fait, toutes les classes jugent les autres par rapport à leurs valeurs. Peut-être la pire de toutes est "l'élite". La valeur ultime pour elle est le "mérite". On est méritant lorsque l'on a fait des études prestigieuses. La classe laborieuse et les pauvres sont donc soit stupides, soit paresseux. En outre, si elle "parle mal", la classe laborieuse bat l'élite sur son propre terrain. Elle est bien plus généreuse, et l'homme prend une part très active aux travaux familiaux.
- Religion. La classe laborieuse est religieuse. La religion est un atout, parce qu'elle aide à tenir droit dans la tourmente, à ne pas céder à la fatigue et à la tentation, et rend généreux (la communauté aide l'individu en difficulté).
- L'élite. L'élite dont il est question ici est faite des meilleurs élèves des meilleures universités. C'est donc une élite intellectuelle. Elle se définit par son emploi, sa carrière. Elle se reproduit, en contrôlant le système éducatif. Elle est démocrate. Elle est aussi extrêmement riche. Plus qu'à ses diplômes, elle doit cette richesse à ses réseaux, qui excluent des meilleurs emplois ceux qui ne connaissent pas leurs codes, quelle que soit leur performance scolaire.
- Le mirage du diplôme, point critique. Les prospectivistes nous annoncent que l'emploi qui fait la classe laborieuse est obsolète. Erreur fatale. L'élite voit l'avenir à son image. Or, s'il y a un problème d'éducation, il n'y a pas de problème de diplôme. En effet, la classe laborieuse n'est pas assez bien formée pour les emplois qu'elle occupait traditionnellement. D'où chômage structurel. Du coup, on utilise une main d'oeuvre de diplômés surqualifiée. Ce qui explique qu'une fraction importante des diplômés ne parvient pas à rembourser ses frais de scolarité. Il y a trop de diplômés de l'enseignement supérieur ! Il faut un enseignement qualifiant fourni par la collaboration de l'université et de l'entreprise. (Des exemples montrent que cela marche.) C'est bien pour les entreprises et cela remettra les salaires de la classe moyenne au bon niveau. C'est la solution de tous les problèmes.
- Les pauvres. La classe laborieuse n'aime pas les pauvres. Et ce pour deux raisons : les pauvres ont un comportement que la morale réprouve, et ils sont l'objet de programmes d'aide qui leur permettent d'avoir ce que la classe laborieuse ne peut pas s'offrir. Et la classe laborieuse est bien placée pour le constater : les employés qui sont nécessaires aux dits programmes sortent de ses rangs. En fait, c'est la situation qui fait le pauvre, et pas le contraire. Les programmes d'aide sont donc contre-productifs. Les besoins du pauvre sont les mêmes, "en pire", que ceux de la classe moyenne : un bon emploi.
- Aide de l'Etat. Les classes laborieuses ne veulent pas d'aide de l'Etat (en fait, elles en profitent sans le savoir) pour deux raisons : elles s'en privent, pour en priver les pauvres ; elles estiment qu'il faut aider les riches, parce que plus ils sont riches, plus ils créent de "bons" emplois, pour tous. Par contraste, les syndicats défendent le "petit nombre" (un autre genre d'élite ?).
- Droits de l'homme. En utilisant l'argument des droits de l'homme pour un oui pour un non, l'élite les a dévoyés. Les droits de l'homme ont un sens quand on parle de crime contre l'humanité. Pour le reste, les cultures qui composent une société ont leur logique, respectable, et doivent s'accommoder les unes des autres.
- Hillary Clinton. Hillary Clinton était certaine qu'elle allait remporter les élections de 2016. Elle avait prévu de célébrer sa victoire en donnant l'illusion que le plafond de verre de la salle qui abritait l'événement éclatait. C'était tout son programme : vaincre la discrimination qui brime la femme, qui vaut mieux que l'homme. Mais ce n'était que l'idéal de peu de gens, les femmes d'élite. Les femmes de la classe laborieuse ont voté massivement contre elle. Elles veulent un bon salaire pour leur mari, de façon à ce qu'elles puissent abandonner leur travail et s'occuper correctement de leurs enfants. Pendant la campagne, Bill Clinton a tenté d'alerter les Démocrates, de leur rappeler que la classe laborieuse était depuis toujours le coeur de leur électorat. Mais, qui aurait voulu se faire prendre à une nouvelle ruse, aussi évidente, d'un machiste ringard décidément incapable d'accepter sa défaite ?
- Donald Trump. Donald Trump est le "bras d'honneur" que la classe laborieuse a fait à l'élite. Mais Donald Trump est aussi la seule personne qui ait montré qu'elle comprenait la classe laborieuse. Et Donald Trump appartient à la race des riches, celle que respecte la classe laborieuse, parce qu'elle lui fournit du travail, mais aussi parce que le riche doit son succès à ce qu'il a travaillé exceptionnellement dur. Et Trump, finalement, est un "homme, un vrai". "L'homme, le vrai", parle peut-être mal, mais il a un coeur d'or, on peut compter sur lui dans les moments difficiles (Tout Hollywood est là pour nous le rappeler !).
mardi 10 décembre 2019
Portrait de la classe moyenne américaine ?
Retour à White Working Class, dont parle un précédent billet. Voici quelques idées, surprenantes ?, qui en ressortent.
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