mercredi 16 septembre 2015

Le son de Christophe Faurie

Une émission, maintenant disparue, de France Culture demandait aux artistes branchés, ses invités, "d'apporter un son". C'est à dire de faire entendre un bruit qui les avait marqués. Cela peut sembler une idée de cultureux vain, mais je la trouve bonne : c'est par ce genre de détail que l'on révèle sa personnalité, me semble-t-il. Malheureusement, le peu que j'ai entendu ne trahissait pas grand chose, sinon un conformisme déprimant : les sons étaient consensuels (Rolling stones and co). 

Je me suis demandé ce que j'aurais répondu. Voici mon son : la fin du Retour de Martin Guerre. J'ai vu ce film il y a plus de trente ans, alors que j'étais en Angleterre. Souvenir flou. Mais ce qui compte est ce que j'en retiens. Moyen-âge. Un jeune mari s'engage dans l'armée. Des années plus tard, un homme revient (Depardieu), sa femme (Nathalie Baye) le reconnait. Le village est heureux. Pas pour longtemps, car le revenant se met à réclamer les terres qu'on lui a prises. Alors survient un misérable, qui prétend être Martin Guerre. Un procès s'ensuit. Au moment où tout semble gagné, Martin Guerre fait une erreur fatale. Il comprend qu'il est perdu. Et il a la présence d'esprit de disculper son épouse. Il sera pendu. Tarentelle. Pour moi la Tarentelle est à l'image de toutes les musiques populaires : un rythme diabolique, pied de nez au sort. Mais cette tarentelle est associée à autre chose. Il est dit en peu de mots que l'histoire a été racontée par celui qui a jugé l'affaire. Et que ce juge a été pendu pendant les guerres de religion. Cette extraordinaire histoire d'amour a ébranlé ses préjugés de classe, et il est mort pour ses idées. Voilà le type d'homme que j'ai toujours admiré : il n'est rien, il est broyé par le sort, mais il tient droit. 

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