Aux USA, beaucoup de sociétés semblent avoir oublié une partie de leur métier, ceci provient du « reengineering » et du « downsizing » qui ont éliminé des personnes importantes et ont démantelé les réseaux informels. En particulier les cadres intermédiaires et les superviseurs, traditionnels liens entre direction et employés ont beaucoup plus souffert des licenciements que les autres catégories de personnels. Pour essayer de redonner la mémoire aux entreprises des cabinets de conseil se sont créés. Beaucoup d’entreprises pensent que la solution se trouve dans de nouveaux logiciels (« product data management »), d’autres essaient d’enregistrer le savoir-faire de leurs employés, LOTUS tente de repérer et de récompenser les personnels clés, mais la majorité d’entre elles est incapable de reconnaître l’importance du savoir.
Le reengineering a été une des plus formidables modes de management de tous les temps. La plupart des grandes entreprises américaines y sont passées. Et elle s’est terminée dans un bain de sang.
Cela nous concerne-t-il, nous Français ? Cette mode était liée aux systèmes d’information (cf. SAP, Oracle, Siebel...). C’étaient eux qui
devaient amener les gains de productivité promis. En Europe, où l’on a peur des
mouvements sociaux, on n’a pas parlé de réduction d’effectifs, on s’est
contenté d’installer les logiciels qui permettaient de le faire. Le miracle n'a pas eu lieu. Mais il a bien fallu compenser les coûts de ces logiciels, donc
réduire la masse salariale en conséquence. (Je soupçonne par exemple qu’une
entreprise que j’ai suivie quelques années a dû se vendre à la Chine suite au
ratage d’un tel projet.)
« Tout le monde » a voulu
conduire le changement de « haut en bas ». Or, celui qui savait
comment le mettre en œuvre était en bas. C’était, par exemple, « les
superviseurs » de l’article ci-dessus. Dans le cas de Dominique, l’assureur
a fixé le cadre du changement, et a demandé à Dominique, qui était en bas, comment le mener.
En fait tout cela est une question d’idéologie. L’obsession
de « tout le monde » était la réduction de coûts. Pour Dominique
Delmas l’innovation devait permettre de tirer le meilleur des
compétences de l’organisation, être infiniment complexe et riche de potentiel.
Compléments :
- L’article : Corporate amnesia, The Economist, 20 avril 1996.
- Une étude que j’ai consacrée à la mise en œuvre des progiciels de gestion.
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