vendredi 4 janvier 2013

Albert Hirschman

A l’occasion de son décès, j’ai découvert un économiste américain, Albert Hisrchman. En guise d’introduction à son œuvre, j’ai acheté Crossing boundaries.

Sa particularité ? Il a toujours été du côté des perdants. Juif allemand, il doit quitter son pays. Il continuera ses études en France (HEC), en Angleterre, puis en Italie. Il fera la guerre d’Espagne, aidera à évacuer les Juifs de France pendant la seconde guerre mondiale, et finira aux USA, professeur, après avoir joué un rôle important dans le plan Marshall. Une fois de plus, il est du mauvais côté : ses travaux montrent que la théorie économique « orthodoxe », celle de Hayek et des libéraux, est simpliste. Et ce, en grande partie parce qu’elle oublie la dimension sociale de l’existence. Ce que j’aperçois de ses idées :

Toute la théorie économique qui sous-tend l’action politique (et gouverne nos vies) repose sur l'hypothèse de la rationalité individuelle, le calcul. L’homme rationnel n’a aucun intérêt à l’action collective. Or, l’expérience quotidienne montre que nous éprouvons du plaisir à une telle action. Et que nous ne sommes pas toujours égoïstes. Le plan Marshall en est un exemple. Initialement, les USA s’imposent des clauses qui les handicapent au profit des pays européens. Mais c’est grâce à elles que l’Europe se redressera. Ce dont les USA seront un grand bénéficiaire. En outre, la passion est une dimension capitale de la vie humaine. Totalement absente de l’économie.

Il montre que l’économie, qui est une science de l’équilibre, aurait beaucoup à gagner à découvrir la dynamique, et la pratique. Il propose des solutions oscillantes à certains problèmes concrets. Et si elle s’était un tant soit peu intéressée à la société, elle aurait découvert la source de quelques effets imprévus. Par exemple, la commensalité n’est pas que consommation de nourriture. Elle crée un lien social. C’est peut-être ainsi qu’est née la démocratie grecque, mais aussi l’esprit de troupeau allemand. Dans son ouvrage le plus connu, il montre que, contrairement à ce que croit l’économiste, si l’on n’est pas content de quelque chose, on ne va pas forcément chercher ailleurs. On peut aussi tenter de le modifier (en protestant).

Il s’est intéressé au « possibilisme », c'est-à-dire à déterminer si tel ou tel avenir favorable, ou non, était possible. Et comment influer sur les événements pour aller dans la bonne direction. D’ailleurs, il note des exemples qui montrent que la planification peut réussir. Contrairement à ce que prétendait Hayek.

HIRSCHMAN, Albert O., Crossing Boundaries, Zone Books, 2001.

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