Public-privé, des ratés en série, par Virginie Malingre : le service public anglais récolte les fruits de ses réformes.
Je me souviens d’une mission, il y a quelques années, qui m’avait fait me pencher sur les aventures d’un organisme caritatif anglais. Une institution vénérable. De manière inattendue, ses dirigeants parlaient comme des consultants, des merveilles d’Internet. Avec un vocabulaire de consultants. Pas un mot sur leur métier ! Leurs projets mirifiques de transformation furent un désastre, bien sûr.
L’administration anglaise est gérée comme l’entreprise privée. On y parle de performance, d’objectifs, de concurrence... Et on y oublie la raison de son travail : les services sociaux laissent les parents battre leurs enfants à mort. D'ailleurs, il serait injuste d’accuser la seule administration britanique :
juste avant Noël, 100 000 fonctionnaires ont appris qu'ils avaient reçu pendant trente ans une retraite trop élevée. Et qu'ils verraient son montant diminuer pour compenser le trop-perçu de 140 millions de livres. Tout ça parce que l'entreprise Xafinity, qui s'occupe d'une partie des retraites des fonctionnaires du National Health Service et de l'armée, s'est trompée dans ses calculs pendant trois décennies !
Là aussi, juge M. Dunleavy, "c'est typique. On demande à ces sous-traitants d'être le moins chers possible. Et en même temps, l'administration perd son expertise sur ces sujets qui sont externalisés".
Cette dernière phrase s’applique à beaucoup d’entreprises. Remplacer ses personnels compétents (donc chers) par des sous-traitants incompétents, donc bon marché, a été la mode mondiale des dernières décennies. C’est une des grandes raisons des délocalisations massives. Management financier. Il ne connaît rien à son entreprise, il n’a pas d’autre moyen de développer sa rentabilité que de sacrifier le long terme au court terme. Il brûle le van Gogh pour avoir un peu de chaleur. Les réformateurs de l'administration française tenteraient-ils d'utiliser un modèle qui n'a marché nulle part ?
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