dimanche 17 juin 2012

Zone euro contre nature ?

Arrêtons l’acharnement thérapeutique. Mettons un terme aux souffrances de la zone euro. Achevons-là, dit Dennis Meadows.  Beaucoup d’Américains pensent comme lui : aucune union monétaire n’a jamais tenu.

Mais un pays n'est-il pas une union monétaire ? L’Inde, la Chine, les USA sont comparables à l’Europe et ne sont pas menacés de chaos. Par contre, la Belgique, si.

Tout ceci a une raison : la confiance. Les Américains ont confiance les uns aux autres, ce qui fait qu’un État peut en subventionner massivement un autre, sans que ça ne pose de question à personne. Il en est de même en France : qui voudrait de la Corse ou de la Corrèze si la France était une union comptable ?

Toute notre crise ne tient qu’à cela : confiance. La confiance commence par un acte de foi. Mais un acte de foi qui n’est pas totalement irresponsable. Il est basé sur un raisonnement, inconscient, à long terme : peut-être aurons-nous besoin d’eux un jour ? Peut-être cela vaut-il la peine que nous les aidions aujourd’hui ? C’est le raisonnement dont sont faites les familles. Mais la confiance, cela se maintient aussi. Par la force de la pression sociale. Il est extrêmement difficile de jouer les parasites lorsque l’on appartient à une équipe…

Bref, ce qui se joue a peut-être deux faces : 
  • ai-je envie d’un monde où j’aimerais les Grecs ou les Allemands comme j’aime les Corses ou les Corréziens ? 
  • Quel type de lien social dois-je installer pour m’assurer qu’on n’abuse pas de ma confiance ?
Compléments :

6 commentaires:

Jad a dit…

La question: ai-je envie d’un monde où j’aimerais les Grecs ou les Allemands comme j’aime les Corses ou les Corréziens ? est très intéressante parce qu'elle en pose une autre encore plus fondamentale: qu'est-ce que ça veut dire que "être Grec" ou "être allemand"? Si appartenir à une société, c'est accepter de vivre selon des règles communes, alors si les peuples allemands et grecs acceptent de vivre selon des règles communes, le problème est résolu...

Christophe Faurie a dit…

Oui ! C'est même la définition que pour un "groupe" : des personnes qui adoptent des règles communes, ce que les ethnologues appellent "culture".

On est en face du même problème que lors d'une acquisition d'entreprise : une fusion de cultures.

Mais nos gouvernants voient ils ainsi la question? Ou pensent-ils, comme les dirigeants, qu'il suffit d'un contrat d'acquisition et de quelques procédures financières communes ?

De manière intéressante, un article que je cite quelque part dit que l'Inde n'éclate pas, en dépit de sa tendance au chaos, parce qu'à sa base est la volonté de rester ensemble... Exemple à méditer ?

Jad a dit…

Oui, la volonté de rester ensemble...les Indiens veulent rester avec les Indiens...le lieu de naissance détermine notre volonté. Devrions nous donc dire aux nouveaux nés Français, Grecs et Espagnols qu'ils sont d'abord européens, pour qu'ils soient plus solidaires entre eux? Peut être. Mais il y a problème qui persiste : comment peut on vivre librement si l'on ne choisit pas notre lieu de naissance ? Je vois une solution qui peut paraître simple: ne pas laisser le lieu de naissance déterminer notre "nationalité". On est Indien seulement si on choisit d’être Indien, si on on se met d'accord avec le groupe "Indien" des règles à suivre. On pourrait donc imaginer que si les peuples européens choisissaient, tous ensemble, des règles communes à suivre, ils seraient vraiment libres et, comme en Inde, ils seraient vraiment solidaires entre eux. Qu'en penses - tu ?

Christophe Faurie a dit…

Tout à fait d'accord. Le lieu de naissance est une mauvaise approximation de la notion de groupe. Ce qui compte, c'est la volonté de vivre ensemble.
Et, ce serait bien que cette volonté soit universelle, parce que s'il y a groupe, il y a "dedans" et "dehors", risque d'affrontement.
Ce qui ne signifie pas qu'il doive y avoir uniformité absolue. On peut être d'accord pour dire que nous sommes tous dans le même bateau, sans pour autant renoncer à appartenir à des courants de pensée, dont les différences sont, au fond, nécessaires à la réflexion humaine. (Ce qui me semble une idée des Lumières, et de Kant en particulier.)

Jad a dit…

Tu l'as probablement déjà lu:
http://krugman.blogs.nytimes.com/2012/06/22/the-euro-is-flat/

Christophe Faurie a dit…

Non. Je n'avais pas vu. Effectivement, c'est surprenant. Le Mississipi est, relativement à la moyenne des Etats américains plus pauvre que la Grèce par rapport à la zone euro, et ça ne pose de problème à personne! D'ailleurs en termes d'inégalités entre Etats, les USA sont aussi inégalitaires que la zone euro.
Je pense qu'on aurait des écarts similaires si l'on prenait les régions de n'importe quel pays. (Par exemple l'outre-mer par rapport à la métropole.)
Bref le problème est bien une question de "conduite du changement": une zone euro qui fonctionne c'est, avant tout, un changement d'état d'esprit.