M.Fillon parle de la menace qui pèse sur l’économie française : crise, délocalisation. La taxe professionnelle handicape nos sociétés. Si les collectivités locales refusent sa suppression c’est qu’elles sont irresponsables. Cette argumentation me semble un manque de respect pour notre intelligence :
- Si c’est une question de crise et de trésorerie, pourquoi supprimer une ressource à long terme ? Pourquoi ne pas apporter une contribution exceptionnelle ?
- Nos voisins vont certainement réduire leurs prélèvements fiscaux, réduisons donc les nôtres. L’argument, on le fait parce que les autres le font, a été l’argument favori du libéralisme économique. La logique poussée à son terme, signifie que l’on supprime tous les impôts, qu’il n’y a plus d’état et que tout devient payant. D’où une classe riche et éduquée et une autre de crève la faim.
- L’avantage concurrentiel n’est pas lié au coût de main d’œuvre mais à un « métier », qui se construit sur des décennies, et à l’efficacité d’un tissu industriel local. Si l’industrie française n’est pas concurrentielle, c’est qu’elle a besoin de mieux faire son métier. Il ne faut pas apporter des subventions, mais la capacité d’investir sur de bons projets, ce qui n’est pas la même chose. D’ailleurs, ce que les pays émergents ont de remarquable, ce n’est pas tant leurs coûts que leur esprit entrepreneurial. (Téléphonie mobile et pays émergents.)
- Mon expérience me montre que les entreprises fonctionnent comme des thermostats. Elles ont une certaine ambition de rentabilité. Quand ça va bien, elles dépensent, quand ça va mal, elles font des économies. Autrement dit, s’il n’y a pas modification de leurs aspirations, les gains de taxe professionnelle seront consommés sans contrepartie en termes d’efficacité (cf. la TVA de la restauration). C’est le phénomène « jeune entreprise innovante » : les allégements fiscaux sont utilisés pour baisser les prix de vente, et lorsqu’ils disparaissent l’entreprise se trouve fort mal.
Pourquoi utiliser des arguments discrédités partout ailleurs ? Pourquoi ne pas partir du problème, que je suppose être la compétitivité des entreprises, et considérer les solutions possibles ? Cette mesure isolée, ne devrait-elle pas s’inscrire dans un programme général ? Pourquoi une tentative de législation au fait divers : profiter de l’émotion du moment pour introduire des mesures à long terme ? Pourquoi, d’ailleurs, jouer sur l’émotion et pas sur la raison ? Par mépris ?
Il y a une panne de l’intelligence sociale dans ce pays.
Compléments :
- Toutes les réformes du gouvernement se ressemblent : ce sont des solutions à des problèmes qui ne sont pas posés, avec la manipulation comme moyen d'application. Triste. (Voir Changement et université, par exemple.)
- La réflexion est partie de : M.Sarkozy et l'état.
2 commentaires:
Face à cette propagande stupide, vous essayez d'argumenter. Quel courage. Mais le propagandiste se moque bien de vos arguments. Il aurait bien plus peur d'une reponse du genre: Les riches possedent tout, reprenons notre bien! Mais ce genre de réponse efficace face à la propagande n'interesse pas non plus les partis de gauche, complices masqués.
Les raisons de mon optimisme :
1) Le changement est comme la congélation de la glace : on peut passer au dessous de 0, sans que l’eau se transforme, ce qui fait la réaction est une impureté ; le changement signifie que tout le monde change d’avis en même temps, or, pour cela, il faut que chacun sache que l’autre a changé d’avis (c'est l'animateur du changement, moi chez mes clients, qui joue l'impureté)… La France pourrait donc basculer vers une organisation de son fonctionnement plus « durable » que celle vers laquelle elle tend aujourd’hui, pour peu que ceux qui le pensent nécessaire sachent qu’ils ne sont pas seuls. Autrement dit un changement radical est possible, probablement.
2) L’homme (au moins occidental) tend à concevoir d’abord ce qu’il doit faire avant d’orienter son comportement en fonction. Les Lumières ont bâti notre pensée et notre société actuelle. Par conséquent, il me semble important de lancer un débat dont puisse sortir les principes d’une société un peu plus solide que celle que l’on semble nous préparer. Bref, même si la congélation ci-dessus ne marche pas, je ne crois pas qu’un effort de rationalisation et d’honnêteté intellectuelle soit perdu. Il servira au moins à nos arrières petits enfants.
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